Anne Jourdain décrit le grand n’importe quoi du recrutement des enseignants aujourd’hui : « Avec quatre mille postes d’enseignant vacants à la rentrée – un record –, la crise des vocations s’approfondit en France. Tandis que des milliers de contractuels sont en passe d’être recrutés au pied levé, une association fait grincer des dents. Le traitement sur mesure dont bénéficient ses recrues agace leurs collègues, bien moins cajolés. »
Alain Gresh a élaboré un dossier sur la colonisation et l’apartheid qui sévissent en Palestine : « Récurrence des interventions militaires israéliennes à Gaza, raids incessants de cette même armée en Cisjordanie, poursuite de la colonisation – autorisée par Tel-Aviv ou « sauvage » –, difficultés économiques liées à la pandémie de Covid-19 et impéritie de l’Autorité palestinienne dirigée par M. Mahmoud Abbas, qui semble ne se préoccuper que de la coopération militaire avec Israël : la liste des épreuves subies par la population en Palestine est un fardeau aggravé par le délitement du processus de paix et l’échec patent de la solution à deux États. De quoi nourrir la résurgence de mouvements sionistes religieux, qui refusent toute concession aux Palestiniens).
Serge Halimi s’inquiète de l’évolution de la guerre en Ukraine : « ix mois après avoir envahi l’Ukraine, la Russie envisage d’annexer une partie du territoire qu’elle occupe. De leur côté, les pays occidentaux fournissent au pays agressé des armes toujours plus sophistiquées en même temps qu’ils y envoient des escouades de « conseillers militaires ». Moscou ne veut plus seulement soumettre l’Ukraine, mais la dépecer ; Washington ne veut plus seulement contenir la Russie, mais la vaincre. Rien ne paraît enrayer cet engrenage où chacun des camps, de plus en plus dominé par des partisans de la guerre, pense avoir les coudées franches parce qu’il parie que son adversaire, même acculé, ne commettra jamais l’irréparable pour se dégager. Or des erreurs de pronostic de ce genre peuplent les cimetières.
L’Union européenne et les États-Unis ont promis au président ukrainien Volodymyr Zelensky qu’ils l’aideraient à récupérer militairement le terrain conquis par l’ennemi. Ils lui ont délégué la définition des missions et la médiatisation des opérations destinées à mobiliser l’opinion. Si, comme on peut le craindre, la Russie annexe cet automne tout ou partie du Donbass, ou les régions de Kherson et de Zaporijia un peu plus au sud, les Occidentaux aideront-ils Kiev à les reconquérir, en prenant alors le risque d’une confrontation encore plus directe et plus périlleuse avec Moscou, susceptible d’appliquer à ces territoires la protection nucléaire qu’il réserve au sien ?
Igor Delanoë (“ Ukraine, la guerre à tout prix ”) se montre très pessimiste : « Près de six mois après le déclenchement par le Kremlin de l’invasion de l’Ukraine, son « opération spéciale » s’est enkystée le long d’une ligne de front qui s’étend des faubourgs de Kharkov, à l’est, aux steppes des rives ukrainiennes de la mer Noire avec le Donbass pour épicentre des combats. Alors que la logique des armes l’emporte, la perspective d’une fin des hostilités paraît lointaine. Car, depuis le sommet d’Istanbul du 29 mars qui a vu les négociateurs russes et ukrainiens se réunir autour d’un projet de traité de paix, le volet diplomatique de la crise est au point mort et les positions se sont durcies. »
Loïc Ramirez nous emmène dans le Dombass occupé : « Les journalistes occidentaux pénètrent rarement au Donbass, si ce n’est à l’occasion de quelques voyages de presse organisés. Notre envoyé spécial a pu s’y rendre à la fin du printemps et y circuler sans escorte. De Donetsk, sous les tirs ukrainiens, à Marioupol, défigurée par les bombardements russes, récit de la guerre de ce côté-ci du front. »
