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"Nous savions dès le départ à quel point ils étaient sans scrupules"

Pourquoi j’ai voté contre, pourquoi j’ai voté pour

LGS donne à lire ici deux textes (apparemment contradictoires, mais cohérents) par lesquels l’ancien ministre des finances grec, Yanis Varoufakis, explique les raisons de son vote contre le nouveau mémorandum, puis de son vote pour sa mise en oeuvre.

POURQUOI J’AI VOTÉ CONTRE

J’ai décidé d’entrer en politique pour une raison : pour être aux côtés d’Alexis Tsipras dans la lutte contre la servitude de la dette. De son côté, Alexis Tsipras me fit honneur en me mobilisant pour une raison : une conception très précise de la crise fondée sur le rejet de la doctrine Papaconstantinou [conseiller économique (2004-2007) puis ministre des Finances (2009-2012) de Papandréou, NdT], selon laquelle entre la faillite désordonnée et les emprunts toxiques, l’emprunt toxique est toujours préférable.

Il s’agit d’une doctrine que je rejetais car elle faisait peser une menace constante dont le but était d’imposer, dans la panique, des politiques qui garantissent une faillite permanente et, en fin de compte, la servitude par la dette. Mercredi soir, au Parlement, j’ai été appelé à choisir entre (a) adopter la doctrine en question, en votant pour le texte que les « partenaires » avaient imposé à la manière d’un coup d’État et avec une brutalité inouïe à Alexis Tsipras lors du sommet européen, et (b) dire « non » à mon Premier ministre.

« S’agit-il d’un vrai ou d’un faux chantage ? », c’était la question que nous a posée le Premier ministre, exprimant ainsi le dilemme de conscience odieux qui se posait à nous comme à lui-même. De toute évidence, le chantage était vrai. J’y fus confronté pour la première dans mon bureau, où M. Dijsselbloem me rendit visite le 30 janvier pour me placer face au dilemme « mémorandum ou banques fermées ». Nous savions dès le départ à quel point les créanciers étaient sans scrupules. Et nous avons pris la décision de mettre en pratique ce que nous nous disions l’un à l’autre, encore et encore, lors des longues journées et des longues nuits à Maximou [résidence officielle du Premier ministre, NdT] : nous ferions ce qui est nécessaire pour obtenir un accord viable sur le plan économique. Nous ferions un règlement sans finir sur un compromis. Nous reculerions autant que nécessaire pour atteindre un accord de règlement au sein de la zone euro. Mais, si nous étions vaincus par la logique destructive des mémorandums, nous livrerions les clefs de nos bureaux à ceux qui y croient pour qu’ils viennent appliquer les mémorandums quand nous serions à nouveau dans les rues.

« Y avait-il une alternative ? », nous a demandé le Premier ministre mercredi dernier. J’estime que, oui, il y en avait. Mais je n’en dirai pas plus. Ce n’est pas le moment d’y revenir. L’important est que, au soir du référendum, le Premier ministre a estimé qu’il n’existait pas d’alternative.

C’est pourquoi j’ai démissionné, afin de faciliter son voyage à Bruxelles et lui permettre d’en ramener les meilleurs termes qu’il pourrait. Mais pas pour que nous les mettions en œuvre, quels qu’ils fussent !

Lors de la réunion de l’organisation centrale du parti, mercredi dernier, le Premier ministre nous a demandé de prendre une décision ensemble et d’en partager la responsabilité. Très correct. Mais, comment ? Une solution aurait consisté à faire, tous ensemble, ce que nous disions et répétions que nous ferions en cas de défaite. Nous dirions que nous étions soumis, que nous avions apporté un accord que nous considérons non viable et que nous demandons aux politiques de tous les partis qui le considèrent au moins potentiellement viables, de former un gouvernement pour l’appliquer.

Le Premier ministre a opté pour la deuxième solution : que le premier gouvernement de gauche reste en place, même au prix de l’application d’un accord - produit de chantage - que le Premier ministre lui-même considère inapplicable.

Le dilemme était implacable - et il l’était également pour tous. Comme Alexis Tsipras l’a bien affirmé, nul n’est en droit de prétendre être confronté à un dilemme de conscience plus fort que le Premier ministre ou les autres camarades. Mais, cela ne signifie pas que ceux qui se sont prononcés en faveur de l’application de l’ « accord » inapplicable par le gouvernement lui-même sont habités par un sens plus fort des responsabilités que ceux qui, parmi nous, se sont prononcés en faveur de la démission, remettant l’application de l’accord à des hommes politiques qui le considèrent potentiellement applicable.

À la séance plénière du Parlement, la réalité a été parfaitement bien décrite par Euclide Tsakalotos [nouveau ministre des finances, ndlr] qui a expliqué que ceux qui estimaient ne pas pouvoir mettre à charge du gouvernement de Syriza la ratification de cet accord disposaient d’arguments aussi puissants que ceux qui estimaient que le gouvernement Syriza est tenu, face au peuple, de mettre en œuvre ce mauvais accord pour éviter la faillite désordonnée.

Personne parmi nous n’est plus « anti-mémorandum » qu’un autre, et personne parmi nous n’est plus « responsable » qu’un autre. Tout simplement, lorsque l’on se trouve à un carrefour aussi dangereux, sous la pression de la (mal)Sainte Alliance du Clientélisme International, il est parfaitement légitime que certains camarades proposent l’une ou l’autre voie. Dans ces conditions, il serait criminel que les uns traitent les autres de « soumis » et que les seconds traitent les premiers d’ « irresponsables ».

En ce moment, en plein milieu de désaccords raisonnables, ce qui prévaut, c’est l’unité de Syriza et de tous ceux qui ont cru en nous, en nous accordant ce grandiose 61,5%. La seule façon de garantir cette unité est de reconnaître mutuellement les arguments, en partant du principe que les dissidents réfléchissent de manière aussi bonne, aussi responsable et aussi révolutionnaire que nous.

