Le 5 novembre 1988, le Conseil National de Palestine (PNC) réuni à Alger publiait la Déclaration Palestinienne d’Indépendance qui créait l’état indépendant de Palestine. Aujourd’hui l’état de Palestine est reconnu bilatéralement de jure par environ 130 états. Palestine a la reconnaissance diplomatique de facto de la plus grande partie de l’Europe. C’est seulement l’importante pression diplomatique des USA qui a empêché les états européens d’accorder à la Palestine la reconnaissance diplomatique de jure.
La Palestine est membre de la Ligue Arabe et de l’Organisation de la Conférence Islamique. Quand la Cour de Justice Internationale de La Haye - la soi-disant Cour Mondiale de l’Organisation des Nations Unies - a mené les procédures légales sur le Mur d’Apartheid d’Israël en Cisjordanie, la Cour Mondiale a invité l’état de Palestine à participer aux débats. En d’autres termes, la Cour Internationale de Justice reconnaît l’état de Palestine.
La Palestine a le statut d’état observateur auprès de l’ONU et essentiellement tous les droits d’un membre de l’ONU sauf le droit de vote. Dans les faits la Palestine est membre de facto de l’ONU. La seule chose qui empêche la Palestine d’avoir la reconnaissance de jure est la menace implicite d’un veto des USA au conseil de sécurité de l’ONU qui serait clairement illégal. Un jour la Palestine sera un état membre de l’ONU à part entière.
Du point de vue de l’ordre mondial, la déclaration d’Indépendance de la Palestine a créé une occasion remarquable de faire la paix avec Israël parce que par là même le PNC acceptait explicitement la Résolution 181(II) de 1947 sur la partition de la Palestine décidée par l’Assemblée Générale de l’ONU qui instituait un état juif et un état arabe dans la Palestine sous mandat britannique ainsi que l’administration internationale de la ville de Jérusalem, pour résoudre le conflit de base :
En dépit de l’injustice historique que constitue pour le peuple palestinien la Résolution 181(II) de 1947 qui a divisé la Palestine en deux états, un arabe et un juif, en les privant du droit à l’autodétermination et en provoquant leur dispersion, c’est toutefois cette Résolution qui assure la légitimité internationale qui garantit au peuple arabe palestinien son droit à la souveraineté et à l’indépendance nationale.
L’importance de l’acceptation du PNC de la Résolution sur la Partition dans le cadre de la Déclaration d’Indépendance est capitale. Auparavant, la Résolution sur la Partition avait été considérée par le peuple palestinien comme un acte criminel perpétré contre eux par l’ONU en violation flagrante de leur droit fondamental à l’autodétermination tel qu’il est établi par la Charte de l’ONU et les principes généraux du droit international publique. L’acceptation de la Résolution sur la Partition dans la Déclaration d’Indépendance a révélé le désir sincère des Palestiniens de mettre fin au terrible conflit du siècle dernier qui les opposait au peuple juif illégalement implanté en son sein afin de parvenir à un arrangement historique sur la base de deux états.
Le fait même que l’acceptation de la Résolution 181 sur la Partition ait été mis en avant dans leur Déclaration d’Indépendance indique le degré de sincérité avec lequel les Palestiniens ont accepté Israël. Cette acceptation se devait d’être déterminante, définitive et irréversible. Comme le PNC le savait très bien à l’époque, leur Déclaration d’Indépendance n’était pas quelque chose qui pouvait être amendé ni faire l’objet de marchandages.
Cependant, cela fait maintenant 22 ans que les Palestiniens essaient en vain de négocier honnêtement avec Israël la solution de deux états inscrite dans la Résolution 181. Ils n’ont aboutit à rien du tout. Israël n’a jamais manifesté la moindre bonne foi dans les négociations pour une solution globale du conflit au Moyen Orient avec les Palestiniens sur la base de deux états. Même les accords d’Oslo de 1993 ne furent rien d’autre que la création d’un Bantoustan temporaire décidé par les Israéliens pour une période de 5 ans et qui fut rejeté à Washington par la Délégation Palestinienne pour les Négociations de Paix au Moyen Orient pour cette raison précise. Israël comme les USA veulent maintenant entériner l’accord Bantoustan d’Oslo de manière permanente et dans la foulée supprimer le droit au retour des réfugiés palestiniens que leur accorde la Résolution 194(III) de 1948 de l’Assemblée Générale de l’ONU et les principes généraux du droit international public.
A ce propos, peu de temps avant sa mort le 24 septembre 2007, j’ai appelé l’ancien chef de la Délégation Palestinienne des Négociations de la paix au Moyen-Orient, Dr Haidar Abdul Shaffi chez lui à Gaza pour faire le point de la situation avec lui. Selon le Dr Haida r : "Les sionistes n’ont pas changé d’objectif depuis la conférence de Bâle de 1897 !" En d’autres termes, les sionistes veulent un "plus grand" Israël sur tout le territoire de la Cisjordanie mandataire en procédant, pour se débarrasser des Palestiniens, à autant de nettoyage ethnique qu’ils pensent que la communauté internationale peut tolérer.
