Macron extérieur nuit

Au moins, c’est cohérent. A la politique économique et sociale d’Emmanuel Macron, qui suscite colère et mécontentement croissants, correspond l’action extérieure du président, tout aussi nuisible. Quatre exemples tirés de l’actualité la plus récente illustrent cette réalité, que ne pourra pas masquer l’opération marketing prévue le 11 novembre...

L’Elysée vient ainsi de mettre tout son poids dans la balance pour que la Rwandaise Louise Mushikiwabo soit portée à la tête de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF). Cette ancienne professeur d’anglais, elle-même de langue maternelle anglaise, est une très proche du président rwandais Paul Kagamé. En 2010, ce dernier s’illustra en remplaçant la langue de Molière par celle de Shakespeare dans l’enseignement national, et fit raser en 2014 le centre culturel français de Kigali. En outre, M. Kagamé est connu pour être, en Afrique, l’un des chefs d’Etat les plus engagés pour relayer les menées impérialistes. Quant à sa conception des droits de l’Homme, elle déclencherait des cris d’orfraie à Paris si elle émanait de dirigeants sous d’autres latitudes. L’éloge macronien de la « francophonie ouverte » (sic !) sert ici une sombre bascule géostratégique anglo-saxonne.

Deuxième terrain : l’Arabie saoudite. On n’ose imaginer la crise immédiate qu’aurait déclenchée la liquidation programmée d’un opposant à Vladimir Poutine dans les locaux du consulat russe à Paris, par exemple. Eh bien, il aura fallu dix jours avant que le Quai d’Orsay ne demande à la pétromonarchie de droit divin – en s’excusant presque – quelques « éclaircissements » sur le journaliste saoudien « disparu » dans les locaux du consulat de ce pays à Istanbul. Pas question de fâcher le jeune autocrate et tête brûlée qui tient de fait les rênes à Riyad, Mohammed Ben Salman, celui-là même qui entretient une guerre sanguinaire et sans fin contre le malheureux Yemen – avec les armes occidentales, françaises en particulier.

Par ailleurs, Paris a été, le 15 octobre, l’une des capitales européennes visitées par le président sud-coréen Moon Jae-in, qui se démène pour contribuer, avec son homologue du Nord, à faire baisser les tensions dans la Péninsule – un enjeu décisif pour la sécurité internationale. Alors que M. Moon a plaidé pour que la France fasse un geste confortant la Corée du Nord dans sa volonté de poursuivre le dialogue, il s’est heurté à une fin de non-recevoir. La France est le dernier pays de l’UE à n’avoir pas de relations diplomatiques avec Pyongyang. Et entend le rester.

Il y a enfin le dossier Brexit. Officiellement, les Vingt-sept affichent leur « unité » dans les négociations face à Londres. Mais en coulisses, le président français s’affiche comme le plus vindicatif des dirigeants européens. Peut-être est-ce du fait du caractère présidentiel arrogant que décrivent certaines gazettes ; on peut aussi y voir une angoisse : celle que l’envie de sortir de l’UE ne fasse école, en France en particulier.

Certes, la politique extérieure d’Emmanuel Macron se situe plus dans la continuité que dans la rupture avec ses prédécesseurs. Le problème est qu’elle prend place dans un monde marqué par des tensions croissantes, et renforce celles-ci. Des manœuvres militaires d’ampleur sans précédent se succèdent et se répondent. Des pays de l’UE – les Pays-Bas encore tout récemment – réclament de nouvelles dispositions contre Moscou, s’appuyant sur de bien étranges (et bien fragiles) accusations d’espionnage et de cyberguerre.

De son côté, la (novice) représentante américaine à l’OTAN a envisagé le 2 octobre de « dégager » (« take out ») certains missiles installés par les Russes sur leur propre sol, avant de devoir préciser précipitamment qu’elle avait été mal comprise. Surtout, Washington vient d’annoncer son intention de se retirer du traité signé en 1987 avec Moscou visant à éliminer les missiles à portée intermédiaire. Le très belliqueux conseiller John Bolton plaide, quant à lui, pour remettre également en cause les accords (1991/1993) sur les missiles nucléaires à longue portée.

