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La guerre psychologique contre Julian Assange (4ème partie) : Pourquoi même certains à gauche veulent sa peau (New Matilda)

Julian Assange, en 2011. (IMAGE : The Naked Ape, Flickr)

Dimanche 3 et 10 mars, des centaines de personnes ont participé aux rassemblements organisés par le Socialist Equality Party australien à Sydney et Melbourne, exigeant que le gouvernement australien garantisse la liberté à Julian Assange.

Le célèbre journaliste et cinéaste John Pilger a pris la parole lors du rassemblement à Sydney en compagnie du fondateur de Sydney Peace Foundation, le professeur Stuart Rees AM, et du rédacteur en chef du site américain Consortium News, Joe Lauria.

Les rassemblements ont appelé le gouvernement australien à intervenir pour protéger son citoyen, Julian Assange, confiné à l’ambassade équatorienne depuis 2012. Assange fait l’objet d’une détention arbitraire selon deux décisions de l’ONU. S’il quitte l’ambassade, il sera probablement extradé vers les États-Unis et poursuivi en justice pour ses activités de publication, très probablement pour des révélations en 2010 de crimes de guerre US en Irak et en Afghanistan.

Selon le Groupe de travail de l’ONU sur les détentions arbitraires (GTDA), Julian Assange fait face à des risques ’fondés’ de ’persécution politique et de traitements cruels, inhumains et dégradants’ et de ’sévices corporels’ aux États-Unis. Le Groupe de travail a en outre statué que M. Assange a droit à une indemnisation et à la restauration de sa liberté.

Peu de temps avant le rassemblement de Melbourne, dans une escalade de la répression par le gouvernement US du fondateur de Wikileaks, on a appris que Chelsea Manning avait été emprisonnée pour avoir refusé de témoigner devant le Grand Jury contre Assange. Wikileaks a tweeté : ’Les lanceurs d’alerte sont maintenant obligés de témoigner contre les journalistes. C’est un nouvel angle d’attaque contre la liberté des médias.

C’est l’avant-garde des tentatives des gouvernements et des élites pour abolir la liberté d’expression, censurer l’Internet et réprimer les sentiments anti-guerre des masses’, a déclaré Evrim Yazgin, président de l’International Youth and Students for Social Equality, lors du rassemblement à Melbourne.

L’organisateur du rassemblement, James Cogan, a ajouté que ’l’administration Trump s’apprête à déposer la toute première plainte pénale contre un éditeur de médias, Wikileaks, en utilisant la loi sur l’espionnage de 1917’.

Joe Lauria, rédacteur en chef de Consortium News, s’exprimant devant le rassemblement à Sydney, a demandé : ’De leur point de vue, il est facile de comprendre pourquoi les États-Unis veulent écraser Assange. Mais quelle est l’excuse de l’Australie ? Pourquoi se bat-elle pour les Etats-Unis ? Pourquoi les médias australiens se sont-ils également retournés contre Assange après une élection qui s’est déroulée aux Etats-Unis, et non pas ici ? Qu’est-il arrivé à la souveraineté de l’Australie ?

Au sujet de la souveraineté, Stuart Rees, professeur émérite de politique sociale, a noté que la culture australienne des relations avec les États-Unis et le Royaume-Uni ’est marquée par la lâcheté : la peur de remettre en question ce qui se passe au Pentagone, à la Maison Blanche, ou même à Westminster’.

Malgré leur importance et leur actualité, les rassemblements de Sydney et de Melbourne, comme un précédent en juin de l’année dernière, ont fait l’objet d’une censure quasi totale par les médias grand public.

La censure des informations qui font la lumière sur la véritable histoire de la persécution de Julian Assange, comme les rassemblements australiens, est conforme à la campagne de diffamation contre Julian Assange et Wikileaks qui dure depuis une décennie, comme nous l’avons vu dans la deuxième partie de cette série. Lors du rassemblement de l’année dernière, John Pilger a retracé cette campagne de diffamation à un document publié en 2008 par le département de la Défense des États-Unis (DoD), qui décrivait un plan visant à détruire la ’confiance’ qui est au ’centre de gravité’ de Wikileaks.

Comme nous l’avons vu dans la troisième partie, plus de dix ans après que le ministère de la défense a élaboré son plan pour miner la confiance en Wikileaks, l’offensive a pris la forme de l’affaire Russiagate, les partisans de Russiagate s’alignant derrière l’administration Trump alors que cette dernière mène une répression autoritaire contre la liberté d’expression via Julian Assange et Wikileaks.

Pour justifier cette persécution, les guerriers de la #Resistance™ [noms que se sont attribués les anti-Trump - NdT] placent leur confiance dans les agences de renseignement US, qui ont une longue histoire de mensonges derrière elles, plutôt que dans Wikileaks qui n’a jamais été pris en défaut.

Comment ? Pourquoi ?

Dans la première partie, j’ai proposé que, conformément au modus operandi du contre-espionnage qui, selon le site Web de la CIA, cherche à ’tirer parti’ des ’vulnérabilités’ de l’adversaire, chaque vulnérabilité majeure du système de traitement humain de la réalité a été exploitée pour saper la confiance en Wikileaks depuis que le DoD a lancé sa mission contre l’éditeur en 2008.

