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L’île caribéenne surpasse les grands pays dans l’envoi de personnel médical : un partenaire improbable pour les Etats-unis

Les docteurs cubains en première ligne dans la lutte contre le virus Ebola (Wall Street Journal)

William Hearst, reviens, ils sont devenus fous ! Lire un article louant le travail des médecins cubains en Afrique, critiquant en comparaison la faible implication des pays européens, des puissances émergentes, des Etats-unis pour lutter contre le virus Ebola, et le trouver dans l’organe central de finance mondialisée – le Wall Street Journal – seule une époque aussi folle rend possible de telles expériences. Pour vous permettre de prendre connaissance de cet article qui ne fait que restituer des faits têtus – tout en tentant de présenter positivement l’attitude américaine qui profite de la crise pour renforcer sa présence militaire sur le continent – en voici une traduction intégrale : Article du Wall Street Journal, datant du 9 octobre 2014 (Traduction AC pour http://www.solidarite-internationale-pcf.fr/)

Alors que le risque est croissant qu’Ebola puisse s’envoler vers d’autres cieux, les Etats-unis appellent les nations du monde entier à envoyer des docteurs, des infirmières en Afrique occidentale, où des milliers de vie sont en jeu. Rares sont ceux qui ont répondu à l’appel, un pays a répondu en force : Cuba.

Dans les semaines qui ont suivi l’envoi par le président Obama de près de 4 000 troupes en Afrique occidentale, la lutte pour éradiquer Ebola a créé des tandems insolites. Rien n’est plus étrange que le spectacle de médecins cubains rejoignant les militaires américains pour lutter contre Ebola en Afrique occidentale. Cuba est depuis longtemps dans une relation de conflit avec son voisin du nord : les Etats-unis.

Les puissances émergentes comme la Chine, l’Inde, la Russie font des affaires en Afrique, mais leurs contributions à la lutte contre l’épidémie d’Ebola ont été plutôt décevantes jusque-là. Et les nations bénéficiant des meilleurs systèmes de santé ont fourni une aide trop faible, trop tardive à la crise, selon les leaders des pays touchés par Ebola.

Jeudi, le secrétaire-général de l’ONU Ban Ki-moon a appelé à une « multiplication par 20 de l’aide », comprenant « un personnel de santé bien formé ».

« La réponse internationale a été lente », a déclaré la présidente du Liberia Johnson Sirleaf. Jeudi, elle a plaidé pour l’envoi de plus de personnel médical, s’adressant depuis la capitale Monrovia à la conférence de la Banque mondiale à Washington. « Plus que jamais, nous avons besoin de personnels qualifiés et dévoués pour participer à la lutte contre Ebola ».

Cuba a répondu à cet appel. Elle a envoyé 165 travailleurs de la santé au Sierra Leone, durement touché, un nombre exceptionnellement élévé pour une petite île de 11 millions d’habitants. Ils ont rejoint les travailleurs médicaux en Afrique occidentale de plusieurs nations qui sont sous les auspices des groupes d’assistance. Médecins sans frontières (MSF) doit que près de 250 travailleurs médicaux internationaux se trouvent la région et près de 3 000 contre Ebola sur place dans son ensemble.

Cuba joue depuis longtemps un rôle énorme en Afrique, envoyant des troupes pour lutter afin de bouter l’armée sud-africaine de l’Apartheid hors d’Angola, et entrainant des guérillas qui ont rejoint la lutte armée de Nelson Mandela contre l’apartheid. Au début des années 1960, Che Guevara s’est rendu en Afrique pour fomenter une révolte dans la tout juste indépendante République démocratique du Congo – bien qu’il ait jugé par la suite qu’ils étaient peu intéressés par le socialisme mondial et plus par le brigandage.

« Nous ne pouvons libérer nous-mêmes un pays qui ne veut pas combattre », a-t-il écrit dans une lettre découragée au leader cubain Fidel Castro.

En revanche, le médecin argentin devenu révolutionnaire cubain a suggéré que Cuba y envoie autre chose : les docteurs. Depuis, Cuba envoyé des dizaines de milliers de travailleurs de la santé à l’étranger. Le pays a envoyé 2 500 travailleurs de la santé au Pakistan après le tremblement de terre de 2005, et 1 500 à Haiti après le séisme de 2010, a déclaré Jorge Delgado Bustillo, responsable de la Brigade médicale cubaine au Sierra Leone.

En comparaison, les 165 médecins représentent presque une réponse prudente.

