Rire jaune, encore, en lisant le tweet d’Alexis Kraland : « Sorti d’une garde-à-vue de 8h parce qu’à gare du nord j’ai refusé de lâcher ma caméra à un policier dont le collègue affirmait que c’est une "arme par destination". Ils ont donc matraqué ma main qui la tenait avant de m’interpeller pour "rébellion de palpation" ».
Rire jaune, toujours, quand nous vivons en direct l’arrestation de Gaspard Glanz, de Taranis News et que nous découvrons le verdict : interdiction d’exercer son métier, notamment le 1er Mai, mais également tous les samedis, jusqu’à son procès en octobre, le condamnant ainsi à la mort économique…
Rire jaune, enfin, pour cette enquête diligentée pour rechercher les prétendus coupables d’un slogan de manif repris par quelques-uns aux côtés de tant d’autres qui crient à leur bourreaux « rejoignez-nous ».
Il faudra bien finir par accepter de regarder le réel, aussi absurde qu’il soit. En France, aujourd’hui, on arrête et condamne des journalistes, on assassine une innocente qui ferme ses volets, on mutile des manifestants, on recherche les coupables d’un cri de rage, mais on laisse les véritables crimes impunis.
La mort, les mains arrachées, les personnes éborgnées, les blessés graves, les interpellations injustes qui se déroulent dans une violence inouïe, les insultes racistes et homophobes, l’humiliation… Impunité totale !
Le droit de manifester et la liberté de la presse abolis… Impunité totale !
Tout ça dans un assourdissant concert de silence par ceux-là même qui pleurnichent sur un slogan et nous demanderont, dans la foulée, de voter pour eux, de regarder leurs émissions débilitantes, de lire leurs journaux propagandistes, de consommer leur bouffe glyphosatée, d’acheter leurs produits en toc fabriqués par des enfants à l’autre bout du monde… Pour faire durer encore quelques années un système qui tue l’Humanité à petit feu.
Comment est-il possible de s’indigner sincèrement de la colère envers les flics ? Lequel d’entre-eux a pleuré Zineb, qui est allé voir la famille, qui a manifesté une once de compassion ? Qui a avoué sa culpabilité pour Geneviève ? Qui a provoqué les blessures à vie ? Qui, chaque samedi, commet des actes indignes, violents, barbares, contre des innocents ? Qui s’en repend ?
Personne, absolument personne. Personne n’a émis le moindre regret, c’est même tout le contraire.
Depuis 23 semaines, depuis 161 jours, mais en fait depuis bien plus longtemps encore, se succèdent, ininterrompus, des actes infâmes, des abus de pouvoir, la violence policière. Jusqu’à plus soif !
Sur un plateau télé, un responsable syndical lâche un « c’est bien fait pour sa gueule » à propos d’un Gilet Jaune amputé d’une main par un tir de flic, alors qu’à la radio, un ancien ministre demande qu’ils « se servent de leurs armes une bonne fois ».
Les menaces de mort défilent entre deux insultes « vieille truie, le premier qui avance il est mort, sale merde, pas de quartier, faut tirer, on va vous brûler la gueule, quand je te dis qu’il faut aligner deux trois bastos… ».
Brice Couturier recommande publiquement, sur Twitter, le suicide à un Gilet Jaune, mais on fait mine de s’indigner quand c’est crié par des manifestants nassés, gazés et frappés des heures durant sur une place transformée en souricière. Tout est filmé, documenté, diffusé, à n’en plus pouvoir.
Aucun coupable, aucune enquête n’a abouti ! Aucune n’aboutira jamais, soyez-en sûrs.
La REM lâche régulièrement son petit mot déplacé sous l’oeil goguenard des autres partis qui se gaussent, Castaner culpabilise les victimes et félicite chaque semaine les responsables de ces barbaries, Nunez court les plateaux pour assener qu’il n’y a pas de violence policière, Macron bidonne ses déplacements avec la complicité de CNews et tous se taisent et détournent les yeux. Ce sont des lâches !
Le point de non retour est franchi.
Le gouvernement donne des ordres iniques à des robots sans âme qui les exécutent avec jubilation, se transformant de fait en une milice barbare. Chacun peut le voir, tout le monde le sait, mais aucun plumitif à la petite semaine, aucun de ces « éditorialistes » de salon, aucun « artiste bankable », aucun politicien professionnel n’en souffle mot. Et pour cause. Sans cette milice aux ordres, le gouvernement tombe, le système s’écroule et ils sont tous balayés ! Tous, sans exception !
Ce jour viendra, qu’ils en soient assurés, nous y travaillons sans relâche et n’allons pas cesser. Leurs indignités renforcent chaque jour notre colère et notre détermination.
Mais d’ici là, qu’ils et elles le sachent bien, nous ne voulons pas des flics dans nos rangs !
Nous ne voulons pas qu’ils nous rejoignent, c’est trop tard, les limites ont été franchies il y a des années déjà. Les actes d’hier dans ce qu’ils nomment, en se pinçant le nez, « les banlieues » et ceux d’aujourd’hui confirment ce que nous savons déjà tous : les flics, dans leur immense majorité, ont choisi leur camp.
Celui du pouvoir, celui qui donne les ordres abjects sans se salir les mains, celui du racisme social, de la justice de classe, de la violence gratuite, celui des consignes obscènes et discriminatoires. Celui d’un état qui ne tue pas seulement physiquement mais qui tue en muselant, en interdisant de penser, en privant de liberté, en emprisonnant pour une opposition.
Celui d’un état policier en marche… ou crève !
Ne nous rejoignez pas ! Continuez de servir l’ordre établi, continuez la sale besogne que vous faites salement, tout ça ne durera pas. Mais surtout, surtout, ne nous rejoignez pas !
Nous n’avons pas les mêmes valeurs, pas les mêmes colères, pas les mêmes indignations, nous n’avons rien à donner à ceux qui mutilent, tuent, blessent, insultent, humilient, si ce n’est notre mépris, notre rage, et notre colère. Nous ne sommes pas semblables.
Quand le Landerneau de la bienpensance qui couvre vos agissements illégaux de ses indignations à géométrie variable s’offusque pour un suicidez-vous, nous sommes indignés pour des morts, des blessés, le droit de manifester dissous, la liberté de la presse abolie.
Nous nous révoltons pour tous ceux qui ne peuvent pas vivre dignement.
Nous pleurons cette femme somalienne condamnée à mourir dans la rue, comme nous pleurons toutes celles et ceux qui misèrent dehors.
Nous hurlons de douleur chaque fois qu’un être humain, l’un des nôtres, se noie en mer.
Nos coeurs révoltés volent vers tous ceux qui subissent la violence, la guerre, la peur, la discrimination, l’humiliation, la honte, le désespoir… ici, en Palestine, en Birmanie, au Soudan, en Somalie, au Yémen… Partout où ceux qui sont vos clones, sèment la désolation et la mort…
Alors non, surtout, ne nous rejoignez pas ! Nous n’avons pas besoin de vous, nous ne sommes pas comme vous.
Nous sommes peut-être des riens, et pourtant nous sommes tout à la fois le feu et la colère, la lave et la rage, la glace et la volonté, déterminés à ne plus céder une once de tout ce que vous entendez voler et détruire.
Demain, après demain, dans nos manifs, il y aura mille Gaspard, mille Alexis, mille Zineb et nous serons de plus en plus nombreux pour vous faire rire jaune, à votre tour.
Nikita et Camille