La finalité psychologique de cette mission est de mobiliser les populations pour une guerre contre le journalisme à travers Julian Assange, et d’obtenir le consentement du public pour traiter le journalisme d’intérêt public comme l’ennemi public numéro un.

Julian Assange, lors d’une vidéo conférence en 2016. (IMAGE : Medialab Prado, Flickr)

Dans ce cas, l’’adversaire’ en ligne de mire des États-Unis n’est pas seulement Julian Assange et Wikileaks, mais les populations mondiales que Wikileaks cherche à informer. Ce sont nos propres vulnérabilités - les vulnérabilités des systèmes d’information de tous les êtres humains - qui ont été exploitées dans la campagne de contre-espionnage contre Wikileaks.

Je ne dis pas cela uniquement à cause du plan du ministère de la Défense de 2008 visant à détruire Wikileaks. Je dis cela parce que mon doctorat en psychologie portait sur les processus psychologiques par lesquels une personne peut influencer les croyances d’une autre. Par conséquent, je connais la vaste littérature en psychologie concernant le système de traitement de la réalité par les humains, ses vulnérabilités et les façons dont ces vulnérabilités peuvent être exploitées et manipulées. Et je vois partout les marques de ces tactiques psychologiques dans toute la campagne de diffamation contre Julian Assange.

De plus, c’est l’essence même des opérations psychologiques, telles qu’une guerre du DoD contre la confiance, que d’exploiter les vulnérabilités dans le traitement de l’information par les humains. Un document sur les PSYOPS militaires publié par les chefs d’état-major interarmées en 2003, par exemple, définit les opérations psychologiques comme ’des opérations planifiées... pour influencer les émotions, les motivations, le raisonnement objectif et, finalement, le comportement’ des publics ciblés.

Mais comment, dans la pratique, les faiseurs d’opinion influencent-ils les émotions, les motivations et le raisonnement objectif des publics cibles ?

Par la propagande. La propagande, qui fait partie de la panoplie des opérations psychologiques, implique ’la manipulation organisée, systématique et intentionnelle de l’information d’une manière qui soit déforme la perception de la réalité des gens, soit les pousse à se comporter d’une manière inhabituelle’ écrit le professeur Piers Robinson, titulaire de la chaire en politique, société et journalisme politique de l’Université de Sheffield et directeur à l’Organisation des études propagandistes.

En outre, la propagande et les relations publiques représentent plus de 80 % du contenu des médias grand public contemporains, selon un récent article de la Sonoma State University. Fermer Wikileaks et faire taire Julian Assange font partie du projet qui consiste à préserver cet état des choses.

Comme le dit le professeur en communication Sut Jhally, producteur exécutif de The Occupation of the American Mind, donnez-moi le contrôle des médias, donnez-moi le contrôle des récits à travers lesquels les gens comprennent le monde... et vous n’avez pas besoin de la police et de l’armée dans les rues. Vous pouvez emprisonner les gens dans leur propre esprit. On peut enfermer les gens dans leur propre imagination’.

Mais quels sont les processus psychologiques par lesquels la perception de la réalité peut être manipulée ? Quelles vulnérabilités peuvent être exploitées pour y parvenir ? Comment mène-t-on une guerre contre la confiance et le journalisme ?

Le traitement humain de la réalité

Les vulnérabilités dans le traitement humain de la réalité peuvent être conceptualisées à deux niveaux généraux.

L’un d’eux est se situe au cœur de la motivation, impliquant des processus axés sur la signification. Ce niveau détermine les versions de la réalité qu’une personne est psychologiquement prête à accepter. Elle détermine quelles graines de propagande sont susceptibles de prendre racine, et quand. Par exemple, la plupart d’entre nous sommes généralement plus sensibles à la flatterie qu’à des réalités peu flatteuses à notre sujet.

Le deuxième niveau est plus technique, de surface, où des versions particulières de la réalité, une fois semées, sont consolidées. Les processus de propagande à ce niveau fonctionnent un peu comme l’arrosage d’une graine de propagande, après avoir été semée. Les vulnérabilités techniques sont liées aux mécanismes de traitement de l’information axés sur l’efficacité, qui privilégient la vitesse par rapport à la précision. La répétition, par exemple, favorise un traitement fluide, que le cerveau considère comme un indicateur simple et efficace de la réalité ou de la vérité.

Aux deux niveaux, les vulnérabilités découlent du fait largement sous-estimé que la perception humaine de la réalité sert un éventail d’objectifs autres que la réalité. L’approche humaine de la réalité est guidée par divers objectifs tacites et inconscients, dont des objectifs sociaux comme le besoin d’appartenance et de communication, ou des objectifs personnels comme l’estime de soi. Ou des objectifs liés à la survie, comme se défendre contre des réalités qui pourraient nous torturer l’esprit.

Tous ces objectifs déterminent inconsciemment les informations que nous acceptons ou rejetons, et ce que nous percevons subjectivement comme ’logique’, ’rationnel’ ou vrai, ayant un impact sur notre perception du monde. Les psychologues appellent cela de la cognition motivée.

