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Les mineurs espagnols sont de retour !

Cela fait plus de trois semaines maintenant que les mineurs espagnols sont en grève contre les menaces de fermeture qui pèsent sur les puits dans le Nord du pays. Le 18 juin, les Asturies, l’Aragon et la Castille et Léon ont été le théâtre d’une nouvelle journée de mobilisation. Nous reproduisons ci-dessous de larges extraits d’un article publié sur la page web des camarades de l’organisation Clase contra Clase qui est partie prenante de la solidarité active qui se construit dans l’Etat espagnol pour faire de cette lutte exemplaire le fer-de-lance de l’opposition à l’austérité du gouvernement de droite de Mariano Rajoy [1].

Alors que l’économie espagnole traverse une crise aigüe, la lutte des mineurs se poursuit et pourrait même grossir dans les jours à venir. Cela fait vingt jours maintenant qu’ils sont en lutte, avec deux points forts : la manif de Madrid, à laquelle ont participé 10.000 personnes et la grève du 18 juin. Les mineurs renouent avec les vieilles traditions de grève de solidarité des années 1960 et 1970 [pendant le cycle de luttes ouvrières qui a caractérisé la fin du franquisme et le début de la « Transition »]. Les mineurs sont aujourd’hui à la tête du conflit ouvrier le plus important de ces dernières années. Comme disait un mineur asturien à un journaliste de El Paà­s la veille de la journée de mobilisation du 18, « mon grand-père a lutté en 1934 [pendant le soulèvement des Asturies], mon père en 1962. Maintenant c’est mon tour ».

Retour sur la grève du 18

Le 18 juin, l’UGT et Commissions Ouvrières (CC.OO.) [les deux confédérations syndicales espagnoles] ont lancé un appel à la grève générale dans les bassins miniers de trois régions du Nord et du Centre de l’Etat espagnol (Asturies, Aragon et Castille et Léon) pour la défense de l’emploi. Cette journée de mobilisation s’inscrit dans la continuité de la grève commencée le 28 mai et qui s’est transformée en une grève illimitée en raison de l’absence d’accord entre les représentants du secteur et le ministère de l’Industrie et de l’Energie espagnol.

Les images des mineurs en lutte ont fait le tour du monde. La presse a enregistré jusqu’à soixante points de barrage en différents endroits du Nord du pays, que les travailleurs bloquent depuis fin mai. Selon les syndicats, la grève a été totale dans les bassins miniers asturiens. Dans le Léon, la grève a été très suivie et plus de 15.000 personnes ont manifesté dans la ville de Léon derrière une banderole qui disait « le gouvernement veut en finir avec tous nos droits. Non à la fermeture de mines de charbon ». La journée avait commencé avec des barrages routiers ainsi que le blocage de deux lignes ferroviaires dans les Asturies, avec des barricades érigées aux alentours des puits de charbon. Les occupations de puits se poursuivent en parallèle dans trois mines du Nord du pays. Les travailleurs des régions minières ont également participé à la journée de mobilisation (à l’image des travailleurs du transport ou les enseignants vacataires dans les Asturies), en participant aux barrages routiers et aux manifestations dans les différentes localités touchées par les menaces de fermeture.

Le capitalisme est en train de couler, les travailleurs se révoltent… Pour une grève générale de solidarité qui unifie l’ensemble de la classe ouvrière !

Le secteur du charbon emploie aujourd’hui dans l’Etat espagnol prés de 8.000 travailleurs répartis sur 47 puits d’extraction qui produisent 8,5 millions de tonnes de minerai [2]… et les mineurs ne sont pas prêts de plier.

Dès le lendemain de la grève du 18, les barrages routiers ont été à nouveau érigés dans les Asturies et dans le Léon, ce qui a entraîné de nouveaux affrontements avec la police. Une nouvelle « marche des gueules noires » [« marcha negra »] est prévue et devrait arriver à Madrid le 11 juillet. Trois cents femmes et filles de mineurs se sont rendues à Madrid le 19 juin, jour du vote par le Sénat de la fin des aides à l’industrie minière. Venues en bus des Asturies, de Léon et de Teruel au cri de « Nous voici, nous sommes les femmes du charbon ! » [« ¡Aquà­ están, éstas son, las mujeres del carbón ! »], une centaine a été expulsée violemment de l’hémicycle (où elles étaient pourtant reçues en délégation) pour s’être insurgées contre les sénateurs et avoir entonné l’hymne des mineurs au moment du vote. A Ponferrada, dans la province du Léon, le maire, solidaire de coupes budgétaires dans l’industrie du charbon, a été coursé par des mineurs dans la ville et a dû se réfugier dans un restaurant pour échapper aux travailleurs en colère.

