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Lettre ouverte à Clémentine Autain et à ceux qui pensent comme elle

Je voudrais commencer en vous avouant une chose : je connais bien la Chine, j’y ai vécu 10 ans. L’estime et le respect que j’ai appris à avoir pour son peuple et son histoire n’ont fait que grandir même après l'avoir quittée. Pourtant, je ne suis ni un spécialiste de la Chine, n’en maîtrisant pas la (les) langue(s), ni un zélateur du PCC. Je n’ai aucune origine chinoise et je suis allé par hasard dans ce pays sans le connaître. Comme tout le monde, j’ai des regrets dont je suis seul comptable, notamment un : celui de ne pas avoir pu connaître davantage le petit peuple de Chine. Je l’ai côtoyé mais pas connu.

Madame Autain,

En date du 12 novembre 2020, vous avez signé la « Charte de solidarité avec les Ouïghours ».

Soit.

Pas de quoi fouetter un chat.

J’espère que les Ouïghours se réjouiront de cette marque d’amitié. Et pas seulement la diaspora.

Du premier article de votre charte découlent tous les autres, mais je vais quand même commencer par démonter le quatrième dans lequel vous vous engagez à demander publiquement l’arrêt du financement des 17 instituts Confucius sous prétexte qu’ils seraient l’instrument de la propagande chinoise.

Parce qu’en toute franchise, Madame Autain, si la bêtise était un sport de grimpe, vous auriez atteint ici un sommet inédit.

D’abord, savez-vous ce qu’est un Institut Confucius ? En dehors de l’idée que vous vous en faites, j’entends.

C’est essentiellement un institut d’apprentissage du mandarin délivrant des diplômes de langues reconnus internationalement, mais également un centre culturel visant à promouvoir la culture chinoise.

Connaissez-vous la culture chinoise ?

J’en doute, mais pour faire simple, disons qu’elle est incommensurablement plus riche que la culture des États-Unis dont la « propagande » ininterrompue abreuve notre jeunesse de valeurs douteuses. Et au lieu d’accuser Netflix des maux dont vous accusez l’Institut Confucius, vous cherchez à éliminer cette vraie richesse culturelle dont il a été maintes fois prouvé dans l’histoire qu’elle nous fut bénéfique.

Savez-vous, par exemple, que l’impression de cette « Charte », vous la devez à la Chine ?

Savez-vous maintenant combien d’Alliances françaises sont implantées sur le territoire chinois ?

J’en doute, peut-être même bien que vous ne savez rien de l’Alliance française.

Comme l’Institut Confucius mais depuis plus longtemps que lui, c’est un institut de langue et de transmission de la culture, française dans son cas. Et il y en a 17 en Chine : à Beijing, à Shanghai, à Hong-Kong, à Chongqing, à Nanjing, à Hangzhou, à Macao, à Canton, à Chengdu, à Wuhan, à Jinan, à Kunming, à Shenyang, à Tianjin, à Qingdao, à Xi’an et à Zhengzhou.

Des dizaines de milliers de Chinois, étudiants ou non, sont passés par ces Alliances françaises, pour beaucoup avec l’objectif de venir faire ou compléter leurs études dans les universités ou les grandes écoles françaises. Combien d’étudiants français se rendent en Chine en comparaison ?

Est-ce à dire, Madame Autain, que les Alliances françaises sont des instruments de la propagande française ?

On aurait davantage raison de le croire cependant puisque l’Alliance Française fut créée en 1883 avec pour objectif à l’origine de faire rayonner notre culture... dans l’empire colonial français.

Voilà, je n’irai pas plus loin en ce qui concerne ce point et je terminerai par une citation de Maxime Vivas : s’attaquer aux Instituts Confucius, c’est vouloir faire taire les stylos pour laisser parler les armes.

Ce sera, je n’en doute pas, plus difficile voire impossible de vous faire changer d’avis sur l’article 1, mais je vais tenter le coup en vous posant quelques questions.

Voici cet article 1 : nous nous engageons à nous tenir inconditionnellement aux côtés du peuple ouïghour qui est réprimé et persécuté par le régime communiste chinois.

Où êtes-vous à cette heure, Madame Autain ? Dans vos salons parisiens ou auprès des Ouïghours ?

Je ne vous ai jamais entendu employer le terme « régime macronien » lorsque les Gilets jaunes se faisaient matraquer.

Savez-vous combien de Chinois y compris de Ouïghours innocents sont morts dans des attentats commis par des djihadistes Ouïghours ?

22 morts et 43 blessés en 2011 à Kashgar, 5 morts et 38 blessés en 2013 à Beijing (Pékin), 31 morts et 143 blessés le 1er mars 2014 à Kunming, 43 morts et plus de 90 blessés à Urumqi en 2014.

Ne croyez-vous pas que le gouvernement chinois, comme n’importe quel gouvernement de n’importe quel pays attaqué de la sorte soit en droit de répondre, même durement, aux massacres de sa population ?

Ou alors, serait-ce que ces morts ont moins de valeur à vos yeux ?

Je me permets de répondre pour vous : oui, le gouvernement chinois a le droit et même le devoir de réprimer un danger de cette teneur. Il est certain qu’il le fait d’une main de fer, mais ce n’est pas à nous d’en juger et encore moins de faire accroire que cette répression viserait la totalité de la population musulmane du Xinjiang ainsi que les milliers de Ouïghours vivant en paix dans les autres provinces chinoises.