Par exemple, le désir de communication et d’appartenance rend les êtres humains enclins à aligner leur perception du monde sur celle de leur entourage. Ce qui génère involontairement des tendances conformistes dans la perception de la réalité, qui sont facilement exploitées dans les offensives de propagande et les campagnes de diffamation.

Dans l’ensemble, une grande partie du traitement humaine de l’information n’est pas seulement influencée par ces motifs inconscients, mais est fondamentalement déterminée par eux, quelle que soit la logique ou la rationalité avec lesquelles nous pensons agir. En fait, les influences souterraines sur la pensée consciente sont si puissantes que, dans le domaine de la cognition politique, la raison est décrite comme un ’mercenaire’ au service de l’émotion.

Les humains excellent à croire ce qu’ils veulent croire’, écrivent les psychologues politiques John Jost et ses collègues. Ce qui facilite la propagande.

Une telle vision de la cognition humaine s’appuie sur ’trois décennies de recherche en sciences cognitives, appuyées par des centaines d’études comportementales bien conçues en psychologie sociale et maintenant des preuves issues des neurosciences’ notent les professeurs de sciences politiques Milton Lodge et Charles S Taber. La recherche neuroscientifique, en examinant la cognition à la milliseconde près, par exemple, montre que l’émotion influence une décision bien avant la pensée consciente. Au final, Lodge et Taber décrivent le raisonnement politique comme ’ un bouchon qui flotte sur les courants des processus inconscients ’. 

Je vous entends penser ’Pas moi. Je suis rationnel.’

Peut-être. Il y a certains états d’esprit, et certaines circonstances, qui favorisent une perception orientée vers la réalité, rendant certaines personnes, et certaines situations, plus résistantes à la propagande. Si vous êtes tenté de lire la suite pour savoir qui et pourquoi, vous êtes peut-être une de ces personnes.

Cela dit, quelles sont les vulnérabilités qui ont été exploitées dans la campagne de diffamation contre Wikileaks et Julian Assange ? Comment les faiseurs d’opinion ont-ils transformé la réalité aux yeux de certains, jusqu’à faire en sorte que la censure est devenue un bastion de la démocratie et la liberté d’expression une menace ?

Pour les propagandistes, l’un des défis de cette inversion est que les diffamateurs eux-mêmes ont une longue histoire de violence et de corruption, à couper le souffle, comme l’a montré Wikileaks, entre autres. Les institutions américaines, par exemple, ont été pris en flagrant délit de pillage et d’occupation de populations appauvries ravagées par des catastrophes, de tortures illégales, de truquage d’élections fédérales et de couverture de leurs propres massacres de civils et de crimes de guerre massifs.

Pour que les institutions à l’origine de ces actes puissent saper la confiance envers Wikileaks et Julian Assange, nous, les gens, devons être incités à minimiser et ignorer leur corruption, ainsi que la fonction de service public rendu par Wikileaks qui la dénonce. Blâmer Julian Assange pour l’élection de Donald Trump, par exemple, exige de négliger le fait que ce sont les Démocrates eux-mêmes qui ont promu la candidature de Trump.

Comment les propagandistes réussissent-ils un tel tour de passe-passe ? Ils tirent parti d’une impulsion humaine qui tend à justifier le système.

La justification du système

Tout comme les individus sont généralement motivés à se voir sous un jour favorable, beaucoup sont également motivés à voir d’un œil favorable leur système social, politique et économique. Cette tendance a été qualifiée de justification du système.

Les impulsion à justifier le système rend les membres d’une société très réceptives aux messages qui minimisent les problèmes de leur société, qui font abstraction des défauts systémiques et qui glorifient le statu quo.

Un solide programme de recherche en psychologie montre que cette tendance à justifier le système poussent de nombreuses personnes à percevoir les systèmes dont elles dépendent comme étant justes et bons, même lorsqu’elles ont des raisons solides de penser le contraire, et même lorsqu’elles en souffrent elles-mêmes.

Le pionnier de la théorie de la justification du système, le psychologue politique John Jost, de l’Université de New York, affirme que ’ des centaines d’études ont maintenant appuyé les prédictions dérivées de la théorie de la justification du système, illustrant de façon frappante les façons dont les gens défendent le statu quo et minimisent ou négligent ses défauts, le percevant ainsi comme plus légitime qu’il n’est réellement ’.

Une conclusion contre-intuitive de cette recherche, particulièrement pertinente dans le cas de Wikileaks, est que les défauts d’un système ont plutôt tendance à exacerber, plutôt que d’atténuer, les tendances à justifier le système. Les fissures systémiques telles que la corruption ou l’injustice, appelées menaces systémiques, compromettent le sentiment psychologique de sécurité, de bien-être et de sens qu’un système fonctionnel apporte.

Plutôt que de critiquer le système à la lumière des défaillances systémiques, de nombreuses personnes ont donc tendance à défendre la légitimité du système afin de préserver leur sentiment de sécurité et de bien-être.

Par exemple, à la suite d’une révélation de Wikileaks.

Dans d’innombrables études, lorsque les gens lisent des passages ou des articles soulignant des problèmes dans une domaine politique, économique ou social, comme un article sur le déclin de la société américaine, ils réagissent en mode défensif, avec plus de rationalisation, de foi et de confiance dans le système.