Cette posture est particulièrement dangereuse, a alerté la Russie. Même pendant la guerre froide, les dirigeants américains faisaient rarement preuve d’autant d’irresponsabilité dans une matière aussi explosive. Des spécialistes commencent du reste à analyser des scénarios de guerre nucléaire limitée.

Le « réchauffement » géopolitique n’est sans doute pas (encore ?) entré en alerte rouge. Mais il serait temps de passer en vigilance orange.

Au moins.

Pierre Lévy,
rédacteur en chef du mensuel Ruptures

Editorial paru dans l’édition de Ruptures datée du 23 octobre
(informations et abonnements : https://ruptures-presse.fr/abonnement/)

 https://ruptures-presse.fr/actu/macron-mushikiwabo-riyad-coree-brexit/

COMMENTAIRES  

01/11/2018 11:03 par benzekri

Macron, président aux ordres.
Appelant à « résister », Macron se dit « frappé » par la ressemblance entre la situation actuelle en Europe et celle qui y régnait durant l’entre-deux-guerres, dans un entretien à Ouest-France publié mercredi 31 octobre au soir.
Macron s’apprête à célébrer le centenaire de la fin de la première guerre mondiale, en visitant les lieux de bataille dans le Grand Est et les Hauts-de-France durant une semaine à partir de dimanche. Suivront la cérémonie du 11 Novembre à l’Arc de triomphe en présence d’une centaine de dirigeants du monde entier, puis le premier Forum de la Paix à La Villette.
Quel crédit accorder à ces célébrations et à ce « Forum de la Paix » à l’initiative d’un néocolonialiste qui appuie et renforce l’installation de son armée en Afrique..., qui arme l’Arabie Saoudite qui tue des enfants au Yémen et finance les organisations terroristes qui opèrent dans la région et au-delà ? Quel crédit accorder à celui qui participe à une occupation illégale de la Syrie et commet -aux côtés de ses maîtres américains- des crimes de guerre... ? Quel crédit accorder à celui qui soutient les massacres des palestiniens par l’Etat d’Israël, régime d’Apartheid ? Aucun.
Au cours de ces rendez-vous, Macron assure qu’il ne « veut pas simplement regarder l’Histoire ». « Je veux rendre hommage et essayer de comprendre les leçons de cette Histoire. C’est un message de célébration, de mémoire et d’avenir ». En promouvant, à cette occasion, une Europe « plus souveraine et plus multilatérale ».
Macron adore parler, bomber le torse et faire croire que sa parole compte ; mais dès que ses maîtres américains et sionistes haussent le ton, il se couche et baisse les yeux. Que fait la France de Macron face aux mesures punitives américaines contre l’Iran qui ne cherche qu’à se protéger contre les agressions et ingérences étrangères dans la région et ne demande qu’à échanger avec les entreprises françaises... ?!
« L’Europe est face à un risque : celui de se démembrer par la lèpre nationaliste et d’être bousculée par des puissances extérieures. Et donc de perdre sa souveraineté. C’est-à-dire d’avoir sa sécurité qui dépende des choix américains et de ses changements, d’avoir une Chine de plus en plus présente sur les infrastructures essentielles, une Russie qui parfois est tentée par la manipulation des grands intérêts financiers et des marchés qui dépassent parfois la place que les Etats peuvent prendre », prévient Macron.
Macron -qui a été fait président- prévient ; il oublie juste un détail : la France est dans l’OTAN...
Le capitalisme prospère avec les guerres, le pillage et le gaspillage des richesses de la planète et la poursuite de l’exploitation -sans limite- des damnés de la terre.
Or cette Europe des mafieux avec ses injustices, ses fraudes, ses trafics en tous genres, sa dépendance vis-à-vis des Yankees, son euro impuissant face au dollar et sa « lèpres » comme le dit Macron est la conséquence des choix faits par ceux qui l’ont menée là où elle est aujourd’hui : les défenseurs du système capitaliste. Cette Europe est un handicap et elle n’est pas réformable !
Trump, le chef de bande des malfaiteurs, vient de révéler au grand jour que les « importants » du monde « libre » monnayent toujours leurs « valeurs ».
Macron, que le pouvoir absolu a rendu fou absolument, doit être écarté d’urgence pour se débarrasser de ce système capitaliste « inhumanisable »...
Hamid Benzekri

