Mohsen Abdelmoumen : Vous avez participé à la marche sur le Pentagone d’octobre 1967 contre la guerre du Vietnam. Que représentent pour vous ces moments historiques ?
Carolyn L. Karcher : La guerre du Vietnam et le mouvement populaire contre elle ont transformé ma conscience et changé ma vie. Bien que j’aie grandi au Japon et que je ne sois pas venue aux États-Unis avant d’entrer à l’université de Stanford en 1962, j’ai fréquenté une école américaine au Japon qui m’a donné l’endoctrinement standard. Je croyais que les États-Unis étaient un phare de la démocratie avec pour mission de transmettre ses bienfaits à d’autres pays et de les sauver de gouvernements oppressifs. La guerre du Vietnam a brisé cette croyance. La marche sur le Pentagone d’octobre 1967 a été la troisième manifestation contre la guerre à laquelle j’ai participé, mais c’est celle qui a marqué le début de ma rééducation politique. Pendant la nuit que j’ai passée au Pentagone, j’ai vu des soldats portant des masques à gaz et des baïonnettes frapper avec la crosse de leur fusil la tête des manifestants assis pacifiquement et leur donner des coups de pied avec leurs lourdes bottes, tandis que les chefs de la marche nous réitéraient leurs instructions de rester passifs et de ne pas résister. Ce qui m’a permis de surmonter cette expérience terrifiante, c’est la conviction que la presse allait informer le public américain de la façon dont les soldats américains avaient traité les citoyens exerçant leurs droits constitutionnels, et que l’incident donnerait lieu à une enquête et à une réparation. Au lieu de cela, les gros titres du Washington Post du jour suivant indiquaient que « Les troupes font preuve de retenue contre une foule violente ». Il faudra des années avant que la presse américaine ne commence enfin à rapporter la vérité sur la guerre et à donner une image plus sympathique des manifestants anti-guerre. Je ne lirais plus jamais la presse grand public sans esprit critique.
L’impérialisme US continue ses guerres dans le monde en ravageant des pays et en massacrant des populations. D’après vous, pourquoi n’y a-t-il pas un mouvement antiguerre combattif comme celui que l’on a connu lors de la guerre du Vietnam ?
Une large opposition publique aux projets américains d’entrer en guerre au Vietnam aux côtés des Français, et plus tard à leur place, a commencé bien avant ce que nous considérons comme le « mouvement de lutte anti- guerre ». En 1954, cette opposition a empêché le président Dwight D. Eisenhower de lancer une invasion militaire conventionnelle du Vietnam, l’obligeant à recourir à la place à des méthodes secrètes graduelles. En 1964, l’opinion publique américaine a voté à une écrasante majorité contre le candidat présidentiel Barry Goldwater, favorable à la guerre, et en faveur du candidat Lyndon Johnson, ostensiblement hostile à la guerre et qui, à l’insu du public, cherchait déjà un prétexte pour lancer une attaque militaire de grande envergure contre le Vietnam.
Le mouvement anti-guerre le plus connu de la période du Vietnam, qui a répondu à la trahison des promesses électorales de Johnson, a commencé sur les campus universitaires. Il progressé des journées d’éducation populaires à la perturbation du Service Sélectif et de ses sursis à la conscription pour les étudiants de l’université avec le brûlage de cartes de conscription pour aboutir à des campagnes contre la production de napalm et d’autres armes, et il a obtenu le soutien de millions de personnes, comme en témoignent les énormes manifestations. L’activisme sur les campus a convergé avec le mouvement populaire pour les droits des Afro-Américains, comme l’illustre la déclaration du Comité de coordination des étudiants non violents (SNCC) de janvier 1966 contre la guerre du Vietnam et la puissante « Déclaration d’indépendance par rapport à la guerre du Vietnam » du Révérend Martin Luther King Jr. en avril 1967. Le mouvement anti-guerre du Vietnam a atteint son apogée et a eu son impact le plus décisif lorsque l’opposition militante à la guerre a éclaté au sein même de l’armée, générant plus de 300 journaux anti-guerre, provoquant des dizaines de milliers de désertions, inspirant des actes de sabotage sur les navires de la marine et les porte-avions, ainsi que la « fragmentation » (meurtre d’officiers impopulaires) sur le terrain au Vietnam, et finalement forçant l’armée et la marine à se retirer, parce que des unités entières refusaient de se battre.
