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Pendant que Trump prépare son putsch, l’Establishment démocrate se voit cohabiter avec les républicains et attaque... la Gauche !

Tandis que les préparatifs putschistes de Trump vont désormais bon train, les États-Unis commencent à faire connaissance avec les prémices d’une situation de double pouvoir aussi inédite que prometteuse de grands chambardements. En effet, fort de l’appui de 72 millions de citoyens qui ont voté pour lui, Trump, qui tient toujours le parti républicain d’une main de fer, montre qu’il se fiche éperdument des soucis légalistes de ses adversaires démocrates, et préfère organiser sa propre “légalité” étatique fondée non pas sur des vœux pieux démocratiques mais sur des « arguments » bien plus musclés et matériels. En somme, pendant que ses adversaires pérorent sur « la force de la démocratie américaine », Trump est aujourd’hui en train d’achever ses préparations dictatoriales poursuivies d’ailleurs fébrilement durant toute sa présidence depuis son élection en 2016...

Cependant, force est de constater que même aujourd’hui quand les intentions antidémocratiques de Trump crèvent les yeux, les grands médias internationaux, ceux de France en tête, peinent à comprendre ce qui se passe aux États-Unis. Et pourtant, le Caligula fascisant américain qu’est Donald Trump n’a jamais caché ses intentions dictatoriales. Il a toujours tout fait – en paroles et en actes – pour dévoiler ses ambitions clairement autoritaires sinon fascistes et nous avertir qu’il est sans scrupules, qu’il ne reculera devant absolument rien afin de rester cramponné au pouvoir le plus longtemps possible...(1)

Pourquoi donc cet aveuglement qui dure déjà depuis quatre ans ? Et pourquoi cette tendance au suicide de la vieille démocratie (bourgeoise) étasunienne ? La réponse à toutes ces interrogations cruciales pourrait se trouver dans ce que pensent et font actuellement les plus illustres promoteurs de cette démocratie (bourgeoise) étasunienne, et en premier lieu son Establishment démocrate. Alors, qu’est ce qui semble préoccuper le plus les dirigeants du parti démocrate au lendemain des élections présidentielles gagnées par leur candidat Joe Biden ? Est-ce le refus de Trump de reconnaître sa défaite ? Sa volonté de rester cramponné au pouvoir ? Son refus d’assurer une transition pacifique et “civilisée” ? Ses projets dictatoriaux ? Ou même la conjonction des crises sanitaire, économique, sociale et politique de dimension historique que doit affronter le nouveau Président du pays ?

Non, aussi incroyable que cela puisse paraître, les dirigeants du parti démocrate – ainsi que les grands médias qui les soutiennent – ne se montrent pas préoccupés en toute priorité par tous ces problèmes gigantesques parce qu’ils semblent... avoir d’autres chats à fouetter : attaquer, même violemment, la gauche, la rendant responsable de l’échec du parti aux élections du 3 novembre pour le renouvellement de la Chambre des représentants et du Sénat !

Évidemment, ce n’est pas un hasard si ceux qui ont lancé cette agression en règle contre la gauche sont les transfuges républicains, comme l’ex-gouverneur de l’Ohio John Casich, probablement destinés à jouer les premiers rôles dans le futur gouvernement de Joe Biden afin d’incarner l’ouverture au parti républicain tant souhaitée par l’Establishment démocrate (1). Pour tout ce beau monde soit-disant "centriste", la raison de la défaite cuisante des démocrates serait l’"extrémisme" de la gauche du parti incarné dans ses propositions programmatiques telles que le Green New Deal, la Medicare for All (l’Assurance maladie pour tous), l’imposition des ultra-riches ou le desinvestissement dans la police.

Il n’est pas surprenant que la vérité soit diamétralement opposée à celle évoquée par les – très droitiers – accusateurs d’Alexandra Ocasio-Cortez et des ses camarades. La preuve ? Tous (100%) les candidats démocrates qui soutenaient la “Medicare for all” et presque tous (99%) de ceux qui défendaient le Green New Deal ont été élus (!) tandis que l’ensemble des vaincus étaient contre. Et surtout, toutes les jeunes députées du célèbre “Squad” (Alexandria Ocasio-Cortez, Rashida Tlaib, Ilhan Omar et Ayanna Pressley) ont ete réélues triomphalement, malgré la féroce opposition de Wall Street ainsi que de l’Establishment tant républicain que démocrate, avec des scores atteignant 70% et plus de voix. D’ailleurs, elles sont désormais rejointes au Parlement par de nouveaux élus socialistes, dont la très radicale agitatrice Afro-américaine Cory Buch élue dans le très Républicain État de Missouri avec l’écrasante majorité de 79% de voix ! C’est ainsi que pour la première fois dans l’histoire du pays, c’est maintenant que des jeunes élus socialistes radicaux pourront et vont former un groupe parlementaire bien consistant, combatif et promis à un grand avenir...

