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Le sacre d’Al-Barzani pour sauver Kobané et le nouveau projet d’Erdogan pour sauver l’EIIL

Qui peut aujourd’hui se vanter d’avoir des idées simples sur cet Orient qui paraît de plus en plus compliqué ? Qui est prêt à croire ceux qui vivent les tragédies qui le bouleversent et à se méfier de ceux qui propagent les mensonges ? L’analyse de M. Nasser Kandil, développée sur la chaîne syrienne Al-Fadaiya, doit-elle se ranger dans la catégorie des « opinons » ou bien repose-t-elle sur des faits ? Aux lecteurs d’en juger. [NdT]

« Vers l’Orient compliqué, je volais avec des idées simples » - Charles de Gaulle, Mémoires de guerre

* * *

1. Monsieur Kandil, voyez-vous une quelconque efficacité aux frappes aériennes quotidiennes de la « Coalition internationale » sur l’Irak et la Syrie, et pensez-vous qu’existe un agenda US qui n’aurait rien à voir avec la lutte contre le terrorisme ?

Il est certain qu’aussi bien au niveau local qu’au niveau international nous abordons une période post-Daech [EIIL : État Islamique en Irak et au Levant]. C’est en tout cas ce qui ressort du discours d’Obama et qui me semble vrai, non pas à cause de l’importance de Daech, mais plutôt parce que ce qui a conduit à l’émergence de cette organisation terroriste et, par conséquent, à l’émergence de la « Coalition internationale contre Daech » sous la bannière de la lutte contre le terrorisme, est le résultat d’une équation qui s’est imposée suite à trois années d’une guerre axée sur la Syrie.

En effet, à moins d’un évènement inattendu, la tendance est à la victoire pour l’Armée arabe syrienne et la Résistance libanaise dans plusieurs régions. C’est un fait acquis pour la majorité des analystes, puisque si nous revenons six mois en arrière pour rappeler la défaite des groupes armés au Qalamoun [Ouest de la Syrie] – groupes ensuite devenus Daech bien qu’ils comptaient des éléments de Jabhat al-Nosra, de l’ASL et de bien d’autres brigades, certaines étant maintenant oubliées ou exterminées comme le groupe des Ahrar el-Cham etc. – ainsi que leurs défaites à Qara, Nab’K, Yabroud… nous pouvons parler d’un effet boule de neige qui s’est accompagné de l’effondrement de leur moral et de leurs capacités militaires à la fois. Ce n’est pas moi qui le dis, mais la presse étrangère telle que l’Intelligentsia ou l’Independent etc. qui estimaient que la Syrie serait débarrassée des groupes armés en l’espace de 1 à 3 mois.

Ce qui signifie que nous sortions de cette guerre en situation de vainqueurs, chose que John Kerry a tenté d’éviter lorsqu’il a déclaré, à une réunion annuelle qui a eu lieu en Juillet 2013 au Palais des Congrès de la mer Morte en Jordanie : « Nous cherchons à éviter une situation de vainqueurs et de vaincus, dans la région, car ceci aboutirait, d’une façon ou d’une autre, à un axe victorieux d’une certaine couleur confessionnelle et à un axe vaincu d’une autre couleur, entre lesquels il sera difficile de trouver des compromis à l’échelle internationale ».

Autrement dit, malgré le bras de fer continu entre les USA et la Russie, nous en sommes arrivés à la nécessité d’une situation de gagnant-gagnant, ce qui est impossible au niveau de notre région ; l’Iran se trouvant du côté des vainqueurs tandis que l’Arabie saoudite est incapable de sortir du côté des vaincus et qu’Israël est impuissant. Et c’est encore plus vrai un an après [la déclaration de John Kerry] pour l’Arabie saoudite suite aux événements du Yémen, pour Israël suite à sa guerre sur Gaza, et pour la Syrie suite aux victoires successives de son Armée face aux groupes terroristes ; ce que les USA ne peuvent tolérer.

Ici, je me contenterai de rappeler ce que nous disait Richard Perle, l’organisateur principal des néoconservateurs US ayant amené George W. Bush à la présidence des USA avec le « Projet pour un nouveau siècle américain » de 1998 [1], devenu officiel pour le Pentagone, dès 2000, alors qu’il était membre puis chef de la Commission de la politique de défense des USA [Defense Policy Board Advisory Committee]. M. Perle disait en substance : « Les intérêts supérieurs des USA et leur suprématie sur le monde dépendent toutes deux du contrôle des sources de gaz et de pétrole et des voies stratégiques de leur acheminement ».