Partant de ces points, la raison pour laquelle j’ai voté « non » mercredi dernier était simple : nous aurions dû avoir remis les clefs de Maximou et des autres ministères, comme nous disions que nous le ferions en cas de capitulation. Nous aurions dû avoir remis les clefs à ceux qui peuvent regarder le peuple dans les yeux et lui dire ce que nous ne pouvions pas : « l’accord est dur mais il peut être appliqué d’une manière qui laisse un espoir de reprise et de renversement de la catastrophe sociale ».

Le gouvernement de gauche ne peut pas prendre, face à l’Europe officielle, des engagements dont il sait qu’il ne pourra pas les réaliser. Le bien suprême que le gouvernement de Syriza doit protéger est la promesse que nous donnions quand nous nous rendions dans les capitales européennes : contrairement à nos prédécesseurs, nous ne vous promettrons pas quelque chose (par exemple, un excédent primaire précis) qui ne peut pas être atteint. Le gouvernement de gauche n’a pas, en même temps, le droit de piller encore plus les victimes des cinq ans de crise sans pouvoir au moins répondre par l’affirmative à la question : « Avez-vous au moins obtenu quelque chose qui compense les mesures récessives ? »

Plusieurs camarades me disent : « N’est-ce pas mieux que ce soit nous qui tenions les rênes ? Nous qui aimons notre pays et qui avons de bonnes intentions concernant la lutte contre la corruption et l’oligarchie ? » Oui, c’est mieux. Mais, avec quels outils travailler ? La décision du Sommet européen fixe et étend l’absence totale de contrôle social sur les banques, alors que la société sera chargée de 10 à 25 milliards supplémentaires de dettes pour renflouer celles-ci.

Et, comme si cela ne suffisait pas, il se crée un super-TAIPED (fonds d’exploitation de la propriété publique), entièrement sous le contrôle de la troïka (indépendamment du lieu où se trouve le siège de ce fonds), qui privera une fois pour toutes la République hellénique du contrôle sur ses avoirs publics. Et comment l’austérité sera-t-elle vérifiée lorsqu’un trait de plume d’ELSTAT (agence des statistiques de Grèce que nous avons cédée à la troïka mercredi dernier) déterminera la taille de l’excédent primaire ?

Et, quand la société commencera à ressentir dans ses tripes l’étau des résultats de la nouvelle austérité désastreuse, quand les jeunes et les moins jeunes prendront les rues ou resteront, désespérés, chez eux, confrontés à ces effets -ces gens dont jusqu’à présent nous portions la voix, qui les représentera dorénavant dans l’arène politique ? Le parti qui a introduit ces mesures au Parlement pourra-t-il représenter ces gens en même temps que ses ministres bien-intentionnés seront forcés de défendre ces mesures, au parlement et sur les chaînes de TV, en se faisant la risée de l’opposition au mémorandum ?

« Mais, ne sers-tu pas le plan de Schäuble, en votant contre l’accord ? », me demande-t-on. Je réponds en posant ma propre question : « Êtes-vous certains que cet accord de capitulation ne fait pas partie du plan de Schäuble ? »

► Le dernier rapport du FMI prévoit une dette publique supérieure à 200% du PIB, ce qui interdit au FMI d’accorder de nouveaux prêts,

► L’exigence de l’ESM, sur ordre de Schäuble, que le FMI accorde de nouveaux prêts, pour prêter lui aussi à la Grèce,

► Le spectacle d’un gouvernement grec qui vote pour des réformes auxquelles il ne croit pas mais, en plus, qu’il qualifie de produit de chantage,

► Le spectacle d’un gouvernement allemand qui passe au Bundestag un accord avec la Grèce qu’il qualifie lui-même de non fiable et d’échec a priori.

Ne conviens-tu pas, cher lecteur, que ce qui vient d’être énoncé sont de puissants « alliés » de Schäuble ? Existe-t-il en effet une manière plus sûre de défenestrer le pays de la zone euro que cet accord non viable qui assure au ministre des Finances allemand le temps et les arguments pour mettre sur les rails le Grexit tant souhaité ?

Mais en voilà assez. Mon jugement m’a amené à voter contre la ratification de l’accord de capitulation, en estimant que la doctrine Papaconstantinou demeure inacceptable. D’un autre côté, je respecte parfaitement les camarades qui ont un autre point de vue. Je ne suis pas plus révolutionnaire-moral qu’eux mais ils ne sont pas plus responsables que moi, non plus. Aujourd’hui, ce qui est en balance, c’est notre capacité à préserver comme la prunelle de nos yeux, la camaraderie et la collectivité, en conservant le droit à l’opinion différente.

Pour conclure, il existe également un aspect philosophique au dilemme de conscience qui se pose à nous tous : existe-t-il des moments où le calcul du bénéfice net est dépassé par l’idée selon laquelle certaines choses ne doivent tout simplement pas être faites en notre nom ? Ce moment, est-il un de ces moments ?

Il n’existe pas de bonnes réponses. Seule existe la disposition honnête à respecter les réponses que donnent nos camarades avec lesquels nous ne sommes pas d’accord.

Yanis Varoufakis, 20 juillet 2015

Yanis VAROUFAKIS : « POURQUOI J’AI VOTÉ OUI CE SOIR »

« Aujourd’hui, nous sommes face aux récents échos d’un coup d’état humiliant au lieu d’un accord honnête. »

Dans la résolution de l’Eurogroupe du 20 février, nous étions arrivés à ce que le Mémorandum (MoU) ne soit mentionné nulle part.

En lieu et place du mémorandum, il y avait, comme préalables à l’évaluation réussie, la référence à une liste comportant nos réformes qui devaient être soumises trois jours plus tard et être immédiatement approuvées par les institutions.