Nous voici donc devant la raison profonde de toutes ces comportements et autres agissements à première vue totalement incompréhensibles de l’Establishment démocrate et des grands médias étasuniens et internationaux. Ce n’est pas qu’ils sont aveugles, qu’ils ne voient pas venir la catastrophe imminente. C’est plutôt qu’ils ne veulent pas voir, qu’ils préfèrent ne pas en parler ouvertement – malgré leur panique à peine dissimulé – car il s’agit de protéger coûte que coûte la maison commune (bourgeoise et capitaliste), bâtie patiemment depuis plus de deux siècles par les élites du bipartisme républicain et démocrate ! Une maison commune qu’ils espèrent toujours sauver au nom de la communauté de leurs intérêts de classe, grâce, entre autres, aux avances de Biden à « son ami de longue date », le président du Sénat et bras droit de Trump dans tous ses manœuvres antidémocratiques et anticonstitutionnelles Mitch McConnell.

Vue sous cet angle, l’attaque de l’Establishment démocrate contre la gauche n’a rien d’incompréhensible car, indépendamment du succès ou de l’échec final des agissements putschistes de Trump, l’ennemi à abattre de tout ce beau monde sera toujours Alexandria Ocasio-Cortez et ses camarades à la tête du grand mouvement social de la jeunesse radicalisée, inspiré et façonné par cette « bizarrerie » qu’est le sénateur indépendant et socialiste Bernie Sanders. Car seule cette jeune gauche radicale voudra et pourra se mettre à la tête du mouvement de résistance aux projets et aux agissements antidémocratiques et putschistes de Trump. Comme d’ailleurs, seule cette même gauche radicale voudra et pourra s’opposer par tous les moyens à la cohabitation des démocrates et républicains, incarnée par le gouvernement Biden-Mitch McConnel tant souhaité par Wall Street et les élites bourgeoises du pays.

Et les gauches européennes dans tout ca ? Est-ce qu’elles continueront à ne pas bouger, à ne pas manifester la moindre solidarité en actes à tous ceux et celles qui luttent plus que jamais pour nous aussi, pour le compte de toute l’humanité et de la planète. Ou, comme le disait si bien Che Guevara, « se battent dans le plus important de tous les combats, parce qu’ils vivent dans le ventre de la bête i » Jusqu’à quand camarades ? Ça urge et vous aurez tout à y gagner...

Notes

1. Voir notre article « Trump refusant de s’en aller, le spectre de la guerre civile plane désormais sur les États-Unis en crise paroxystique ! : https://www.cadtm.org/Trump-refusant-de-s-en-aller-le-spectre-de-la-guerre-civile-plane-desormais-sur

Et aussi, deux articles écrits en mars et en octobre 2019, aux titres éloquents : « Les États-Unis un pas avant la guerre civile » (https://www.cadtm.org/Les-Etats-Unis-un-pas-avant-la-guerre-civile), et « Le spectre de la guerre civile hante déjà les États-Unis d’Amérique » (https://www.cadtm.org/Le-spectre-de-la-guerre-civile-hante-deja-les-Etats-Unis-d-Amerique)

En général, nos articles depuis au moins deux ans, ne se contentaient pas d’avertir sur les projets antidémocratiques et dictatoriales de Trump, mais décrivaient souvent en détail ce qu’on voit se dérouler actuellement aux États-Unis devant nos yeux...

2. L’affaire de l’opération dite “Lincoln Project” est très emblématique de la volonté des dirigeants démocrates de préparer la cohabitation avec les républicains. Financé par le parti Démocrate (plus de 70 millions de dollars), le Lincoln Project qui regroupait quelques personnalités dissidentes du parti républicain, avait pour mission d’ouvrir des brèches dans la base électorale de ce parti. Malgré sa promotion par les grands médias proches des démocrates, son échec a été patent : les républicains qui ont voté pour Trump ont été en 2020 plus nombreux qu’en 2016 (93% contre 90%)) ! Ce qui n’a pas empêché ses transfuges républicains d’attaquer violemment, avec l’aval des dirigeants Démocrates, la gauche du parti dont le péché a été d’avoir contribué comme nul autre à la victoire de Biden...

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