RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher
23 

La leçon d’Haiti

Voilà deux jours, à partir de six heures de l’après-midi à Cuba, mais déjà de nuit en Haïti du fait de sa position géographique, les chaînes de télévision ont commencé à informer qu’un violent séisme de catégorie 7,3 à l’échelle Richter, avait frappé sévèrement Port-au-Prince, l’épicentre ayant été repéré dans une faille tectonique située en mer à seulement quinze kilomètres de la capitale haïtienne où 80 p. 100 de la population vit dans des maisons de pisé et de torchis.

Les nouvelles ont continué d’arriver presque sans interruption pendant des heures. Les images manquaient, mais on disait que de nombreux bâtiments publics, des hôpitaux, des écoles et des installations plus solides s’étaient effondrés. J’ai lu qu’un séisme force 7,3 équivalait à l’énergie libérée par une explosion de quatre cent mille tonnes de TNT.

Les descriptions étaient tragiques. Les blessés en pleine rue réclamaient en criant des secours médicaux, au milieu des ruines sous lesquelles des familles étaient ensevelies. Personne n’a pu toutefois, durant bien des heures, transmettre la moindre image.

La nouvelle a surpris tout le monde. Nous étions nombreux à écouter de fréquentes informations sur des cyclones et de grandes inondations en Haïti, mais nous ignorions que notre voisin courait des risques de fort tremblement de terre. C’est alors qu’on a appris que le dernier grand séisme survenu dans cette ville remontait à deux cents ans en arrière, quand elle ne comptait sans doute que quelques milliers d’habitants.

A minuit, le chiffre de victime était encore approximatif. De hauts fonctionnaires des Nations Unies et plusieurs chefs de gouvernement parlaient de ces événements bouleversants et annonçaient l’envoi de secouristes. Comme des troupes des Nations Unies de divers pays étaient déployées en Haïti dans le cadre de la MINUSTAH, des ministres de la défense évoquaient des pertes éventuelles parmi leurs personnels.

C’est réellement hier matin, mercredi, que des nouvelles attristantes ont commencé à arriver au sujet d’énormes pertes humaines dans la population, et des organisations comme les Nations Unies signalaient que certains de leurs bâtiments s’étaient effondrés, une expression qui ne dit rien en soi ou qui peut au contraire signifier beaucoup.

Des nouvelles toujours plus bouleversantes au sujet de la situation dans ce pays frère ont continué d’arriver pendant des heures. Les chiffres de victimes mortelles variaient selon les sources de trente à cent mille. Les images sont désolantes. Cette catastrophe a reçu une large divulgation mondiale, et de nombreux gouvernements sincèrement émus s’efforcent de coopérer dans la mesure de leurs moyens.

Toute tragédie bouleverse de bonne foi un grand nombre de personnes, surtout quand il s’agit de désastre naturel. Mais rares sont sans doute celles qui se demandent : pourquoi Haïti est-elle un pays si pauvre ? Pourquoi sa population dépend-elle à presque 50 p.100 des envois de fonds familiaux en provenance de l’étranger ? Pourquoi n’analysent-elles pas aussi les réalités qui ont conduit à la situation actuelle en Haïti et à ses énormes souffrances ?

Le plus curieux de cette histoire, c’est que personne ne rappelle à aucun moment qu’Haïti a été le premier pays où quatre cent milles Africains victimes de la traite et de l’esclavage des Européens se soulevèrent contre trente mille Blancs, maîtres de plantations de canne à sucre et de café, déclenchant la plus première grande révolution sociale sur notre continent. Ils écrivirent des pages d’une gloire insurpassable. Ils mirent en déroute le général de Napoléon le plus éminent.

Haïti est le pur produit du colonialisme et de l’impérialisme, de plus d’un siècle d’utilisation de ses ressources humaines aux travaux les plus durs, des interventions militaires et de la ponction de ses richesses.