La leçon que le gouvernement américain a tirée de la guerre du Vietnam est qu’il est dangereux de compter sur une armée de conscrits pour mener des guerres impérialistes prolongées. L’armée est maintenant professionnelle, composée de soldats volontaires qui sont recrutés principalement dans les communautés à faibles revenus. Pour assurer un recrutement suffisant, les programmes de bourses qui permettaient autrefois à un grand nombre d’étudiants à faibles revenus de fréquenter l’université ont été drastiquement réduits, incitant ces étudiants à demander des bourses à l’armée en échange de leur service militaire. De toute évidence, il est beaucoup plus facile de faire de la propagande et d’intimider des soldats professionnels volontaires. Pourtant, même dans ces conditions, les soldats qui ont servi en Irak sont rentrés chez eux pour fonder Iraq Veterans against the War (les Vétérans d’Irak contre la Guerre), sur le modèle de Vietnam Veterans against the War (les Vétérans du Vietnam contre la Guerre), et d’autres ont rejoint Veterans for Peace (les Vétérans pour la Paix). De plus, pendant la période qui a précédé l’invasion de l’Irak en 2003, les Américains ont été plus nombreux à marcher contre elle que contre la guerre du Vietnam à son apogée. Même si la plupart des familles ne sont plus directement touchées par les guerres américaines à l’étranger comme elles l’ont été par la guerre du Vietnam, une majorité de l’opinion publique s’oppose toujours à ces guerres. Et l’armée cherche toujours des moyens d’empêcher l’émergence d’un autre « mouvement anti-guerre », en minimisant l’utilisation des troupes américaines et en s’appuyant principalement sur les bombardements, les drones, les mercenaires, les supplétifs et les troupes étrangères. Sa tactique la plus efficace a peut-être été de maintenir ses guerres réparties sur l’ensemble du globe tout en restant invisible. Comment un « mouvement anti-guerre » peut-il se mobiliser contre des guerres qu’il ne voit pas ?
Vous avez écrit les deux livres “The First Woman in the Republic : A Cultural Biography of Lydia Maria Child” et “A Refugee from His Race : Albion W. Tourgée and His Fight against White Supremacy”. Dans ces livres, vous vous intéressez à la question de l’esclavage et de la ségrégation en évoquant le parcours de deux personnages historiques connus pour leur lutte contre le racisme. Peut-on dire que les États-Unis sont un pays raciste ?
Ce qui m’a lancé dans les recherches qui ont abouti à ces deux livres, c’est la rééducation politique déclenchée par la guerre du Vietnam et le mouvement contre celle-ci. Je me suis rendu compte que je n’avais jamais appris la véritable histoire de mon propre pays. En grandissant au Japon, je n’avais jamais été exposée non plus au problème racial américain qui, simultanément à la guerre du Vietnam, éclatait en rébellions urbaines noires à travers les États-Unis, y compris à Washington, DC, où je vivais désormais. Pour combler cette lacune dans mon éducation, j’ai commencé à lire sur l’esclavage et le mouvement anti-esclavagiste, ou abolitionniste. J’ai été ravie de trouver chez des abolitionnistes comme Lydia Maria Child les précurseurs de mes camarades du mouvement contre la guerre du Vietnam. Les abolitionnistes, eux aussi, croyaient profondément aux idéaux américains de liberté et d’égalité proclamés dans la Déclaration d’indépendance des États-Unis. Eux aussi ont été indignés de découvrir avec quelle brutalité leurs concitoyens américains ont violé ces idéaux. Ils ont également formulé des critiques virulentes de l’hypocrisie américaine, ainsi que des analyses détaillées du racisme blanc. Eux aussi ont consacré leur vie à faire en sorte que leur pays respecte ses idéaux, souvent en défendant les droits des Afro-Américains face à la violence collective des partisans de la suprématie blanche. Le mouvement anti-esclavagiste a fourni le premier modèle dans l’histoire des États-Unis, aussi imparfait soit-il, d’intégration raciale et de lutte commune pour la justice. Il a culminé avec la guerre de Sécession et l’adoption des 13e, 14e et 15e amendements abolissant l’esclavage et accordant une citoyenneté et des droits de vote égaux à tous les hommes américains.
Cependant, les forces de la suprématie blanche étaient trop puissantes pour céder même en cas de défaite militaire et législative. Dans les anciens États esclavagistes, les suprémacistes blancs ont formé des organisations paramilitaires comme le Ku Klux Klan qui a lancé une campagne de terrorisme contre les Afro-Américains et leurs alliés blancs, par lequel ils ont renversé les nouveaux gouvernements démocratiquement élus et introduit des formes de néo-esclavagisme pires que l’original. Dans le Nord, lorsque le public a compris que seule une occupation militaire prolongée du Sud pourrait endiguer la violence des suprémacistes blancs, la lassitude de la guerre et le désir de réconciliation nationale – qui ne pouvait être atteint qu’en sacrifiant la justice pour les Afro-Américains – ont poussé la sympathie blanche à se détourner des esclaves émancipés pour se tourner vers les Blancs du Sud. Codifiant ce revirement, la Cour suprême des États-Unis a réinterprété les amendements de l’après-guerre civile pour signifier leur contraire et a déclaré inconstitutionnelles les autres lois sur les droits civils. La vie d’Albion W. Tourgée résume cette histoire mouvementée. Converti à l’abolitionnisme par les esclaves fugitifs qu’il a rencontrés alors qu’il était soldat dans l’armée de l’Union pendant la guerre civile, Tourgée a participé à la reconstruction de la Caroline du Nord, a aidé à écrire une constitution égalitaire pour l’État et a bravé les menaces de mort du Klan alors qu’il était juge à la Cour Supérieure. Après que le renversement de la Reconstruction l’ait contraint à retourner au Nord, il a tenté de faire revivre le mouvement abolitionniste en écrivant une série de romans sur la lutte avortée pour la liberté et la justice dans laquelle il s’était engagé aux côtés des Afro-Américains. Par la suite, il s’est joint aux Afro-Américains pour fonder une organisation interraciale de défense des droits civils, faisant campagne contre le lynchage qui causait des centaines de morts par an dans les années 1890, et contestant l’idéologie de la ségrégation dans l’affaire Plessy v. Ferguson de 1896, qu’il a plaidée pro bono. Le tristement célèbre verdict de la Cour suprême justifiant la ségrégation a validé la suprématie blanche comme loi du pays. Elle a régné sans partage pendant près d’un demi-siècle, jusqu’à ce que la Cour répudie Plessy dans l’affaire Brown v. Board of Education.