Étant donné que la justification du système agit de cette façon pour protéger les gens des dures réalités, John Jost la décrit comme une forme d’auto-illusion, alimentant une ’illusion fondamentale’ sur le monde social et politique. Son influence sur le traitement de l’information politique, dit-il, est ’profonde’.

Avec sa profonde influence sur le raisonnement politique, à la lumière des failles dévastatrices dans la démocratie US révélées par Wikileaks en 2016 (truquage des élections, positions ’publiques’ contre ’privées’ et connivences entre l’État et les entreprises), on pouvait s’attendre au déclenchement de l’impulsion pour justifier le système. Pour se défendre contre les dures réalités révélées par Wikileaks (par exemple, que la démocratie n’est qu’un simulacre), les illusions justifiant le système (par exemple, tout est de la faute de la Russie) étaient prêtes à s’installer pour légitimer un système mal en point.

L’affaire Russiagate s’est ainsi abattue avec force sur ces vulnérabilités psychologiques, alimentant l’auto-illusion collective avec une abondance de matériel délirant, avec lequel la légitimité des élites qui truquent les élections fut consolidée, et où Wikileaks fut présenté comme la cause de tous les maux.

Dans un mouvement de panique pour justifier le système, l’obsession répressive et sans preuves sur des « étrangers malfaisants » s’est imposée, insensible aux réalités admises d’ingérences électorales internes, et Russiagate prétendait défendre le caractère sacré de ce qui avait précisément été révélé comme inexistant : la ’démocratie américaine’.

Capitalisant sur une pseudo-défense du statu quo brisé, Russiagate a distillé une pensée imaginaire, selon laquelle des messages dans les médias sociaux – pour la plupart puérils, invisibles et hors sujet (tels que Bernie Sanders en caleçon) auraient détourné le cerveau des électeurs, semé la division raciale et sociale dans un pays d’harmonie sociale, et souillé la démocratie.

Complété par le fantasme que les agences de renseignement US seraient des sauveurs progressistes, Russiagate est en effet une ’illusion fondamentale’. Elle s’est avérée aussi éloignée de toute logique et preuve factuelle que n’importe quel système de croyance délirante, et aussi imperméable à la réalité.

Dans cette vision répressive du monde, toute critique systémique de l’État devient un complot russe. Un retraité britannique qui aime lire et tweeter ? Russe. Un commentateur syrien vivant à Perth et qui anime une chaîne YouTube ? Encore un Russe. Des militants écologistes ? Ouais. Russes. Jill Stein ? [candidate « vert » au présidentielles US – NdT] Russe aussi. Black Lives Matter ? Infiltré par les Russes. Les Afro-Américains ? Incapables de penser par eux-mêmes, d’après Russiagate. La Russie contrôle leurs esprits. Donc, oui, Russes. Wikileaks et Julian Assange ? Russes. Evidemment. Russes, Russes, Russes et Russes.

Si les adeptes du Russiagate souffraient d’hallucinations auditives et entendaient la voix de Joseph McCarthy en personne, ils ne pourraient guère mieux imiter une psychose collective.

Comme à l’époque de McCarthy, le spectre au centre de cette idéation paranoïaque est familier - le croque-mitaine étranger. Comme le croque-mitaine immigrant d’en face, il remplit la même fonction psychologique que les croque-mitaines étrangers : nous protéger des vérités sur notre propre pays, servir de refuge contre les dures réalités et nous faire nous recroqueviller dans un statu quo rassurant. Aux dépens de Julian Assange. Et de la critique systémique de l’État contrôlé par des intérêts privés.

Pour les élites qu’il sert, l’ensemble du processus de justification du système préserve le pouvoir et élimine la dissidence et rationalise la guerre.

Dans le cas de la guerre de l’information contre les ’rébellions de l’information’ sur le ’champ de bataille’ de l’Internet, comme il a été dit devant une commission judiciaire du Sénat, les victimes de cette guerre sont les journalistes et les éditeurs, dont Julian Assange, et les populations qu’ils cherchent à informer. Ce sont des êtres humains partageant des informations, déshumanisés et « invisibles », comme le sont toutes les victimes des guerres, derrière le croque-mitaine - en l’occurrence russe - sur lequel les populations occidentales sont invitées à projeter leur rage et leurs peurs.

Et c’est ainsi que la réalité se trouve inversée. Ceux qui ont été exposés comme des corrompus sont considérés comme vertueux en vertu de leur corruption. Et ceux qui les dénoncent sont corrompus en vertu de leur dénonciation. Et la liberté d’expression devient une menace.

Plus généralement, le rôle même de Wikileaks dans la révélation des machinations du pouvoir le rend vulnérable aux réactions qui justifient le système à chaque tournant. Chaque fois que Wikileaks dénonce une corruption et des abus systémiques, c’est là qu’apparaissent les manipulateurs et charlatans pour porter l’estocade. Russiagate ne fait pas exception.

Lorsque Wikileaks a révélé les crimes de guerre US en 2010, les populations étaient psychologiquement mûres pour défendre l’État de sécurité nationale. C’est précisément ce qui s’est passé.

