Malgré le tollé général contre les raids aux drones, le président américain, Barack Obama, a défendu l’usage de ces engins militaires, qu’il a qualifiés de défense juste pour cibler les extrémistes, prétendant que ces attaques sont menées lorsqu’on s’est rassuré de ce qu’elles ne coûtent pas la vie aux civils.
Pourtant, toutes les instances des droits de l’Homme considèrent ces armements comme un instrument pour semer la terreur et massacrer les civils. Ainsi, l’ONU a demandé aux États-Unis de coopérer avec la commission d’enquête de cette organisation sur le rôle des drones dans l’assassinat des civils tandis que Human Rights Watch a jugé le massacre des civils en Afghanistan, au Pakistan, au Yémen et en Somalie la manifestation flagrante de la violation des droits de l’Homme.
Il est vrai que les drones, ces armes les plus modernes et les plus controversées de l’arsenal étasunien, furent d’abord utilisées pour des vols d’espionnage et de reconnaissance, se transformant au fur et à mesure en une arme létale, équipée de missiles pour assassiner les humains. Les victimes des attaques aux drones sont plutôt des civils que des extrémistes, contrairement à ce que prétend le gouvernement étatsunien. Le Pakistan compte déjà, quelques milliers de morts civils ; le bilan est presque le même en Somalie, au Yémen et en Afghanistan sans oublier certaines régions de l’Afrique du Nord.
L’administration étatsunienne reste toutefois déterminée à utiliser ces armements. Elle semble même plus audacieuse après la mort d’au moins quatre citoyens américains, à la suite de ces attaques aux drones, qu’elle a reconnues impunément. Prônant, auparavant, une politique d’ambiguïté envers l’usage des drones, les autorités étasuniennes ont fini par assumer la responsabilité de la mort de ces derniers et d’autres civils. Or, sans se soucier désormais de la révélation de leurs méthodes inhumaines, elles peuvent procéder, plus aisément, à de telles attaques aux drones qu’elles qualifient, d’ailleurs, de « juste défense ».
Cette démocratie si parfaite fabrique elle-même son inconcevable ennemi, le terrorisme. Elle veut, en effet, être jugée sur ses ennemis plutôt que sur ses résultats. L’histoire du terrorisme est écrite par l’État ; elle est donc éducative. Les populations spectatrices ne peuvent certes pas tout savoir du terrorisme, mais elles peuvent toujours en savoir assez pour être persuadées que, par rapport à ce terrorisme, tout le reste devra leur sembler plutôt acceptable, en tout cas plus rationnel et plus démocratique.
Guy DEBORD