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Boycotter les Jeux Olympiques de Pékin ? Asor Rosa et l’idéologie de la guerre








L’Ernesto. Rivista comunista, septembre-octobre 2007.



Quand me sont arrivées les premières informations sur l’invitation d’Alberto Asor Rosa à boycotter les Jeux Olympiques, j’ai pensé que c"était les Jeux de Londres de 2012 qui étaient dans le collimateur. En effet, tout aussi discutable est leur assignation à un pays qui depuis des années se distingue par la violation de la charte de l’ONU et qui, pour finir, s’est rendu responsable, aux côtés des Etats-Unis, de l’agression contre l’Irak. La catastrophe qui en est dérivée est sous les yeux du monde entier : les victimes civiles se comptent par dizaines ou centaines de milliers, les réfugiés par millions ; répugnante est l’insulte aux droits de l’homme qui est en acte à Abou Ghraib ; déjà rejeté des décennies en arrière, le pays risque à présent le démembrement.



Les Jeux Olympiques de Pékin et ceux de Londres

Et ce n’est pas fini. Pour rester au Moyen-Orient, l’ombre menaçante de l’invasion ou des bombardements couvre maintenant la Syrie et l’Iran, alors qu’est évoqué le spectre de la « troisième guerre mondiale » sans exclure le recours à des armes nucléaires plus ou moins « tactiques » : le tout grâce à la politique non seulement de Washington mais aussi de Londres. Etait-il vraiment nécessaire de récompenser avec cette assignation des Jeux, qui devraient être synonymes de convivialité pacifique entre nations, une capitale qui se distingue par son arrogance impériale et sa politique de guerre ?

J’ai lu ensuite l’article publié sur La Repubblica du 16 octobre : non, Asor Rosa n’en a qu’après les Jeux de Pékin, et brandit la menace de leur boycott en ressassant tous les lieux communs de l’idéologie dominante. L’extraordinaire effort d’un pays, qui dans une courte période de temps a assuré le droit à la vie à des centaines de millions d’hommes, est dédaigneusement liquidé comme la « machine du développement et de l’exploitation économique » mise en marche par sa « structure centraliste et autoritaire ». Sans s’en apercevoir, Asor Rosa devient l’apologue emphatique du système politique qu’il entend pourtant condamner : il serait difficile de délégitimer « la structure centraliste et autoritaire », si celle-ci suffisait à elle seule à sauver la masse immense d’hommes qui subissent encore dans le Tiers-monde la faim et la mort par privations. En réalité, les choses sont bien différentes « La structure centraliste et autoritaire » n’est certes pas absente dans un pays comme l’Egypte, qui cependant continue à attendre et à dépendre de la farine américaine : pour l’obtenir, Moubarak doit se soumettre à la politique de guerre et d’oppression qu’Etats-Unis et Israël conduisent au Moyen-Orient. Le cas de la Chine est bien différent qui, sortant du sous-développement, en même temps porte à bon terme sur le plan économique aussi l’indépendance politique obtenue à la suite d’une lutte de libération nationale épique.

C’est pour cela qu’est en cours une sorte de croisade contre le grand pays asiatique, croisade à laquelle s’associe aussi Astor Rosa. Le voilà lister une série de « valeurs absolues » et de « droits universels » (liberté de parole, de culte, d’association, etc.), toutes, à ce qu’il paraît, systématiquement violées par Pékin.



Le syndicat en Chine

Les « libertés syndicales » aussi seraient réprimées. Et la désinvolture qui caractérise l’article dans son entier se fait ici plus que jamais évidente. C’est justement en Chine que le leader mondial de la grande distribution (Walt Mart) a été obligé de reconnaître à ses salariés ce droit à l’association syndicale qu’il continue à refuser dans le monde entier et aux Etats-Unis en premier lieu. Oui, objectera-t-on, mais dans les grands magasins chinois seul le syndicat officiel est toléré, généralement accusé de peu s’impliquer dans la lutte pour l’augmentation des salaires. Mais cette accusation est-elle convaincante ?