Pour Ibrahim Warde, la chasse aux oligarques russes est ouverte : « Premiers bénéficiaires de la libéralisation économique entreprise par la Russie au tournant des années 1990, les oligarques connaissent des fortunes diverses à l’heure des sanctions. Accusée par les puissances occidentales de proximité avec M. Vladimir Poutine ou par Moscou de verser dans la traîtrise, cette caste de nantis ne jouit plus de la tolérance dont elle a longtemps profité à l’Ouest. Si l’on en croit la liste publiée chaque année par le magazine américain Forbes, la Russie compte à elle seule 83 milliardaires en dollars américains en 2022, en baisse par rapport à l’année précédente, lorsque leur nombre s’élevait à 117. En un an, les oligarques auraient ainsi perdu en moyenne 27 % de leur fortune. Les sanctions draconiennes imposées par les Occidentaux le 24 février, à la suite de l’invasion russe en Ukraine, commencent à produire leurs effets, qui viennent s’ajouter aux difficultés liées à la guerre elle-même. Mais, toujours selon les estimations de Forbes, si vingt-cinq milliardaires russes ont été sanctionnés par les États-Unis, le Royaume-Uni ou l’Union européenne, pas moins de cinquante autres n’ont pas, ou pas encore, été inquiétés. »
Serge Halimi et Pierre Rimbert déplore le voluptueux bourrage de crâne dont souffrent les médias occidentaux à l’occasion de cett§e guerre en Ukraine : « Le président Volodymyr Zelensky est-il aussi rédacteur en chef des médias occidentaux ? Ses vidéos quotidiennes donnent le ton, ses thèmes et anathèmes sont déclinés dans les heures qui suivent du New York Times au Monde en passant par Arte, Paris Match, les chaînes d’information continue et les radios publiques. Des livraisons d’armes occidentales traînent ? Libération relaie les doléances de Kiev auprès de l’Élysée : « L’aide militaire, notamment celle de la France, est bien en deçà de ses besoins » (20 juillet). L’intérêt des populations occidentales pour le conflit faiblit ? Une parlementaire ukrainienne s’en désole dans L’Opinion, ce qui permet à la revue de presse de France Inter d’amplifier son appel : « Elle supplie les médias occidentaux de ne pas oublier la guerre. Ils ont autant de pouvoir que les grands dirigeants, et si l’information se tarit Moscou va en profiter. (…) Oui, soupire le journaliste, il y a risque de lassitude, oui, la routine s’installe déjà. » La routine assurément : celle d’une chambre d’écho médiatique qui amplifie les informations favorables au gouvernement ukrainien avec autant de détermination qu’elle disqualifie tout ce qui pourrait le contredire.
Saša Dragojlo et Ivica Miladenović expliquent à quel point le lithiuem serbe est convoitée par l’Europe : « Devant l’ampleur des manifestations organisées au printemps dernier, le président serbe a dû renoncer à l’exploitation d’un important gisement de lithium. Mais M. Aleksandar Vučić pourrait relancer le projet du géant minier Rio Tinto, sous la pression de l’Union européenne, qui entend développer massivement les voitures électriques… en délocalisant les sources de pollution. »
Quant au bois roumain, il fait l’objet de toutes sortes de combines (Hervé Bossy et Hugo Nazarenko) : « L’économie parallèle représenterait près du tiers de la production de richesse en Roumanie, selon certains travaux. Classé parmi les plus touchés par les détournements d’argent public en Europe, ce pays — qui a rejoint l’Union européenne en 2007 — enchaîne les scandales. L’exemple de la filière bois permet d’appréhender le caractère systémique de la corruption. »
Jean-Baptiste Mallet revient sur l’histoire oubliée du pacifisme : « Peu avant le début de la première guerre mondiale, le mouvement pacifiste international ambitionnait de construire une cité universelle afin de réunir l’élite scientifique, intellectuelle, sportive et spirituelle de toutes les nations. Dans son dernier ouvrage, le journaliste Jean-Baptiste Malet raconte l’histoire méconnue de cette utopie qui croisa les destins de philanthropes bourgeois, de socialistes et du roi des Belges. »
Le clan Marcos revient aux Philippines (François-Xavier Bonnet) : « Symbole de l’oppression du peuple philippin et de la corruption, le couple Marcos fut chassé du pouvoir en 1986. Le fils Ferdinand « Bongbong » Marcos Jr a repris la place, démocratiquement, en mai dernier. Son gouvernement a fait arrêter le militant de gauche, candidat à la vice-présidence, Walden Bello. Et sur le front diplomatique, quels seront ses choix ? »