En effet, notre liste, portant ma signature, a été déposée le 23 février. Dans le weekend entre le 20 et le 23 février, nous avons fiévreusement travaillé et nous étions, bien entendu, constamment en contact avec les représentants des institutions afin d’éviter tout blocage le lendemain, le 24 février, lors de la téléconférence au cours de laquelle l’Eurogroupe approuverait notre liste, sur proposition des institutions.

La liste finale que j’ai transmise aux institutions tard dans la nuit du 23 février (voir en anglais ici) contenait nos priorités (par exemple, lutte contre la crise humanitaire, retour des négociations collectives, changement de philosophie quant à l’exploitation des avoirs publics, pas de coupes dans les pensions auxiliaires, etc.) ainsi que certaines de leurs exigences.

Leurs exigences, concernant lesquelles j’avais plaidé en faveur de leur acceptation en échange de celle de nos priorités, incluaient les deux mesures que le Parlement est appelé à adopter ce soir[ndlr : le mercredi 22 juillet] : (a) Amendements du Code de procédure civile (CPC) et (b) Transposition de la directive 2014/59 de l’UE concernant « l’assainissement » des banques et des établissements de crédit (BRRD).

Je savais déjà que les amendements au Code de procédure civile regorgeaient de dangers concernant les droits humains des parties les plus faibles en cas de faillite d’entreprises ou de ménages. Par ailleurs, la meilleure des choses que l’on pourrait dire concernant la directive sur « l’assainissement » des banques était que, au fond, il s’agissait d’un grand coup d’épée dans l’eau (puisqu’elle garantissait au niveau juridique les dépôts garantis sans pour autant garantir le financement du fonds qui devait les… garantir). Toutefois, j’ai estimé que s’il s’agissait, dans le cadre d’un accord honnête, de préserver nos lignes rouges importantes (par exemple, des excédents primaires ne dépassant pas 1% ou, tout au plus, 1,5%, les pensions, les droits sociaux, une TVA faible), le Code de procédure civile et la directive BRRD ne représentaient pas de concessions majeures. C’est pourquoi j’avais inclus ces deux préalables dans notre liste.

Aujourd’hui, bien entendu, les choses sont totalement différentes.

Aujourd’hui, il n’existe plus de liste à nous concernant les réformes dans le cadre d’un accord honnête.

Aujourd’hui, il y a une liste dictée dans sa totalité par la troïka.

Aujourd’hui, nous sommes face aux récents échos d’un coup d’état humiliant au lieu d’un accord honnête.

En février, nous avons accordé le Code de procédure civile et la directive BRRD pour recevoir en retour des choses importantes. À présent, nous accordons le CPC et la BRRD pour « recevoir en retour » des mesures encore plus délétères, dans l’espace de quelques semaines.

En outre, dans le texte que j’avais transmis aux institutions en février, je m’engageais quant à « un nouveau Code de procédure civile » (to a new Civil Code) et non pas, bien entendu, quant au CPC qu’elles nous dicteraient. Cela ne m’aurait jamais traversé l’esprit que notre gouvernement accepterait la procédure d’urgence, refusant (sous les dictats de la troïka) que tous les amendements, abolissant ainsi, dans les faits, le Parlement( * ).

Mercredi dernier, je n’avais d’autre choix qu’un NON tonitruant. C’était mon propre « OXI » qui est venu s’ajouter au 61,5% de nos concitoyens à une capitulation fondée sur la logique de l’inexistence d’alternative (la fameuse « TINA » – there is no alternative), logique que je rejette depuis trente-cinq ans aux quatre continents où j’ai vécu. Aujourd’hui, ce soir, les deux mesures que j’avais moi-même proposées en février, arrivent au Parlement d’une manière que je n’aurais pas pu imaginer alors et qui ne nous fait pas honneur, en tant que gouvernement Syriza.

Mais, comme j’avais expliqué dans mon récent article au « Journal des Rédacteurs », intitulé Pourquoi j’ai voté ‘Non’, mon objectif est, en dépit de mon désaccord fondamental concernant nos manœuvres d’après le Référendum, de préserver l’unité de Syriza, de soutenir Alexis Tsipras et de soutenir Euclide Tsakalotos. Ainsi, aujourd’hui, je vote OUI à deux mesures que j’avais moi-même proposées bien que, dans des conditions et sous des termes radicalement différents.

Je suis malheureusement certain que mon vote n’aidera pas le gouvernement dans notre objectif commun. Et, ce, parce que l’accord de l’Euro Summit, dont font partie les deux mesures de ce soir, est conçu pour échouer. Néanmoins, je donne ce vote à mes camarades dans l’espoir qu’ils gagnent du temps de sorte que, ensemble, unis, nous planifions la nouvelle résistance au totalitarisme, à la misanthropie et à l’accélération et l’approfondissement de la crise fomentés.

Yanis Varoufakis, 23 juillet 2015.

* Ce matin, lors de la réunion de la Commission des affaires financières du Parlement à laquelle je participais, j’ai constaté que pas un seul parlementaire n’était d’accord avec le nouveau Code de procédure civile, ministre de la justice inclus. Il s’agissait d’un triste spectacle.

 http://www.okeanews.fr/20150720-pourquoi-jai-vote-contre-par-yanis-varoufakis

COMMENTAIRES  

24/07/2015 17:42 par Geb.

Néanmoins, je donne ce vote à mes camarades dans l’espoir qu’ils gagnent du temps de sorte que, ensemble, unis, nous planifions la nouvelle résistance au totalitarisme, à la misanthropie et à l’accélération et l’approfondissement de la crise fomentés.

On peut avoir des précisions sur ce que sera cette "nouvelle résistance" ? Alors que l’"ancienne" n’a jamais été efficace.

Personnellement, je n’en voit qu’une : Face à des assassins violents et retords il ne reste "que" la méthode radicale et le reniement de tous les accords scélérats pris sous la contrainte.

