Un vent de révolte souffle du côté de Suez : en cause, la nomination du futur directeur général de Suez, décidée semble-t-il en totale opacité, par le très fermé Comité des nominations et des rémunérations. Même si le nom du vainqueur n’est pas connu, en dehors d’un cercle très restreint d’initiés, l’intéressé et le principe de cette nomination, en dehors de toute concertation, font déjà l’unanimité contre eux.
Que se passe-t-il réellement lors des réunions Confidentielles du comité des nominations et des rémunérations ? Telle est la question posée en creux par trois représentants du personnel de Suez, qui ont récemment envoyé un long message à destination des instances de direction de ce comité. Premier visé : Gérard Mestrallet, ex-PDG d’Engie (contrairement à ce qu’indique l’article faisant état de cette affaire, voir en bas de ce texte), toujours à la manœuvre en dépit de sa presque-retraite, dès qu’il s’agit de décider du capitaine du navire Suez (Engie détient encore plus d’un tiers de Suez, ex Suez-Environnement). Mais Gérard Mestrallet n’est pas le seul fautif, puisque figurent en bonne place dans ce courrier plusieurs personnalités du monde des affaires, liées au groupe Engie-Suez : Anne Lauvergeon, Nicolas Bazire, Jean-Louis Chaussade ou encore Valérie Bernis.
Fin octobre, les représentants du personnel de Suez ont en effet eu la surprise de découvrir que le choix d’un successeur pour le poste de directeur général du groupe Suez était tranché, et qu’un nom, et un seul, ressortait. Circulez, il n’y a rien à voir. Et précisément, il n’y a rien à voir : aucune justification, aucun débat, aucune concertation. Dans l’entre-soi confortable d’un comité très exclusif, les postes se distribuent comme les bonus : en totale opacité et selon, apparemment, le bon vouloir de Gérard Mestrallet, qui n’a manifestement rien perdu de son autorité sur ses ex-collègues.
Ce n’est pas comme ça que les choses sont censées se passer dans une entreprise avec une gouvernance digne de ce nom. On se demande d’ailleurs ce qu’en pense l’Etat actionnaire, qui détient encore près d’un quart du capital. Certes, l’Etat envisage actuellement de battre en retraite et de se débarrasser de sa participation. Mais ce contexte est une raison supplémentaire de s’inquiéter pour les salariés : si de telles pratiques existent alors que l’Etat est encore au capital, qui va-t-il se passer quand celui-ci aura quitté le navire ? C’est une des raisons pour lesquelles les représentants du personnel de Suez, faisant, eux, honneur aux responsabilités qui sont les leurs, ont mis en demeure la direction de ce comité de fournir les justificatifs et les explications pour ce choix sorti du chapeau. L’identité de l’intéressé(e) n’a pas été dévoilée, mais il est très probable qu’il s’agisse d’un(e) proche de Gérard Mestrallet, tant celui-ci admet ouvertement vouloir garder un pied dans la maison Suez, au besoin par l’intermédiaire d’un(e) fidèle. La personne en question a peut-être toutes les qualités requises et la probité nécessaire pour occuper dignement ces fonctions. Mais peu importe : son accession à la direction générale restera pour toujours entachée par l’ombre du soupçon de connivence et du petit arrangement entre « amis ».
Nommer un directeur général dans de telles circonstances et avec un tel arrière-plan n’est pas lui rendre service. Ce présupposé du « coup de piston » ne lui facilitera certainement pas la tâche, tant sa légitimité risque d’être contestée, indépendamment des qualités de l’homme ou de la femme retenu. Les représentants du personnel ne demandent rien d’autre que le respect des règles et du droit, en plus d’être légalement tenus informés des décisions qui affectent l’avenir de l’entreprise. Les directeurs généraux passent, les salariés restent : l’avenir de l’entreprise les concerne en réalité bien plus que certains ne veulent bien l’admettre.
Sources :
http://bellaciao.org/fr/spip.php?article160605
https://fr.calameo.com/read/005775828a34b616b0668