Ce qu’on lit un peu partout sur l’anniversaire de la mort de Staline montre que 60 ans après, le moment n’est pas encore venu d’une analyse sereine de l’action du bonhome. Et cela sera sans doute encore plus long que pour Robespierre ;
Pourtant on connait assez de détails pour pouvoir apprécier cette action dans ses principales dimensions.
Staline était un dictateur intelligent, animé par un "marxisme sommaire", totalement manichéen, persuadé que la victoire du prolétariat passerait par une épreuve de force avec la bourgeoisie dans laquelle tous les coups seraient permis. Même s’il ne l’a pas dit ouvertement, Staline, contrairement à Marx ("la bourgeoisie a joué un rôle éminemment révolutionnaire") et Lénine qui a lancé la NEP en 21, ne voit rien de positif dans le développement du capitalisme. Même pas l’accumulation primitive du capital !
C’est dans cet état d’esprit qu’il arrive au pouvoir en 27. Il troque la NEP ( qui a donné des résultats appréciables) contre le "socialisme dans un seul pays". C’est alors le temps de l’industrialisation volontariste, basée sur un exode rural (collectivisation) obligatoire. Quand il n’est pas volontaire, le travail est forcé (goulag) et jamais correctement payé. C’est à ce prix que les plans quinquennaux, toujours basés sur l’industrie lourde, produisent des résultats d’autant plus brillants qu’ils sont surmédiatisés.
Toutefois, force est de constater que Staline a mis les moyens en face de ses préoccupations. Dés 34 les plans du char T34 (meilleur engin de 39-45) sont prêts, les rokettes Katouichas sont à l’essai, les avions Yak, Illiouchine, Tupolev etc... Contrairement au rapport Kroutchev qui vise à charger le dictateur des responsabilités de ses courtisans, Staline a dominé la situation militaire de bout en bout. Conscient que l’offensive lui est politiquement interdite, il choisit une stratégie à la Koutouzoz, tablant sur les distances et le climat avant de lancer les troupes de chocs dans la bataille (décembre 41). Perdre beaucoup avant de battre une armée allemande usée et loin de ses bases ! Le pari était risqué mais il fût gagnant, nul ne peut contester la valeur de ce calcul !
Reste qu’on peut, à la lumière de ce que nous vivons actuellement en Chine, se demander si la poursuite de la NEP n’aurait pas, finalement, produit une toute autre situation politique mondiale. Où les rapports de forces auraient été totalement différents de ceux qui ont prévalus en 39......et n’aurait pas conduit à un déchainement aussi mortifère. Mais avec des « si ».......
Dans ces années là , sur la balance des valeurs, la vie ne pesait rien, Staline, qui se disait communiste, aurait, sur ce terrain, dû se distinguer. Il a fini par chausser les mêmes brodequins que les capitalistes. Pour lui, si l’esclavage des africains, le génocide des indiens, le colonialisme était passés comme une lettre à la poste, pourquoi en serait-il autrement pour les millions de « goulaguisés » qui travaillaient gratuitement sur les chantiers des plans quinquennaux. Et, accéssoirement, pour le million de communistes qui furent, pour terroriser le reste de la troupe, passés par les armes en 36,37 et 38 !
Dans un monde de brute, Staline tint son rang. Il déporta les allemands de la Volga, Roosevelt en fit autant avec les japonnais de côte ouest des USA etc... Pour que la politique puisse rester propre, il faut d’abord éviter la guerre !....