Bien que le mouvement des droits civiques des années ‘50 et ‘60 ait produit de nombreuses avancées, le racisme systémique est toujours présent aux États-Unis, entraînant des inégalités flagrantes entre les blancs et les personnes de couleur dans les domaines de la santé, de l’éducation, du logement, des opportunités d’emploi et de l’accès au vote. Dans son livre « The New Jim Crow : Mass Incarceration in the Age of Colorblindness« , l’universitaire Michelle Alexander a également souligné que la prison a remplacé l’esclavage et la ségrégation comme moyen de maintenir les Afro-Américains dans un statut inférieur et de les priver de leurs droits civils et électoraux. La persistance du racisme se manifeste également dans les politiques que l’administration Trump a mises en place pour restreindre l’immigration et l’asile, par exemple en emprisonnant et en expulsant les immigrants de couleur et en les séparant de leurs enfants.
Aujourd’hui, nous assistons à une nouvelle bataille décisive entre les forces de la suprématie blanche, d’une part, et les défenseurs de l’égalité, d’autre part. Je fonde beaucoup d’espoir sur l’ampleur et la durée des manifestations antiracistes inspirées par le mouvement Black Lives Matter dans tout le pays, le nombre sans précédent de Blancs qui y participent, les demandes bien fondées que les dirigeants ont formulées, et le soutien qu’ils ont reçu des administrations municipales, des médias indépendants et d’une grande partie de la population. Je fonde également de l’espoir sur les vigoureuses manifestations de solidarité avec lesquelles les Américains de toutes les races ont répondu au bannissement des musulmans et aux politiques anti-immigrants de Trump.
Comment expliquez-vous qu’aux États-Unis, les policiers tuent impunément des citoyens de couleur comme on l’a vu avec l’assassinat de George Floyd et bien d’autres ?
Dans le Sud, la police en tant qu’institution est issue des patrouilles esclavagistes dont le travail consistait à empêcher les esclaves de voler, de s’enfuir ou de conspirer pour se révolter. Là, le racisme a été intégré au maintien de l’ordre depuis le début, puisqu’il a permis aux pauvres blancs non esclavagistes de s’investir à la fois dans le système esclavagiste et dans le monde blanc. Le racisme opère plus subtilement dans d’autres régions du pays, où la police sert à protéger les riches et leurs biens contre les « classes dangereuses ». Ces classes comprenaient des groupes d’immigrants qui n’étaient pas perçus comme blancs, comme c’était initialement le cas pour les Irlandais, les Italiens, les Slaves, les Juifs et autres. En brisant les grèves et en aidant à réprimer les groupes d’immigrés moins bien lotis que le sien, la police pourrait offrir une voie vers la reconnaissance et l’acceptation en tant que Blanc.
Bien que les forces de police soient aujourd’hui plus diversifiées sur le plan racial, avec des membres afro-américains, latino-américains et asiatiques, les grades supérieurs sont majoritairement blancs, et le racisme continue de façonner le travail de la police. L’armée joue un rôle tout aussi pernicieux dans l’organisation du maintien de l’ordre. Les forces de police reçoivent les armes excédentaires de l’armée – une raison majeure pour la militarisation du maintien de l’ordre. En outre, de nombreux soldats rentrent d’Afghanistan, d’Irak ou d’ailleurs pour trouver un emploi de policier (ou de gardien de prison). Leur entraînement militaire dans les armées d’occupation leur apprend à tirer d’abord et à poser des questions ensuite, ainsi qu’à traiter avec mépris les peuples étrangers dont ils occupent les pays. Renforçant ce schéma, depuis le 11 septembre 2001, les États-Unis parrainent un programme d’échange de policiers avec Israël, considéré comme le pays qui a le plus d’expérience dans la lutte contre le terrorisme. Comme l’a fait remarquer Jewish Voice for Peace, les deux pays échangent les « pires pratiques » dans le cadre de ce programme d’« échange meurtrier ». Il est clair que le modèle d’armée d’occupation fourni par Israël ne fait qu’encourager une police militarisée et raciste.
