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"France et AREVA au Niger : état des lieux"
Assis sur un trésor, l’uranium, qui en cinq ans a vu plus que décupler sa valeur marchande, le Niger tente par tous les moyens de rééquilibrer ses rapports avec le géant français Areva.
Mais ce bras de fer politico-économique ne va pas sans mal et sans frictions avec la France, l’ancienne puissance coloniale.
Car à la différence d’autres pays africains où la France est économiquement présente via des entreprises, le Niger, troisième producteur mondial, représente un enjeu hautement stratégique : un tiers de l’électricité d’origine nucléaire (environ 75% de la production totale) produite par EDF (Electricité de France) dépend de l’uranium nigérien !
Pour Paris il faut sécuriser cet approvisionnement essentiel tout en préservant ses relations avec son ancienne colonie à laquelle elle fournit une assistance budgétaire d’environ 8 millions d’euros par an.
Pour Areva, numéro un mondial du nucléaire civil, il s’agit de pérenniser cette importante source de minerai qui constitue un argument de poids pour vendre ses réacteurs EPR en garantissant le combustible nécessaire. D’où aussi la volonté de diversifier ses approvisionnements, notamment avec le rachat récent de canadien Uramin (présent en Afrique du sud, Namibie et République Centrafricaine)
Et pour le Niger, avant-dernier pays le plus pauvre au monde, l’objectif est d’augmenter logiquement sa part de ce gateau qui grossit, notamment en diversifiant ses partenaires, en particulier des compagnies chinoises agressives déjà sur le terrain. Créée en juin, la Somina prévoit ainsi 700 tonnes d’uranium à partir de 2009.
"Nous n’avons rien contre la concurrence. Il y a de la place pour tout le monde", assure à l’AFP un responsable local d’Areva, premier employeur privé du pays.
Elément déclencheur probable de la crise : l’explosion soudaine des cours mondiaux qui sont passés de 7 dollars la livre en 2002 à 85-90 dollars en juin dernier, avec un pic à 137 dollars sur le marché spéculatif "spot" (entre 5 et 10% des transactions mondiales). De quoi aiguiser les appétits.
Malgré ou à cause de 40 ans de présence, Areva s’est ainsi trouvé ces derniers mois prise dans une zone de turbulences qui a culminé avec l’expulsion en juillet de son directeur local Dominique Pin. Du jamais vu dans les relations bilatérales, au point que quelques manifestations anti-françaises ont même été autorisées à Niamey.
Le ton a monté au point que Paris a dû envoyer en urgence début août à Niamey son secrétaire d’Etat à la coopération Jean-Marie Bockel, pour tenter de recoller les morceaux.
Deux jours plus tôt, Areva et le Niger signaient discrètement en France de nouveaux accords pour 2007, prévoyant un relèvement sensible du prix de l’uranium : 40.000 FCFA (60,98 euros) le kilo contre 27.300 jusque là .
"Niger et Chine : les objectifs"
Le Niger a accordé jeudi un nouveau permis de prospection et d’exploitation d’uranium à une société chinoise dans la région d’Agadez (nord), théâtre du conflit touareg, a appris l’AFP vendredi de source gouvernementale.
Situé à Azelik (nord), ce nouveau site uranifère a été accordé à la Société des mines d’Azelik (Somina), créée le 5 juin 2007 par le Niger et des partenaires chinois, selon un communiqué du conseil des ministres.
Le permis d’Azelik comprend deux études, la première sur les impacts de l’exploitation de l’uranium sur l’environnement, la seconde sur la faisabilité et la rentabilité du gisement, indique le communiqué.
Aucun détail n’a été cependant été fourni sur le montant de la transaction non plus que sur les réserves estimées du site d’Azelik.
L’octroi de ce permis intervient quatre jours après la pose à Niamey de la première pierre d’un second pont qui va être construit par la Chine sur le fleuve Niger pour un montant de plus de 27,3 millions d’euros.
Pékin vient également de faire un don de 3 millions d’euros au Niger pour la construction de deux écoles et la rénovation du stade de la capitale.
Depuis 2006, la Chine a renforcé ses liens économiques avec le Niger, où elle prospecte de l’uranium à Teguidan Tessoumt, dans le nord du pays en proie depuis février à l’insécurité en raison d’une résurgence d’une rébellion touareg.
Officiellement, Niamey attribue cette insécurité à des "bandits" et des trafiquants de drogue.
La prospection a été suspendue depuis l’enlèvement le 6 juillet par des rebelles touareg d’un employé chinois de la China Nuclear Engineering and Construction Corporation (CNEC), propriétaire du site de Teguidan Tessoumt.