Assange et Wikileaks furent présentés comme de dangereux terroristes avec du sang sur les mains, qui s’en prenaient gratuitement à une pauvre machine de guerre US sans défense. En réalité, le vice-président Joe Biden a admis que les révélations de 2010 n’avaient provoqué ’aucun dommage significatif’ autre que d’être ’embarrassantes’.

Lorsque Wikileaks a révélé l’espionnage de la CIA sur nos iPhones et nos Smart TV, la CIA s’est présentée comme une victime de l’espionnage de Wikileaks.

Aujourd’hui, en 2019, alors que les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie défient le droit international, emprisonnent Assange pour journalisme en violation de deux décisions de l’ONU, faisant fi des principales organisations mondiales de défense des droits humains et de la Cour interaméricaine des droits de l’homme, c’est Julian Assange qui est accusé : par les médias et l’appareil de sécurité nationale des Etats-Unis.

Dans cette équation, la réalité objective est que ce sont Assange et Wikileaks qui ont la légitimité institutionnelle, et le droit, de leur côté - le droit international, celui des traités sur les droits de l’homme et le droit d’asile. En cas d’extradition de Julian Assange, c’est ’l’État de droit’ lui-même qui est en jeu, affirme Alfred De Zayas, professeur de droit international et expert à la retraite de l’ONU sur la promotion de l’ordre international.

De plus, en se défendant contre l’État voyou US et son appareil de sécurité nationale, Wikileaks bénéficie du soutien des principales institutions démocratiques et de défense des droits de l’homme dans le monde, notamment l’ONU, la CIDH, Amnesty International, le Comité pour la protection des journalistes, l’American Civil Liberties Union et Human Rights Watch.

C’est la persécution de Julian Assange et Wikileaks qui menace l’ordre établi et le statu quo fondé sur des règles. Justifier le système, c’est prendre la défense de Wikileaks.

Les spécialistes en diffamation, cependant, ne vous le diront jamais.

Apologistes

Il va sans dire que tout le monde n’est pas aussi enclin à défendre le statu quo. Selon Jost et ses collègues, les plus aptes à justifier le système sont ceux qui ont des besoins élevés d’ordre, de structure, de certitude et de contrôle.

Et pour tous les autres ? Comment une campagne de diffamation les cible-t-elle ? Quelles vulnérabilités peuvent être exploitées par les spécialistes en diffamation ?

Outre la justification du système, une autre vulnérabilité psychologique est ce que les psychologues appellent le dénigrement des défenseurs de la morale. Selon la recherche psychologique, ceux qui attirent l’attention sur les défaillances de leur société ont tendance à être perçus négativement par les groupes mêmes qu’ils cherchent à éclairer et à aider.

Heureusement pour les spécialistes en diffamation, ce procédé est doublement efficace. Elle s’applique non seulement aux éditeurs de critiques systémiques tels que Julian Assange et Wikileaks, mais à tous ceux qui s’engagent pour défendre Wikileaks et Julian Assange.

Dans une thèse de doctorat sur ce sujet, Nadia Bashir, de l’Université de Toronto, écrit : ’Les gens conviennent généralement que les comportements douteux, nuisibles et illégaux sont répréhensibles et contraires à l’éthique. Ainsi, il peut sembler contre-intuitif que les individus dénigrent souvent ceux qui visent à exposer et donc à éliminer ces comportements. De plus en plus de recherches démontrent, cependant, que les personnes qui prennent position contre les comportements immoraux (c.-à-d. les défenseurs de la morale) peuvent susciter le mépris plutôt que l’admiration’.

Quiconque défie publiquement la campagne de diffamation contre Julian Assange, ou rejette la guerre et la propagande en général, est susceptible de connaître un tel mépris : apologiste, bot russe, troll ou agent du Kremlin. C’est pourquoi, à la suite du rassemblement de Sydney pour libérer Assange, l’organisateur, James Cogan, a averti : ’Plus il y aura de soutiens pour Assange, plus il y aura de calomnies et de diffamations contre lui et ses défenseurs’.

Dans la recherche de Bashir, les défenseurs de la morale qui dénoncent l’injustice, comme l’injustice contre Julian Assange, sont perçus comme étant plus ennuyeux, offensants, arrogants, égoïstes, égocentriques, odieux, avides, insultants et traîtres que les autres. Ce qui les rend plus faciles à calomnier.

Bref, ceux qui sont moins vulnérables aux processus de justification du système et plus enclins à défendre Wikileaks sont en même temps les plus vulnérables à la mise à l’index. D’être détestés. Considérés comme ennuyeux, offensants, arrogants ou odieux. Apologistes. Agents.

De telles perspectives contribuent sans doute à ce que John Pilger a appelé le ’silence sinistre’ qui entoure Julian Assange.

Mais pourquoi les défenseurs de la morale suscitent-ils des réactions négatives ? Qui est le plus enclin à percevoir ainsi les défenseurs de la morale ?

S’agit-il de ceux qui se préoccupent le plus de la morale et qui sont le plus troublés par les défauts de leur société ? Est-ce, paradoxalement, ceux qui ont le plus profond attachement à la moralité de leur propre comportement ?