Les États-Unis encouragent un sentiment d’impunité au sein de leurs troupes en refusant d’adhérer à la Cour pénale internationale et en contrecarrant les efforts visant à punir les soldats qui commettent des viols ou des crimes de guerre. La police entretient sa propre impunité par le biais de puissants syndicats qui font pression sur les politiciens et engagent des avocats coûteux pour défendre ses membres contre toute accusation de mauvaise conduite. Ironiquement, les syndicats de policiers et de gardiens de prison sont les seuls qui n’ont pas été victimes des politiques antisyndicales. C’est ce qui leur a permis de gagner une affaire devant la Cour suprême américaine qui a accordé à la police une « immunité qualifiée » contre les poursuites, ce qui équivaut en substance à une impunité sans réserve.
Au lieu de poursuivre la police, ce qui ne réussit presque jamais, les municipalités versent des indemnités – aux frais des contribuables – aux familles des victimes de fusillades policières, comme la ville de Louisville, dans le Kentucky, l’a récemment fait pour la famille de Breonna Taylor. Cette pratique apaise la colère des communautés de victimes mais n’impose aucune sanction financière à la police, la rendant ainsi peu encline à se réformer.
Actuellement, les manifestants demandent l’élimination de l’« immunité qualifiée », la fin de l’armement militaire de la police, des coupes drastiques dans les budgets de la police, la réaffectation des fonds vers des programmes sociaux visant à résoudre les problèmes auxquels les pauvres sont confrontés, et dans certains cas l’abolition même de la police. Les conseils municipaux répondent à ces demandes de manière beaucoup plus positive que par le passé, influencés par la brutalité choquante du meurtre de George Floyd, comme le montre la vidéo que le monde entier a vue, par la violence flagrante de la police contre les manifestants, même sous les projecteurs des médias et d’un public sensibilisé, et par l’ampleur, la durée et le caractère multiracial des manifestations.
Quelle est votre analyse de ce grand mouvement de solidarité mondial après l’assassinat de George Floyd ?
Il ne fait aucun doute que la vidéo explicite du meurtre de George Floyd, que les photos édifiantes et la couverture médiatique des manifestations ici aux États-Unis ont suscité une sympathie mondiale, mais cela n’aurait pas pu devenir un véritable mouvement de solidarité sans reconnaître que d’autres pays ont leurs propres George Floyd. Certes, les Palestiniens font remarquer depuis longtemps que la police, l’armée et les colons israéliens les traitent aussi brutalement que la police américaine traite les Afro-Américains et les tuent avec encore plus d’impunité. Les citoyens arabes et africains de France sont eux aussi fréquemment victimes de brutalités policières, ainsi que de ghettoïsation, de discrimination et d’enfermement dans des écoles inférieures – et contrairement aux États-Unis, la France n’a jamais essayé de corriger ces conditions par des politiques de discrimination positive. En Inde, les Dalits (Intouchables) ont toujours fait l’objet de violences de la part des castes supérieures, et de nos jours, le gouvernement Modi a donné à la police et à la foule hindoue le pouvoir de terroriser les Dalits et les communautés musulmanes. De nombreux autres pays offrent des exemples similaires de groupes opprimés qui ont toutes les raisons de s’identifier à George Floyd et au mouvement de solidarité que son meurtre a généré.
Il y aura bientôt des élections présidentielles aux États-Unis. Quel est votre avis sur la présidence de Donald Trump ? Selon vous, la réélection de Trump ne serait-elle pas un danger potentiel ? Pourquoi la gauche américaine n’a-t-elle pas su être une alternative à Donald Trump ?
La présidence de Donald Trump a été catastrophique non seulement pour les États-Unis mais aussi pour le monde entier. Il a déjà bafoué la Constitution, éviscéré nos institutions démocratiques, détourné les agences destinées à protéger les travailleurs, les consommateurs, la santé publique et l’environnement, et fait reculer les réglementations favorisant la pureté de l’air, la propreté de l’eau, le renforcement des normes d’émission, la lutte contre la pollution, etc. Aujourd’hui, il a demandé que les écoles enseignent le « patriotisme » plutôt que la « propagande de gauche » qui rend les étudiants honteux de leur pays. Si Trump était réélu, il supprimerait toutes les protections constitutionnelles restantes et inaugurerait un régime fasciste à part entière. Une victoire de Trump aiderait à amener les fascistes au pouvoir dans de nombreux autres pays également. Une telle évolution mettrait fin à tout espoir de sauver la planète d’un chaos climatique dévastateur.