QUOIQUE CELA DOIVE APPORTER DE NEGATIF.

Yannis le sait, mais il sait aussi que le premier qui l’énoncera aura son avenir, (Ou même sa vie), très limité dans temps

Ses camarades ne "gagneront pas du temps". Leur "volonté" de "résistance" se dissoudra au fur et à mesure que les accords pèseront plus lourdement sur le peuple, et les forces fascistes se renforceront de cette indécision prortionellement au désespoir et à la paupérisation des masses grecques.

Dans cette affaire le temps et l’indécision ne jouent qu’à l’avantage de l’ennemi.

Pourtant l’exemple de l’Ukraine aurait du en réveiller plusieurs.

24/07/2015 20:53 par macno

Il y a un passage très, oui TRÈS important dans l’exposé de Varoufakis :
« « Y avait-il une alternative ? », nous a demandé le Premier ministre mercredi dernier. J’estime que, oui, il y en avait. Mais je n’en dirai pas plus. Ce n’est pas le moment d’y revenir. L’important est que, au soir du référendum, le Premier ministre a estimé qu’il n’existait pas d’alternative. »
À chacun d’imaginer en quoi consistait cette "alternative"...

24/07/2015 22:43 par Autrement

Geb, pourquoi douter de la résistance grecque ? La nouvelle comme l’ancienne a fait ses preuves. Déjà le Non du 5 juillet a éclairci beaucoup de choses. Varoufakis est non seulement un économiste, mais un super-dialecticien, qui sait et prouve par son récit des "négociations" que la vérité est toujours concrète. Pourquoi, au lieu de s’appliquer à décrire l’inconnu, le ramener mécaniquement au connu ?L’histoire ne se répète pas, et déjouera toujours sur le long terme les scénarios préfabriqués, même si sur une brève période on croit s’y reconnaître. Par exemple, la différenciation interne de Syriza, malgré l’apparence, n’a rien à voir avec celle du PS. Dans un très long interview en anglais (sur Jacobin, voir ici ), S. Kouvelakis s’efforce de situer et de décrire les conflits d’idées et de personnes qui divisent son parti. Mais Syriza tout entier est contre l’accord, et l’aile la plus révolutionnaire prépare déjà la suite, avec, ce qui est très important, les Jeunes de Syriza qui eux aussi ont dénoncé l’accord. Surtout, Kouvelakis s’efforce de comprendre à quel moment la "bifurcation" renversant le rapport de forces aurait pu avoir lieu. il la place...en 2011-2012 ! On ne peut pas prévoir ce que va entraîner le début de l’application de l’accord, surtout si les Grecs, qui sont plus politisés que les Français, sont régulièrement tenus au courant de ce qui se passe. Ce qui suppose de combattre énergiquement les médias dominants, surtout les TV privées. Syriza, c’est un parti, mais un parti atypique, c’est surtout une équipe de gens avertis, qui entendent de toutes façons tirer dans la même direction, contre les traités européens, pour la justice sociale et la souveraineté populaire. En tant que parti, ils sont dans une situation complètement inédite, puisque le peuple leur fait majoritairement confiance alors que les Oui sont majoritairement de droite au parlement. Il peut en sortir beaucoup d’inattendu, d’autant qu’il y a des "patriotes" à droite aussi, et non pas seulement des magouilleurs. Bref, Varoufakis est parfaitement représentatif à lui tout seul de tout ce qu’il y a de porteur d’espoir dans Syriza. Aidons-les en éclairant chez nous l’opinion du grand nombre, tant sur la Grèce que sur le véritable visage des "institutions" et de ceux qui les soutiennent.

24/07/2015 22:45 par Geb.

En effet ce passage est très important.

Mais simplement le citer sans citer "l’alternative en question" ne fait que souligner aux yeux de ceux qui attendent l’indécision mortelle des acteurs du drame.

L’alternative c’était faire échouer des "négociations" qui n’étaient que simplement un viol, et aussitôt nationaliser les banques grecques et se mettre en défaut de paiement..

Et mettre tous les citoyens grecs dans la rue... De l’extrème-gauche à l’extrème-droite pourvu qu’ils veuillent sortir de ce carcan. Et armés s’il le fallait ;

Le "double Non" du KKE signifiait à peu près ça.

Je suis sûr que les Russes avaient envisagé cette possibilité et que c’est de cela que Tsipras était aller discuter à Moscou... Il avait même des garantie d’un accord sur le gaz qui lui permettait de faire de la Grèce hors UE les Rois du Pétrole dans 3 ans.

Si les Grecs étaient sortis de l’Euro et de l’UE en se tournant immédiatement vers les nouvelles entités économiques et politiques émergentes, en faisant un bras d’honneur à l’Europe des Banksters, les Oligarques européens n’auraient pas bougé. Ils sont déjà assez emmerdés avec le problème de l’Ukraine et des USA qui tentent de les confronter par tous les moyens avec les Russes sans aller se mettre encore un problème de plus sur les bras avec eux.

Ils ont manqué la marche, et si on connaît la mentalité des Russes qui n’aiment pas qu’on joue avec leurs bons sentiments, ça ne va pas faciliter la vie aux Grecs en général si par hasard ils changent d’avis...

C’est peut-être bien que Varoufakis se soit mis un peu en retrait de cette saloperie. Mais ça serait bien aussi qu’il cesse de ménager, au moins en paroles et publiquement, une chèvre mourante et un chou pourri.

25/07/2015 00:28 par Geb.

Et au sujet des "nouvelles entités économique émergentes vers lesquelles se tourner, à UFA, Luciano Countinho, Président de a Banque de Développement du Brésil, a proposé lors du sommet que dans un futur très proche " il pourrait aussi être apporté de l’aide aux états non-membres de l’EU...".

