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Un réalisme politique supérieur aux affinités doctrinales

L’appui dénué d’équivoque que l’Arabie Saoudite suivie par les Émirats Arabes Unis et le Koweït a apporté au général El-Sissi et à l’armée égyptienne dans leur confrontation avec les islamistes Frères musulmans n’a pas été pour rien dans la fermeté de la réaction de « l’homme fort » de l’Égypte aux critiques émanant de Washington et de capitales européennes sur « l’usage disproportionné » de la force dont auraient fait preuve les militaires et policiers égyptiens pour déloger les partisans du président déchu des lieux publics qu’ils occupaient au Caire et dans d’autres villes du pays.

Ryadh n’a pas fait dans la dentelle en exprimant son approbation à l’action menée en la circonstance par les forces de l’ordre égyptiennes. Les autorités saoudiennes l’ont estimée en effet appropriée car ces forces de l’ordre ont été confrontées à des menées terroristes qui menaçaient la sécurité nationale de l’Égypte. Le soutien saoudien va plus loin encore, Ryadh ayant fait savoir que le royaume et ses alliés du Golfe sont déterminés à suppléer à toutes les suppressions d’aides que les Occidentaux viendraient à décréter en guise de sanctions contre la violence à laquelle les autorités égyptiennes ont eu recours pour disperser les rassemblements des Frères musulmans et leurs sympathisants.

L’appui des monarchies de la péninsule arabique exprimé avec autant de détermination élargit sans conteste la marge de manœuvre des militaires et du gouvernement intérimaire.

Il leur permet de continuer à acculer la confrérie des Frères musulmans en accentuant son affaiblissement, sans encourir d’être taxés d’avoir instauré un régime anti-islamique en Égypte. La caution de l’Arabie Saoudite a pour signification de les dédouaner de ce « péché suprême » dont les en accusent les Frères musulmans et leurs relais dans le monde arabe.

Il conforte également le général El-Sissi et l’armée égyptienne dans leur prise de distance avec Washington qui leur a fait trop sentir le poids de sa tutelle sur le pays et de sa dépendance à l’égard des subsides américains. Pour autant l’Arabie Saoudite ne prône pas aux militaires égyptiens une révision de leur alliance stratégique avec les États-Unis. Même si apparemment Américains et Saoudiens divergent sur l’appréciation de la situation égyptienne, Ryadh demeure attachée à l’alliance avec Washington et à la prépondérance de l’influence américaine dans le monde arabe. Les Frères musulmans égyptiens pour aussi islamistes qu’on les présente et donc a priori proches doctrinairement des Saoudiens ont commis la « faute » aux yeux de ces derniers d’avoir esquissé un rapprochement et un dialogue avec leur « mortel ennemi » régional, l’Iran.

Comme les Américains, les Saoudiens considèrent qu’en dernier ressort l’armée est leur véritable allié stratégique en Égypte et dans la région. Mais contrairement à Washington, ils ont estimé qu’exercer sur elle des pressions l’obligeant à reculer face aux Frères musulmans entraînerait son affaiblissement sur l’échiquier national égyptien aux donnes complexes. Les Saoudiens ont sacrifié les Frères musulmans sur l’autel des intérêts de leur sécurité nationale dont l’armée égyptienne la plus forte du monde arabe en est l’un des garants. Ryadh continuera ailleurs à soutenir et à financer les islamistes qui visent à prendre le pouvoir. Même quand pour y accéder ils recourent à la violence et au terrorisme. Le soutien de l’Arabie Saoudite aux autorités égyptiennes n’est pas un signal de revirement de sa politique, mais un acte de « réalisme politique » supérieur aux affinités doctrinales.

Kharroubi Habib

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