Le bimestriel le Plan B a noté les dérapages antisémites d’Alexandre Adler, Laurent Joffrin et Philippe Val et s’attend à ce que la LICRA et SOS Racisme les traînent devant tribunaux de la République. Attention, deuxième degré !
Affaire Charlie Hebdo : la pétition à laquelle vous avez échappé
« Le ventre est encore fécond... »
SOS Racisme, la Licra et une trentaine de personnalités politiques et d’intellectuels européens de tous horizons - parmi lesquels Bertrand Delanoë, Bernard-Henri Lévy, Elisabeth Badinter, Pascal Bruckner et Elie Wiesel - auraient signé un communiqué dont Le Plan B s’est procuré une copie. Ses auteurs dénoncent la campagne de haine antisémite déclenchée par le directeur de Charlie Hebdo, le PDG de Libération et un chroniqueur de France Culture par ailleurs éditorialiste au Figaro.
Nous tenons à exprimer notre plus vive émotion après les déclarations à caractère antisémite proférées par Philippe Val et son entourage à l’occasion de « l’affaire Siné ». Pour justifier l’éviction du chroniqueur de Charlie Hebdo, congédié pour avoir moqué le fils du chef de l’Etat français, le directeur de l’hebdomadaire satirique et deux dignitaires de son fan-club ont insulté la communauté juive en des termes qui nous renvoient aux pages les plus sombres de notre histoire.
Le 18 juillet, en direct sur France Culture, c’est d’abord le journaliste gastronomique du Figaro, Alexandre Adler, qui dérape en s’attaquant à Michel Polac, un collaborateur de Charlie Hebdo qui a refusé de prendre part à la curée contre le dessinateur : « Michel Polac, né juif sans aucun doute, ami de Siné et dont la femme Catherine Siné est sa productrice [sic]… » Alexandre Adler établit une corrélation entre l’origine juive supposée de Michel Polac et les intérêts financiers - incarnés ici par la figure déshumanisée de la « productrice » - qui motiveraient son soutien à Siné. Derrière cet amalgame ignoble, une oreille attentive ne peut pas ne pas percevoir l’écho sinistre des pogroms.
C’est ensuite au tour de Laurent Joffrin de se couvrir d’infamie. Dans une tribune de soutien à Philippe Val publiée le 25 juillet dans Libération, il utilise le mot de « race » pour qualifier les personnes d’origine juive. Le fait que Laurent Joffrin soit connu comme le « journaliste le plus bête de France » ne saurait excuser l’usage d’une notion ancrée au coeur-même de l’idéologie raciste. Faut-il rappeler au directeur de Libération que le concept de race est dépourvu de toute valeur biologique et qu’il est à l’origine des crimes les plus abominables jamais perpétrés dans l’histoire de l’humanité ?
Cinq jours plus tard, dans un portrait de Siné publié par Libération (30.7.08), Philippe Val laisse échapper : « Rendez-vous compte, pas un seul journaliste non juif qui me soutient. » Comment comprendre un tel dérapage ? Le directeur de Charlie Hebdo s’est-il enquis auprès de chaque journaliste qui a traité de l’affaire Siné pour savoir s’il était juif ? La judéité constitue-t-elle à ses yeux un critère pertinent pour évaluer le travail d’un journaliste ? En sommes-nous arrivés à ce point de régression antisémite qu’il nous faille signaler à Philippe Val, au risque de nous rabaisser à son niveau, qu’un certain nombre de personnes d’origine juive ont désavoué ses procédés d’épuration interne et signé la pétition de solidarité envers Siné ? En laissant entendre qu’être juif vaut soutien au patron de Charlie Hebdo, ce dernier contredit les enseignements de Hannah Arendt et de Spinoza ; il offense gravement tous les Juifs et, à travers eux, l’humanité entière.
La conjonction en quelques jours de ces trois émanations pestilentielles, dont aucun observateur de bonne foi ne peut nier le caractère antisémite, apparaît d’autant plus révoltante qu’elle n’a, jusqu’à présent, soulevé aucune réaction dans la presse française. Nous sommons par conséquent Alexandre Adler, Laurent Joffrin et Philippe Val de s’expliquer sur leurs propos et de présenter des excuses publiques pour le préjudice qu’ils ont causé à quiconque demeure épris d’égalité. A défaut de quoi, la LICRA et SOS Racisme se réservent le droit, soutenus par tous les signataires de ce communiqué, et au-delà par toutes les femmes et tous les hommes de bonne volonté, de réclamer réparation auprès des tribunaux de la République.