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Musique classique et capitalisme

Le 1er juillet 2009, je postai la note suivante sur mon blog :

« Ce 30 juin, j’écoutais " L’invité classique " , l’émission d’Olivier Bellamy sur Radio Classique.
Bellamy est un très fin connaisseur de la musique et des musiciens classiques. Son émission est un régal. La parole des invités n’est pas coupée toutes les sept secondes, ils peuvent s’exprimer en toute liberté et Bellamy les aide subtilement à livrer la part d’eux-mêmes qu’ils veulent bien livrer. C’est à son micro que, pour la première fois, je crois, Jean-Claude Casadesus a confié que, dans les années soixante, il avait accompagné en studio Sheila, qui plus est aux percussions.
Hier, Bellamy recevait à Moscou le jeune chef d’orchestre ossète Tugan Sokhiev, à l’occasion d’un déplacement de l’orchestre du Capitole de Toulouse en Russie. Il m’a été donné d’assister récemment à un concert dirigé par Sokhiev : c’est un grand, et Bellamy le considérait comme tel. Ce qui ne l’empêcha pas, après une dizaine de minutes d’interview, de lui infliger la remarque suivante :

 J’imagine que les musiciens russes sont amusés par le pouvoir de nuisance des syndicats de musiciens français.

Bellamy s’attendait peut-être à ce que le maestro embraye sur le même registre, en vrai relais de l’idéologie capitaliste-maffieuse de la Russie d’aujourd’hui. Manque de chance, Sokhiev expliqua de manière nuancée que la section syndicale du Capitole défendait, naturellement, le niveau de vie et les conditions de travail au quotidien des musiciens. Et il ajouta, ce qui importait au plus haut point, qu’elle le faisait toujours avec le seul souci de servir la musique. Ceci cloua le bec de Bellamy.

Les gens les plus raffinés savent être les plus grossiers. Il faut en effet une bonne dose de vulgarité pour introduire dans un échange consacré à la " grande " musique une " analyse " politique aussi prosaïque afin de tenter de déstabiliser un interlocuteur qui vous dépasse de cent coudées.

Radio Classique fait partie du groupe de Bernard Arnault LVMH, où tout n’est que « luxe, calme et volupté ». La station compte de vrais spécialistes, mais aussi des produits d’appel, comme le journaliste sportif Nelson Montfort ou Jean-Luc Hees qui y pantouflait il y a peu encore, avant que Sarkozy et Philippe Val le nomment à la tête de Radio France.

Avec Radio Classique, ce n’est pas le capitalisme qui est au service de la musique, mais bien la musique qui est au service du capitalisme. »

Le 22 août, Olivier Bellamy répondit très courtoisement à ma note :

« Cher Monsieur Gensane,"¨Je suis très touché que vous écoutiez mon émission et j’ai lu avec intérêt l’article de votre blog que vous avez voulu lui consacrer."¨Puis-je me permettre d’y apporter quelques précision ?"¨1) Jean-Claude Casadesus a évoqué sa collaboration avec Sheila dans son livre "Le plus court chemin d’un coeur à un autre". C’était peut- être la première fois qu’il en parlait à la radio, mais les journalistes n’ont pas toujours le temps de lire les livres de leurs invités. A moins qu’il s’agisse d’ironie de votre part. Auquel cas me voilà bien attrapé !
2) Les rapports entre syndicats et musiciens font partie de la réalité du métier et ils ne sont pas toujours roses (si vous saviez !) Je ne pense pas qu’en parler soit signe de "vulgarité". Le grand pianiste Sviatoslav Richter avait eu maille à partir avec le syndicat d’un orchestre français. A l’issue d’une discussion orageuse sur des minutes en plus ou en moins d’une répétition, il s’était levé en disant : "En Russie aussi nous avons des orchestres de fonctionnaires, mais au moins ils aiment la musique".

3) Ne soyez pas si dur avec Radio Classique. Nous essayons de gagner notre vie en travaillant de notre mieux. Le budget est toujours déficitaire et fait perdre de l’argent au groupe. Donc ce serait plus juste de dire que le capitalisme est au service de la musique. En "¨tous cas au service du million d’auditeurs qui nous fait confiance et dont beaucoup ont découvert Beethoven, Schubert ou Ravel en nous écoutant.

Avec mes meilleurs sentiments."¨Olivier Bellamy »

Je lis dans le Télérama du 5 septembre, sous le titre " Radio Classique économise " , la note suivante :

« Les Olivier Nahum, Gilles Moreau, […] Nelson Montfort et Mitsou Carré sont partis ou virés. Reste […] un trio sur qui pèse toute la programmation : Olivier Bellamy, Laure Mézan et Francis Drésel. […] La seule station privée de musique classique devient une radio d’accompagnement. […] Bernard Arnault, son propriétaire (patron de LVMH, première fortune en France dans le classement Challenge 2009) a opté pour des économies drastiques. »

N’en déplaise au rescapé Olivier Bellamy, c’est bien la musique classique qui est au service du capitalisme et non le contraire.

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La télécratie contre la démocratie, de Bernard Stiegler.
Bernard GENSANE
Bernard Stiegler est un penseur original (voir son parcours personnel atypique). Ses opinions politiques personnelles sont parfois un peu déroutantes, comme lorsqu’il montre sa sympathie pour Christian Blanc, un personnage qui, quels qu’aient été ses ralliements successifs, s’est toujours fort bien accommodé du système dénoncé par lui. J’ajoute qu’il y a un grand absent dans ce livre : le capitalisme financier. Cet ouvrage a pour but de montrer comment et pourquoi la relation politique (…)
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