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Quand le pétrole finance la révolution bolivarienne / Revue de presse - Courrier international





Courrier international, 5 avril 2006, revue de presse.


Profitant des cours élevés, le président vénézuélien Hugo Chávez force les compagnies pétrolières à renégocier leurs contrats en faveur du pays producteur. Au grand dam de la Maison-Blanche, la richesse générée sert à subventionner la révolution bolivarienne, une alternative au libéralisme prôné par George W. Bush.

"Le Venezuela a fait un pas de plus pour obtenir des conditions de partage des revenus du pétrole plus favorables de la part des grandes compagnies qui exploitent les gisements du pays", constate le quotidien américain des affaires The Wall Street Journal. Ainsi, Caracas vient de reprendre le contrôle "de deux zones d’extraction, l’une exploitée par le français Total et l’autre par l’italien ENI".

"Nous avons agi de cette façon car ces deux entreprises refusaient d’appliquer nos lois", s’est justifié le ministre de l’Energie vénézuélien, Rafael Ramà­rez, le 3 avril, cité par Business Week. "Elles refusaient que nous contrôlions nos ressources et ne payaient pas les taxes et les dividendes." L’hebdomadaire américain analyse le changement politique et économique qui se produit au Venezuela. "Cet acte reflète le nouvel équilibre des pouvoirs entre compagnies pétrolières et pays producteurs. Dans les années 1990, Caracas avait supplié les géants du secteur de venir moderniser son industrie spécialisée et d’exploiter son or noir, dont les cours étaient alors au plus bas". Tout cela avait bien sûr donné lieu à des contrats particulièrement avantageux pour les grandes compagnies. Mais, depuis son arrivée démocratique au pouvoir, "Hugo Chávez n’a eu de cesse de renégocier ces accords", qu’il juge trop défavorables à son pays.

Or, avec un baril de brut aux alentours de 65 dollars, le président vénézuélien est désormais en position de force, précise Business Week. Ramà­rez ne l’a d’ailleurs pas caché : "Les compagnies a qui un partage en faveur de notre pays ne plaît pas peuvent partir." Mais elles ont tout intérêt à rester, reconnaît l’hebdomadaire. "A partir de 2018, elles encaisseront 40 % des revenus du pétrole produit. Et, d’ici là , elles continueront à toucher de l’argent et à être remboursées de leurs investissements."

Le jeu en vaut la chandelle au vu des réserves du Venezuela, que Hugo Chávez, dans une interview à la BBC reprise par The Guardian, qualifie "de plus grandes réserves de pétrole du monde. Nous avons du pétrole pour deux cents ans." C’est probablement exact, note Business Week, "en ajoutant aux 80 milliards de réserves connues les 250 milliards de barils de pétrole lourd brut que le Venezuela semble posséder". De fait, avec ce mode de calcul, même l’Arabie Saoudite n’est plus de taille en matière de réserves d’or noir.

De sources américaines, note The Guardian, "Caracas possède 90 % des réserves mondiales de brut lourd". Mais cette huile est "de faible qualité car elle a une forte teneur en soufre. Son exploitation n’est économiquement rentable que si le baril se négocie à environ 40 dollars", précise le quotidien londonien. Qui revient alors sur la proposition de Hugo Chávez : l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) doit fixer le prix du baril à 50 dollars. "Cinquante dollars le baril, c’est un prix juste, pas un prix élevé", affirme-t-il. De fait, ce tarif est inférieur d’environ 15 dollars au cours mondial actuel, ce qui serait une économie substantielle pour les pays consommateurs qui signeraient un accord avec le Venezuela.

Mais pour tenir une telle offre, Caracas devra convaincre ses partenaires de l’OPEP de réviser le calcul des réserves officielles de pétrole vénézuélien, ce qui reviendrait à autoriser le pays à accroître massivement sa production, considère The Guardian. Le journal ne croit pas au succès de l’initiative, bien que Chávez accueille une réunion de l’OPEP à Caracas en mai 2006. "Certains pays s’opposeront à l’idée d’un tarif fixe sur le marché mondial du pétrole bien inférieur au niveau actuel. D’autres seront mécontents de voir leur influence en matière de prix mondiaux du pétrole diminuer au profit du Venezuela."

Il est néanmoins évident que Washington mettra tout son poids dans la balance pour faire échouer le plan vénézuélien. Car la façon dont Hugo Chávez utilise son argent n’a pas l’heur de plaire à la Maison-Blanche. "Le président vénézuélien dépense des milliards de dollars en subventions et aides pour l’étranger, exportant ainsi un modèle de gouvernement solidaire, alternatif à celui prôné par l’administration Bush", analyse The New York Times. "Avec des revenus du pétrole en hausse de 32 % l’année dernière, Caracas a pu consacrer près de 3 milliards de dollars à l’aide de voisins plus pauvres ou libéraux, comme le Mexique, le Brésil, Cuba ou même les miséreux du Bronx de New York !" Or, 3 milliards de dollars, c’est mieux que les 2 milliards d’aide que Washington alloue chaque année à l’Amérique latine pour des programmes de développement et de lutte contre la drogue.

"Chávez s’est construit un pouvoir politique reposant sur la dénonciation de ce qu’il nomme "l’impérialisme américain’ en Amérique latine. Il est en train de devenir le nouveau Castro, plus dangereux même que Fidel car Chávez a, lui, les ressources et les moyens de ses ambitions et de son programme", analyse le New York Times. Plus de 30 pays, dont certains aussi éloignés du Venezuela que l’Indonésie, bénéficient aujourd’hui de l’argent du pétrole vénézuélien.

Washington a réagi comme souvent en orchestrant une campagne de presse anti-Chávez, et plusieurs articles récents signés d’experts ou d’analystes proches de l’administration Bush ou de l’opposition vénézuélienne ont décrié "le gaspillage des ressources nationales au détriment des citoyens vénézuéliens". The New York Times reconnaît cependant que "le budget que le gouvernement Chávez consacre cette année aux programmes sociaux atteint 10 milliards de dollars, contre seulement deux l’année dernière."

Au final, considère le quotidien, la politique de Chávez peut déplaire mais elle porte ses fruits en matière de pouvoir du leader bolivarien, qui est en passe de prendre la place de Castro parmi les cauchemars des Etats-Unis. Quant aux grandes compagnies pétrolières, résume Business Week, elles apprennent à leurs dépens les conséquences de la loi du plus fort et des aléas de l’offre et de la demande.

Philippe Randrianarimanana et Eric Glover


 Source : www.courrierinternational.com


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Démocratie et contrôle des changes : L’exemple vénézuélien, par Benoît Borrits.

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Discours du Président Hugo Chavez au IVe Sommet des peuples de l’Amérique à Mar del Plata.

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 Photo : Chavez Haora www.geocities.com/chavezahora


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