Hier, l’armée arabe syrienne soutenue par les forces irakiennes et iraniennes et la force aérienne russe a lancé une attaque surprise au sud et à l’est d’Alep. Au début, la progression a été rapide, mais maintenant la résistance s’est renforcée et le rythme de la progression actuelle est plus lent et plus régulier. Comme les lignes de front se déplacent constamment, les nouvelles sur les positions réelles changent.
Une excellente carte de l’opération en cours via TexMapMaker1. (Encore une fois, le vert = insurgés, le rouge = le gouvernement syrien et les forces alliées)
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Il y a trois axes importants. Le premier, (en haut à gauche sur la carte : numéros 1 et 2) aux abords des villes assiégées de Nubl et Al-Zahra, a pris de l’ampleur lorsque, plus tôt dans la semaine, les rebelles payés par l’étranger ont perdu certaines de leurs positions au nord-est d’Alep dans des combats contre l’État islamique. L’Armée arabe syrienne (AAS) en a profité pour élargir son emprise sur le terrain aux abords des villes assiégées. En plus de soulager les villes, le fait d’étendre ces positions coupera la ligne d’approvisionnement des insurgés vers le nord de la ville d’Alep.
A l’est, les troupes de l’AAS se battent pour dégager l’aéroport militaire assiégé de Kuweiris (à droite sur la carte). Au sud, elles contournent la route directe qui relie, d’ouest en est, la ville d’Alep à Kuweiris mais qui est sous le contrôle des insurgés. Elles progressent de manière satisfaisante et pourraient atteindre l’aéroport demain ou après-demain.
Hier et aujourd’hui, la principale attaque surprise a eu lieu au sud de la ville d’Alep. Les troupes ont progressé d’environ dix kilomètres au sud avant de tourner à droite en direction de l’autoroute M5, à l’ouest (en jaune foncé sur la gauche). Elles vont essayer de gagner l’autoroute contrôlée par les rebelles ou au moins les collines qui la surplombent à l’est.
Cette opération a surpris les insurgés. L’opération a été menée tambour battant. Plusieurs centaines de combattants irakiens, soutenus par l’Iran, de la force Qods commandée par Suleiman, ont été transférés de nuit de Lattaquié à Alep pour soutenir l’attaque au sud d’Alep.
On a aussi entendu dire que quelque 3000 combattants supplémentaires du Hezbollah devaient arriver, ce qui porterait à 10 000 le nombre de combattants venant d’Iran, d’Irak et du Liban pour se joindre aux forces du gouvernement syrien. Le Pentagone estime le nombre de soldats russes en Syrie à 3000, beaucoup plus que mon estimation à moi, qui est de 1250.
Il y a quelques mois, je pensais que l’armée syrienne aurait besoin d’une aide extérieure équivalent à une division (soit 15 000 hommes) pour regagner du terrain. Le nombre actuel de soldats envoyés par des gouvernements étrangers a presque atteint ce chiffre. Si, comme le bruit en court, une division blindée du Hezbollah devait rejoindre les forces actuelles, il deviendrait possible d’entreprendre une grande offensive vers Idlib, puis vers la frontière turque. Cela fermerait les grandes lignes de ravitaillement des rebelles, et ce serait probablement le début de la fin pour eux.
Mais cette attaque n’a pas encore commencé. A la place, il y a plusieurs petites opérations autour de Rastan, assistées (video) par des hélicoptères russes, pour désagréger une bulle rebelle, à Lattaquié, dans la plaine du Ghab, puis à Alep. Il faut savoir que la vision tactique et stratégique russe influence maintenant l’ensemble de la campagne. La Maskirovska*, les feintes ici et là avant de frapper ailleurs, font toujours partie des opérations militaires russes de plus grande ampleur. Ce que nous savons de la disposition des forces du gouvernement syrien et de ses alliées est essentiellement ce qu’on veut que nous sachions. Cela peut ou non refléter la véritable situation. Nous ne sommes pas au bout de nos surprises.
Traduction : Dominique Muselet
(*) La Maskirovka (en russe : Маскировка, littéralement : camouflage) est l’art russe de la désinformation militaire.
Elle ne recouvre aucune pratique spécifiquement russe mais trouve son originalité dans l’appréhension des techniques de désinformation comme un tout, depuis le simple camouflage à l’échelon individuel jusqu’au niveau stratégique (Wikipedia).