Cet oubli historique ne serait pas aussi grave que le fait réel qu’Haïti constitue une honte de notre époque, dans un monde où l’immense majorité des habitants de la planète continue d’être exploitée et mise à sac.

Des milliards de personnes en Amérique latine, en Afrique et en Asie souffrent de carences semblables, quoique toutes ne les subissent peut-être dans des proportions aussi élevées qu’en Haïti.

De situations comme celles de ce pays ne devraient exister nulle part sur la Terre, et pourtant des dizaines de milliers de villes et de villages y connaissent des conditions semblables, voire pires, à cause de l’ordre économique et politique international injuste qu’on a imposé au monde. La population mondiale n’est pas seulement menacée par des désastres naturels comme celui d’Haïti, qui est un pâle reflet de ce que les changements climatiques peuvent provoquer, bien que ces risques aient été vraiment tournés en dérision à Copenhague.

Il est juste de dire à tous les pays et à toutes les institutions qui ont perdu des citoyens ou du personnel dans le désastre naturel d’Haïti : nous ne doutons pas que vous ferez les plus grands efforts pour sauver des vies et soulager la douleur de ce malheureux peuple ; nous ne pouvons vous rendre coupables du phénomène naturel qui vient d’y avoir lieu, bien que nous soyons en désaccord avec la politique qu’on a suivie vis-à -vis d’Haïti.

Je ne peux m’empêcher de le dire : il est temps de chercher des solutions réelles et véritables pour ce peuple frère !

Dans le domaine de la santé et d’autres, Cuba, bien que pays pauvre en butte à un blocus, coopère depuis des années avec le peuple haïtien. Environ quatre cents médecins et spécialistes de la santé lui prêtent des services gratuits. Nos médecins travaillent tous les jours dans 227 des 337 communes du pays. Par ailleurs, au moins quatre cents jeunes Haïtiens se sont formés comme médecins dans notre pays. Ils travailleront maintenant auprès des renforts que nous avons dépêchés hier pour sauver des vies dans cette situation critique. On peut donc mobiliser sans efforts spéciaux jusqu’à un millier de médecins et de spécialistes de la santé qui sont presque tous déjà sur place et prêts à coopérer avec n’importe quel État qui souhaiterait sauver des vies haïtiennes et soigner des blessés.

De nombreux autres jeunes Haïtiens font actuellement des études de médecine à Cuba.

Nous coopérons aussi avec le peuple haïtien dans d’autres domaines à notre portée. Aucune autre forme de coopération ne sera toutefois plus digne de porter ce nom que celle de la bataille dans le monde des idées et dans l’action politique pour qu’on mette fin à la tragédie sans borne que souffrent de nombreuses nations comme Haïti.

La chef de notre brigade médicale a informé : « La situation est difficile, mais nous avons déjà commencé à sauver des vies. » Tel était le message laconique qu’elle a pu envoyer quelques heures après son arrivée, hier, à Port-au-Prince à la tête de renforts médicaux.

Elle a fait savoir tard dans la nuit que les médecins cubains et les Haïtiens diplômés de l’École latino-américaine de médecine (ELAM) de La Havane étaient en train de se déployer dans le pays. Ils avaient déjà soigné à Port-au-Prince plus de mille blessés, après avoir refait fonctionner d’urgence un hôpital qui ne s’était pas effondré et en recourant, en cas de besoin, à des tentes. Ils se préparaient à installer sans retard d’autres centres de soins d’urgence.

Nous somme fiers à juste titre de la coopération que les médecins cubains et les jeunes médecins haïtiens formés à Cuba prêtent à leurs frères d’Haïti en ces moments tragiques !

Fidel Castro Ruz
Le 14 janvier 2010

URL de cet article 9809
  
AGENDA

RIEN A SIGNALER

Le calme règne en ce moment
sur le front du Grand Soir.