La grève du 18 montre que les travailleurs sont prêts à tout pour défendre les emplois. Cependant, les directions syndicales de l’UGT et de CC.OO. d’Aragon, des Asturies et du Léon n’ont organisé que quelques rassemblements symboliques en appui à la lutte des mineurs.Dans le reste de l’Etat espagnol, la direction de l’UGT et de CC.OO. ne fait strictement rien. L’UGT et CC.OO. ne veulent rien faire qui puisse transformer la sympathie dont jouissent les mineurs en un vaste mouvement de solidarité qui pourrait faire de la grève des mineurs le fer-de-lance de la lutte contre le gouvernement Rajoy mais également contre la politique de contention et de dialogue social avec laquelle la bureaucratie syndicale a renoué après la grève générale nationale du 29 mars.

Au moment où le capitalisme est en train de montrer qu’il n’a rien à offrir aux travailleurs et à la jeunesse, la lutte des mineurs pourrait donner lieu à une grande journée de mobilisation dans l’ensemble de l’Etat espagnol. Cela permettrait d’unifier en un même mouvement l’ensemble du monde du travail et de la jeunesse derrière un plan de lutte à même de contrer les mesures d’austérité extrêmement violentes du gouvernement Rajoy.

Pour un mouvement de solidarité active et une politique indépendante de celle du patronat du charbon

Les militant-e-s de Clase contra Clase et du Rassemblement révolutionnaire No Pasarán soutiennent depuis le début du conflit les mineurs et ont fait appel à ce que se construise un mouvement de solidarité « active ». Notre position reste cependant que, pour défendre l’avenir des bassins miniers, il est nécessaire de défendre une orientation indépendante de celle du patronat du charbon [qui est propriétaire des puits et qui s’oppose également aux suppressions des aides à l’extraction décidées par le gouvernement qui dit appliquer les directives de la Commission européenne]. Les patrons du charbon ont amassés des fortunes au cours des dernières décennies, sur le dos des travailleurs et grâce aux aides à l’extraction que leur a généreusement versées Madrid. Malheureusement, les directions de l’UGT et de CC.OO. ne soulèvent pas cette question et se contentent de demander que les aides d’Etat destinées au patronat ne soient pas réduites. En ce sens, les militant-e-s de Clase contra Clase et du Rassemblement révolutionnaire No Pasarán ont défendu, dans leurs tracts et à travers une campagne d’affiches, la perspective de la lutte pour la nationalisation sous contrôle des travailleurs des mines ainsi que des aides versées dans le cadre du Plan Charbon [« Plan Carbón »]. C’est la seule issue à même de défendre le maintien de l’emploi, les conditions de sécurité dans les mines et un avenir digne pour la population et les travailleurs des bassins miniers concernés par les menaces de fermetures des puits.

Dans quelques villes du reste de l’Etat espagnol des manifestations de solidarité ont été organisées le 18. A Valence, 400 manifestants, des travailleurs et des étudiants, à l’appel du mouvement des indigné-e-s, se sont rassemblés derrière une banderole qui disait « la lutte des mineurs, c’est la lutte ouvrière ! ». La police leur a barré le passage et a dispersé violemment la manifestation.

A Saragosse, capitale de l’Aragon, le Rassemblement révolutionnaire No Pasarán a organisé, avec d’autres mouvements, l’accueil de la « marche des gueules noires » auquel ont participé plus de 1.500 personnes. Le 18, une journée de solidarité a été organisée par les étudiants, aux côtés des travailleurs en lutte des espaces verts municipaux, de Telepizza et de Hewlett-Packard.

A Barcelone, l’assemblée étudiante de l’université de Barcelone (UB-Raval) a été à l’initiative d’une manifestation de soutien avec blocage de Gran Và­a, au nom de la solidarité avec les mineurs et de l’unité ouvrière-étudiante.

L’unité ouvrière-étudiante, comme de nombreux événements récents l’ont confirmé, est une arme puissante pour contrer les mesures d’austérité qui nous sont imposées par le gouvernement de Madrid et l’Union Européenne. Malheureusement, ces quelques rassemblements ont été les seules actions concrètes qui ont été menées le jour de la grève des mineurs du 18 juin.

Clase contra Clase et le Rassemblement révolutionnaire No Pasarán revendiquent ces actions dans la mesure où elles témoignent, à échelle réduite, de la solidarité active qui devrait être mise sur pied, de l’unité ouvrière-étudiante, une condition essentielle pour contrer les attaques du gouvernement et pour le faire plier. C’est en ce sens que nous nous adressons à l’ensemble de la gauche syndicale et alternative ainsi qu’aux courants d’extrême gauche de façon à construire un vaste mouvement de solidarité active avec la lutte des mineurs.

Cynthia Lub

Source : http://www.ccr4.org/Les-mineurs-espagnols-sont-de-retour

21/06/12

[1Voir C. Lub, « Gran jornada de huelga en solidaridad con la lucha de los mineros », 21/06/12 www.clasecontraclase.org/Gran-jornada-de-huelga-en-solidaridad-con-la-lucha-de-los-mineros La page internet permet également de suivre, au jour le jour, la lutte des mineurs.

[2Il y a une trentaine d’années, le secteur employait plus de 50.000 mineurs et produisait 20 millions de tonnes.


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