Il n’est pas tout à fait exact, cependant, de dire que la gauche américaine n’a pas réussi à fournir une alternative à Donald Trump. Sur le plan électoral, Bernie Sanders a présenté une alternative très claire à Trump qui a gagné un grand nombre de partisans, surtout parmi les jeunes. L’une des raisons pour lesquelles il a perdu contre Joe Biden est que de nombreux électeurs craignaient qu’un socialiste autoproclamé ne puisse pas vaincre Trump et pensaient que Biden avait le plus de chances de le faire. Bien que la gauche ne soit pas assez forte pour gagner une élection présidentielle, elle n’a jamais été aussi forte de mon vivant. Un nombre croissant de candidats extrêmement progressistes remportent les élections à la Chambre des représentants et aux gouvernements des États et des villes. Les mouvements populaires pour la justice raciale et environnementale contribuent à définir une législation progressiste, comme l’appel au financement de la police, mentionné au point #4 ci-dessus, et le Green New Deal. Ces mouvements continueront à exercer une pression sur Biden et sur l’establishment du parti démocrate si nous parvenons à vaincre Trump.
La renaissance de la gauche américaine contraste fortement avec le déclin marqué de la gauche en France, où elle a toujours été beaucoup plus forte qu’aux États-Unis.
Comment expliquez-vous la gestion catastrophique de la crise du Covid-19 par l’administration Trump ?
Trump ne croit pas en la science, comme il l’a indiqué en niant que le changement climatique est en cours. Pour Trump, les profits sont primordiaux – les siens et ceux de ses amis et donateurs. Il est déterminé à maintenir le prix des actions à un niveau élevé, car il est convaincu que sa réélection dépend du dynamisme de la bourse et de l’économie. Ainsi, il refuse d’approuver toute mesure qui provoquerait un ralentissement économique, comme la fermeture d’usines, d’entreprises et d’écoles pour empêcher la propagation de Covid-19. Il dépend, pour les dons de la campagne électorale, des industries et des entreprises qui veulent maintenir leurs profits à tout prix. Par exemple, la dépendance de Trump à l’égard de l’industrie pharmaceutique et ses investissements personnels dans ce secteur l’ont amené à favoriser non seulement une course aux États-Unis pour développer un vaccin qui peut être breveté et vendu à un prix élevé, mais à promouvoir des médicaments tels que l’hydrochloroquine dont les effets nocifs plutôt que bénéfiques ont été prouvés. Parallèlement, il a défini l’industrie de la viande comme « essentielle » à l’économie américaine, ce qui permet aux usines de conditionnement de la viande de rester ouvertes malgré le fait qu’elles soient devenues des points de concentration du Covid-19. Tout en citant la Loi sur la Production de Défense pour maintenir ouvertes les usines de conditionnement de la viande, il a refusé de la faire appliquer pour imposer la production d’équipements de protection individuelle, qui ne génèrent pas de profits comparables. Outre son obsession des profits, Trump voit tout en termes de politique partisane. C’est pourquoi il sape et contrecarre les gouverneurs et les maires qui sont démocrates, privant leurs États et municipalités de ressources et encourageant ses partisans à désobéir aux ordres locaux de porter des masques et d’éviter de se rassembler dans les bars, les églises et les réunions de campagne. La suprématie blanche de Trump et ses opinions anti-immigrants l’incitent à laisser le Covid-19 continuer à faire rage dans les communautés afro-américaines, latino-américaines et amérindiennes, qui souffrent de taux d’infection et de mortalité extrêmement élevés. Enfin, le dénigrement des médias par M. Trump en tant que fournisseurs de « fausses nouvelles » a eu l’impact souhaité sur ses principaux partisans, qui ne fondent leur point de vue sur la pandémie que sur les mêmes chaînes de télévision de droite, talk-shows et plateformes de médias sociaux dont Trump lui-même se nourrit.
Vous avez écrit le livre “Reclaiming Judaism from Zionism : Stories of Personal Transformation” dans lequel vous évoquez le parcours de certaines personnalités juives qui ont rejeté le sionisme. Comment expliquez-vous que ces personnalités, bien que juives, se soient détournées du sionisme ?
« Reclaiming Judaism from Zionism » est un recueil dans lequel quarante juifs d’origines diverses, qui ont presque tous reçu une éducation sioniste, racontent leurs histoires individuelles de transformation personnelle. Les contributeurs sont des rabbins, des professeurs d’études juives et d’études moyen-orientales, d’autres universitaires, des journalistes et des spécialistes des médias, des juristes, des professionnels de la santé, des travailleurs sociaux, des militants et des nouveaux diplômés. Leur âge varie de soixante-dix à vingt ans. Chacun d’eux se rappelle comment et pourquoi il a cessé de croire au principe de l’idéologie sioniste : que la solution à l’antisémitisme était que les Juifs aient leur propre État, qu’ils pourraient contrôler et qui les privilégieraient par rapport aux non-Juifs. Ils décrivent ensuite les différentes routes qu’ils ont parcourues, depuis une vision du monde sioniste jusqu’à l’activisme en solidarité avec les Palestiniens et les Israéliens qui s’efforcent de construire une société inclusive fondée sur la justice, l’égalité et la coexistence pacifique.