« Nous travaillons sur la malaria, le choléra, la dengue, une situation de désastre, inondations au Vénezuela, au Guatemala, au Belize », dit M.Bustillo. « Mais Ebola ? C’est une première pour les Cubains ».

Dans un discours datant de ce mois-ci, M.Castro semblait rappeler les exploits militaires de Cuba face au déploiement de docteurs au Sierra Leone. Il les a nommé « une armée de blouses blanches » et a lancé : « Honneur, gloire à nos combattants valeureux de la cause de la santé et de la vie ! » selon les extraits de son discours publié dans le journal Granma.

Les Cubains minimisent l’idée de toute rivalité avec les Américains. « Contre Ebola, nous devons travailler avec tout le monde », dit M.Bustillo. « Les Etats-unis ? Oui, nous pouvons le faire ».

Mercredi, le drapeau cubain flottait sur le mur du palais des congrès ici, alors que les docteurs bouillant d’impatience sur leurs chaises, attendant plus d’une heure que le gouvernement du Sierra Leone ne les accueille officiellement.

Un officiel australien de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), chargé de les formes sur Ebola, les regardait avec inquiétude alors que les Cubains multipliaient les mains serrées, les tapes dans le dos et autres gestes hasardeux quoique sincères. Les officiels mettent en garde : Ebola peut se diffuser au contact, le virus peut avoir comme vecteurs des fluides corporels tels que la sueur.

« Ce sont des gens très calins (sic) », dit Katrina Roger, responsable technique à l’agence de l’ONU. « Demain, on va leur expliquer pourquoi il faut qu’ils arrêtent de serrer des mains et de se partager les choses qu’ils touchent ».

Le secrétaire d’Etat John Kerry, mercredi, a demandé à ce qu’un plus grand nombre de nations envoie des travailleurs de la santé ainsi que d’autres formes d’aide. « Nous avons besoin de gens pour aller plus loin », a-t-il dit.

Que les Etats-unis se trouvent désormais depéndants de leur rival de Guerre froide souligne la réponse humanitaire dissymétrique à l’épidémie d’Ebola. Les USA sont la première nation donatrice, ayant promis d’envoyer près de 4 000 soldats et près de 400 millions de $ en aides diverses. Ils ont envoyé 65 responsables du Service public de santé pour former un service Ebola auprès des agents de santé au Liberia. Plus de 2 600 volontaires de santé ont accepté, sur le site du gouvernement, d’aller en Afrique pour aider les organisations de santé sur place.

Le premier partenaire commercial de l’Afrique, la Chine, a dit qu’elle fournirait 1 millions de $ en cash, 2 millions de $ en nourriture et spécialistes pour chacun des pays suivants : Liberia, Sierra Leone et Guinée.

Le géant asiatique envoie aussi 170 travailleurs de la santé au Liberia, a déclaré l’agence de presse Xinhua. Actuellement, 58 chinois forment une équipe de traitement d’Ebola et de tests sanguins, dans une clinique construite par les Chinois. Sur ces 58 personnes, 35 sont des conducteurs, personnels techniques et cadres, selon Guo Tongshing, chef de la clinique.

L’Inde, qui a d’importants liens commerciaux et des connections aériennes avec l’Afrique occidentale, a récemment promis de contribuer à hauteur de 12,5 millions de $ mais sans envoyer de personnel médical. Le Brésil, qui courtise depuis près d’une décennie les nations africaines, a donné 413 000 $.

La Russie, qui cherche aussi à raviver certains liens issus de la Guerre froide, a envoyé une équipe de huit virologistes en Guinée, jadis un avant-poste soviétique, et des vêtements de protection.

L’Afrique du sud – un pays désireux d’affirmer son rôle de leader sur le continent – a envoyé un laboratoire mobile au Sierra Leone. Il n’y a aucune trace de contribution monétaire venant de ce pays.

Les travailleurs de la santé africains sont intégrés à la riposte, toutefois. L’Union africaine a envoyé 75 travailleurs de la santé, et l’Ouganda, qui a une expérience certaine avec Ebola, en a envoyé 15.

Pendant de temps, le Japon, troisième économie du monde après les Etats-unis et la Chine, envoie 40 millions de $ pour la cause, mais pas de personnel. Toyota envisage de donner des voitures pour aider au transport des patients.