Pas d’après les recherches de Bashir. Dans ses études, Bashir a constaté que ceux qui diabolisent les défenseurs de la morale le font parce qu’ils accordent plus de valeur à l’image sociale qu’aux considérations morales. Ce qui dérange les détracteurs des défenseurs de la morale, dit-elle, c’est ’la façon dont les défenseurs font paraître leur groupe aux yeux des autres’. Pour restaurer l’image sociale ternie du groupe, « les membres du groupe semblent adopter une approche qui consiste à ’tirer sur le messager’. »

Joseph McCarthy, pour sa part, l’avait apparemment compris. En 1950, McCarthy a dit à un journaliste : ’J’ai une chaussette pleine de merde et je sais m’en servir.’ Et c’est ce qu’il fit. Il brandit sa chaussette pleine de merde contre tous ceux qui s’opposaient au récit officiel, de sorte que ’le fléau d’un progressiste dans les années cinquante était d’être la victime d’une erreur d’identité’, écrit l’historien Bruce Cumings, professeur d’histoire. Erreur d’identité en tant que stalinien à l’époque, et en tant que Poutinien-Nazi-Trumpoide-Fasciste aujourd’hui.

C’est toute une question d’image, aux yeux des autres.

Cumings ajoute que c’était ’une période sombre en effet, une maximisation du conformisme absolu’ au cours de laquelle les dissidents subissaient ’d’intenses pressions psychologiques et menaces pour changer leurs pensées ou être exclus du spectre de l’acceptabilité politique’.

Il en résulte que ceux qui sont prêts à défier, à contester l’acceptabilité politique et à défendre Julian Assange et Wikileaks peuvent être rassurés en sachant qu’ils placent la moralité - et la réalité - au-dessus des préoccupations d’image sociale. Être frappé avec une chaussette remplie de merde devient un label de qualité.

Partage de la réalité

Une fois qu’une narration justifiant le système est déployée et imposée par le dénigrement de l’autre, il faut imposer la perception que tous les ’bien pensants’ sont d’accord entre eux. Cette tactique exploite la vulnérabilité humaine de la réalité partagée.

En tant qu’espèce sociale, les êtres humains sont câblés pour percevoir la réalité d’après ceux qui nous entourent. Les fondateurs de la théorie de la réalité partagée notent quel’individu crée et maintient l’expérience de la réalité... en la partageant avec les autres’. Jost et ses collègues ajoutent que ’les perceptions de la réalité qui sont socialement construites et apparemment partagées par les autres autour de nous sont tout simplement ’tenues pour acquises’ et, en ce sens, acquièrent une sorte de légitimité présumée’.

Pour parvenir à une réalité partagée, les êtres humains s’engagent dans un ’accord social’, qui est un processus d’alignement inconscient de leur vision du monde avec celle de ceux qui les entourent, en particulier ceux dont ils dépendent, ou dont ils recherchent l’affiliation.

Par conséquent, dans une offensive de diffamation comme celle contre Julian Assange, il est essentiel de favoriser la perception que la majorité des bien-pensants ont une opinion défavorable, tout en censurant les opinions favorables et les soutiens. La censure contre les rassemblements pour libérer Assange et l’appui international de personnalités respectées, est un bon exemple.

Il en va de même pour l’omission de mentionner les données de sondages indiquant un soutien populaire pour Wikileaks et Juilan Assange. Même parmi les téléspectateurs des médias grand public, où l’on dénigre régulièrement Assange, plus de 80 % des participants à un récent sondage de 60-Minutes Australia [émission d’actualité politique - NdT], auquel ont participé 10 000 personnes, ont voté pour que le Premier ministre australien ramène Julian Assange en Australie en toute sécurité.

Empêcher que ces réalités ne soient partagées est essentiel pour les campagnes de diffamation, de crainte que la réalité ne parte pas dans d’autres directions, et que les populations ne la déterminent d’elles-mêmes. Il faut donc faire en sorte que les dissidents se sentent isolés et seuls.

En plus d’être alignée sur les perceptions de la réalité des autres, la réalité partagée éloigne les gens des visions du monde de ceux dont ils veulent se dissocier. Associer les partisans de Wikileaks avec d’autres personnes indésirables est donc une autre tactique de la campagne de diffamation.

Associer les partisans de Wikileaks avec la droite pour un public de gauche, ou avec les anti-américains pour un public patriotique, ou avec la misogynie pour un public féministe, ou avec les ’complotistes’ pour tous les autres, fonctionne en distillant la perception que les partisans de Wikileaks sont éloignés de la réalité, à plusieurs égards.

La réalité qui est cachée ici, c’est que les récits qui souillent Julian Assange et Wikileaks ne sont pas des récits de gauche ou de droite, ni des récits pro ou antiaméricains. Ce sont des récits de l’élite. Ce sont les récits des individus et des institutions qui pourraient être exposés si Wikileaks poursuivait son travail.

Alors, qui est le plus enclin à partager la réalité des élites, et donc le plus susceptible d’adhérer à la campagne de diffamation ?

Étant donné la volonté d’harmoniser la perception de la réalité dans le sens souhaité, ce sont ceux qui éprouvent le désir d’appartenir ou d’être acceptés par l’élite. Aspirer à faire partie des milieux élitistes, tels que les médias, les milieux politiques ou académiques, favoriserait donc le partage de la réalité des élites, en vertu de ces aspirations élitistes.

