L’argent de RSF intrigue le Médiateur européen.
(L’Union européenne sur la piste des subventions versées à RSF).
Dimanche 29 juillet 2007.
Rappelons les faits.
En 2003/2004, l’Union européenne (UE) a octroyé 1 293 303 euros à RSF.
Le 1er février 2005, Reporters sans frontières a adressé une lettre publique comminatoire au Président de l’Europe l’adjurant de l’aider à provoquer une « transition démocratique » à Cuba. L’expression « transition démocratique » est utilisée par l’Administration Bush pour signifier : liquidation du gouvernement cubain et gestion de l’île sous protectorat US.
RSF énonçait des prescriptions précises : « Il nous paraît indispensable que l’UE apporte son soutien aux agences de presse indépendantes, ainsi qu’aux organisations de syndicalistes, de bibliothécaires, médecins, économistes, etc. »
On voit là que RSF balaie pratiquement tout le champ politique en préconisant d’intervenir dans les systèmes médiatique, social, culturel, médical, économique, ainsi que dans le sibyllin « etc. ».
« Etc » ? Si l’on en croit Nestor Baguer, journaliste « dissident » cubain longtemps appointé par RSF et recruté à La Havane par Robert Ménard en personne (qui apprendra trop tard que c’était un agent de la sécurité cubaine), RSF s’intéresse aussi à une possible dissidence dans la police et dans l’armée.
Bref, sous couvert de la défense des journalistes dans le monde, RSF mène-t-elle des actions factieuses avec l’argent de l’Europe ? Si oui, ne s’agit-il pas d’un détournement des fonds pour un usage incompatible avec les règles qui régissent les rapports entre Etats, ici entre Cuba et l’Europe, cette dernière n’ayant jamais inscrit dans ses objectifs le renversement d’un gouvernement qui ne représente aucune menace pour elle et avec qui elle entretient des relations diplomatiques normales ?
Pour le savoir, j’ai déposé, le 3 février 2005, une plainte contre RSF auprès de l’UE en lui demandant de s’assurer du bon usage des subventions.
A commencé alors le jeu de la patate chaude. Entre février 2005 et juin 2006, ma plainte a hanté les bureaux de M. Nikiforos Diamandouros, médiateur européen, Mme Rachel Doell, sa secrétaire, M. Joa Sant’Anna chef du département administratif et financier, M. Daniel Koblentz, Mme Josiane Pailhès, membre de la Commission, Mme Marjorie Fuchs, juriste au bureau du Médiateur, M. Giuseppe Massangioli, directeur de la Direction G du Secrétariat général, M. Ian Harden, du bureau du Médiateur et jusqu’à M. José Manuel Barroso, Président de l’UE. Ce dernier fut la 9ème personne à compulser un dossier avançant au rythme des carabiniers d’Offenbach (qui chantent sur scène « Marchons, marchons », en faisant du surplace).
Pressé de questions par mes différents interlocuteurs, j’ai pu préciser que 779 304 euros avaient été versés à RSF en 2003 et 513 999 euros en 2004 « pour la défense des journalistes emprisonnés en Asie et dans les pays ACP » (Afrique, Caraïbes, Pacifique) » dans le cadre de « l’Initiative européenne pour la Démocratie et les Droits fondamentaux ».
Nous avions là les différents protagonistes, (RSF et l’UE), les années budgétaires de versements, les montants, l’intitulé de l’usage prévu des fonds.
Et ma question était simple : Votre (notre) argent a-t-il été utilisé à bon escient ou détourné pour d’autres causes ?
Finalement, la réponse de l’UE fut : si vous ne fournissez pas « la référence exacte du contrat » avant le 31 juillet 2006, la plainte sera classée.
A ce moment-là , je me suis persuadé que si je parvenais (par une intrusion nocturne dans les bureaux de l’UE ?) à lui fournir le renseignement qu’elle seule possédait, on me demanderait ensuite l’heure de signature et la marque du stylo, voire le signe zodiacal des signataires et les numéros de sécurité sociale de leurs ascendants.
Entre temps, RSF avait reçu le prix européen Sakharov, j’avais appris que l’UE a négocié avec les USA des dérogations à la loi extraterritoriale US Helms-Burton (qui limite le commerce avec Cuba) en échange de condamnations répétées de l’île des Caraïbes, que Lucie Morillon, la représentante de RSF à Washington, avait révélé que le contrat de RSF avec le Center for a Free Cuba (paravent de la CIA oeuvrant à la « transition démocratique ») oblige l’ONG, en échange de dollars, à agir contre ce pays.
