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Prise d’otage(s).

On attend le GIGN et les forces de l’ordre d’un instant à l’autre.

Des centaines, non des milliers de salariés sont pris en otage.

Partout, dans tout le pays, des gens sont contraints de baisser la tête : ils ont le sentiment d’être impuissants. Ils sont impuissants, car les preneurs d’otages ne leur laissent aucun choix. C’est comme ça, et pas autrement. Autant faire avec : toute la société est prise en otage.

Ils doivent donc faire profil bas : les preneurs d’otage ne rigolent pas. Ils ont le doigt sur la gâchette, et toute rébellion pourra se solder par de graves ennuis.

C’est une journée noire. Une journée ?

Non, ça dure depuis bien plus longtemps que cela : depuis quand, au juste ? On ne sait pas, on ne sait plus. Mais sans doute depuis au moins le début des années 80. A l’époque, un gentil monsieur s’est fait passer pour ce qu’il n’était pas : quelqu’un « de gauche ». Il a été élu sur des promesses claires et précises. Certains s’en souviennent : selon les journalistes (des gens sérieux, qui ont pignon sur rue et disent donc toujours la vérité, tellement sérieux d’ailleurs qu’ils ne se trompent jamais et n’ont donc jamais besoin de s’excuser), « les chars de l’armée rouge » étaient « stationnés dans des entrepôts près de Paris » et attendaient de « défiler sur les Champs-Elysées ». Le Franc allait « s’effondrer » sous la pression de « l’idiot utile du Kremlin ». Dieu merci, l’URSS s’est depuis effondrée, tout comme la gauche française, donc ça va mieux depuis, n’est-ce pas ?

Ben non, il paraît que pas vraiment. Ca empire : ce pays est devenu irréformable et ingouvernable.

Donc, depuis cette époque, et le tournant (de la rigueur) qui fut pris en 1983, il n’est plus permis d’espérer qu’une chose pour ces millions de français pris en otage : ne pas trop déplaire à leurs maîtres, histoire d’espérer rentrer un peu plus longtemps encore la tête dans les épaules, et passer à côté du couperet, de l’exécution (sociale) sommaire que constitue le licenciement, et/ou le déclassement. Nous parlions de mort, tout à l’heure : c’est véritablement une menace de mort qui pèse sur les Français. Les preneurs d’otage ne rigolent pas, nous l’avons dit. Ils ne promettent rien de moins que la mort sociale à leurs victimes si celles-ci devaient d’aventure se rebeller.

La mort sociale ? C’est le licenciement, la dégringolade du compte en banque, les ennuis qui arrivent, les huissiers, et, au bout du bout, le statut peu enviable de sdf. Remarquez, ça marche aussi avec ceux qui ne sont pas salariés : retraités, déjà chômeurs, précaires etc.

Parlons-en donc, de ces victimes des preneurs d’otage. Ce sont ces millions de Français que l’on assomme à longueur de temps. C’est cet étudiant qui rate ses études parce qu’il doit aller bosser à Mc Do, car ses APL ont diminué, que les places en Cité U sont inexistantes par rapport à la demande et que le prix des logements du privé, non régulé, a explosé. C’est ce salarié de Carrefour qui, à trente ans d’ancienneté, ne touche pas plus de 1500 euros et à qui l’on essaie d’expliquer, en vain, que les actionnaires n’ont pas eu assez des 400 millions de dividendes qui leur ont été versés avec l’argent des contribuables, via le CICE, à tel point que sa prime d’intéressement qui était habituellement de 600 et quelques euros, sera ramenée à 50. Sans doute pour l’intéresser et le motiver un peu plus. Vous me direz, 50 euros et un emploi sous payé, c’est toujours mieux que pas d’emploi du tout non ? Vous n’avez pas tort : attendez juste la fin de l’année, vous aurez le beurre, l’argent du beurre, et le postérieur de l’actionnaire car les licenciements sont aussi prévus dans le plan de transformation. Les victimes ? C’est aussi et surtout ce couple de retraités modestes, qui au terme d’une vie de labeur, verra sa retraite fondre comme neige au soleil à cause d’une réforme pas assez bien expliquée.