Même la France, le pays européen qui dispose du plus grand nombre de bases militaires en Afrique, a été lent à envoyer des personnels médicaux. L’ancienne puissance coloniale construira et gérera une clinique de 50 lits en Guinée, avec 15 médecins français envoyés sur place, en plus des volontaires de la Croix Rouge, d’après ce qu’a dit l’agence publique gérant les réservistes médicaux.

La Grande-Bretagne envoie 750 personnes pour aider à construire des dizaines de cliniques au Liberia et au Sierra Leone. Les cliniques sont nécessaires pour isoler les patients de leurs familles et briser la chaîne virale de transmission. Mais on ne sait toujours pas clairement qui gérera ces cliniques.

Le Liberia a besoin à lui seul de près de 10 000 travailleurs de la santé qualifiés, et un nombre similaire est nécessaire au Sierra Leone, d’après ce qu’en dit le gouvernement américain. Jusqu’à présent, la plus grande brigade médicale, c’est celle de Cuba au Sierra Leone.

« Cuba est le seul pays, à ma connaissance, à répondre avec des ressources humaines, en termes de médecins et d’infimières », déclare Nkosazana Dlamini-Zuma, présidente de l’Union africaine et ex-femme du président sud-africain Jacob Zuma.

Ce ne sera pas suffisant, affirme Abdoulaye Baratay, porte-parole du gouvernement sierra-léonais : « Même si nous apprécions les Cubains (…) nous pensons qu’à la vitesse où le virus se répand, nous aurons besoin de plus de gens sur le terrain ».

Les gouvernements, Chine compris, se plaignent du fait qu’ils n’ont tout simplement pas assez d’expérience avec Ebola pour envoyer du personnel en nombre : « c’est un grand défi pour nos scientifiques », a affirmé Qian Jun, chef d’équipe du Centre chinois pour le contrôle de la maladie dans l’équipe du laboratoire mobile au Sierra Leone.

En fait, il n’y avait aucune station pour se laver les mains et les pieds à l’arrivée de l’équipe Ebola chinoise dans la capitale du Sierra Leone, Freetown, une mesure de sécurité vitale. Par contre, il y avait une famille de chats vivant dans l’embrasure de la porte, l’un dormant sur les marches.

« Chaque jour qui passe, nos médecins, nos infirmières viennent à l’heure ici », déclare M.Guo, chef de la clinique. « Mais parfois, les Sierra-léonais, eux, ne viennent pas ».

Voilà le vide que remplit Cuba. Tandis que les consultants du Centre américain pour le contrôle de la maladie et sa prévention sont longés à l’hôtel Radisson Blu – 200 $ la nuit – les 165 médecins cubains vivent à trois dans une salle dans un des hôtels bon marché de Freetwon. Les toilettes de l’hôtel sont cassés. Les mouches bourdonnent autour de nappes sales, sur lesquels les Cubains mangent sur le pouce.

« Ce n’est pas le Sierra Leone qui a besoin de nous », dit Yosvany Vera, docteur cubain de 36 ans se frayant un chemin, un plat graisseux de riz à la main : « c’est le monde qui a besoin de nous ».

Drew Hinshaw, Betsy McKay

Source : http://online.wsj.com/articles/cuba-stands-at-forefront-of-ebola-battle-in-africa-1412904212

Traduction AC pour http://www.solidarite-internationale-pcf.fr/

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"De toutes les ironies exprimées par la politique étrangère américaine, notre position vis-à -vis de Cuba est la plus paradoxale. Une forte dégradation de la situation économique a provoqué une poussée du nombre de Cubains entrant illégalement aux Etats-Unis.

Nous faisons tout ce que nous pouvons pour détériorer la situation économique et ainsi accroître le flux. Nous encourageons également cet exode en accordant aux Cubains, qui arrivent illégalement ou qui s’approchent par voie de mer, un statut de résident et une assistance pour s’installer.

Dans le même temps, nous n’avons pas respecté les quotas de visas pour les Cubains désireux d’immigrer aux Etats-Unis [...] quand Castro tente d’empêcher des cubains malheureux de quitter leur pays infortuné, nous l’accusons de violer des droits de l’homme. Mais quand il menace d’ouvrir grand les portes si nous continuons à accueillir sans limites des cubains sans visas - y compris ceux qui ont commis des actes de violence pour aboutir à leurs fins - nous brandissons des menaces imprécises mais aux conséquences terribles. "

Jay Taylor, responsable de la section des intérêts américains à Cuba entre 1987 et 1990, in "Playing into Castro’s hands", the Guardian, Londres, 9 août 1994.

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