Ce texte souhaite exprimer une inquiétude à propos de l’histoire qui a été enseignée dans les écoles et collèges de ce pays et que nous avons entendue depuis l’enfance comme une histoire remplie de stigmatisations concernant le peuple Mapuche, lequel représente, dans ce cas, tous les autres peuples que la machine colonisatrice s’est chargée de nier et qu’elle nie systématiquement dans l’actualité, en raison de projets supposément homogénéisant impulsés par l’état. Ces visions stigmatisantes et éthocentriques, qui reflètent fidèlement ce qu’est l’Occident, en sont arrivées à un tel point de leur projet négationniste que nous ne pouvons approcher les autres avec une vision qui ne soit pas ethnocentriste. Ces autres que sont les Mapuches continuent d’exister en tant que communauté grâce à la conscience qu’ils ont d’eux-mêmes et qui leur a permis de survivre et de se renforcer en dépit de la constante négation qu’ils vivent au Chili. ; Ceci a amené à ce que se fasse jour parmi eux une Résistance, non pas en termes épiques comme ceux qui sont exaltés par Ercilla, mais en termes de maintien de la culture (…).
Avant de commencer ce travail et pour le renforcer du point de vue Mapuche, auquel il est consacré (…), j’aimerais citer une partie du prologue qu’a écrit Raúl Zurita dans le livre de Leonel Lienlaf, Se ha despertado el ave de mi corazón [Il s’est réveillé l’oiseau de mon coeur].
Pour l’homme Mapuche qui a fait irruption à la ville par une entreprise petite ou bien plus méprisable de travail de location, le retour à sa terre natale ou à la « ruka » (habitation des Mapuches) et un acte d’une violence extrême. On ne peut passer d’un monde à l’autre sans y laisser un peu de vie. De toutes les formes de négation, celle-ci est probablement la plus cruelle. Non seulement elle fait de l’homme de la terre un étranger au pays de ses ancêtres, mais en plus il ne lui est pas permis non plus de bénéficier de cette étrangeté. Privé en général de sa langue, de sa terre et de ses caractéristiques propres, on lui demande en plus de survivre avec peu et on ne lui donne rien en échange. Ensuite, à la vue de son effondrement, on le juge et on le condamne. Maintenant, s’entend au moins la condamnation contraire : celle de perdre sa langue ; Toutes ces violences - exercées au nom du même monde qui en 170 ans de République n’a jamais établi une seule politique réaliste et égalitaire - retombent finalement sur tous. La différence que nous nions, la langue que nous ne comprenons pas, les rites que nous transformons en folklore des plus pittoresques, les caractéristiques que nous ne voulons pas reconnaître, sont cependant les nôtres. En les perdant, nous nous perdons.
Ces mots de Zuritas, je pense qu’il nous conduisent à réfléchir sur la rage du peuple Mapuche, non pas comme une pure violence, mais comme la défense basique de son territoire tant physique que spirituelle.
Pour ce travail, j’ai choisi comme textes d’analyse les livres de poèmes De sueños azules y contrasueños [rêves bleus et contre-rêves]de Elicura Chihuailaf et Se ha despertado el ave de mi corazón de Lionel Lienlaf.
Ce que j’ai voulu travailler dans ce texte est la vérification dans les deux oeuvres poétiques mentionnées des moments qui racontent la relation entre le voyage à la ville et le retour postérieur à la terre Mapuche après la constatation qu’il manque un espace pour se reconnaître.
On dit que les quatre piliers fondamentaux de l’identité sont :
– la langue
– le territoire
– l’histoire
– le mode de vie
Autant Lienlaf que Chihuailaf sont des poètes Mapuches qui ont dû quitter la terre de leurs ancêtres pour continuer leurs études et ont constaté une fois, et encore une fois, et encore une fois, que le bonheur pour eux était d’être avec les leurs, dans leur terre, parce qu’au-delà il n’y a pas d’endroit pour eux, les autres . Cependant, à travers l’écriture, on peut résister à la réalité, selon ce que nous disent les théoriciens du désir. Dans cette perspective ces poètes ont une arme de résistance pour eux-mêmes, individuellement, quand ils sont au loin, c’est-à -dire en ville, et aussi pour leur peuple depuis l’intérieur et depuis l’éloignement, puisque la conscience de la réalité de leur peuple ne les a pas abandonné.
Suite en espagnol : http://www.atinachile.cl/content/view/34817/Poesia-Mapuche.html
*
La poésie Mapuche (en espagnol - rien n’est traduit en Français - ou en langue Mapuche) : http://poesiamapuche.blogspot.fr/ et http://www.mapuche.info/docs/elicura980000.html ou là http://www.poesia.ca/recursos/articulos/... par exemple…