Dans le grand pays asiatique il y a chaque année entre 10 et 15 millions d’habitants qui abandonnent la campagne (surpeuplée et encore lourde d’arriération) pour s’installer en ville (y compris ces nouvelles villes qui sortent de rien) : dans ces conditions, même la Cgil (plus grand syndicat italien, équivalent de la CGT en France, ndt) du grand Di Vittorio aurait mis l’accent sur les postes de travail et, donc, sur l’expansion de l’économie ; et pourtant - se lamente « Wall Street Journal-Europe » du 6 juin 2007- « depuis plusieurs années les salaires chinois augmentent sans interruption au rythme annuel de 10% ». Le taux de croissance connaîtrait une ultérieure accélération : à cause aussi de la nette amélioration des condition de vie dans les campagnes, les émigrés, à présent, « prétendent à des salaires plus élevé de 16% par rapport à l’année précédente » et exigent et arrivent à arracher aussi quelques bénéfices et améliorations ultérieurs.

Plus impressionnantes encore sont les données rapportées par l’hebdomadaire allemand « Die Zeit » du 18 octobre, dans un article de Georg Blume : « A l’heure actuelle, les plus bas salaires augmentent de 30% par an, alors que le revenu moyen progresse de 14% et, donc, bien plus rapidement qu’une économie qui pourtant se développe de façon très dynamique ». C’est vrai, le coût du travail augmente plus lentement, mais à cause seulement du développement rapide de la productivité. A bien y regarder, même avec toutes ses limites et ses retards, le syndicat officiel chinois se révèle nettement plus mature que ses critiques (y compris ceux de « gauche ») : il appelle la classe ouvrière à ne pas s’enfermer dans un corporatisme étroit, pour être au contraire la protagoniste du processus d’industrialisation et modernisation du gigantesque pays asiatique dans sa totalité ; protagoniste de la lutte nationale pour l’acquisition des technologies les plus avancées, de manière non seulement à renforcer l’indépendance de la Chine mais aussi à rompre le monopole détenu jusqu’à présent dans ce domaine par l’Occident. C’est aussi grâce à la détérioration de ce monopole et à la possibilité d’accéder à des produits industriels de plus en plus sophistiqués, et à la technologie en rapide développement de la République Populaire de Chine, que des pays comme Cuba et le Venezuela sont en mesure de résister à la politique d’étranglement économique mise en oeuvre à Washington. Ils le savent bien, les cercles impérialistes largement impliqués dans la politique d’isolement du géant asiatique : c’est à travers cet isolement que passent la réaffirmation de la doctrine Monroe en Amérique latine et l’imposition de l’hégémonie étasunienne dans le monde.



Une étrange idée de démocratie

Asor Rosa passe survole tout cela de très haut. Parmi les « valeurs absolues » et les « droits universels » qu’il énumère, ne figurent ni le droit à la paix ni le droit pour les nations à jouir de la démocratie dans les rapports internationaux et à ne pas être soumis à la loi du plus fort. Sont ainsi ignorés ou écartés les « valeurs absolues » et les « droits universels » effacés par les aspirants patrons du monde, lesquels, grâce justement à un tel effacement, peuvent s’attribuer la mission d’exporter la démocratie dans le monde entier, en ayant recours à tous les moyens, y compris les embargos économiques, aux menaces en tout genre et aux agression militaires véritables.

Insouciant de tout cela, Asor Rosa invite l’Italie (et indirectement l’ « Occident démocrate capitaliste ») à lancer un ultimatum : si le jour de l’ouverture des Jeux, « tous les organes de presse et télévisuels chinois » ne rendent pas publics « un document en faveur des droits universels de parole et d’association », les Jeux Olympiques de Pékin seront boycottés. Une singulière vision de la démocratie se fait jour ici : non seulement les dirigeants du Comité Olympique international, mais le secrétaire général de l’Onu lui même, élu par les représentants des pays du monde entier, se sont prononcés de façon répétée et avec force contre l’idée du boycott ; Asor Rosa, par contre, attribue en ultime analyse aux ex-puissances coloniales le devoir souverain de juger et punir un pays déjà frappé par eux dans le passé, par des agressions militaires répétées et infâmes. C’est une attitude d’autant plus stupéfiante que ce même Asor Rosa reconnaît qu’il n’y a en Chine pour penser comme lui « qu’une minorité de la population » ; et, toutefois, au nom de la « valeur absolue » de la démocratie, la majorité des habitant du pays le plus peuplé du monde est appelée à s’incliner devant la volonté des grandes puissances occidentales (et du grand intellectuel romain) !