Et je soupçonne, (Ces gens là parlent rarement pour ne rien dire, contrairement à ceux de chez nous), que c’était aussi une pierre dans le jardin grec.

http://russia-insider.com/en/how-china-and-russia-are-running-rings-around-washington/ri8949
"As Brazilian Development Bank President Luciano Coutinho stressed, in the near future it may also assist European non-EU member states like Serbia and Macedonia. Think of this as the NDB’s attempt to break a Brussels monopoly on Greater Europe."

Ne pas prendre en compte le mouvement actuel d’émancipation de la tutelle impériale étasunienne est une faute grave de la part d’un chef d’état qui prétend à refuser les diktats du Cartel Européen au nom du Peuple grec.

On pourra me rétorquer que de l’autre côté ils ne valent pas mieux que chez nous, mais pour l’instant ceux qui bombardent chez lez autres, ceux qui déstabilisent les gouvernements qui ne leur plaisent pas, ceux qui assassinent les opposants et les résistants à coup de drones, ceux qui financent les Nazis et qui glorifient les assassins de masse des années 40, c’est bien du côté occidental qu’ils sont.

Et c’est avec nos sous qu’on finance tout ça. Et c’est nos hommes politiques qui ferment leur gueule devant tous ces crimes.

En attendant, Tsipras, n’a pas posé des problèmes qu’au Peuple grec. Il en a posés aussi à l’Italie, à l’Espagne et au Portiugal...

En attendant que vienne notre tour.

25/07/2015 08:13 par macno

@ Geb.
C’est bien évidemment à cette solution dont je faisais allusion, en existe-t-il d’ailleurs une autre ?
Mais elle entraîne avec elle tant de points d’interrogation, et pas des moindres, que je n’ai pas voulu aller plus loin...
C’est une solution pas évidente et longue à mettre en application, il faut donc se garder de la présenter comme étant La solution.
Dans ce sens je ne peux pas te suivre concernant la suite : prendre le contrôle d’un système bancaire aux acteurs forcément hostiles (euphémisme quand tu connais leur mentalité) n’aurait certainement pas été un parcours de santé, exempts d’embûches, de chausse-trapes et Cie, sans compter cette arme ultime et redoutable qu’est la force de l’inertie, c’est la pire !
L’autre question importante venait de Diana Johnstone :
« Pouvons-nous donc conclure que la Grèce a capitulé devant la France ? »
Des informations avaient filtré comme quoi des "experts" de Bercy était venu en Grèce donner "un coup de main" pour rédiger quoi ? La capitulation ? Certainement...mais sans la présenter comme telle, voyons !
Donc le gouvernement grec étaient au courant de la position de la France, et qu’il se retrouvait donc....tout seul.
Varoufakis, je ne sais plus où, a bien précisé que pour mener une telle opération, celle de sortir de l’Euro et pour mettre le plus vite possible tout un autre système financier en état de fonctionner, il aurait eu besoin d’aide extérieure, mais LA question est : une aide de la part de QUI ?
Pas de la Russie qui voudra peut-être bien donner un coup de main par la suite, mais qui n’est certainement pas résolu à mettre de l’huile sur le feu concernant une affaire interne à l’Occident. Elle a assez reproché à l’Occident de se mêler de ses affaires internes concernant la Crimée pour se permettre de faire plus ou moins la même chose.
Il n’y a fondamentalement qu’une seule chose à faire, c’est attendre l’évolution et surtout ne pas invoquer de solution armée.

25/07/2015 16:01 par olivier imbert

pas un mot de la position critique de l’économie politique bourgeoise européenne par le KKE et sur la dette et les armes de l’otan non plus d’une souveraineté nationale orientée en commerces extérieurs en dehors des cadres de l’Europe ; c’est le problème avec des ex-socialistes que ce soit en amérique latine ou en europe et en afrique, même bien élevé dans la com et le débat et sans solution avec des soi-disant puissant armée la chine et la russie et leurs aliés alors c’est comme chvènement il y a plus qu’à rester au fond une singularité ou un original pour le spectacle médiatique.

25/07/2015 16:38 par marc

@Geb
C’est facile de donner des leçons sans savoir la réalité cachée des pressions, toi même dit :
« On pourra me rétorquer que de l’autre côté ils ne valent pas mieux que chez nous, mais pour l’instant ceux qui bombardent chez lez autres, ceux qui déstabilisent les gouvernements qui ne leur plaisent pas, ceux qui assassinent les opposants et les résistants à coup de drones, ceux qui financent les Nazis et qui glorifient les assassins de masse des années 40, c’est bien du côté occidental qu’ils sont. »
ça peut faire réfléchir si l’on voit que depuis 3 mois Arabie saoudite, US, Israël, France bombardent le Yemen sans aucune répercussion internationale....

alors pour la Grèce membre de l’Otan, à quoi s’attendre … envoyer Hollande le chien couchant des US pour maintenir la Grèce dans l’Euro-pe évite t-il pire ?

à remarquer que la présidente du Parlement Zoe Constantopoulou a écrit officiellement à tous les présidents de parlement Européens, à tous les responsables Européens pour dénoncer l’illégalité et le déni de démocratie que constitue l’imposition des règles de la Tro¨ka au parlement grec, qu’elle est toujours en place, ce n’est guère diffusé en Europe.

Même le cœur serré, je garde ma confiance à Syriza qui reste unie, la Grèce qui a résisté plus de 3 mois à l’invasion allemande (alors que la France n’a pas résisté un mois) s’est libérée seule de l’occupation (seul pays de notre Europe à le faire) avant d’être occupée par les anglo-américains après le désarmement de la résistance...je leur fais confiance.

