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L’énigmatique sourire du président yéménite

Confronté à d’importantes manifestations depuis plusieurs mois, Ali Abdallah Saleh a signé le 23 novembre un accord de transfert du pouvoir, avec le sourire aux lèvres. La journaliste libanaise s’amuse à décrypter les raisons de cette joie affichée

A
près trente-trois ans au pouvoir, trois tentatives d’accord avortées, des tergiversations à n’en plus finir, des morts, des blessés, un come-back postattentat hollywoodien, Ali Abdallah Saleh a signé, le mercredi 23 novembre au palais Yamamah à Riyad, l’accord sur un transfert de pouvoir. A cette occasion, le président yéménite était tout sourire. Question : Pourquoi Saleh, au moment où il perd le pouvoir, se marre-t-il ?

Éléments de réponse :

Parce que, autour de lui, les ministres du Conseil de coopération du Golfe, médiateur de l’accord, représentent des régimes non démocratiques et de plus en plus contestés chez eux.

Parce que, après dix mois de crise, il peut se permettre le luxe de dire publiquement qu’il "est engagé dans un véritable partenariat avec l’opposition pour gérer les affaires du pays". Et parce que personne n’a le droit de rire quand il dit ça.

Parce que, à Sanaa, les manifestants ne sont pas contents.

Parce que Ban Ki-moon lui a promis un séjour en clinique à Manhattan.

Parce que, en plus, Ban Ki-moon lui dit "merci" et affirme que si lui, Saleh, vient à New York, il sera "ravi" de le rencontrer.

Parce qu’il est le seul "président" d’une péninsule arabique gavée d’émirs, de princes et de rois, et que c’est lui qui dégage.

Parce que le roi Abdallah [d’Arabie Saoudite], 88 ans dont seize au pouvoir, héritier d’une dynastie politico-religieuse en porte-à -faux avec les droits de l’homme - surtout quand il s’agit d’une femme -, invoque le plus sérieusement du monde le concept de la "nouvelle page" qui s’ouvre.

Parce que, après lui, au Yémen, les grands démocrates ne se bousculent pas au portillon.

Parce qu’il a décroché l’immunité, avec extension à la famille et aux proches pour pas un rial de plus.

Parce que, dans deux cents ans, les mous de la matière grise associeront ses présidences avec le premier Nobel décroché par le Yémen. Et par une femme de surcroît [la militante des droits de l’homme et journaliste Tawakkol Karman].

Parce que si, depuis trente-trois ans, il se prépare une retraite cinq étoiles, il avait toujours craint de ne pas y arriver. Là , non seulement il y arrive dans une forme pas si mauvaise étant donné les circonstances, mais aussi, question confort, il ne pouvait pas rêver mieux.

Parce qu’il pense à tous les avantages en nature qu’il a négociés auprès des grands de ce monde en contrepartie de son autographe.

Parce que son aîné fait la tronche sur le mode "moi aussi j’aurais voulu être autocrate, c’est pas juste !" et qu’il était temps que ce grand dadais comprenne que tout ne peut pas toujours lui tomber tout cuit dans le bec.

Parce qu’il pense à toutes ces séries TV qui vont divertir ses vieux jours : "Moubarak derrière les barreaux", "Ben Ali et Leila à Djeddah", "Seif Al-Islam et les feux de la Cour".

Parce que Bachar El-Assad va bien finir par l’appeler et lui demander, après avoir pris des nouvelles de ses 14 enfants, des conseils pour se sortir du pétrin dans lequel il s’est fourré.

http://www.courrierinternational.com/article/2011/11/25/l-enigmatique-sourire-du-president-yemenite

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Henry Stewart, Londres

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