Mais concentrons-nous aussi sur les « droits universels de parole et d’association », au nom desquels est lancé l’ultimatum. D’une part Asor Rosa ignore les notables progrès réalisés par la Chine, dans des conditions difficiles, dans ce domaine aussi. Dans les années 70 du 20ème siècle, Deng Xiaoping soulignait l’importance du gouvernement de la loi ; au contraire, la « nouvelle gauche » italienne et occidentale continuait à l’époque à célébrer la Révolution culturelle qui, en toute continuité à ce propos avec le socialisme réaliste, regardait les libertés et garanties « formelles » avec un mépris souverain. Entre temps, la tutelle des droits de l’homme a été insérée dans la Constitution chinoise. Il ne s’agit pas d’un geste « formel » ou d’un point isolé : dans le pays est en cours la traduction systématique des grands textes de la culture occidentale, y compris ceux qui sont largement engagés dans la théorisation des droits de l’homme, problématique qui tend désormais à acquérir la dignité de discipline universitaire ; de façon plus générale, on voit grandir assez rapidement le nombre des organisations non gouvernementales, des journaux, des Universités, des étudiants et diplômés qui étudient en Occident, et des professeurs occidentaux appelés à enseigner dans les universités chinoises. Bien sûr, le chemin à accomplir est encore long, et le grand pays asiatique ne veut pas s’ouvrir immédiatement à la « démocratie » de la même façon que s’y sont ouverts la Yougoslavie et la Russie : pays qui ont subi une catastrophe économique, sociale, nationale et humanitaire, avec un Occident prêt à en tirer profit sans scrupules, afin d’élargir sa sphère d’influence et de domination.

Mais, alors qu’il ignore d’un côté les progrès réalisés par la Chine même dans le domaine des « droits universels de parole et d’association », de l’autre côté, Asor Rosa embellit le comportement de l’Italie et de l’Occident « démocratique-capitaliste ». Mais qui, au printemps 1999, a assassiné par des bombardements aériens les journalistes télés yougoslaves coupables de ne pas partager l’opinion des sommets et des idéologues de l’OTAN et de s’obstiner à condamner l’agression subie par leur pays ? Et combien y a-t-il de journalistes « accidentellement » tués par le feu des forces d’occupation en Irak ou en Palestine ? Bénéficient-ils des « droits universels de parole et d’association » les habitants de Gaza qui, après avoir voté pour le Hamas au cours d’élections libres, se voient maintenant condamnés au boycott, à l’étranglent économique et à l’embargo ? Et ont-ils bénéficié de ces droits les détenus d’Abu Ghraib et de Guantanamo ? Pour finir : les arabes et les musulmans qui aux Etats-Unis osent contribuer à une souscription en faveur de la population de Gaza et du Hamas risquent d’être poursuivis et condamnés en tant que « terroristes ».

A son époque, Clinton, en prononçant le discours qui inaugurait son premier mandat présidentiel, exaltait les Etats-Unis comme la plus antique démocratie du monde et donc comme le pays appelé à « conduire le monde » sur la voie de la liberté, dans le cadre d’une mission « sans âge » ; naturellement, le président étasunien ne faisait référence ni à l’anéantissement des peaux rouges, ni au régime d’esclavage et d’oppression raciale infligé pendant des siècles aux noirs, ni à la répression impitoyable et aux pratiques de génocide mises en actes par les Usa dans leurs véritables colonies (Philippines) et dans leurs semi-colonies en Amérique latine ; Asor Rosa argumente de la même façon. Quand il propose, en matière de « droits universels de parole et d’association » d’ériger un tribunal, dans le cadre duquel la Chine est l’imputée et l’Italie et l’Occident « démocratique-capitaliste » sont les juges, il évacue du cadre les infamies antidémocratiques dont justement l’Occident se tâche aujourd’hui encore, quand il s’agit de plier la résistance des pays et des peuples qu’il entend soumettre à sa domination.

