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Ressources naturelles : aubaine ou malheur ?

L’Afrique Australe regorge de richesses naturelles. Cela devrait contribuer significativement au développement économique, faciliter la sortie de la misère pour des millions de gens au-dessous du seuil de pauvreté. En est-il ainsi ?

Depuis des décennies, les ressources naturelles – eau, terres fertiles, charbon, gaz, pétrole, cuivre, or, diamants, etc. – n’ont cessé d’être exploitées, mais force est de constater qu’elles ont peu profité à la majorité des gens. Ces ressources, y compris humaines, ont déclenché la convoitise depuis toujours. D’abord la traite des esclaves, puis l’occupation des terres par les colons, enfin, le déferlement des entreprises minières des pays colonisateurs et de leurs alliés. Cela n’a pas été une aubaine pour les peuples concernés, au contraire : elles leur ont infligé beaucoup de malheurs et souffrances.

Les luttes politiques et les armées de libération nationale ont abouti à la conquête des indépendances. Mais la présence d’importantes ressources minières a souvent été un obstacle pour y arriver. Ainsi, la France a retardé l’indépendance algérienne à cause du pétrole. Les intérêts belges sur les mines de la richissime province du Katanga ont provoqué une succession de soubresauts et l’ignoble assassinat de Lumumba et de ses compagnons.

Ce n’est pas un hasard si les indépendances des pays membres de l’ancienne Fédération de la Rhodésie et du Nyassaland, de la Namibie, des colonies de l’Angola et du Mozambique, voire la fin du régime d’apartheid en Afrique du Sud, ont été acquises bien plus tard que dans le reste de l’Afrique, et souvent après des longues luttes armées de libération.

L’appétit étranger pour les richesses de ces pays explique ces blocages. Qui plus est, pendant la guerre froide, le colonialisme et l’apartheid étaient perçus en Occident comme des alliés contre le prétendu danger soviétique. Après les indépendances de l’Afrique australe et la chute de l’apartheid, qu’est-il arrivé ?

Le gouvernement du Mozambique a pu signer à Rome un accord de paix avec la Renamo, parti instrument de la Rhodésie de Ian Smith et du renseignement militaire du Sud-Africain Piether Botha. Les vingt-huit années de guerre ont contraint le pays à se soumettre aux diktats de Bretton Woods et à chasser toute idée de socialisme. L’Angola a également dû affronter une longue et destructrice guerre contre les alliés de l’apartheid, soutenus ouvertement par la première puissance mondiale, les États-Unis. Cependant, les bonnes relations de ce pays avec les compagnies pétrolières occidentales ont finalement pesé sur l’issue du conflit, qui a vu la disparition de Savimbi, le leader de l’Unita.

Il faut reconnaître aujourd’hui que la misère dans laquelle était plongée la majorité de la population a bien diminué. Dans les campagnes, les gens bâtissent de plus en plus souvent des maisons en briques, l’électricité couvre presque tous les districts du pays, et des antennes de télévision surgissent comme des champignons. Quelque dix millions de Mozambicains, sur un total de vingt-trois millions, possèdent un mobile, les gens s’habillent et sont chaussés. À présent, la pauvreté en ville est plus frappante qu’à la campagne. Toutefois, le mieux-être rural n’est pas la conséquence de l’exploitation du sous-sol, mais du simple fait qu’avec la paix retrouvée le paysan a pu reprendre le travail. Enfin, un nouveau scandale a récemment éclaté dans le pays : une compagnie qui exploite le gaz a voulu vendre une partie de ses actions à l’extérieur, de façon à ne pas payer les impôts au pays ! Une bagatelle de quelques centaines de millions de dollars, voire des milliards !

Tout n’est pas sombre, bien entendu. En Angola, grâce aux rendements du pétrole et des diamants, on a pu reconstruire les villes du Centre et du Sud, détruites pendant la guerre, de même que les infrastructures indispensables au développement économique. Les ressources minières et l’exportation de viande bovine ont permis au Botswana de redistribuer suffisamment pour que sa population vive dans une certaine aisance. De progrès sont également visibles en Tanzanie et en Zambie, ainsi qu’au Zimbabwe où la levée des sanctions européennes et britanniques s’impose désormais.

Moins réjouissante, la situation au Swaziland où le charbon est épuisé – tout est parti au Japon – et où le pays n’a même pas profité de sa valeur ajoutée. En Afrique du Sud, un apartheid économique demeure pour la majorité des non-Blancs et même des petits Blancs. Nul ne voit la lumière au bout du tunnel. Conséquence, les conflits sociaux et la violence ne font qu’augmenter. Où s’arrêteront-ils ? Les massacres des mineurs de platine et des paysans qui occupent des terres sont plus qu’inquiétants.

En l’état actuel des choses, on ne peut avoir qu’une conclusion : les populations d’Afrique australe souffrent encore trop des malheurs induits par la convoitise sur les ressources naturelles pour se réjouir de leur abondance.

La lutte continue !

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