Il est important de noter que cette vulnérabilité va au-delà d’une simple conformité consciente. Il s’agit d’un processus subconscient par lequel les récits et les calomnies officiels, comme ceux de Russiagate, Wikileaks et Assange, sont perçus subjectivement par le cerveau comme plus réels et plus vrais. Pour reprendre l’image du bouchon, le désir du statut d’élite est la marée émotionnelle sur laquelle flotte le bouchon de l’opinion politique.

Comme l’observe le comédien et commentateur Jimmy Dore, après avoir construit une chaîne Youtube pour démystifier les récits des élites, ’tous ceux que j’ai voulu impressionner dans ma vie, je l’ai déjà fait... Ces gens du journalisme, je ne les respecte pas. Je ne veux pas impressionner David Corn, Rachel Maddow ou un trou du cul du Washington Post. Je vais les dénoncer pour être les propagandistes qu’ils sont.

La tyrannie du groupe

L’une des tendances psychologiques les plus fortes chez l’être humain est de s’organiser et d’organiser sa perception du monde en groupes sociaux, en particulier ses propres groupes sociaux et culturels, ou ingroups (nous) et les autres groupes sociaux et culturels, ou outgroups (eux).

De nombreuses recherches menées au fil des décennies montrent que les gens sont sensibles à toutes sortes de motivations et d’attitudes destructrices à l’égard des membres des groupes marginalisés, en particulier dans des conditions d’insécurité et de menace.

Il n’est donc pas surprenant que la psychologie intergroupes a été largement exploitée tout au long de la guerre psychologique contre Julian Assange et Wikileaks, peut-être plus fortement depuis 2016.

Qu’elle soit mesurée psychologiquement, physiologiquement ou neurologiquement par exemple, l’empathie humaine est plus faible envers les membres des groupes externes qu’envers les membres des groupes internes. Les gens sont plus enclins à torturer les membres des groupes marginaux et ont tendance à les considérer comme moins humains, de les considérer comme moins capables d’expériences humaines comme la douleur, le chagrin et la souffrance.

Dans ce contexte, tous les efforts ont été faits pour activer l’identification de groupe vis-à-vis de Wikileaks sous différents angles, que ce soit en termes de gauche contre droite, de Démocrates contre Républicains, des États-Unis contre le monde, de femmes contre les hommes ou de Clinton contre Trump.

Depuis les élections américaines de 2016, tous ceux qui sont de gauche, de centre gauche, de pseudo-gauche, ou bobos, ou de la #Resistance™ libéral ont été fortement incités à voir Julian Assange comme quelqu’un de droite. De droite tendance alternative. De droite tendance Poutine. De droite tendance Trump. De droite misogyne. Ou anarchiste de droite. Et parfois tout ce qui précède en même temps.

Non seulement cela rend ceux qui s’identifient à la gauche plus insensibles au sort de Julian Assange, et se sentir moins touchés par sa détention arbitraire, ses persécutions et ses tortures, mais cela a aussi des implications pour la perception de la réalité. Percevoir négativement les membres des groupes externes est une caractéristique de la psychologie intergroupe.

Même lorsque les étrangers sont divisés en groupes en fonction de rien d’autre que des tirages à pile ou face ou de la couleur de leurs T-shirts, les membres du groupe ont tendance à considérer les membres d’autres groupes comme moins sympathiques, moins honnêtes, moins dignes de confiance et plus irresponsables. Pour commencer.

Heureusement pour les propagandistes, l’antipathie envers les membres de groupes externes peut monter en flèche, en passant du mépris à la rage meurtrière dans des conditions de peur et de menace. L’immense peur et la menace que beaucoup de gens ont ressenties après l’élection de Donald Trump est un bon exemple. Les pulsions vers ’l’autre’ dans de telles conditions peuvent devenir un combat à mort.

C’est sans doute la raison pour laquelle la campagne de Clinton n’a pas tardé à se mettre au travail en attribuant sa défaite électorale à la Russie et à Julian Assange dès les premières 24 heures , très chargées émotionnellement après la victoire de Trump.

Une telle activation de l’animosité intergroupes est au cœur de toute propagande en faveur de la guerre, et joue un rôle clé dans la mobilisation des populations en faveur des guerres de toutes sortes, par la cristallisation de la haine.

Les psychologues Kevin Durrheim et ses collègues écrivent que ’les appels aux armes... justifient la violence en opposant un ’nous’ vertueux à un ’autre’ sauvage, notamment en créant de nouvelles cibles, en regroupant divers ennemis, en les caractérisant de façon marquante et innovante et en offrant de nouvelles normes d’action contre eux’.

Associer Wikileaks avec Trump et la Russie après l’élection de 2016 fut l’une de ces nouvelles caractérisations, qui rassemblait divers ennemis d’une manière marquante et innovante. Elle justifiait la guerre de l’information et offrait une nouvelle norme d’action contre un journaliste qui n’avait fait que son travail en couvrant de manière factuelle des élections.

