Il faut dire que j’ai longtemps hésité avant de me décider finalement à rédiger cet article. Cette hésitation se justifie non du fait que grand nombre de lecteurs ne partageront pas mon point de vue, mais qu’ils m’accuseront sûrement de défendre des parties évidemment inculpées. Pour revenir aux attaques barbares par lesquelles la France a été frappée, je dirais que la faute de ce pays est sa grandeur. Personne ne peut pas nier que la France est un asile pour les réfugiés, un pays d’accueil pour les exilés et une patrie pour les expatriés. Certes, la France paye pour sa générosité, or ce qui me paraît une régression après ce drame, c’est cet acharnement sur une partie de la société qui provoque une sorte de lynchage à caractère religieux. Sommes-nous devant des nouvelles croisades locales ou médiatiques ou ce sont des croisades raciales nourries d’un sentiment de répulsion et du désir d’inculper l’autre ?! Les meneurs de ces attentats sont assurément d’origine maghrébine, mais ce qui est débile c’est que des spécialistes, des analystes font porter le chapeau à l’Islam. Etant un connaisseur des musulmans et de leurs valeurs je trouve du mal à croire que cet Islam soit devenu une religion sanguinaire du jour au lendemain, et qu’il faille des justifications beaucoup plus convaincantes, beaucoup plus justes.
Des raisons font croire à des manigances et que les exécuteurs sont des marionnettes manipulées par des esprits qui œuvrent à semer l’islamophobie. Les médias canalisent l’opinion publique et avertissent, ne serait-ce que subtilement, contre un ennemi dont le portrait est en train de se dresser. Ces jeunes musulmans immigrés de la troisième ou la quatrième génération. Mais ce qui semble un attrape-nigaud c’est que personne ne se demande pourquoi leurs parents et leurs arrière-grands-parents ne faisaient pas ce genre de folie puisque la religion est la même ! Les musulmans ne sont pas des assassins, loin de là, ils sont accueillants, chaleureux et conviviaux. Quant à ceux qui veulent des boucs émissaires, on doit rappeler quelle importance recouvre cette composante de la société française et emprunter par la même occasion l’expression d’Emmanuel Valls à propos des juifs, et dire que « sans les musulmans, la France ne serait pas la France. »
Il s’avère donc qu’il y a un écart entre ce qu’est la vérité et ce qu’on veut nous faire avaler et que ces médias vont nous présenter encore et encore des reportages et des documentaires sur ces barbus extrémistes et soifs de sang. Il est vrai que des types comme cela existent, mais pas autant qu’on veut nous le faire croire. Et le public gobera d’un appétit glouton ces propos parce qu’il a l’habitude de croire à l’évidence, de se laisser convaincre par la banalité oubliant que ce n’est que du spectacle, de l’irréel, et surtout que c’est une image propagée dans le cadre d’un projet préétabli comme l’indique Guy Debord, dans son livre La société du Spectacle : Le spectacle, compris dans sa totalité, est à la fois le résultat et le projet du mode de production existant. Il n’est pas un supplément au monde réel, sa décoration surajoutée. Il est le cœur de l’irréalisme de la société réelle*. Que le spectacle commence et qu’on répande cette image stéréotypée du musulman : débile soif du sang, du sexe et qui refuse toute réflexion juste et rationnelle.
Et ces moyens de communication de masse qui font le spectacle tairont les valeurs qui font la grandeur de l’Islam et la mansuétude du musulman. Les exemples ne manqueront pas pour illustrer le pacifisme de cette religion à commencer par le prophète qui a évité l’effusion du sang lors de prise de la Mecque alors qu’il était capable de faire un massacre, et en arrivant à Saladin qui a épargné la vie des habitants de Jérusalem et a garanti les droits des minorités. L’histoire retiendra la magnanimité et la grandeur d’âme de ce dernier qui a envoyé son médecin pour soigner son ennemi Richard lors de la troisième croisade. C’est ce même Islam, qu’on surnommait l’empire de la raison, qui était la religion de ceux qui, lors de l’apogée la civilisation islamique, ont fait des avancées dans le domaine de la médecine et de la mathématique. C’était une époque révolue, mais quand même !
Ces médias ne mettront sûrement pas sous le feu des projecteurs un tueur, qu’on n’appellera d’ailleurs jamais terroriste, en kippa en train de tirer sur une femme désarmée ; ni la croix tatouée sur le bras d’un soldat qui bombarde, qui viole et qui pille en Lybie ou en Syrie. Quant à l’Afrique centrale, on n’en reparlera peut-être plus jamais. Le plan infernal qui a pour finalité non avouée d’avilir l’Islam par cet islamisme meurtrier récemment apparu opère de multiples façons : primo, créer un Etat éphémère par le biais de quelques centaines de mercenaires dont le spectateur ne fera aucune distinction avec des révolutionnaires puisque les similitudes sont nombreuses. Secundo, frapper des pays qui ont la réputation de défendre les libertés individuelles et compléter le tout par cette phobie nourrie au quotidien par les médias. Le spectacle se déroule jusqu’à présent à merveille sauf que les spectateurs ne sont pas éternellement dupes.
* Guy DEBORD, La Société du Spectacle, 3e édition (1992). P.11.