C’est un trait caractéristique de la fausse conscience de l’Occident de faire abstraction du sort réservé à ses victimes pour pouvoir s’autocélébrer comme le lieu de la liberté ; et c’est à partir de cette fausse conscience que l’Occident peut passer ses guerres de contrebande comme une contribution à la diffusion de la démocratie. Asor Rosa ferait bien de réfléchir à tout cela. Ce serait triste de voir un prestigieux intellectuel de gauche se mettre dans la trace de la tradition culturelle pro-colonialiste et pro-impérialiste, et devenir un idéologue de la guerre (qu’elle soit froide ou chaude) !

Domenico Losurdo


Alberto Asor Rosa est enseignant de littérature à La Sapienza à Rome, écrivain et critique littéraire.

Domenico Losurdo est philosophe et historien à Urbino, auteur de nombreux ouvrages traduits en plusieurs langues.


- Publié dans « L’Ernesto. Rivista comunista », numéro de septembre-octobre 2007, p. 59-61.

- Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio


- Lire en portuguais http://resistir.info




Impérialisme humanitaire. Droits de l’homme, droit d’ingérence, droit du plus fort ? par Jean Bricmont


Plus efficace encore que les dictatures : le lavage de cerveaux en liberté, Noam Chomsky, entretien avec Daniel Mermet.


Esclaves Marrons et Drapeau Noir, par Soopa Seb.






COMMENTAIRES  

12/12/2007 14:36 par Jean

Il est sarkoziste ce Domenico Losurdo ?
Je ne comprends pas comment on peut approuver en Chine ce qu’on combat ici en occident au prétexte que la Chine est en développement. Il n’est jamais allé là -bas, ce n’est pas possible. Cet article on dirait qu’il sort du quotidien du peuple. Affligeant !

12/12/2007 16:49 par So Krazy

Oui , article affligeant de partialité.
D’un autre côté , si on boycotte les JO dans tous les pays qui baffouent la morale , il ne va pas rester grand chose..Comment la France pourrait elle s’insurger contre la violation des droits de l’homme alors que ses principaux représentants affirment haut et fort que le carnet de chèque est au-dessus de toute valeur morale.
Bientôt ce sont les dictateurs qui boycotteront la France , pays de violation du droit des immigrés !

13/12/2007 13:07 par à -nos-amis

Domenico Losurdo adopte la seule démarche critique acceptable : celle de re-situer le sens (idéologique) du réel dans la complexité historique.

Notons en passant qu’il "n’approuve pas en Chine ce qu’on combat ici en occident", mais remarque que l’on pratique précisément chez soi ce que l’on condamne chez l’autre au moment même où on le condamne avec tant d’effronterie partiale, c’est à dire la négation de la parole de l’autre dans la négation de son altérité.

Certaines personnes, hélas, trop habituées à la nouvelle réalité médiatique simplificatrice de l’image bi-dimensionnelle, vont peut-être compter pour rien le fait dynamique d’une réalité chinoise en développement, mais c’est justement cela qui empêche cette dernière de n’être que virtuelle ou fantasmée.

En bref n’oublions pas : l’occident est narcissique, égoïste et prétentieux, il en donne des preuves tous les jours aussi surement que "certains" encore prouvaient la marche en marchant.

M Andissac

14/12/2007 09:26 par Jean

Critiquer à raison l’Occident narcissique, hégémonique et prétentieux n’implique pas qu’on doive approuver une Chine bureaucratique, corrompue et esclavagiste. Cet article est justement caricatural d’une pensée binaire : la Chine s’oppose aux USA, donc on doit à tous prix approuver la Chine. Comme s’il n’y avait que ces deux modèles.
Un autre monde est à inventer...