Pour Michael Klare, Washington et Pékin jouent avec le feu : « Que cherchait Mme Nancy Pelosi, troisième personnage de l’État américain, en se rendant début août à Taipei ? Un simple coup de publicité ? Ou voulait-elle provoquer Pékin, obligeant M. Joseph Biden et son gouvernement à accélérer le changement de la politique historique des États-Unis ? Celle-ci combine la reconnaissance d’« une seule Chine » et une certaine protection de Taïwan. »
Victor de la Fuente et Libio Pérez s’interrogent sur la future constitution chilienne : « Longtemps vitrine du néolibéralisme, le Chili n’en finit pas de décevoir ses admirateurs d’antan : en quelques années, ce champion des inégalités a renoué avec les mobilisations populaires, a élu un président de gauche et s’est engagé dans un processus de rédaction d’une nouvelle Constitution, afin de remplacer un texte issu de la dictature. Ainsi, la déception des uns suscite l’enthousiasme des autres. »
Maëlle Mariette a voyagé dans la noivelle bourgeoisie issue du chavisme : « Au cours de la présidence d’Hugo Chávez (1999-2013), le Venezuela s’est illustré par la rapidité avec laquelle il parvenait à réduire les inégalités. Depuis, la crise qui déchire le pays — exacerbée par les sanctions imposées par Washington — a plongé une grande partie de la population dans la misère, tout en donnant naissance à une nouvelle bourgeoisie, dispendieuse, richissime et proche du pouvoir. »
Breno Altman estime que Lula vire au centre : « L’élection présidentielle brésilienne se tiendra le 2 octobre. L’ancien président de gauche Luiz Inácio Lula da Silva et le dirigeant d’extrême droite Jair Bolsonaro devraient se qualifier pour le second tour, prévu le 30 octobre. À moins que la stratégie adoptée par l’ancien syndicaliste ne lui permette de l’emporter dès le premier. Mais à quel prix ? »
Hicham Alaoui analyse le triomphe fragile des contre-révolutions arabes : « Le verrouillage des institutions mené par le président tunisien Kaïs Saïed depuis un an semble avoir symboliquement fermé la parenthèse démocratique entamée au Maghreb et au Machrek en 2011. Mais cette glaciation est-elle définitive ? Faute de doctrine idéologique claire et de projets économiques viables, les autocraties du monde arabe subiront tôt ou tard de nouvelles protestations massives. »
André-Michel Essoungou et Fanny Pigeaud se sont mis à l’écoute des voix de la Françafrique : « Ignorance ? Suivisme ? Patriotisme mal placé ? Les médias français épousent facilement le discours officiel lorsqu’il s’agit de l’Afrique. Les interventions militaires — de la Côte d’Ivoire au Sahel — seraient ainsi « utiles » et « désintéressées ». Ce traitement biaisé rend incompréhensible l’échec d’opérations telles que « Barkhane » ou l’impopularité croissante de Paris sur le continent. »
Anne-Cécile Robert estime pour sa part qu’Emmanuel Macron a « trébuché au Cameroun » : « Destiné à contrer l’influence croissante de la Russie en Afrique, le voyage-éclair du président Emmanuel Macron au Cameroun, fin juillet dernier, a surtout souligné la proximité de la France avec les dirigeants les moins fréquentables du continent. Cet impair trahit la fébrilité de Paris, qui doit surmonter ses revers diplomatiques et reconquérir des parts de marché face à la Chine. »
Martine Bulard en est malheureusement certaine : le travail ne paye pas : « Selon le président Macron, la « fin de l’abondance » est arrivée. Mais dans quel monde vit-il ? Celui des patrons d’entreprises publiques qui veulent faire sauter leur plafond salarial jugé trop bas (37 500 euros par mois) ? Celui des actionnaires ? Pour beaucoup de familles, la rentrée se tient sous le signe de la chute du pouvoir d’achat, que les mesures de cet été ne compenseront pas. »
Jean-Cristophe Servant évoque les connivences très originales de l’ultra-violent Lesotho : « Au Lesotho — pays le plus meurtrier du continent africain —, musique et criminalité vont de pair. Aux affrontements entre gangs s’ajoutent les connivences entre musiciens et élites dirigeantes. Mais une nouvelle génération entend prendre ses distances avec les vendettas. »
PS : Ma 800ème contribution dans les colonnes du GS.