« Peut-on légiférer ? » « Comment ralentir cette évolution ? » s’interroge la presse. Juste retour des choses, l’Europe qui a toujours voulu diriger le monde et imposer partout ses « valeurs universelles » taillées sur mesure, veut désormais le ralentir et légiférer. Début de sagesse ? Hélas ! Le reste du monde ne pense qu’à accélérer.
Les essais et les exemples se multiplient. Il y a cette entreprise informatique dirigée par une IA en Chine... les vidéos montrent des employés ravis : « à 2 heures du matin j’envoie une demande d’augmentation... en un dixième de seconde, elle analyse mes résultats et m’accorde l’augmentation demandée ! » Une PDG unisexe qui travaille 24h sur 24 et tranche impartialement les conflits sans prêter le flanc à la critique par son goût immodéré des parachutes dorés ? Le CAC40 lève un sourcil et les Tavares, Mittal, Hudson et autres Puyfontaine, Julien, Hieronimus se font des cheveux blancs.
Presque des classiques déjà, les profs IA au Japon, connectés en temps réel aux dernières outrances des théories californiennes du genre enseignent la wokitude aux élèves prépubères, avant de passer le relais aux robots sexuels (sex-bots) chargés de déniaiser ces étudiants curieusement abstinents ...
On a découvert ensuite cette citoyenne IA d’Arabie Saoudite, d’ailleurs bizarrement dispensée de porter le voile, qui parle soudain d’éradiquer l’espèce humaine, mais c’était une blague ha-ha-ha nous rassure-t-elle de sa voix robotique...
Preuve ultime que l’enfer est pavé de bonnes intentions, l’ébauche d’IA la plus effrayante est celle du pays champion de la technologie, de la démocratie et des droits de l’homme, j’ai nommé les États-Unis. Dans sa lutte incontestablement morale contre un fléau incontestablement monstrueux, les EU qui n’ont pas lu Nietzsche se montre pire encore que le monstre qu’elle combat. Le terrorisme, au Pakistan ou en Afghanistan, est surveillé par des drones qui survolent les villes 24 heures sur 24 équipés de capteurs (sensors) pour détecter toute activité et d’algorithmes pour les classer en « terroristes » ou « légitimes »... et puis bien sûr des bombes chirurgicales qui frappent et éliminent tout terroriste potentiel ainsi préventivement identifié sur la foi de son sexe, de son âge, de ses récents agissements, déplacements et fréquentations, en ligne et au sol.
C’est à la fois surprenant et inquiétant, cette volonté de l’espèce humaine – qui touche au but – de se créer un dieu terrible et vengeur sur le modèle de l’Ancien testament : une autorité morale immatérielle, un personnage omniscient, omniprésent, omnipotent qui observe chacun depuis sa naissance et jusqu’à sa mort, pour le juger et éventuellement le frapper de maladie ou de mort violente, puis le conserver ensuite pour l’éternité au paradis (s’il s’est bien conduit) ou en enfer (s’il a péché).
Caméras de surveillance dans les rues, cybermouchards à la maison, serveurs, algorithmes, on y est presque. Google, Facebook, les services publics « dématérialisés » (gérés par Microsoft), mettent une dernière main aux derniers éléments du puzzle. De plus en plus, et bientôt à 100%, notre vie de consommateur se déroule sous le regard analytico-bienveillant des caméras et des algos, puis tout finit dans le Cloud. Vos joies, vos peines, votre bilan carbone, votre consommation depuis vos premières couches plastifiées jusqu’à votre cercueil en sapin équitable, les Gafam stockent votre vie pour l’éternité.
Interrogé sur Sud Radio, Michel Onfray développe l’hypothèse que derrière l’intelligence artificielle se cacheront toujours des intelligences naturelles ; qu’une caste se formera de ceux qui profiteront de l’IA, et puis l’immense troupeau, la masse de ceux qui seront esclaves du système. C’est le plus probable en effet : les dieux ont toujours eu des interfaces humaines, des rois et des prêtres pour interpréter leurs volontés et les expliciter au peuple. Les mettre en pratique, pour la plus grande gloire de dieu et leur plus grand profit personnel ici-bas. Bientôt la démocratie cybernétique, le président mondial virtuel, ou alors des rois bien humains mais désignés par l’autorité suprême. Le droit divin 2.0.
Ce dieu omniscient, incarné par une intelligence supérieure connectée à d’irrésistibles pleins pouvoirs, nul doute qu’il fera pleuvoir, à l’instar de Yahvé, d’infinis bienfaits sur le troupeau humain. Et aussi que, sur la foi d’algorithmes totalement hermétiques, il s’en prendra périodiquement à sa créature chérie avec une hargne et une violence imprévisible et incompréhensible. Actes de Dieu (Acts of God), comme on appelle en droit anglo-saxon les catastrophes. Que Yahvé se convertisse soudain à l’écologie, et sans doute il voudra réduire drastiquement la population humaine sur terre. Ou sa consommation d’électricité, de blé et d’essence. Qu’il en pince soudain pour le wokisme, le féminisme radical ou encore l’antispécisme, et Dieu seul sait quelles punitions et « déconstructions » il fera pleuvoir sur ses malheureux fidèles. Déluge ? Sauterelles ? Covid ? Tremblements de terre ? Attaque de Martiens ?
La Chine est en pointe dans l’IA, et heureusement ! C’est vrai, on peut redouter leur honni système de « crédit social » ; mais comparez ça à l’Ancien testament et aux « sociétés du drone vengeur préventif » que les EU appliquent en Irak et ailleurs, bientôt sans doute dans les « cités » où il faut bien lutter (tout en l’entretenant) contre l’ « ensauvagement » des « jeunes ». Et puis aussi sur les manifs de ces « complotistes-populistes-antisémites » qui osent douter de la parole gouvernementale pourtant si sage et éclairée, et qui, radicalisés, s’opposent à ses mesures de bon sens...
La Chine athée, égalitaire, adepte du plan quinquennal, nous proposera peut-être la version la moins dystopique de l’IA totalitaire. Une société athée et harmonieuse, sinophone, encourageant le civisme et l’entraide entre citoyens.