14/12/2007 17:13 par à -nos-amis

Vous avez raison, bien que certains l’expliquent à tue-tête, je ne veux pas comprendre que les chinois soient les "grands méchants", c’est malheureux, il faudra m’enfermer. Me boycotter peut-être ?

Ne nous leurrons pas, il n’est question nulle part là dedans de démocratie, -où est-elle la bien-aimée tandis que vous la chassez encore un peu plus ?- mais il n’est question que d’hégémonie politique. Qui n’est pas capable de comprendre cela ?

Et de plus, est-ce que je repproche à quelqu’un de soutenir les usa et la modernité occidentale, alors que je devrais justement le faire pour rationaliser le débat, c-à -d le rendre compréhensible et désigner les idéologies pour ce qu’elles sont ?

La preuve, comme moi à contrario, que certaines personnes sont partisanes ? C’est qu’elles se révoltent qu’on puisse défendre la Chine mais ne s’insurgent pas qu’on puisse l’attaquer.

Cependant nuançons :

Personne n’a réclamé de manifester dans la rue bruyamment en faveur du néo-capitalisme chinois ", alors que beaucoup hurlent au boycott, faisant de la condamnation du régime et de quelques autres (dont Kadhafi, Iran, Cuba etc...) leur point d’horizon-diversion politique.

Il se trouve que dans toute confrontation au système de la globalisation anglo-saxonne, j’ai hélas, puisqu’il le faut, choisi un camp, et depuis... ouf ! longtemps ! D’autres aussi, peut-être ?

Il n’est question nulle part là dedans de démocratie, mais d’hégémonie politique.

16/12/2007 18:59 par vincent présumey

L’ennemi pour les travailleurs, ce n’est pas la "globalisation anglo-saxonne", c’est le capitalisme ! Et ses hommes d’Etat sont aussi bienj Hu Jintao que Bush. Quand on prétend actualiser Marx, Gramsci et quelques autres comme le fait Losurdo, on part de ces vérités là . Il a fait croire qu’il écrivait contre les petits propagandistes du boycott des JO mais il a écrit contre le droit des travailleurs chinois à s’organiser, et en faveur du "développement" capitaliste de ce pays clef. C’est un fait : quand on joue aux "camps" géostratégiques, on se retrouve dans le camp du capital. C’est caricatural de voir comme Losurdo illustre ce principe théorique qui, aprés tout, n’est pas toujours évident : mais avec lui, il est tellement lourd avec son argumentation de char d’assaut, que cela l’est ! Quelle terrible démonstration !

16/12/2007 22:11 par à -nos-amis

Vous parlez de char d’assaut ? Vous avez raison la stratégie du pouvoir n’est pas un jeu de dentelle et j’aimerais que vous me confirmiez du haut de vos dédains que le retour de la Russie sur la scène géo-politique n’est pour rien, avec ses fournitures d’armes et ses droits de véto (de même la Chine), dans le renoncement, même temporaire, de l’aggression américaine contre l’Iran ? Le pouvez vous ?
Certes il est de bon ton de faire rendre ses tripes a tout ce qui peut être stigmatisé en terreur humaine mais il est très profitable que ceux là se salissent les mains à la place des âmes pures, qui attendent peut-être que la souffrance s’éteignent avec la mort du malade, car je n’ai pas l’impresssion que ces belles âmes, toutes rivées à leurs mots d’ordre de fraternité de classe, intimident le moins du monde les impérialismes, en l’occurence anglo-saxons désolé. Est-ce que je me trompe ? Bien sur...

Je suis moi aussi un idéaliste et lorsque j’entend crier les opprimés, des travailleurs migrants de Dubaï aux paysans hindous et clandestins africains piégés au Maroc (mais sont-ils des ouvriers ?), il me semble que quelque chose crie de moi et comme je suis l’inefficacité faite homme(si si), je suis heureux de tout ce qui enfonce un coin dans l’hégémonie du système fût-il, ce coin, escorté "d’amazones" portant des verres fumés sous un chapeau de cuir.