Combien de Ouïghours radicalisés ont rejoint les rangs de DAECH ?

Difficile de le savoir avec certitude, mais si on se base sur les données de la France qui a vu partir plus de 700 personnes au djihad en Syrie, on pourra raisonnablement évaluer le nombre de Ouïghours à un taux proportionnel à la démographie du Xinjiang comptant 25 millions d’habitants dont la moitié sont musulmans. Ce qui nous mène à plus d’un millier de candidats probables. Probablement davantage.

Comme la France, la Chine est confrontée au retour de ces djihadistes qui représentent un risque élevé pour la sécurité de la nation et qu’il convient de circonscrire. Encore une fois, il ne fait guère de doute que la Chine n’emploie pas une méthode douce pour résoudre ce problème qui se superpose aux velléités d’indépendance d’une minorité au Xinjiang. Imaginez chez nous une fusion entre les djihadistes et les indépendantistes corses ou bretons...

Connaissez-vous Adrian Zenz ?

Il représente pour les médias occidentaux la principale source d’informations sur le Xinjiang : ce pseudo-anthropologue allemand, intégriste religieux, homophobe est selon ses dires « guidé par Dieu » dans sa croisade anti-chinoise. Il a falsifié ses prétendues données et ne s’est rendu qu’une seule fois au Xinjiang avec un visa touristique... en 2007.

Madame Autain, je vous le demande : dans l’histoire récente, combien de fois considérez-vous que les Etats-Unis d’Amérique ont menti pour servir leur ordre du jour ? Les doigts des deux mains n’y suffiraient pas. Ne croyez-vous pas alors qu’il y a au moins une petite raison de douter de la véracité de ces informations ?

Il n’existe à ce jour aucune preuve tangible, aucun document, aucune photo, aucune vidéo d’une quelconque persécution de masse ayant cours au Xinjiang. Au contraire, toutes les données disponibles en ligne concourent à prouver la bonne santé démographique de l’ethnie ouïghoure en Chine. Par contre, il existe de nombreux fakes dont les médias, ceux que vous écoutez trop, se repaissent le doigt sur la couture du pantalon. Cet article dont les commentateurs ont vérifié les données fournies est révélateur.

Si les journalistes chinois venaient dans nos prisons pour photographier les détenus, en concluraient-ils pour autant que la France persécute son peuple ? Ce n’est même pas nécessaire tant les clichés d’une police abusant de la force foisonnent. Souvenez-vous de cette photo sur laquelle des lycéens étaient mis à genoux devant une police surarmée...

Enfin, pour finir, je ne saurais que trop vous conseiller de lire le livre-enquête de Maxime Vivas, Ouïghours, pour en finir avec les fake-news (il paraît qu’il vous l’a transmis via Jean-Luc Mélenchon) dans lequel il met en évidence les incohérences des informations sur le Xinjiang distillées par les médias occidentaux. M. Vivas s’est rendu récemment au Xinjiang, lui. Lisez aussi ses nombreux articles sur le site du Grand Soir, ainsi que ceux d’André Lacroix, grand connaisseur de la Chine.

Ouvrez votre esprit, Madame Autain, et cessez de donner cette image désastreuse d’un parisianisme nombriliste qui croit tout et mieux savoir que les autres, qui dévaste le champ politique et ridiculise la France par un suivisme pitoyable ! Et surtout, éloignez-vous autant que possible de la doxa répandue par les médias hexagonaux, de France Info à Arte, dont la sinophobie rampante ne se cache plus.

Je termine en vous avouant une deuxième chose : j’ai pris l’initiative de lancer une pétition en ligne demandant votre exclusion du groupe parlementaire France Insoumise car je considère que vos prises de position répétées contre la Chine, ainsi que contre Cuba, contre le Vénézuela et contre la Syrie, aussi légères que vos sources, portent atteinte à l’image de ce mouvement.

On pourrait d’ailleurs s’étonner du grand écart que vous effectuez quand vous apportez votre soutien aux mouvements sociaux français et au progrès social de manière plus générale tout en bêlant de concert avec les mêmes médias, les mêmes personnages qui éreintent à longueur d’années la France Insoumise et Jean-Luc Mélenchon, lorsqu’il s’agit de critiquer le Vénézuela, la Chine ou Cuba et qui gardent le silence face aux persécutions étasuniennes à l’endroit de Julian Assange ou aux exactions israéliennes contre le peuple palestinien. On pourrait n’y voir qu’une posture qui changera au gré du sens où le vent souffle.

Evidemment, c’est mettre la charrue avant les bœufs que de vous écrire alors que j’ai déjà déclenché à votre encontre une action hostile quoique vaine. L’inverse eût été plus logique. Mais que voulez-vous, certains parlent sans réfléchir, d’autres agissent sans réfléchir...

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Journaliste, écrivain, professeur d’université, médecin, essayiste, économiste, énarque, chercheur en philosophie, membre du CNRS, ancien ambassadeur, collaborateur de l’ONU, ex-responsable du département international de la CGT, ancien référent littéraire d’ATTAC, directeur adjoint d’un Institut de recherche sur le développement mondial, attaché à un ministère des Affaires étrangères, animateur d’une émission de radio, animateur d’une chaîne de télévision, ils sont dix-sept intellectuels, (…)
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Viktor Dedaj

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