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Parlez-vous franglais ?

Attaque ou attentat ?

Orwell l’a postulé il y a soixante-dix ans : quand on pense dans une autre langue, on pense d’autant plus mal qu’on connaît mal cette autre langue.

La plupart des journalistes français pensent en anglo-américain (en « sabir atlantique », comme disait Étiemble) parce que c’est plus rapide, moins fatigant et aussi, j’imagine, parce que cela doit rapporter plus.

A propos du carnage d’Oslo, ils nous parlent donc d’« attaque ». En lieu et place d’« attentat ».

Parfois la langue anglaise est plus riche et plus précise que le français. Souvent, c’est l’inverse. Le mot anglais attack signifie à la fois attaque et attentat. Les deux vocables français n’ont pas le même sens, la même origine et ne sont pas apparus en même temps dans la langue.

Je me plonge dans mon Robert préféré. Attaque vient du verbe attaquer, qui vient lui-même de l’italien attacare, qui signifie assaillir, investir par la violence : attacare battaglia (commencer la bataille). Le mot italien attacare vient soit du gothique tacca (entaille), soit de staccare (détacher), du gothique stakha (pieu).

Une attaque est donc l’action de commencer le combat, une attaque, une guerre. Le mot s’emploie aussi pour une attaque au football, une attaque verbale, l’attaque d’un acide, l’attaque d’un morceau de musique. Par extension, on des expressions du style « être d’attaque », c’est-à -dire être prêt à affronter les fatigues.

Le verbe attenter a donné attentat, ces deux vocables étant nettement plus anciens qu’attaque et attaquer. Attentat vient du latin attemptatum, attentatum, participe passé neutre de attemptare (attaquer quelqu’un, entreprendre quelque chose contre quelqu’un). C’est donc la notion d’entreprise qui domine (les journalistes adeptes du capitalisme financier devraient apprécier), de tentative criminelle contre une ou des personnes, contre des biens, ou même contre des droits. Par extension, on trouvera « attentat à la pudeur » et, au figuré, l’idée d’un acte qui heurte les sens, la raison, la morale.

Attenter est donc beaucoup plus fort qu’attaquer puisqu’il implique une tentative criminelle (meurtre, viol). De même, on n’attaque pas ses propres jours : on attente à sa vie.

PS : il en va des attaques comme des frappes (chirurgicales, comme on sait) qui font moins mal que les bombardements et sont tellement plus précises...

http://bernard-gensane.over-blog.com/

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Ceux qui se sont sagement limités à ce qui leur paraissait possible n’ont jamais avancé d’un seul pas.

Mikhaïl Bakounine

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