25/07/2015 17:58 par marc

Manifestation pour les 41ans de la chute de la dictature dans la cour du parlement

Manolis Glezos : « je suis venu pour parler de la réapparition de l’anniversaire de la démocratie, de la décision de se battre »

Zoe Constantopoulou :
« 41 ans après la chute de la junte, le pays et le peuple ont à affronter le défi des intérêts financiers et les organismes internationaux, représentants des gouvernements étrangers qui interviennent directement dans nos affaires intérieures ( comme cela s’est passé lors du premier référendum après l’alternance) dans le processus législatif, ils interviennent même dans l’administration de la justice qu’ils cherchent à asservir »

« il nous faut réfléchir et réaliser que la démocratie qui a été conquise n’est pas donnée et doit être conquise par notre résistance quotidienne, par les actions et la résistance de ceux qui l’incarnent dans les institutions et réaliser que la démocratie est l’affaire de tous, du peuple et de tous les représentants des fonctions démocratiques »

« la démocratie n’est pas un apéritif sur l’assiette de ceux qui se nourrissent de l’oppression des peuples, rappelons nous de ne pas laisser la démocratie s’échapper de nos mains, la première chose est de se souvenir que nous l’avions perdue pendant 7 ans et de résister à l’oubli voulu de cela »
la présidente du parlement a aussi estimé que ce n’était pas par hasard que durant la durée du mémorandum avait été supprimée la célébration de l’anniversaire de la restauration de la démocratie, sous prétexte d’économie.

trahi de http://kinisienergoipolites.blogspot.fr/2015/07/41_25.html

25/07/2015 18:09 par depassage

Il faut parfois rentrer dans la peau du diable pour connaitre ses raisons. S’opposer à un colosse économique comme l’Europe et ses alliés objectifs voulus ou qu’ils lui sont imposés n’est pas chose simple d’autant plus que ce colosse n’est perçu que par facteurs jugés décisifs selon les opinions des uns et des autres, et non pas globalement ou de manière exhaustive ne serait-ce approximativement. Je vais souligner cela par un exemple pour me faire comprendre. Prenons le cas de paysans français producteurs de tomates qui se révoltent contre l’importation des tomates marocaines. On peut se solidariser avec eux et trouver leurs revendications légitimes, mais entretemps on oublie que si on n’importe pas de tomate marocaine souvent produite à faible productivité (ou peu de valeur ajoutée), avec quoi les Marocains puissent acheter notre quincaillerie et nos produits de luxe qui, quant à eux sont produit à forte productivité (ou avec beaucoup de valeur ajoutée) ?
Cet exemple est une réalité qui s’élargit à beaucoup de domaines et de pays et que l’outil financier lui sert de moyen régaleur sans être impartial puisqu’il est dépendant d’intérêts nombreux, contradictoires et importants où les légitimes et l’illégitime se disputent des places au soleil souvent au profit du dernier. Penser la finance sans penser l’économie réelle, c’est penser la chose au détriment de l’homme ou de l’être humain sans le vouloir. Là n’est pas mon sujet, ce n’est juste que de petites réflexions au passage. Mon sujet est de dire combien je comprends Yanis VAROUFAKIS et combien cela doit être difficile pour lui. Vu que notre monde est abandonné aux intérêts des coteries sans dire lesquels, ni comment, ni pourquoi, parce que c’est sans importance, une coterie en vaut une autre, ses prises de positions ne sont pas contradictoires, elles sont plutôt sages. On peut en vouloir à l’Allemagne pour sa menace de mettre en œuvre le Grexit, mais la peur de céder aux doléances de la Grèce n’est pas farfelue. L’effet domino et ses conséquences imprévisibles sont là et sont réels. Imposer et tempérer ensuite est une démarche qui vaut ce qu’elle vaut, avec seulement le tort de ne pas plaire aux prophètes de malheur qui croient que c’est sur les cadavres qu’on peut mieux sauter. Syrisa est bien contraint (e) à jouer au funambule.
Pour ceux qui peuvent croire que je défends le capitalisme, ils se trompent. Il y a un système où il faut ou bien le changer ou bien le replâtrer. Pour le changer cela exige plus que détruire pour refaire le même. Dans le cas contraire, vaut mieux replâtrer.

25/07/2015 20:40 par Geb.

@Macno,

Pas de la Russie qui voudra peut-être bien donner un coup de main par la suite, mais qui n’est certainement pas résolu à mettre de l’huile sur le feu concernant une affaire interne à l’Occident. Elle a assez reproché à l’Occident de se mêler de ses affaires internes concernant la Crimée pour se permettre de faire plus ou moins la même chose.

Tu as remarqué la citation tirée de RI sur "une aide aux pays européens non membre de l’UE" ???

Et qui a fait la proposition ?

Ca n’est pas la "Russie"... Mais le Brésil ! La cinquième puissance économique mondiale. A travers les nouvelles structures financières des BRICS.

Structures financières ou se précipitent en pleurnichant qu’on les laisse entrer TOUS les Ministres des Finances occidentaux, les Allemands en premier. Et sauf les USA évidemment.

Et alors ? L’UE va bombarder le Brésil aussi ???

Si tu lis l’Anglais tu devrais lire entièrement l’article de RI

Tu te rendra compte que le jeu se joue maintenant à plusieurs et que ce qui concernait uniquement la "Russie" il y a un an est en train de devenir l’affaire personnelle de pays qui représentent à eux seuls plus de la moitié de la Planète en population, la moitié en GDP, et rassemblent quatre puissances nucléaires contre trois en Occident.

Ce qui signifie que la politique de la canonnière c’est bien fini.

C’est ce que Tsipras n’a pas su réaliser.

C’est sûr qu’avec Hollande comme mentor il est pas près d’émerger.

26/07/2015 16:21 par ozerfil

Lu dans Mondialisation.ca...