Bien sûr l’ennemi est bien la globalisation, cette tentative totalitaire, cette uniformisation contraignante des valeurs et des comportements, le capitalism ne trône pas sans point d’appui comme un réel éthéré.

Bien, pour la Chine que propose t-on ? Les 35 H avant la réalisation d’une société industrielle et technologique (ils iront dans la lune quand ils seront milliardaires, en touristes) ? L’effondrement de la grande muraille comme on a renversé jadis feu le mur de Berlin ? Manifester à la place des citoyens chinois, heureux des jeux de Pekin par pure propagande qui n’existe pas chez nous (si pardon, mais de façon purement subjective, intégrée) ?
Je suis très ouvert.

17/12/2007 15:36 par vincent présumey

D’abord, pourquoi ces allusions aux immigrés au Maroc, aux travailleurs hindous, si ce n’est pour suggérer que celui qui s’insurge contre le régime chinois ne défendrait pas ceux-ci ? C’est totalement absurde. S’opposer à l’exploitation capitaliste en Chine n’empèche pas de s’opposer au même capitalisme au Venezuela, au Maroc ou ailleurs, au contraire. Evidemment que les migrants au Maroc appartiennent à la classe ouvrière ... il est regrettable d’avoir à le préciser.

Deuxièmement. Le "capitalisme" serait une notion abstraite et éthérée, alors que l’ "impérialisme anglo-saxon", ça ça serait du concret, du bon rosbif à se mettre sous la dent. Désolé, c’est l’inverse : c’est le capitalisme qui est une réalité concréte et l’ennemi "anglo-saxon" qui est l’un des masques visant à la cacher. Cette idéologie n’est que le reflet de la propagande capitaliste, justement, sur la "mondialisation". Elle ne fait que prendre en gripe le mythe qui est présenté comme le Bien. Mais la réalité concréte mondiale du capitalisme aujourd’hui, c’est bien entendu Wall Street et le Pentagone, mais c’est aussi le pays où la plus grande quantité de plus-value est extorquée aux prolétaires, permettant la valorisation des capitaux à Wall Street, et ce pays, c’est la Chine, et les agents de cette extraction de plus-value, ce sont les dirigeants chinois.

Troisième point : les missiles russes (ou chinois) si j’ai bien compris protégeraient les iraniens. Pauvres iraniens ! Il ne faudrait quand même pas oublier que toutes les interventions US dans le monde depuis 20 ans se sont faites avec l’accord de Moscou et de Pékin. Il y a des contradictions entre eux, mais faut-il s’aligner sur les uns ou les autres ? La meilleure garantie pour rendre le plus difficile possible une attaque de l’Iran serait que les peuples d’Iran renversent le régime des mollahs. En attendant, ce qui a freiné Bush, c’est l’impopularité croissante de sa politique aux EU. C’est le peuple, c’est la classe ouvrière américaine.

Les 35 heures serait déplacées en Chine puisqu’ils sont en phase de "développement" ? admirable argument de petit patron ! Qui ignore la réalité économique la plus élémentaire : la productivité techonologique et organisationnelle du travail dans les entreprises capitalistes, étrangères ou chinoises, qui exploitent les chinois, est tout à fait au top. Augmenter massivement les salaires réels (et ne pas se contenter, comme le fait Losurdo dans son article, de faire passer pour hausse leur progression nominale mangée par l’inflation ! ), par exemple en baissant le temps de travail, serait la meilleure chose immédiate qui pourrait arriver aux travailleurs chinois et aux autres aussi par la même occasion car elle rendrait plus difficile leur mise en concurrence les uns avec les autres par le capital mondial. Un vrai syndicat chinois -et il en existe, tous clandestins- revendiquerait cela, en effet, et non pas le "développement" à la Losurdo.