Il est donc clair que l’invasion de l’Afghanistan et de l’Irak répondaient à ces intérêts, mais les USA étaient bloqués, entre autres, par leur « complexe du Vietnam ». D’où l’idée que le processus « sera probablement de longue durée s’il ne se produit pas d’événement catastrophique et catalyseur, comme un nouveau Pearl Harbor » [2]. Et voilà que subitement et par le plus grand des hasards, arrive l’attentat du 11 Septembre justifiant l’invasion de ces deux pays.

Et aujourd’hui que les USA ont besoin d’un équivalent pour rééquilibrer une situation de perdant-gagnant, voilà que subitement et par le plus grand des hasards, arrive Daech !

Daech est une entité née pour que tous soient ciblés, que tous s’engagent dans l’impasse et que tous en arrivent à chercher la solution pour s’en sortir. Rappelez-vous tous les gros titres des médias : « Si la Syrie s’en sort victorieuse dans un bref délai, que se passera-t-il si les moudjahidines occidentaux, comme ils disent, revenaient au bercail ? ». Tous craignent leur retour et tous prennent des mesures préventives pour s’en protéger, à commencer par l’Arabie saoudite, mais aussi la Grande Bretagne, la Hollande, l’Australie, le Canada, etc. Et que faire lorsqu’on a peur de leur retour ? Réponse : fabriquer un « rêve séduisant » qui retienne ceux qui sont déjà rendus dans notre région et qui attire ceux qui sont encore en Occident.

Une autre règle dit : « Si tu es incapable d’assurer des raisons supplémentaires pour ta victoire, arrange-toi pour créer des raisons supplémentaires qui entraineraient ton adversaire dans la crise ». L’« équilibrage des crises » devient alors la solution qui compense ton incapacité à briser les défenses de ton ennemi. C’est ainsi qu’Israël, incapable de briser la dissuasion créée par la Résistance au Liban et en Palestine, n’a cessé de leur créer des problèmes semblables aux siens.

Partant de là, comment faire pour que l’Arabie saoudite et la Turquie ne soient pas, en fin de compte, les deux seuls pays en crise ? Comment faire pour que l’Iran, la Syrie, et la Résistance subissent cette même crise ? Comment ? Réponse : en introduisant Daech !

Mais Daech répond aussi à une deuxième nécessité imposée du fait que nous sommes face à deux blocs avec d’un côté, l’Iran, la Syrie, et la Résistance pour notre région ; de l’autre, le bloc mené par les USA. Même si les USA arrivaient à jouer gagnant-gagnant avec la Russie à l’échelle internationale, ils n’en demeureront pas moins « perdants » à l’échelle régionale si leurs alliés sont perdants. Qui d’autre que Daech jouerait le rôle du tiers qui offrirait la victoire à tous les alliés des USA ?

C’est ainsi qu’à la fin de ce long film US, l’Arabie saoudite et la Turquie pourront sortir « gagnantes » car elles auront participé à la victoire contre Daech. Ce qui n’empêche pas les USA et leurs alliés d’essayer encore toujours de vaincre la Syrie et notre camp, en se servant de Daech, bien qu’ils n’y soient pas arrivés en joignant leurs efforts à ceux du Qatar, d’Israël, de la France et du reste de l’OTAN, sans oublier Al-Qaïda et les Frères Musulmans […].

En résumé, Daech a été fabriquée pour répondre à cette volonté d’invasion la Syrie, laquelle couvre d’autres nécessités : l’équilibrage des crises, le sauvetage des alliés perdants, le « rêve séduisant » qui éloignerait les terroristes menaçant la sécurité nationale de tous. Cette dernière nécessité étant de loin la plus importante de toutes […].

Alors dire que la Coalition internationale est là pour exterminer Daech ? Non ! Quel serait l’intérêt des USA ? Exterminer Daech c’est reconnaître la victoire de la Syrie et risquer le retour des « moudjahidines » dans leurs pays d’origine […].