"En février 2013, Alexis Tsipras, le dirigeant de la Coalition de la gauche radicale grecque (Syriza), publiait un article dans le Monde diplomatique qui redonnait espoir à une population accablée par le chômage et les baisses de salaires, conséquences directes des réformes imposées par la Troïka. Il affirmait : « Les programmes de « sauvetage » des pays d’Europe du Sud ont échoué, creusant des puits sans fond qu’on invite les contribuables à tenter de remplir. » Evitant de s’opposer frontalement à ceux qui avaient mis le pays en coupe réglée, il les invitait au dialogue en vue de « Parvenir à une solution globale, collective et définitive du problème de la dette. » Ce dialogue devait, selon lui, prendre la forme d’une conférence européenne sur la dette, calquée sur « celle de Londres sur la dette allemande en 1953 (…) la seule solution réaliste et bénéfique pour tous : une réponse globale à la crise du crédit et au constat de l’échec des politiques menées en Europe. » Il réclamait « une réduction de la valeur nominative de la dette cumulée », « un moratoire sur le service de la dette », « l’instauration d’une « clause de développement », afin que le remboursement de la dette ne tue pas dans l’œuf le redressement économique » ainsi que « la recapitalisation des banques, sans que les sommes en question soient comptabilisées dans la dette publique du pays. » Il proposait aussi de parvenir à la mise en place de « réformes visant à une plus juste répartition des richesses. » En disant cela, il remettait en cause les privilèges des classes dominantes grecques, de « l’oligarchie financière, cette poignée de chefs d’entreprise qui ont pris l’Etat en otage, d’armateurs solidaires entre eux (…) de patrons de presse et de banquiers touche-à-tout (et en faillite) qui portent la responsabilité de la crise », une classe favorisée par une politique fiscale très inégalitaire où depuis le début de la crise les impôts ont augmenté de 337% pour les pauvres et seulement de 9% pour les plus riches (Bourassi). Il dénonçait le fait que la Grèce était devenue une « colonie financière de la zone euro. »

Elu en janvier 2015, il prenait comme premier ministre l’économiste Yanis Varoufakis, qui quelque temps plus tard, expliquait devant le micro tendu par le journaliste britannique Paul Mason, que son projet était la destruction de l’édifice sur lequel l’oligarchie grecque avait bâti sa domination.

Au mois de juin dernier, si la Grèce décide d’honorer les quatre échéances à verser au FMI (total 1,6 milliards d’euros) elle se met en situation « de ne pas pouvoir payer salaires et retraites. » Face à Yanis Varoufakis, qui menace de faire défaut, le FMI regroupe et reporte les quatre échéances du mois en un seul paiement fixé au 30 juin (Godin). Alexis Tsipras compte sur le délai accordé pour renégocier les conditions de remboursement, mais il échoue devant la fermeté des créanciers de la zone euro. Pris dans une impasse, il annonce le 27 juin qu’un référendum sera organisé le 5 juillet pour demander aux Grecs s’ils acceptent de faire un pas de plus dans l’enfer de l’austérité. Contre l’avis des puissances d’argent qui font campagne pour que le oui sorte vainqueur, c’est le non qui gagne avec un vote massif de 62%. N’écoutant pas l’avis des économistes hétérodoxes qui pensent qu’une sortie de l’euro est la seule solution viable pour relancer l’économie grecque, Alexis Tsipras signe un troisième mémorandum qui oblige la Grèce à financer un « montage à la Ponzi par des mesures d’austérité qui garantissent avec certitude l’augmentation du poids de la dette grecque et l’incapacité future de rembourser cette dette. Immanquablement, il faudra proposer un quatrième plan qui augurera d’un cinquième… » (Godin)

En n’oubliant pas de s’excuser devant les marxistes du monde entier, lui qui ne l’est pas, Tsipras demande la démission de Yanis Varoufakis et le remplace par le millionnaire Euclide Tsakalotos. Dans la nuit du 15 au 16 juillet, pendant que des manifestants se font gazer sur la place Syntagma par une police garante de l’ordre favorable aux gens de bien, il fait passer un premier paquet de mesures en s’appuyant sur des forces politiques situées à droite de sa coalition et se débarrasse à l’issue du scrutin de 5 autres ministres « frondeurs. » Une semaine plus tard, dans la nuit du 22 au 23 juillet, « le parlement [adopte] deux lois très volumineuses dans le cadre d’une procédure qui ressemble aux années noires de la Troïka (2010-2014). Comme le dénonce la présidente du parlement grec, les députés ont reçu le texte d’une des deux lois dans la nuit du 20 au 21 juillet et ont dû se prononcer 24 heures plus tard sans possibilité de présenter des amendements. Il faut préciser que ce texte à prendre ou à laisser comportait 977 pages. » (Toussaint)

Cette pratique, qui consiste à accélérer le processus législatif, a pour conséquence de contourner, en le neutralisant, le processus démocratique jugé trop lent par les instances technocratiques, bancaires et financières. Pour Zoé Konstantopoulou, elle est une « attaque violente contre la Démocratie ». Elle a le mérite de démontrer les milieux d’affaires cherchent à exclure le peuple et ses représentants des prises de décisions qui les concernent. En appuyant sur le bouton « lecture rapide », en mettant à disposition pendant quelques heures un document beaucoup trop gros pour être lu et assimilé dans un laps de temps aussi court, les milieux d’affaires sont certains que le débat n’aura pas lieu.

Cette manœuvre a permis de faire passer, par exemple, « une réforme de la justice voulue par le gouvernement précédent et par les créanciers » et rejetée, en décembre 2014, « par les avocats de l’intégralité du pays » (Toussaint) ainsi qu’une modification « en faveur des banques [de] la législation sur les faillites des entreprises et sur les dettes des ménages. En cas de faillite d’une entreprise, les banques sont les premières à devoir être remboursées sur les actifs disponibles alors qu’auparavant les retraités et les salariés de l’entreprise étaient prioritaires. En ce qui concerne les dettes hypothécaires, les privilèges des banques à l’égard des ménages endettés sont renforcés de manière à ce qu’elles puissent procéder plus facilement à des expulsions et à la vente du bien immobilier » (Toussaint).