Car si les retraités (ou tout autre fainéant/lâche/cynique de leur acabit) sont dans la rue, c’est bien sûr parce que le gouvernement n’a pas assez fait preuve de pédagogie. C’est important, la pédagogie : d’une main, il faut expliquer aux gueux pourquoi on les rend encore plus gueux, pendant que de l’autre, on supprime l’Impôt Sur la Fortune, impôt injuste s’il en est, car il fait fuir les investisseurs. Tout le monde sait ça, regardez le nombre d’exilés fiscaux fortunés qui sont revenus au bercail depuis la suppression de cet impôt confiscatoire.

Les victimes ? Il y en a beaucoup, mais les preneurs d’otage se montrent inflexibles dans les négociations. Ils parlent de dialogue social, mais font la sourde oreille à toute demande qui sort de leur agenda  : il faut aller vite, parce que le pays en a besoin. Les réformes, on ne sait pas trop ce que c’est, mais on est sûrs d’une chose : c’est nécessaire pour la compétitivité du pays, et surtout c’est indispensable pour les actionnaires.

Et ne nous parlez pas de popularité après tout ça : désormais, ceux aux manettes s’en foutent, de leur côte de popularité. Ils sont là pour libérer les énergies, pas pour faire carrière. La carrière, ils laissent ça aux vieux éléphants et autres dinosaures. Aux hommes politiques de l’ancien temps.

Nos nouveaux maîtres, empreints de cette modernité qui fait défaut aux anciens, n’ont pas peur de la baisse de leur côte de popularité. Ils ne gouvernent pas avec les sondages, ni même malgré eux. Que leur importe ? A la fin de leur mandat, après que le job sera fait, ils auront largement de quoi aller faire carrière ailleurs : en remerciement, la place est déjà prête dans une grande entreprise, quelque part dans un petit conseil d’administration douillet, ou grâce à une tournée de conférences payées à un tarif à la hauteur de leur valeur, c’est à dire plusieurs centaines de milliers d’euro par an.

Aujourd’hui, les politiques, et le Politique, c’est has-been. Il faut dépasser tout ça, en marchant rapidement de préférence, car le DRH en cravate qui dirige la France n’est ni de droite, ni de gauche. Il est du côté des gagneurs, de ceux qui réussissent, et qui sont donc quelqu’un.

Il laisse le soin à ceux qui ne sont rien de s’agiter vainement pour des privilèges qui sont dépassés par la nécessaire modernisation de notre pays.

Bon, assez parlé. J’entends la police et les troupes d’assaut, en bas. Il était temps : les preneurs d’otage sont de plus en plus menaçants. Ils viennent de hurler à travers la fenêtre qu’ils ne faibliraient pas, qu’ils étaient « déterminés à aller jusqu’au bout ». Je crains le pire.

Dieu nous vienne en aide.

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Déposséder les possédants - La grève générale aux « temps héroïques » du syndicalisme révolutionnaire (1895-1906)
CHUECA, Miguel
Textes de Édouard Berth, Henri Girard, Jean Jaurès, Hubert Lagardelle, Paul Louis, Fernand Pelloutier, Émile Pouget, Georges Sorel et Henri Van Kol Réunis & présentés par Miguel Chueca La grève générale exprime, d’une manière infiniment claire, que le temps des révolutions de politiciens est fini. Elle ne sait rien des droits de l’homme, de la justice absolue, des constitutions politiques, des parlements ; elle nie le gouvernement de la bourgeoisie capitaliste. Les partisans de la (…)
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Il y a un sacré paquet de connards à Cuba - comme partout. Mais la différence à Cuba, c’est qu’ils ne sont pas au pouvoir.

Jose G. Perez

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