Ils ont été envoyés pour se faire tuer. Ils sont prêts à mourir pour l’histoire qu’on leur a inventée, croient à toutes les foutaises qu’ils racontent, aux houris qui les attendent au ciel, au déjeuner à la droite du prophète… Ceux qui les dirigent font partie des agences de renseignement et sont en relation avec le centre qui les a fabriqués, mais ne peuvent pas les contrôler. C’est l’aviation militaire US qui s’en charge. Ainsi, elle a dû les faire reculer d’Irbil, à moins que les USA ne les aient indirectement dirigés vers cette ville pour redresser Massoud al-Barzani et l’attirer de leur côté.

Ils sont aux frontières jordaniennes et servent d’épouvantail aux Saoudiens auxquels on a suggèré qu’ils attaqueront juste après le Fête d’al-Adha [la Grande Fête], pour qu’ils se précipitent à mendier leur protection et payent cash 30 milliards de dollars des installations électroniques made in USA.

En conclusion : Daech a été créée pour une mission. Il est interdit de l’éliminer. Ses actions et son rôle sont contrôlés par le feu US. C’est la raison d’être de la Coalition.

2. Aujourd’hui l’évènement est à Aïn al-Arab [Kobané]. Pourquoi cette ville précisément et quelles sont les équations qui régissent cette bataille ?

Je commencerai par préciser un point important qui étonnera peut-être nombre d’analystes.

La propagande veut que Daech soit liée à une couleur confessionnelle précise et la présente comme le protecteur des uns contre le danger des autres. Certains gobent encore cette histoire. En réalité, nous sommes passés d’une étape où les USA travaillaient sur la discorde confessionnelle en Irak, en Syrie et au Liban, à une nouvelle étape où il n’est plus question de partition sur des bases confessionnelles. Le jeu est devenu trop dangereux car l’Arabie saoudite tomberait. Dans ce cas, les 10 millions de barils sortis de la région du Qatif sous l’autorité morale du Cheikh Nemr Al-Nemr [3] seraient perdus pour les USA et pour les Saoudiens à la fois.

De même, lorsque Massoud al-Barzani a annoncé qu’il souhaitait organiser un référendum sur l’indépendance du Kurdistan irakien suite à l’offensive subite de Daech le 9 juin 2014, il n’a trouvé que Netanyahou pout le féliciter. Les USA ont dit « stop », interdiction d’aller vers la partition de l’Irak et la création d’un État kurde car la même chose se produirait en Turquie.

En somme, ils en seraient arrivés au « suicide » contre lequel les a mis en garde l’ex-secrétaire général de l’OTAN, A.F.Rasmussen, lorsqu’ils se sont tous réunis à Frankfort en 2012 pour discuter du projet de partition du Moyen-Orient proposé par l’historien Bernard Lewis ; projet basé sur la déflagration des composantes sociales et ethniques du Monde Arabe et Musulman, en poussant ses populations à s’entretuer sur des bases confessionnelles et doctrinaires [4]. Ce qui revient à faire sauter les frontières dessinées par MM. Sykes et Picot et à concrétiser le « chaos » constructeur ou destructeur, appelez-le comme vous voudrez.

3. Mais quelles en seraient les conséquences ?

Plusieurs micro-États chiites sur la côte du Golfe arabo-persique dépendant de l’Iran et plusieurs micro-États chiites et alaouites sur la côte méditerranéenne. Des couleurs confessionnelles que les USA n’apprécient pas particulièrement, d’autant plus que ces deux valeurs géostratégiques se trouveraient au sein d’une alliance dirigée par l’Iran.

Cette objection de Rasmussen prise en considération par Henri Kissinger, lors de la réunion de la « Commission des Sages » présidée par Madeleine Albright déléguée par l’OTAN, l’a amené à proposer une nouvelle théorie consistant à jouer sur les cordes démographiques et les tensions confessionnelles pour disloquer les sociétés locales, faire pression, et affaiblir les États, sans pour autant aller jusqu’aux partitions. Par conséquent, Daech et Jabhat al-Nosra font l’affaire, et diviser sur des bases confessionnelles n’est plus de mise.