02/11/2018 10:11 par Assimbonanga

Je vous recopie le message de Loïc, de la Compagnie Jolie Môme : L’armistice a 100 ans et nous avons des choses à en dire

Le 11 novembre 2018, Trump, Poutine et 120 dignitaires étrangers vont rejoindre Macron pour les commémorations officielles du centenaire de l’armistice. Parmi eux, combien de chefs de guerre ? Combien de marchands d’armes ? L’émotion sera intense et le ton solennel pour rendre hommage à ces morts qui se sont jadis battus avec honneur. Mais qui se sont battus pour qui et pour quoi ? Qui interrogera les causes réelles du conflit ? Quelle commémoration pour se souvenir du partage du monde, des colonies, des richesses entre les grandes puissances ? Quel chef d’État prendra la parole pour dire que ce partage continue aujourd’hui sous d’autres formes ? Quel facétieux rappellera que l’armistice ce n’est pas la paix et qu’à l’automne 1918 toutes les puissances sont parties à l’assaut de la jeune révolution soviétique ? Qui rendra hommage aux internationalistes de tous les pays qui, avant et pendant la guerre, risquant la prison et la mort, se sont battus contre cette logique cynique et pour la fraternité entre les peuples ? Nous le ferons. Nous tous qui participerons à cette contre-commémoration du 11 novembre 2018 !

A 14h place de la République en manifestant à l’appel du collectif « Trump c’est la guerre »

A partir de 17H à La Belle Etoile, 14 Allée Saint-Just, 93210 SAINT-DENIS :
- Rencontre et discussion avec les historiennes Mathilde Larrère et Laurence De Cock et le journaliste du Monde Diplomatique Benoît Bréville. Avec le soutien des Amis du monde Diplomatique de Saint-Denis
- Représentation spéciale de 14-19, la mémoire nous joue des tours par la Compagnie Jolie Môme à 19h, au tarif unique de 10€ !

02/11/2018 12:55 par Oleku

La nouvelle secrétaire générale de l’OIF, Mushikiwabo, visite le Congo-Brazzaville, juste après son élection : https://www.oleku.net/mushikiwabo-elue-a-la-tete-de-loif-entreprend-sa-premiere-visite/

02/11/2018 13:42 par Danael

Macron dénonce d’un côté ( système colonial français ou pseudo situation semblable aux années trente), ce qu’il pratique de l’autre (au Proche Orient, en Afrique, en Amérique Latine, avec l’OTAN , etc.). Sans oublier son abus de pouvoir en France qui tend à criminaliser toutes les oppositions politiques, citoyennes et syndicalistes sérieuses pour soumettre la société aux lois liberticides de l’UE. Or l’UE est celle qui a justement dans son ADN le processus fascisant des classes dominantes en péril qui exercent par ailleurs son pouvoir impérialiste criminel dans le monde . Rappelons que les pratiques de notre armée et police ( notamment en Algérie) ont servi longtemps et servent encore de modèle dans le monde où des gouvernements dictatoriaux répriment les révoltes de leur population. Prétendre qu’il suffirait de donner à ces appareils répressifs d’État plus de moyens et de formation professionnelle pour les rendre plus acceptables témoigne d’ une méconnaissance totale de notre histoire ou d’un aveuglement organisé pour ne rien bousculer. Les vertus républicaines tant vantées par certains "progressistes" sont à repenser totalement sous l’angle des luttes de libération populaire et non sous celui de principes idéalisés par la révolution bourgeoise de 1789 qui veut encore nous faire croire que son chapeau républicain défend aussi le petit peuple des abus du pouvoir des possédants. Pas plus que notre appareil judiciaire soumis aux lois de la classe dominante protège les classe populaires et leurs représentants. Ôtons-nous de la tête ces fausses assurances qui retardent l’exercice d’une vraie conscience de classe nécessaire à une prise réelle de pouvoir.
Petit rappel historique à écouter jusqu’au bout :
https://www.youtube.com/watch?v=E-dLfJUHbto&feature=em-lbcastemail

02/11/2018 18:20 par GG

Le gouv Macron demande des preuves réelles sur l’assassinat du journaliste K . Un sac en forme de jus de journaliste livré dans leurs assiettes toutes neuves , par exemple ...dans d’autres cas ce gouv n’attend aucune preuve pour réagir . Macron concernant la politique étrangères est consternant de bêtises .

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