Ces récits révèlent un certain nombre de raisons pour lesquelles les auteurs ont perdu la foi dans le sionisme : (1) les auteurs ont vu pour la première fois de leurs propres yeux la brutalité de l’occupation israélienne ; (2) ils ont rencontré et noué des relations chaleureuses avec des Palestiniens et ont écouté ce qu’ils avaient à dire sur la Nakba ; (3) ils en sont venus à reconnaître la contradiction entre les principes éthiques juifs qui leur avaient été enseignés – aimer son voisin, aimer l’étranger, rechercher la justice, réparer le monde – et le traitement cruel des Palestiniens par Israël ; (4) ils ont été confrontés à la censure et au silence que les autorités sionistes utilisent pour maintenir la foi en Israël en tant que refuge démocratique pour les Juifs – et à la diffamation à laquelle ces autorités soumettent les dissidents ; (5) en tant que Juifs Séfarades-Mizrahi, certains étaient confrontés à une discrimination flagrante en Israël qui démentait la prétention de l’idéologie sioniste d’offrir à tous les Juifs un refuge contre la persécution ; (6) en tant que progressistes, beaucoup ont découvert que l’égalité raciale et la tolérance religieuse qu’ils défendent aux États-Unis ne sont pas pratiquées en Israël, et qu’Israël s’est joint aux États-Unis pour soutenir les régimes réactionnaires contre lesquels les progressistes ont lutté au Vietnam, en Afrique du Sud, en Amérique latine et ailleurs.
L’introduction et la postface du livre replacent ces récits dans leur contexte historique. L’introduction explique pourquoi le sionisme est apparu à la fin du XIXe siècle. Le mouvement est né parmi les Juifs russes qui, comme les parents de ma mère, subissaient des pogroms perpétrés par des foules et tolérés par l’État. Pour échapper aux pogroms et à la persécution dont ils étaient victimes, un million et demi de Juifs russes ont émigré en Amérique, tout comme mes grands-parents maternels. Des dizaines de milliers d’autres ont rejoint le Bund, une organisation juive militante et socialiste qui exhortait les travailleurs à lutter pour la libération là où ils vivaient, plutôt que d’émigrer. Seule une infime minorité a adhéré au point de vue sioniste selon lequel le meilleur moyen pour les Juifs d’obtenir une sécurité permanente était de se réfugier dans la patrie biblique des anciens Israélites. Le sionisme n’a pas acquis une pleine expression idéologique ou une force significative jusqu’à ce que le juif viennois Theodor Herzl publie « L’État juif » (1896) en réponse à l’explosion de l’hystérie anti-juive en France. Herzl a conclu que les Juifs ne pourraient jamais échapper à l’antisémitisme tant qu’ils vivraient en tant que minorités dans des États ethniquement homogènes – d’où la nécessité pour eux de trouver un État homogène qui leur soit propre. « L’État juif » indique clairement que Herzl a conçu cela comme un projet de colonisation. Bien qu’il ait envisagé d’autres sites, il a choisi la Palestine parce qu’elle plairait davantage aux colons juifs qu’il espérait attirer.
Cependant, contrairement aux attentes de Herzl, la grande majorité des Juifs a rejeté le sionisme. Les orthodoxes l’ont dénoncé comme impie parce qu’il substituait le nationalisme à la religion, la conquête à la règle de fraternité universelle du Messie. Les Juifs réformateurs libéraux l’ont approuvé, mais ils l’ont également critiqué parce qu’ils craignaient que cela ne mette en danger l’intégration des Juifs en tant que citoyens égaux dans leurs pays d’origine. Les Bundistes l’ont critiqué parce qu’il substituait une unité juive fictive à la lutte des classes et un État juif au socialisme. Certains opposants au sionisme ont en outre pressenti que la colonisation juive européenne de la Palestine susciterait l’inimitié des Arabes et plongerait la région dans une guerre perpétuelle.
Ce qui a fait pencher la balance en faveur du sionisme, c’est la montée du nazisme, dont le point culminant a été l’Holocauste. La décimation des Juifs européens, combinée au refus des États-Unis et des pays européens d’admettre des réfugiés juifs, a finalement convaincu la plupart des Juifs que les sionistes avaient raison – les Juifs avaient en effet besoin d’Israël comme refuge contre la menace d’un nouvel Holocauste.
Une fois que le sionisme a acquis une large acceptation, il s’est progressivement emparé de toutes les synagogues, écoles rabbiniques, centres communautaires juifs et autres institutions. Au cours du processus, il est devenu si étroitement imbriqué avec le judaïsme que peu de gens pouvaient voir une différence entre les deux. Le sionisme et la loyauté envers Israël sont devenus les piliers de l’identité juive. Par conséquent, la plupart des contributeurs à « Reclaiming Judaism from Zionism » ont connu des conflits douloureux avant de renoncer au sionisme.
