Un agent de sécurité de l’ambassade de Chine, dont les bureaux se trouvent aux deux derniers étages de l’hôtel, a été tué, alors que trois autres membres du personnel de l’ambassade ont été légèrement blessés.
Les rebelles shebab ont revendiqué cet attentat, disant qu’il constituait une vengeance après les récentes opérations menées conjointement par la Mission de l’Union africaine en Somalie (Amisom) et l’armée nationale somalienne dans les régions de Dinsoor et de Bardhere (sud).
Choisir comme cible le Jazeera Palace, qui abrite les ambassades de Chine, du Qatar et des Emirats arabes unis et accueille parfois des réunions gouvernementales de haut niveau, vise à l’évidence à donner une plus grande résonance internationale à l’attentat.
Vu la menace accrue que fait peser le terrorisme, une coopération internationale constitue une urgence.
Depuis que la Somalie a sombré dans la guerre civile en 1991, bien que les opérations antiterroristes se poursuivent, les résultats ne sont toujours pas satisfaisants. Les rebelles shebab ont été plusieurs fois frappés, mais ils sont toujours là.
Dans la lutte contre le terrorisme en Somalie, il existe trois problèmes majeurs.
Tout d’abord, la guerre civile a fourni un terreau au terrorisme. Un cocktail mélangeant années de violence, séparatisme armé et factions tribales ont donné aux islamistes shebab un large espace de diffusion. La faiblesse du gouvernement de transition en Somalie, retranché dans un pan du territoire, le rend incapable d’assurer la sécurité nationale.
Deuxièmement, le nombre de pauvres augmente. Le taux de chômage des jeunes Somaliens reste toujours très élevé et la lutte contre la pauvreté et la famine est quotidienne. Beaucoup de jeunes, désespérés, ont rejoint les rangs shebab et d’autres organisations, ou bien se sont lancés dans la piraterie maritime pour survivre. Autant de "renforts" pour les forces terroristes. Tant que la pauvreté frappera la Somalie, la menace terroriste pèsera sur le pays.
Troisièmement, l’indifférence internationale a donné des ailes aux islamistes shebab. Depuis vingt ans, la communauté internationale et les organisations régionales ont essayé à plusieurs reprises de résoudre le conflit en Somalie, mais sans grand succès. Les Etats-Unis et d’autres grandes puissances ne jouent pas pleinement leur rôle dans le processus de paix en Somalie, alors que les pays voisins ont leurs propres objectifs et que les aides à la lutte antiterroriste en Afrique de l’Est sont faibles.
La situation en Somalie reflète ce qui se passe au niveau du terrorisme mondial. Des organisations terroristes cherchent toujours à ouvrir des bases au Moyen-Orient et en Afrique, dans les régions qui connaissent à la fois une stagnation socio-économique, des pressions externes et des troubles internes.
Les situations de guerre sont favorables à l’installation du terrorisme, la pauvreté est bénéfique pour le recrutement et le vide sécuritaire aide à la collusion des différentes organisations terroristes.
C’est donc l’heure de sonner l’alarme. L’Etat islamique (EI) a connu une ascension fulgurante, les organisations terroristes régionales fusionnent, un "rayon d’instabilité" grandit, les dimensions de "l’horreur afro-asiatique" sont sans précédent. Le terrorisme a déjà constitué un réseau international, ses membres sont de plus en plus locaux et la planification des attentats passe par l’utilisation de moyens high-tech. Cette tendance a aggravé l’instabilité de la région.
Une lutte internationale efficace contre le terrorisme nécessite de l’argent, de l’aide technique, une formation de personnels, la fourniture d’équipements, un partage de renseignements et le développement conjoint de projets.
L’attentat du Jazeera Palace est le dernier d’une série de violences commises dans ce pays de la Corne de l’Afrique déchiré par la guerre.
He Wenping, chercheuse à l’Académie chinoise des sciences sociales, a noté que les rebelles shebab, un groupe islamiste radical affilié à Al-Qaïda en 2012 et qui recrute aussi au Kenya, constituent la principale menace à la sécurité en Afrique de l’Est. Ils ont perpétré au Kenya des attaques de grande ampleur, dont la tuerie dans le centre commercial Westgate à Nairobi en 2013 (67 morts) et, plus récemment, en avril, le massacre à l’université de Garissa (nord-est) qui a coûté la vie à 148 personnes, essentiellement des étudiants.
Ce groupe continue de s’adapter en lançant des attaques asymétriques et en bloquant l’accès aux zones récemment conquises par l’armée somalienne. "De plus, ce groupe a étendu sa présence au Puntland (nord-est) et il est devenu une menace plus significative au sein de la sous-région", s’inquiète Edmond Mulet, sous-secrétaire général des Nations Unies en charge des opérations pour le maintien de la paix.
LIU Ying
(Texte envoyé par l’auteur au GS).
De nationalité chinoise, LIU Ying est rédactrice au Département des informations internationales de l’Agence de presse Chine Nouvelle à Pékin. Elle a été en poste au Maroc et en France.