Dans les efforts pour exploiter la psychologie intergroupes à des fins de diffamation et de censure, Julian Assange s’est paradoxalement rendu vulnérable aux attaques inter-groupes en raison du fait qu’il se déclare ’membre d’aucun groupe’, pour reprendre ses propres termes. Ce qui a permis de le définir comme étranger à tous les autres groupes. Tout comme le fait que Wikileaks est une organisation médiatique non partisane, sans lien de groupe, d’État ou politique, qui publie des articles au-delà des frontières sociales, qui bouleverse les frontières de groupes à tous les niveaux.

De telles classifications occultent le fait que, comme Joe Lauria l’a observé, soutenir Wikileaks n’est ’pas du tout une affaire de gauche ou de droite. C’est une affaire de possédants contre dépossédés... Il y a les nantis et les démunis. C’est ainsi que le monde est de plus en plus divisé, non seulement par l’argent, la richesse et la propriété, mais aussi par l’information..... C’est là qu’intervient Wikileaks. Il aide les démunis à avoir des informations.

C’est compliqué, alors faites-nous confiance

Une dernière tactique par laquelle les élites obtiennent la confiance dans leurs récits est de rendre les choses confuses. Alors que les récits de propagande doivent être simples dans leur énoncé (par exemple, ’la Russie a piraté la démocratie américaine’), ils sont souvent complexes dans leurs détails.

Russiagate, par exemple, a été depuis deux ans un flot incessant de ’révélations explosives’, d’actes d’accusation, de dossiers, de scoops, de réunions et de courriels entre tel ou tel personnalité politique à telle ou telle date, avec telle ou telle signification supposée, qui se sont avérés à chaque fois hors de propos avec une collusion russe. A chaque fois. Y compris le récent témoignage de Michael Cohen.

Cependant, la preuve d’une collusion n’est pas sujet. Le fait est que le sentiment d’être perdu devant la complexité des questions sociopolitiques entraîne un sentiment accru de dépendance à l’égard des gouvernants. Il a été constaté que la confusion au sujet des détails des affaires courantes favorise une plus grande confiance dans les autorités gouvernementales, l’évitement de l’information en question et la confiance que l’on accorde au pouvoir pour régler les problèmes.

Semer la confusion de cette façon est une tactique couramment utilisée pour vendre la guerre et les politiques économiques. Des questions simples telles que les élites qui pillent les nations et les économies à des fins lucratives sont formulées en termes économiques élitistes et complexes, ce qui incite les citoyens à s’en détacher et à laisser les affaires entre les mains des dirigeants. Comme le fait remarquer le professeur de communication Sut Jhally, l’une des principales tactiques de propagande et de relations publiques est de « rendre compliqué ce qui est simple ».

Dans l’affaire Russiagate, lorsque la prochaine révélation explosive se produira, les consommateurs des médias ne se souviendront plus de ce qu’ils étaient censés retenir et supposeront que tout cela doit être important puisque les élites continuent de se disputer à ce sujet. Et c’est ce qui se passera.

Tout cela occulte le fait qu’il n’existe à ce jour aucune preuve de collusion entre Trump et la Russie, avec ou sans Julian Assange. Ni la réunion à la tour Trump Tower, ni les actes d’accusation contre des agents du GRU [service de renseignement militaire russe - NdT], ni l’acte d’accusation contre Roger Stone, ni le témoignage de Michael Cohen, ni les réunions fictives de Manafort avec Assange à l’ambassade de l’Équateur.

Mais tout cela n’a aucune importance. Ce qui compte, c’est ceci : ’C’est compliqué, alors faites-nous confiance’

Ensuite, dans le dernier article de cette série, j’explorerai les vulnérabilités techniques qui ont été exploitées dans la campagne de diffamation contre Julian Assange et Wikileaks. Ce faisant, je répondrai à la question de savoir qui est psychologiquement résistant à la propagande et pourquoi.

Les tactiques déployées pour exploiter les vulnérabilités techniques sont les mêmes que celles qui sont utilisées dans toutes les grandes offensives de propagande. Ainsi, une fois que vous les reconnaîtrez, vous serez en mesure de repérer de loin une campagne de propagande, telle que Russiagate.

Pendant ce temps, si vous avez manqué les rassemblements de Sydney et Melbourne, le Parti socialiste pour l’égalité (SEP) d’Australie continue à construire un mouvement pour libérer Julian Assange et Chelsea Manning. Le SEP entend faire de la protection de Julian Assange un enjeu électoral.

Si vous souhaitez suivre et soutenir ces efforts, vous pouvez le faire sur Twitter, sur Facebook, et sur le site World Socialist Website.

Lissa Johnson

Traduction « moi aussi je suis tombé dans leur panneau » par Viktor Dedaj pour le Grand Soir avec probablement toutes les fautes et coquilles habituelles

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Cette démocratie si parfaite fabrique elle-même son inconcevable ennemi, le terrorisme. Elle veut, en effet, être jugée sur ses ennemis plutôt que sur ses résultats. L’histoire du terrorisme est écrite par l’État ; elle est donc éducative. Les populations spectatrices ne peuvent certes pas tout savoir du terrorisme, mais elles peuvent toujours en savoir assez pour être persuadées que, par rapport à ce terrorisme, tout le reste devra leur sembler plutôt acceptable, en tout cas plus rationnel et plus démocratique.

Guy DEBORD

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