Sous Alexis Tsipras, venu au pouvoir porté par le peuple pour dire non à l’austérité, la Grèce est en train de devenir un paradis néolibéral. Le peuple est bâillonné, la démocratie abolie. Malgré « l’opposition de 31 députés de Syriza (dont la présidente du parlement), les textes ont été adoptés avec une majorité de 230 voix composée des députés de Syriza qui ont voté pour, ainsi que les députés des 4 partis de droites (Nouvelle Démocratie, Pasok, Grecs indépendants et To Potami). » (Toussaint)

Le but d’Alexis Tsipras est-il de sauver la Grèce ou de rester au pouvoir ? Pourquoi n’a-t-il pas démissionné ? L’opportuniste jetterait-il le masque ? Quant au député Varoufakis, qui s’était opposé à la première partie de l’accord le 15 juillet, il a cette fois voté oui.

Tsipras et Varoufakis ressemblent à deux généraux partis en guerre pour sauver leur ville d’un siège qui a trop duré. Du haut des murailles, la populace les voit s’éloigner. Elle prie les dieux pour qu’ils obtiennent la victoire. Ces deux braves soldats suscitent une admiration sans bornes. Mais ils reviennent vaincus, on les accueille, ils demandent pardon. Des mécontents veulent prendre les armes, continuer la lutte. Ils les emprisonnent. Puis ils ouvrent les portes de la ville, font signe à l’ennemi qui attend et organisent eux-mêmes le carnage afin de lui faciliter le travail. Avouez tout de même que ces gens-là nagent en eaux troubles.

Bruno Adrie"

A sa prise de pouvoir, je voyais Syriza s’écrouler sous les ignobles et anti-démocratiques attaques concertées de la Finance et de L’UE mais, ce parti a beau dire, il s’est sagement couché devant les injonctions des sus-cités sans autre résistance que verbale et très symbolique !!

Une décision à l’encontre des divers récents votes des grecs dont un référendum, au verdict pourtant limpide, ignoré avec un superbe mépris : une trahison en bonne et due forme ! A croire qu’A. Tsipras espérait plutôt un "oui"...

Nous étions habitués à voir les socialistes sans cesse se renier, voilà que la gauche radicale, qui prenait là pour la première fois au Monde le pouvoir de façon démocratique, s’y met : elle rend, de fait, le vote inutile.

Bravo !

Les illuminés trotskistes auraient-ils finalement raison...?!!

Au fait, on n’entend plus J.L. Mélenchon...

Ozerfil.
De plus en plus dégoûté de tant de reniements de politiciens sensés porter une autre vision du Monde alors que, plus que jamais, il faudrait être forts et déterminés devant des gens sans scrupules et sans limites dans leurs appétits financiers. Attention, ils veulent nous ramener à une société à la Zola... Il ne faut manquer aucune opportunité d’entraver leur marche destructrice, fut-ce au prix d’immenses sacrifices : il vaut mieux vivre dignement, même dans la misère, en ayant résisté, que mourir résignés, pauvres et asservis pendant qu’ils s’enrichissent démesurément !!

PS : une pensée pour les espagnols de Podemos qui doivent tomber de haut devant la volte face de ceux qui auraient naturellement dû constituer leur modèle...

27/07/2015 07:06 par Grisou

Je ne comprends pas pourquoi on tourne autour du pot.
Il nous dit : "Nous achèverons de détruire et de voler nos concitoyens, mais nous, c’est différent, ce sera avec grandeur d’âme et avec les meilleurs sentiments".
Il me semble que c’est de la paranoïa pure... et que cela ne présage rien de bon.

27/07/2015 07:07 par Grisou

Je ne comprends pas pourquoi on tourne autour du pot.
Il nous dit : "Nous achèverons de détruire et de voler nos concitoyens, mais nous, c’est différent, ce sera avec grandeur d’âme et avec les meilleurs sentiments".
Il me semble que c’est de la paranoïa pure... et que cela ne présage rien de bon.

29/07/2015 19:04 par maria

Maintenant cela suffit avec Varoufakis,
le pourquoi, le comment et
les sous entendus sur ce qu’il aurait fallu
faire , ne pas faire, ce qu’il a voulu faire , mais qu-il n’a pas pu faire, voter, ne pas voter ,
pour finalement voter oui, bla bla bla, aprés non, bla bla bla
Quand la stratégie
car je suppose qu"il y en avait une - euh laquelle -
est défaite, on peut toujours se prendre la tête sur la tactique...
Mais c’est une défaite en l’occurrence !
Face à un système
et qd on prétend s’y affronter
 : être préparé à risquer trés trés gros ..
De toute évidence ce risque n"a pas été pris !
SI tel avait été le cas, il faut lire entre les lignes,
c’était les accidents (ha, ho, hu )...
Tout le monde- la majorité de Syriza- n’a pas été prêt à prendre ce risque !

30/07/2015 20:24 par tchoo

Marrant cela, les deux argumentations se rejoignent. La deuxième pour justifier le OUI en fait argumente pour le non sauf à la fin, ou le seul argument est la solidarité.
Plus je lis, plus je reste persuadé que Varoufakis s’est fourvoyé,
et la posture de Tsipras me laisse dubitatif quand à l’interprétation
il en résulte, de toute façon un immense fiasco
qui jettera un peu plus de désespéré dans les bras de l’extrême driote

01/08/2015 01:06 par Philippe Caduque

Petit complément d’information, que la citation du jour m’incite à poster :

http://www.wsws.org/fr/articles/2015/jul2015/pers-j12.shtml

Je trouvais le wsws assez dur avec syriza en janvier, mais ils avaient peut-être raison...

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