En effet, si le souci de Daech et de Jabhat al-Nosra était confessionnel, qu’est-ce qui les a poussés à sélectionner Quneitra, Mossoul ou Aïn al-Arab ? Quneitra n’a pas de couleur confessionnelle, mais sa géographie est en liaison avec la sécurité d’Israël. De même pour Mossoul choisie pour être le siège du Califat d’un prétendu État islamique, alors qu’elle est éloignée de Bagdad qui aurait été plus indiquée en la matière. Et pourquoi pas Tikrit ? Est-ce parce qu’elle est plus proche des frontières turques ?

Par conséquent, il s’agit de désormais de dessiner de nouvelles frontières. Pour s’en convaincre, il suffit de situer le positionnement de Daech et de Jabhat al-Nosra en rappelant, au passage, que cette dernière organisation est en passe d’être considérée comme le « Front anti-Assad modéré » alors qu’elle est une branche officielle d’Al-Qaïda ; laquelle Al-Qaïda, ne reconnait pas Daech.

Positionnement de Jabhat al-Nosra :

  • Aux frontières entre le Liban et la Syrie
  • Aux frontières entre le Liban et la Palestine
  • Aux frontières entre la Syrie et la Palestine

Positionnement de Daech :

  • Aux frontières entre la Syrie et l’Irak
  • Aux frontières entre la Syrie et la Turquie
  • Aux frontières entre l’Irak et la Turquie
  • Aux frontières entre l’Irak et la Jordanie
  • Aux frontières entre l’Irak et l’Arabie saoudite

Quant à l’invasion de Aïn al-Arab, elle est destinée à parfaire le tracé des frontières entre la Syrie et la Turquie.

Observez bien leur jeu. Daech s’est approchée d’Irbil [capitale de la région autonome du Kurdistan en Irak] dans un but d’expansion qui n’a donc rien à voir avec la cause chiite. Si tel était le cas, il aurait été plus logique que Daech se dirige vers Samarra, mais Samarra est une ligne rouge. Et si Daech voulait mettre la main sur une zone disputée par les uns et les autres, il aurait été plus logique que ses combattants se dirigent vers Kirkouk, l’un des plus grands centres pétroliers de l’Irak. Mais ils ont préféré se diriger vers Irbil, autre ligne rouge puisque, comme l’a dit le New York Times, dès qu’Obama en a été informé, il a immédiatement envoyé ses bombardiers B-1 pour dresser un « mur de feu » face à leur avancée.

Résultat : Daech a été fort utile pour dénoncer les Peshmergas qui ont assisté sans bouger à la déroute des troupes de l’armée irakienne [5] et Massoud al-Barzani [président du gouvernement régional du Kurdistan en Irak et chef du parti démocratique du Kurdistan, le PDK] a obtempéré devant la volonté des USA. A-t-il abandonné l’idée d’un état kurde indépendant en Irak ? A-t-il mis les Peshmergas sous la protection exclusive des USA alors qu’il les louait tantôt aux Israéliens tantôt aux Turcs ? Toujours est-il qu’il est « le protégé » et que c’est son drapeau qui doit flotter sur Aïn Al-Arab, non celui de la Turquie ou du PYD syrien [Parti kurde de l’Union démocratique, coprésidé par Saleh Muslim]

Et ceci parce que les Unités de protection du peuple [YPG, de Yekîneyên Parastina Gel, qui forment la branche armée du PYD] sont un mélange de mouvements indépendants, ce qui explique qu’ils peuvent se comporter avec justesse ou tomber dans l’erreur. Leurs déclarations du type « Nous sommes dans l’opposition mais nous ne voulons pas nuire à la Syrie ni à l’Armée syrienne, nous ne voulons être des instruments aux mains des puissances étrangères parce que la Syrie est notre patrie et que nous n’oublierons pas ses bienfaits » ne font pas partie du dictionnaire US, d’autant plus que les USA ne supportent pas cette multiplicité de joueurs et doivent en limiter le nombre.

Concernant le jeu Kurde, Daech a dû abandonner des villes importantes telles que Idleb et Alep pour entrer dans Aïn al-Arab ; laquelle, une fois de plus, ne présente pas un grand intérêt pour leur projet prétendument confessionnel. Mais là, et contrairement à Irbil, nous avons eu droit aux explications de l’état-major des armées des États-Unis nous disant que les conditions sur le terrain empêchaient leurs bombardiers de sauver Aïn al-arab […].