L’affaire étant entendue, je jetai l’éponge. Au demeurant, l’objectif n’était pas de faire condamner RSF par l’Europe (ne rêvons pas), mais de mettre à nue les collusions RSF/USA/UE.
Mais voilà que (surprise !) le Médiateur européen m’écrit, le 18 juillet 2007. Et pour me dire quoi ? Qu’il ne comprend pas pourquoi la Commission européenne ne m’a fourni aucune réponse, qu’il suppose que l’UE détient un registre décrivant les subventions versées ainsi que les actions promues avec cet argent, que j’ai clairement exposé mes préoccupations : déstabilisation « de gouvernements légitimes en utilisant les fonds européens pour la défense des journalistes. », qu’il fait part de ces observations à la Commission européenne en lui demandant pourquoi elle a été « incapable » de répondre à ma plainte.
Bref, il n’est pas content, il s’interroge, négligeant la date butoir à laquelle devait être fourni, à ceux qui l’ont signé, le numéro du contrat incriminé.
Pourquoi ce rebondissement ?
Parce qu’un nombre croissant de pays dans le monde n’admet plus l’acharnement anti-cubain des affidés des USA ?
Parce que l’Espagnol José-Maria Aznar est sur la touche et que José Luis Zapatero agit autrement ?
Parce que, le 12 juin 2007, la Française Christine Chanet, représentante du Haut-commissariat des droits de l’homme à l’ONU, dénigrant Cuba à Genève lors de la réunion du Conseil des droits de l’homme a suscité l’indignation ouverte de 26 pays membres sur 47 ?
Parce que de plus en plus d’Etats-uniens préconisent une autre approche du cas cubain ? (Wayne S. Smith qui fut le représentant des Etats-Unis à Cuba dans les années 80 a écrit, le 22 juillet 2007, que « Le plan d’action de Bush ne marche pas » ).
Parce que l’Europe perd peu à peu toutes ses positions économiques et commerciales à Cuba, laissant la place libre à la Chine aujourd’hui, et aux USA demain ?
Parce que RSF commence (enfin !) a sentir le soufre ?
Ou tout simplement parce que le traitement de ce dossier par la Commission européenne relève d’un « foutage de gueule » dans lequel le Médiateur lui-même est méprisé ?
Pour plusieurs de ces raisons ? Pour d’autres à découvrir ?
Allez savoir ! Ce qui est sûr, c’est que la question : une « ONG » peut-elle ouvertement utiliser l’argent du contribuable européen dans l’intérêt des USA n’est pas enterrée.
A suivre donc, sans illusion, mais en se délectant du numéro de contorsionniste/transformiste d’une Europe invitée par Cuba à reconsidérer, sans précipitation, son comportement.
Le 18 juin 2007, le ministère des Relations extérieures cubain publiait un communiqué invitant l’Union européenne à « rectifier les erreurs commises envers Cuba ». Et d’ajouter orgueilleusement : « Mais rien ne presse : nous avons tout le temps du monde ».
En effet, en multipliant ses échanges commerciaux avec un nombre croissant de pays non européens, Cuba desserre l’étau US. Les campagnes médiatico-politico-RSfiennes agissent surtout comme des boomerangs.
En mêlant ses euros aux dollars entassés dans la caisse de RSF, l’Union Européenne joue contre son camp.
Maxime Vivas
Les USA financent Reporters Sans Frontières, par Diana Barahona.
- [ En mars 2003, 87 personnes furent arrêtées pour conspiration, activités subversives et collaboration avec la mise en place du blocus imposé par Washington.
Parmi ces individus se trouvaient infiltrés douze agents de la sécurité de l’Etat cubain dont Nestor Baguer, considéré comme l’un des plus prééminents leaders de la dissidence par la presse internationale et les organisations non gouvernementales, jusqu’à ce qu’il révèle sa véritable identité. Il était, en réalité, l’agent Octavio de la Sécurité de l’Etat depuis 1962 et avait infiltré depuis 1992 les différentes organisations de « militants des droits de l’homme », financées par les Etats-Unis. De plus, il était le correspondant privilégié de RSF à Cuba. M. Ménard, honteux de s’être laissé berné de la sorte, a passé cette information sous silence mais n’en démord pas, et persiste à qualifier ces gens « d’intellectuels » ou de « poète[s] ».]
Extrait de : Comdamnation de Cuba à Genève : le Honduras et l’histoire d’un terroriste notoire devenu diplomate US, par Salim Lamrani.
Pourquoi les arrestations à Cuba ? par Wayne Smith, ancien responsable la section des intérêts US à la Havane.