L’urgence pour les travailleurs chinois, c’est qu’on soutienne leur organisation indépendante sans avoir peur que ça fasse le jeu des "anglo-saxons". Dans ce cadre, la place des JO est de leur éventuel boycott n’est pas une affaire fondamentale, en tous cas ce serait aux chinois -pas au PCC au pouvoir, aux Chinois ! - à nous dire ce qu’ils en pensent.

Bref, le but c’est pas la guerre mondiale avec le vilain oncle Sam, c’est l’émancipation. Quitte à être idéaliste, autant être aussi réaliste.

Cordialement.
VP

17/12/2007 22:10 par à -nos-amis

Je n’apprécie que très faiblement que vous me qualifiiez de "petit patron" parce que je n’en suis pas un, du tout, bien que je ne crois pas non plus "du tout" à une construction sociale perenne "par la base qui ne se structurerait pas en organisation puissante" (c-à -d en investissant d’abord les formes du pouvoir classique) dans le rapport de force actuel. Décapitez la révolution bolivarienne, supprimez Chavez, son administration, son Etat, confiez le pouvoir aux communautés villageoises et demain il n’y a plus de socialisme bolivarien ni andin. Vous prenez le pari 100/1 ?

"( )ce qui a freiné Bush, c’est l’impopularité croissante de sa politique aux EU ( )" Vous plaisantez j’espère, à mon tour de parler de méconnaissance, cela signifierait que nos réactionnaires occidentaux ont une once de conscience démocratique -tardive- ! non : c’est qu’il n’en n’ont momentanément pas les moyens pour une convergences de motifs !!!

Ce qui m’amène à penser que le capitalisme (concret) repose sur ses pattes -bases- : institutions politico-financières, forces répressives de ses états impérialistes, serviteurs éminents et dévoués... qui lui permettent de canaliser et d’amasser le capital naturel et humain, de grandir.

Que la Chine à travers son neo-capitalisme perturbe le fonctionnement serein de celui-ci fait sans doute parti de ses contradictions le conduisant à imploser.

La Chine ne connait pas de taux de croissance faramineux parce qu’elle est capitaliste mais parce qu’elle sort du sous développement.

Losurdo ne fait que pointer un thème bien intégré de la propagande impérialiste occidentale à laquelle beaucoup malheureusement prêtent un levier.

Cordialement,
Michel A

18/12/2007 20:21 par vincent présumey

... puisque cette comparaison vous pique au vif, d’accord ; mais reste que ce discours "développementaliste" est bel et bien patronal, et qu’il est symptomatique de voir qu’en partant d’une vision du monde qui en gros oppose les gentils chefs d’Etat capitaliste -de Chavez à Hu Jintao- aux méchants (Bush) on en arrive effectivement, comme Losurdo, à parler comme un patron, du point de vue capitaliste -celui-là même du "développement".

Par ailleurs, il est surprenant d’être supris de lire que c’est l’opposition du peuple américain qui pose problème aujourd’hui à Bush pour sa politique en Irak et contre l’Iran : il faut regarder la réalité en face. A moins de considérer qu’un chinois capitaliste est plus progressiste qu’un américain prolétaire et anti-Bush de surcroit, par définition ...

"L’émancipation des travailleurs sera l’oeuvre des travailleurs EUX-MEMES." Ou ne sera pas ...

19/12/2007 16:31 par à -nos-amis

Mais il n’y a pas d’opposition...
Il n’y a pas de gentil capitalisme...
Il n’y a pas de développementalisme...

c’est vous, vous qui vous êtes focalsé son mon expression malheureuse "de globalisation anglo-saxonne"(peut-être êtes vous atlantiste ?) alors que j’aurais dû parler de "mondialisation libérale" et vous qui faites des procès à Losurdo ou son modeste défenseur en nous qualifiant de discours pro-capitaliste ou patronal, tandis que l’auteur n’essayait que d’apporter ce dont nous aimerions que vous soyez capable, c-à -d de nuances dans les processus historiques (définitivement spécifiques à chaque société) et les rapports stratégiques. Surtout ne vous focalisez pas à nouveau sur "votre classe -laborieuse-" ça n’est qu’en concept et ce sont les hommes dans leur diversité qui sont la matière de l’histoire, et la souffre et in fine la façonne.