Cependant, tout comme le nazisme et l’Holocauste ont fait basculer la tendance en faveur du sionisme, la dérive d’Israël vers l’extrême droite et ses violations de plus en plus flagrantes du droit international et des droits de l’homme envers les Palestiniens font maintenant basculer cette tendance contre le sionisme. De plus en plus de Juifs, surtout mais pas exclusivement parmi les jeunes, rejettent le sionisme et Israël et œuvrent en solidarité avec les Palestiniens. Ce faisant, ils redéfinissent l’identité juive et redécouvrent le judaïsme.
Comment expliquez-vous qu’au moment où des pays arabes comme les Emirats arabes unis, le Bahrein, etc. normalisent leurs relations avec l’entité sioniste d’Israël, des citoyens occidentaux se mobilisent dans les BDS pour boycotter les produits israéliens ?
Les pays arabes qui normalisent leurs relations avec Israël sont des monarchies absolues. Tout comme Israël, ils perçoivent l’Iran comme leur principale menace, et Israël leur est utile en tant que fournisseur d’armes, de technologies de surveillance et de renseignements (jusqu’à présent sub rosa). D’après ce que je comprends, les citoyens arabes du Moyen-Orient ont toujours été très compatissants envers les Palestiniens et seraient heureux de rejoindre le mouvement BDS si cela ne tenait qu’à eux. Les citoyens occidentaux, en revanche, ont été aveuglés par la propagande israélienne jusqu’à tout récemment. Grâce aux médias sociaux, Israël n’est plus en mesure d’empêcher les citoyens des pays occidentaux de connaître la vérité sur les crimes qu’il commet à l’encontre du peuple palestinien. La diaspora palestinienne en Europe et aux États-Unis joue également un rôle de plus en plus important dans la sensibilisation des citoyens occidentaux aux conditions répressives dans lesquelles les Palestiniens sont contraints de vivre, et de nombreuses organisations offrent la possibilité de se rendre dans la région et de rencontrer des militants palestiniens. Ces nouveaux développements ont encouragé les citoyens de gauche à embrasser la cause palestinienne, tout comme ils avaient auparavant embrassé la cause des Sud-Africains noirs.
Quel est votre avis sur la politique d’apartheid du peuple palestinien pratiquée par l’entité sioniste d’Israël et comment expliquez-vous que l’ONU et toutes les organisations internationales ferment les yeux sur les crimes d’Israël ?
Le sionisme a toujours été une idéologie coloniale. L’objectif de créer un refuge pour les Juifs (européens) sur une terre habitée par des Arabes palestiniens impliquait nécessairement l’expulsion de la population indigène. Aux États-Unis, bien sûr, les colons européens ont mené des guerres d’extermination contre les peuples autochtones et ont rassemblé les survivants dans des réserves. Ce processus s’est déroulé sur plusieurs siècles lorsque le monde occidental a pleinement soutenu le colonialisme. En revanche, la fondation d’Israël a eu lieu alors que le colonialisme était tombé en discrédit et que les pays anciennement colonisés gagnaient leur indépendance. De ce fait, Israël ne pouvait pas expulser toute la population de la Palestine. Il a plutôt cherché à confiner les Palestiniens dans des enclaves de plus en plus petites, sur le modèle des bantoustans sud-africains. Dans les territoires palestiniens occupés, l’apartheid israélien fonctionne à peu près comme l’équivalent sud-africain, en ce sens que des systèmes juridiques différents s’appliquent aux Palestiniens, qui sont jugés par des tribunaux militaires, et aux colons juifs israéliens, qui sont jugés par des tribunaux civils. L’apartheid israélien est plus extrême, cependant, en empêchant les Palestiniens d’utiliser les mêmes routes que les Juifs israéliens. En 1948, en Israël, le système ressemble davantage à celui de Jim Crow aux États-Unis, en ce sens que les Palestiniens sont soumis à plus de 50 lois discriminatoires, ainsi qu’à une ségrégation dans les écoles et les logements. L’apartheid est intégré dans le concept d’un « État juif » qui, par définition, exclut, assujettit ou marginalise les non-Juifs. Mais Israël a également une raison pragmatique de maintenir la séparation entre les Palestiniens et les Juifs israéliens. Sa politique de déshumanisation des Palestiniens et de stigmatisation des terroristes ne peut fonctionner que si les Juifs israéliens n’interagissent pas avec les Palestiniens, sauf à travers le canon d’une arme.
Israël a réussi à maintenir son impunité face à la réprobation internationale grâce à une propagande intelligente, à l’exploitation de la culpabilité européenne et américaine pour l’Holocauste et, plus récemment, à une campagne visant à définir la critique d’Israël comme de l’antisémitisme. Ces tactiques commencent cependant à s’essouffler, alors que de plus en plus d’informations sur les crimes d’Israël sont divulguées et que de plus en plus de progressistes, y compris des Juifs, se retournent contre Israël. Certains de ces progressistes travaillent pour des organisations internationales et les influencent de l’intérieur.