4. N’ont-ils pas déclaré que ce n’était pas leur mission ?

En effet, John Kerry, a déclaré que « Kobané n’était pas un objectif stratégique » [6]. Entretemps les forces kurdes qui défendaient cette ville ont été saignées pour les faire plier, et Abdullah Öcalan a appellé par à l’unité de tous les kurdes [7] pour sauver Kobané. Tous se sont rendus chez Al-Barzani, et nous avons eu droit à la photo souvenir de 12 chefs politiques kurdes lui déclarant leur allégeance.

Massoud al-Barzani est sacré « chef des Kurdes ». La mission conçue pour Aïn al-Arab est remplie. Il n’est plus question qu’elle tombe aux mains de Daech. Les bombardements US sont désormais plus efficaces [8]. Les équations sont modifiées, et la Turquie doit s’assoir à la table des négociations.

5. Pour quelles raisons la Turquie s’abstient-elle de participer à la Coalition internationale ? Comment comprendre les conditions qu’elle avance pour sa participation et notamment son acharnement contre le Président syrien ? Comment comprendre les déclarations d’Erdogan refusant d’armer le PYD et le traitant de parti terroriste ?

Pour moi, la Turquie et les USA marchent ensemble […]. Les USA ont leur projet et la Turquie a le sien mais qui, néanmoins, reste au cœur du projet US. Daech est née à la demande des USA et la Turquie l’a couvée par procuration.

Il est désormais de notoriété publique que le gouvernement turc et le Qatar portent l’étiquette des Frères Musulmans et que le projet de les porter au pouvoir en Égypte, en Tunisie, en Libye, en Syrie et en Irak, a été confié à Mme Hilary Clinton en tant que ministre des Affaires étrangères des USA pour en finir avec la Résistance dans notre région […]. Peu leur importait le sacrifice d’alliés tels que Hosni Moubarak et Zine el-Abidine. Peu leur importait l’assassinat de Mouammar Kadhafi. Il leur fallait faire plier Bachar al-Assad et que le meilleur s’acquitte de la besogne après la distribution des rôles […].

Erdogan sait parfaitement que ce n’est plus le sujet du moment. Alors, n’accordez pas trop d’importance à ses slogans, son nouveau projet est tout autre et a plutôt surpris les délégués US qui se sont rendus la semaine dernière à Ankara.

Partant du fait que Daech est son enfant commun avec les USA, mais que c’est lui qui la contrôle, qui peut toujours s’en servir comme épouvantail, qui peut la nourrir ou la sevrer selon les circonstances, il a décidé qu’il serait dommage de se passer de ses services. II a donc expliqué à ses visiteurs sa nouvelle mission pour Daech, avec cartes à l’appui.

Cette nouvelle mission consiste à concentrer les forces de Daech dans la zone à cheval sur la Syrie et l’Irak entre les deux fleuves du Tigre et de l’Euphrate et, en évitant Bagdad, à les faire occuper le corridor qui irait vers le zone désertique en direction de la Jordanie. C’est ainsi, qu’il pense pouvoir acheminer le gazoduc qatari vers l’Europe sans avoir à se battre avec les gouvernements syriens et irakiens. Et c’est ainsi, qu’il pense satisfaire les USA et l’Europe qu’il libérerait de sa dépendance au gaz russe […].

Les délégués US lui ont répondu que Daech devait avoir une date de péremption, car il était impossible de justifier une telle occupation de ces terroitoires par des terroristes, ni devant leurs Forces armées, ni devant leur opinion publique, même s’ils en étaient les géniteurs, et qu’il n’était pas question de jouer de la sorte avec l’organisation des pays exportateurs de gaz et de pétrole.

Là est le désaccord entre la Turquie et l’administration US, lequel arrive suite à l’incapacité évidente de ses autres alliés à se battre sur le terrain […]. Et c’est ce qui explique qu’elle peut, à n’importe quel moment, se dégager de toutes responsabilités pour les laisser face à leurs crises de perdants . N’a-t-il pas suffi qu’Erdogan hausse le plafond de ses prétentions pour que Joe Biden rappelle tous ces alliés régionaux à l’ordre [9] dans son fameux discours à Harvard ?