Teguidan Tessoumt est un des deux premier permis de recherches accordés à la Chine et la production doit y débuter en 2010.
Niamey a déjà délivré 29 permis de recherches et d’exploitation d’uranium à des compagnies chinoises, anglo-sud africaine, anglo-américaine, australo-maltaise, canadienne et russe.
Tous ces permis sont localisés dans le nord désertique, où le groupe français Areva, numéro un mondial du nucléaire civil, exploite depuis 40 ans deux gisements d’uranium.
"L’expulsion de Dominique Pin"
Dominique Pin, le directeur local d’AREVA au Niger a été expulsé du Niger le 26 juillet dernier, se voyant reprocher des liens avec le Mouvement des Nigériens pour la Justice. La MNJ est un groupe de Touaregs qui habitent dans le nord du Niger. Cette zone sous souveraineté du Niger depuis l’indépendance est convoitée par la Libye pour ses richesses souterraines notamment en Uranium.
Depuis 40 ans, AREVA exploite les mines d’Uranium et a su développer une stratégie d’arrosage systématique des lieux de pouvoirs afin de garder le monopole et fixer ses conditions dans ses exploitations minières (tarifs, quantités, emplois). Il est important de savoir qu’AREVA représente après le gouvernement le premier employeur du Niger. Sa puissance économique et politique est donc en proportion de cette importance. Au travers de cette entreprise c’est bien sur la France en tant qu’actionnaire principal qui définit la politique d’AREVA au Niger.
Que s’est il donc passé pour que le Niger expulse le directeur de cette entreprise si puissante et si étroitement liée au gouvernement français ?
Depuis quelques années, la Chine cherche à s’approvisionner en minerai africains pour financer son économie et sa forte croissance. La Chine a donc ciblé un certains nombre de pays africains afin de garantir son approvisionnement. Cependant, ce qui différencie principalement les Chinois des Français réside dans la façon de s’implanter dans le pays. En effet, la France depuis la fin de la colonisation installe ses entreprises et arrose l’ensemble des acteurs politiques et traditionnels. Ce financement peut se faire soit directement, soit au travers de constructions publiques ou privées. Les entreprises françaises emploient de la main-d’oeuvre locale exceptée pour les postes de direction qui sont toujours détenues par des français expatriés. Les Chinois ont eux une approche différente. Ils financent bien sur leur installation mais en traitant principalement avec le pouvoir central. Dans le cas du Niger, l’installation a également était accompagnée par des livraisons d’armes au gouvernement nigérien. La main-d’oeuvre est constituée presque exclusivement d’expatriés et cela à tous les échelons.
Dans le nord du Niger, le gouvernement Français et son intermédiaire AREVA ne voient pas d’un très bon oeil l’arrivée des chinois dans une situation de monopole qui dure depuis 40 ans. Certains Touaregs ont le même point de vue car les Chinois ne leur versent pas les mêmes "dividendes" que les Français. A cela, s’ajoute des problèmes internes au Niger relatifs à la répartition des pouvoirs entre les différents groupes de population et leur prise en compte dans l’espace public national.
Le MNJ a donc pris les armes pour réclamer une meilleure intégration des Touareg dans l’armée, les corps paramilitaires et le secteur minier local. Le MNJ dénonce les sociétés chinoises comme aidant militairement, par des livraisons d’armes, l’armée. Étrangement, rien n’est dit sur l’action de la France depuis 40 ans par ce mouvement.
"Le putsch militaire"
Le président Tandja a été renversé par un coup d’Etat ce jeudi 18 février. Le chef de l’Etat a été emmené par des soldats insurgés dans une caserne située à l’extérieur de la capitale Niamey. Les ministres du gouvernement seraient, pour leur part, retenus non loin du palais présidentiel.
Les dirigeants du putsch ont annoncé dans la soirée qu’ils suspendaient la Constitution. L’annonce a été lue à la télévision publique nationale par le colonel Abdoulakarim Goukoye qui se présente comme le porte-parole des insurgés.
Le porte-parole des putschistes a annoncé la constitution d’un Conseil supérieur pour la restauration de la démocratie, le CSRD.
Les noms commencent donc à se confirmer. Il y a trois militaires, trois colonels, le colonel Pelé, de son vrai nom Djibrilla Hima Hamidou, commandant de la zone militaire de Niamey, le colonel Harouna Adamou, commandant de la compagnie d’appui, c’est-à -dire des blindés. Et enfin le colonel Goukoye Abdul Karim, chef du renseignement militaire, jusque-là porte-parole de l’armée c’est lui le porte-parole du Conseil supérieur pour la restauration de la démocratie.
Le régime de Tandja avait, semble-t-il, fait monter les enchères avec le nouveau prétendant chinois…
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