De plus, on ne peut pas dire honnêtement que l’ONU « ferme les yeux sur les crimes d’Israël ». Le Conseil de sécurité des Nations unies a tenté à plusieurs reprises d’adopter des résolutions condamnant Israël et a échoué uniquement à cause du veto américain. Elle a réussi en décembre 2016 lorsque l’administration Obama sortante s’est abstenue de censurer une résolution qui dénonçait la construction de colonies en territoire occupé comme une violation du droit international. Le Conseil des droits de l’homme des Nations unies (HCDH) a condamné avec force les violations des droits de l’homme des Palestiniens par Israël. L’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), comme son nom l’indique, a été créé spécifiquement pour soulager la détresse des Palestiniens et les a ardemment défendus. C’est pourquoi les Israéliens détestent à la fois l’UNRWA et l’UNHRC et pourquoi l’administration Trump a coupé son financement à l’UNRWA. À une échelle beaucoup plus réduite que l’UNWRA, la Banque mondiale est engagée dans les territoires palestiniens depuis 1992, fournissant des subventions à partir de ses propres revenus, complétée par d’autres financements de donateurs pour soutenir des projets dans les domaines de l’eau, de l’assainissement, des services municipaux, de l’éducation, du travail indépendant et de la santé, dont le plus récent est un projet visant à répondre aux besoins sanitaires urgents liés à la pandémie de Covid-19.
On évoque souvent le poids du lobby sioniste aux États-Unis, comme par exemple l’AIPAC. Comment expliquez-vous cette influence majeure ?
Le lobby sioniste comprend un large éventail d’organisations juives, dont certaines sont antérieures au sionisme et ont servi à l’origine à protéger les Juifs américains contre la discrimination et l’antisémitisme, tout comme l’Anti-Defamation League (ADL), ou pour faire la charité aux juifs pauvres, comme le faisait le United Jewish Appeal (UJA). Dès sa création, l’ADL a réalisé qu’elle ne pouvait pas lutter efficacement contre l’antisémitisme sans combattre le racisme sous toutes ses formes et qu’elle ne pouvait pas protéger les Juifs contre la discrimination si elle ne cherchait pas à protéger les Afro-Américains et les autres minorités opprimées. Cependant, depuis la victoire d’Israël dans la guerre de 1967, toutes ces organisations juives, et beaucoup de nouvelles avec des programmes de droite, ont fait de la défense d’Israël leur mission prioritaire. Ils se mobilisent contre les orateurs, les événements sur les campus, les groupes d’étudiants, les programmes universitaires, les membres du corps enseignant ou tout autre personne qu’ils jugent anti-Israël, et ils parviennent souvent à leurs fins en poursuivant ou en menaçant de poursuivre, ou en incitant les grands donateurs à menacer de couper les financements.
L’AIPAC a été fondée en 1951 spécifiquement comme un lobby politique pro-israélien mais n’a acquis un pouvoir sans équivalent qu’après la guerre de 1967. Elle recrute et encourage les candidats à des fonctions politiques, collecte des fonds pour soutenir leurs campagnes électorales et, jusqu’à récemment, réussissait à dissuader les politiciens d’adopter des positions controversées sur Israël en recrutant des candidats pour se présenter contre eux et en inondant les politiciens fautifs de publicité négative. Les politiciens assez courageux pour résister à l’AIPAC ont généralement subi une défaite aux élections.
La bonne nouvelle est que le lobby sioniste perd peu à peu l’influence qu’il exerçait auparavant. Bien que le harcèlement continue, les universités sont maintenant en mesure d’embaucher et de garder des professeurs dont l’enseignement et la recherche se concentrent sur la Palestine, et des groupes tels que Students for Justice in Palestine (SJP) et Jewish Voice for Peace (JVP) attirent de plus en plus de membres et forment des coalitions avec d’autres organisations étudiantes progressistes.
Sur le front politique, la candidature de Bernie Sanders à la présidence en 2016 a démontré que critiquer Israël ne condamnait plus un homme politique. En 2018, deux candidats musulmans pro-BDS extrêmement progressistes, Rashida Tlaib, une Palestinienne américaine, et Ilhan Omar, une immigrante somalienne portant le hijab, ont remporté les élections pour la première fois, et lorsque l’AIPAC a tenté de les battre en 2020 par les moyens habituels, elle a échoué lamentablement. Entre-temps, deux nouveaux candidats pro-palestiniens viennent de remporter leurs primaires.
Ces développements reflètent un net changement dans le sentiment public, qui s’éloigne d’un soutien inconditionnel à Israël pour se tourner vers une plus grande sympathie pour les Palestiniens.
Interview réalisée par Mohsen Abdelmoumen