Nasser Kandil

19/10/2014

Monsieur Nasser Kandil est libanais, ancien député, Directeur de TopNews-nasser-kandil, et Rédacteur en chef du quotidien libanais Al-Binaa

Source : Vidéo You Tube d’Alfadaiya TV [Syrie] ; M. Nasser Kandil est interrogé par Mme Racha Al-Kassar

https://www.youtube.com/watch?v=hpRL3c5Qm_Q

Transcription et traduction par Mouna Alno-Nakhal

Notes :

[1] Project for the New American Century

http://en.wikipedia.org/wiki/Project_for_the_New_American_Century#.22New_Pearl_Harbor.22

[2] Stratégie impériale pour un nouvel ordre mondial : les origines de la Troisième Guerre mondiale.

http://www.mondialisation.ca/strat-gie-imp-riale-pour-un-nouvel-ordre-mondial-les-origines-de-la-troisi-me-guerre-mondiale/16186

[3] Les saoudiens condamnent à mort l’opposant religieux et politique Sheikh Baqir-Al Nemr

http://www.lejournalduforkane.com/les-saoudiens-condamnent-a-mort-lopposant-religieux-et-politique-sheikh-baqir-al-nemr

[4] L’historien Bernard Lewis, le « Printemps Arabe » et les nouveaux assassins.

http://www.mondialisation.ca/lhistorien-bernard-lewis-le-printemps-arabe-et-les-nouveaux-assassins/5402894

[5] Les Kurdes en rêvaient, grâce à l’EIIL ils l’ont fait

http://www.slate.fr/story/88817/eiil-kurdes

[6] Pourquoi Kobané n’est pas une ville stratégique pour les USA

http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20141009.OBS1700/pourquoi-kobane-n-est-pas-une-ville-strategique-pour-les-usa.html

[7] Les kurdes, tous unis pour sauver Kobané

http://www.zamanfrance.fr/article/kurdes-tous-unis-sauver-kobane-12867.html

[8]Syrie : les Kurdes contrôlent la majeure partie de Kobané

http://www.rtl.fr/actu/international/syrie-les-kurdes-controlent-la-majeure-partie-de-kobane-7774934694

[9] EIIL - Le vide-président des USA, Joe BIDEN, mange le morceau !

http://www.youtube.com/watch?v=DEC_WeOYdvo


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Eric Hazan. Changement de propriétaire. La guerre civile continue. Le Seuil, 2007
Bernard GENSANE
Très incisif et très complet livre du directeur des éditions La Fabrique (qui publie Rancière, Depardon, Benjamin etc.), ce texte n’est pas près de perdre de son actualité. Tout y est sur les conséquences extrêmement néfastes de l’élection de Sarkozy. Je me contenterai d’en citer le sombrement lucide incipit, et l’excipit qui force l’espoir. « Dimanche 6 mai 2007. Au bureau de vote, la cabine dont on tire les rideaux derrière soi pour mettre son bulletin dans l’enveloppe s’appelle un (…)
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« Si le Président se présente devant le Peuple drapé dans la bannière étoilée, il gagnera... surtout si l’opposition donne l’impression de brandir le drapeau blanc de la défaite. Le peuple américain ne savait même pas où se trouvait l’île de la Grenade - ce n’avait aucune importance. La raison que nous avons avancée pour l’invasion - protéger les citoyens américains se trouvant sur l’île - était complètement bidon. Mais la réaction du peuple Américain a été comme prévue. Ils n’avaient pas la moindre idée de ce qui se passait, mais ils ont suivi aveuglement le Président et le Drapeau. Ils le font toujours ! ».

Irving Kristol, conseiller présidentiel, en 1986 devant l’American Enterprise Institute

Le 25 octobre 1983, alors que les États-Unis sont encore sous le choc de l’attentat de Beyrouth, Ronald Reagan ordonne l’invasion de la Grenade dans les Caraïbes où le gouvernement de Maurice Bishop a noué des liens avec Cuba. Les États-Unis, qui sont parvenus à faire croire à la communauté internationale que l’île est devenue une base soviétique abritant plus de 200 avions de combat, débarquent sans rencontrer de résistance militaire et installent un protectorat. La manoeuvre permet de redorer le blason de la Maison-Blanche.

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