Pour créer une agitation
CLIQUEZ-ICI

Même Auteur
L’Histoire m’acquittera
Fidel CASTRO, Jacques-François BONALDI
L’Histoire m’acquittera (en espagnol : La Historia me absolvera) est un manifeste d’auto-défense écrit par Fidel Castro en octobre 1953, à la veille de son procès (il est jugé pour avoir attaqué la caserne de Moncada le 26 juillet 1953, en réaction au coup d’état de Batista). Fidel Castro est diplômé en droit, il manie la plaidoirie, exercice qu’il connaît bien, avec aisance : il y explique ses actes et son implication dans le soulèvement contre Batista mais surtout, il y développe ses différentes thèses (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

"L’un des grands arguments de la guerre israélienne de l’information consiste à demander pourquoi le monde entier s’émeut davantage du sort des Palestiniens que de celui des Tchétchènes ou des Algériens - insinuant par-là que la raison en serait un fonds incurable d’antisémitisme. Au-delà de ce qu’il y a d’odieux dans cette manière de nous ordonner de regarder ailleurs, on peut assez facilement répondre à cette question. On s’en émeut davantage (et ce n’est qu’un supplément d’indignation très relatif, d’ailleurs) parce que, avant que les Etats-Unis n’envahissent l’Irak, c’était le dernier conflit colonial de la planète - même si ce colonisateur-là a pour caractéristique particulière d’avoir sa métropole à un jet de pierre des territoires occupés -, et qu’il y a quelque chose d’insupportable dans le fait de voir des êtres humains subir encore l’arrogance coloniale. Parce que la Palestine est le front principal de cette guerre que l’Occident désoeuvré a choisi de déclarer au monde musulman pour ne pas s’ennuyer quand les Rouges n’ont plus voulu jouer. Parce que l’impunité dont jouit depuis des décennies l’occupant israélien, l’instrumentalisation du génocide pour oblitérer inexorablement les spoliations et les injustices subies par les Palestiniens, l’impression persistante qu’ils en sont victimes en tant qu’Arabes, nourrit un sentiment minant d’injustice."

Mona Chollet

Analyse de la culture du mensonge et de la manipulation "à la Marie-Anne Boutoleau/Ornella Guyet" sur un site alter.
Question : Est-il possible de rédiger un article accusateur qui fait un buzz sur internet en fournissant des "sources" et des "documents" qui, une fois vérifiés, prouvent... le contraire de ce qui est affirmé ? Réponse : Oui, c’est possible. Question : Qui peut tomber dans un tel panneau ? Réponse : tout le monde - vous, par exemple. Question : Qui peut faire ça et comment font-ils ? Réponse : Marie-Anne Boutoleau, Article XI et CQFD, en comptant sur un phénomène connu : "l’inertie des (...)
93 
Hier, j’ai surpris France Télécom semant des graines de suicide.
Didier Lombard, ex-PDG de FT, a été mis en examen pour harcèlement moral dans l’enquête sur la vague de suicides dans son entreprise. C’est le moment de republier sur le sujet un article du Grand Soir datant de 2009 et toujours d’actualité. Les suicides à France Télécom ne sont pas une mode qui déferle, mais une éclosion de graines empoisonnées, semées depuis des décennies. Dans les années 80/90, j’étais ergonome dans une grande direction de France Télécom délocalisée de Paris à Blagnac, près de Toulouse. (...)
69 
Le fascisme reviendra sous couvert d’antifascisme - ou de Charlie Hebdo, ça dépend.
Le 8 août 2012, nous avons eu la surprise de découvrir dans Charlie Hebdo, sous la signature d’un de ses journalistes réguliers traitant de l’international, un article signalé en « une » sous le titre « Cette extrême droite qui soutient Damas », dans lequel (page 11) Le Grand Soir et deux de ses administrateurs sont qualifiés de « bruns » et « rouges bruns ». Pour qui connaît l’histoire des sinistres SA hitlériennes (« les chemises brunes »), c’est une accusation de nazisme et d’antisémitisme qui est ainsi (...)
124 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.