"( )il est surprenant d’être supris de lire que c’est l’opposition du peuple américain qui pose problème aujourd’hui à Bush pour sa politique..( ), je ne suis pas surpris par l’idée (ou le possible de la chose) mais par le fait qu’elle soit fausse !!. Cette remarque est un sophisme qui vient de l’habitude de plaquer ses propres représentations sur celles d’autrui.

Chavez n’est pas "un capitaliste"... c’est trop simple encore une fois. Décidemment c’est tout un art de faire plaisir à l’oncle Sam... J’ai bien peur que certains à travers le discours radical, adossé sur un réel de type médiatique, de leur représentation abstraite (refusant la complexité du concret), ne prépare que la "société du désert", car n’est pas possible "( ) L’émancipation" [ des travailleurs sera l’oeuvre des travailleurs EUX-MEMES."( )] mais seule peut-être possible la Justice, ou la construction d’une société JUSTE, car seuls les loups, les maîtres négriers et les Nérons sont émancipés. Chavez ne l’est pas, il est lié à son peuple.

Au fait pour les chinois et les jeux ? Leur poser la question ? mais... vous connaissez déjà la réponse !!! Pour Londres, pour Paris aussi... Tout ça c’est insuffisant, simple, trop simple...

Sans rancune ! et me tenez pas rigueur svp si je ne répondais pas, afin de vaquer aux activités de Noël ou autres, (j’essaie d’entrer au châpitre !).

16/12/2007 18:53 par vincent présumey

Exemple : Wall-Mart. Il nous explique que cette firme décisive, connue pour sa répression anti-syndicale, a du accepter en Chine la présence d’un syndicat. Mais il le dit lui-même : c’est le syndicat officiel ! et il ne dit pas que ce syndicat obligatoire interdit les grèves, mais il nous explique doctement que "même la CGIL" placée dans les conditions chinoises serait pour le développement, sous-entendu pour le "produire d’abord" comme disaient les Losurdo français il y a 63 ans. Ces arguments sont patronaux : ils ont, en leur temps, attiré des entreprises "contraintes" elles aussi, d’accepter des syndicats officiels, verticaux : ceux du franquisme et du fascisme en Espagne ou en Italie. Ceux qui savent lire ont reconnu la thématique des patrons, bridés ou blancs. Choisis ton camp, camarade : pas ton gouvernement favori, pas ton camp géostratégique, ceux-là appartiennent tous aux exploiteurs, mais ton camp de classe !

17/12/2007 11:54 par à -nos-amis

"( )le développement, sous-entendu pour le "produire d’abord, ( )".
Nous comprenons parfaitement que c’est la façon dont vous, vous l’entendez...

Faire relever son système de pensée d’un ordre de réalité extérieur (re-construit apodictiquement pour l’occasion ), un de facto trié du flux des événements et donné rétrospectivement comme antérieur à l’analyse, qui ne pourra plus dès lors que partir de lui, participe tout de même un peu de... la communication de masse dominante, j’en suis désolé...

Oui désolé... je préfére le char d’assaut de M Losurdo...

Il me semblait qu’en France ce n’était pas le grand amour en ce moment avec les directions syndicales ? Pardi, dès qu’on a un chef, ça sent le roussi, non ? mais peut-être est-ce un echo bruyant de la grosse caisse noire de la mettalurgie, que même ma faible oreille perçoit ?

17/12/2007 15:36 par vincent présumey

Apodictiquement parlant, rien compris.

10/04/2008 02:40 par Christian Charron

Si on boycotte les Jeux olympiques de Pékin à cause des agissements de la Chine envers les Tibétains, il faudrait aussi le faire à cause de la présence américaine aux Jeux.

Plus d’infos ici :
http://www.debateria.com/article.php3?id_article=352

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