Après 22 ans de négociations que n’ont mené nulle part, mais qui au contraire ont permis l’érection du mur d’apartheid en Cisjordanie et l’asphyxie de Gaza, il est temps que les Palestiniens adoptent cette nouvelle stratégie que je leur recommande respectueusement de bien vouloir étudier : Ne plus rien signer et attendre qu’Israël s’effondre ! Il y a peu, on a entendu dire que la CIA américaine a prédit l’effondrement d’Israël dans les 20 ans qui viennent. Mon conseil respectueux aux Palestiniens est de laisser Israël s’effondrer !
Si les Palestiniens signaient un traité de paix global avec Israël, cela n’aboutirait qu’à consolider, renforcer et garantir l’existence du sionisme et des sionistes en Palestine pour toujours. Pourquoi les Palestiniens voudraient-ils faire une chose pareille ? Sans l’accord écrit des Palestiniens, le sionisme et Israël vont s’effondrer. Donc les Palestiniens ne doivent signer aucun accord de paix pour le Moyen Orient avec Israël, mais au contraire maintenir la pression sur Israël pour que le sionisme s’effondre dans les 20 années qui viennent comme l’a prédit la CIA. La comparaison historique adéquate n’est pas l’Afrique du Sud de l’apartheid mais la Yougoslavie génocidaire qui s’est effondrée en tant qu’état, a perdu son statut de membre de l’ONU et n’existe plus en tant qu’état pour cette raison précise.
L’évolution démographique est favorable aux Palestiniens et défavorable aux sionistes. Le gouvernement des USA commence à se lasser de donner un chèque en blanc à Israël car le soutien inconditionnel qu’il lui procure nuit considérablement et même s’oppose à l’objectif américain impérialiste de s’approprier par tous les moyens les gisement de pétrole qui se trouvent sous les terres arabes et musulmanes. Israël est handicapé, paralysé même par tellement de conflits et de contradictions internes qu’il est impossible de les citer tous ici.
De fait depuis le tout début de son existence née du génocide sioniste de 1948, la Nakba, Israël a été l’exemple même de l’état failli et il l’est resté. Israël n’aurait jamais existé sans le soutien des puissances impériales coloniales occidentales au cours du vingtième siècle. Et c’est toujours vrai. Sans le soutien politique, économique, diplomatique et militaire fourni principalement par les USA et dans une moindre proportion pas la Grande Bretagne, la France et l’Allemagne, Israël s’effondrerait immédiatement. La campagne de boycott internationale (BDS) menée contre Israël réduit rapidement le soutien des habitants de ces pays. Les atrocités commises par Israël contre les Palestiniens et les Libanais ont révélé le vrai visage du sionisme au monde entier : le génocide.
En fait Israël n’a jamais été un état ; c’est juste une armée déguisée en état -un état Village Potemkine. Israël est l’archétype de la Grande Bande de Voleurs que St Augustin décrit au livre 4, chapitre 4 de "la Cité de Dieu" :
"Les royaumes sans justice sont semblables aux grands voleurs. S’il n’y a pas de justice, que sont les royaumes sinon des bandes de voleurs ? Car les bandes de voleurs ne sont-elles pas de petits royaumes ? La bande est aussi un groupe d’hommes gouvernés par un leader, qui ont des liens sociaux et qui se partagent le butin selon les règles en vigueur chez eux. Si en ralliant toujours plus d’hommes désespérés ce fléau grossit au point qu’il réussit à conquérir un territoire et à s’y établir, à conquérir des villes et à soumettre des gens, alors il peut prendre ouvertement le nom de royaume et on lui donne ce nom non parce qu’il est devenu moins cupide mais parce qu’il jouit de davantage d’impunité..."
Toutes les forces politiques, économiques, militaires, diplomatiques, sociologiques, psychologiques et démographiques jouent en faveur des Palestiniens et contre Israël et les sionistes en Palestine. Cela prendra encore quelques années pour que ces forces deviennent prédominantes et l’emportent. Mais le sombre destin de l’entreprise sioniste en Palestine est écrit sur le mur et le monde entier -y compris surtout la CIA- peut le lire. D’ailleurs de nombreux sionistes qui vivent en Israël ont déjà préparé leurs parachutes, leurs plans de sortie et leur destination d’atterrissage dans un autre endroit du monde. Il n’y a pas de raison que les Palestiniens donnent aux sionistes une seconde jeunesse en Palestine en signant un quelconque accord de paix avec Israël.
Il est clair que le sionisme va bientôt entrer dans la "poubelle" de l’histoire comme dit Trotsky avec tous les autres mouvements nationaux en "isme" qui ont fait souffrir l’humanité au cours du vingtième siècle : le Nazisme, le Fascisme, le Franquisme, le Phalangisme, le Stalinisme, le Maoïsme, etc. La seule chose qui pourrait sauver le sionisme en Palestine, serait que les Palestiniens signent un accord de paix soit-disant global pour le Moyen Orient de quelque nature que ce soit avec Israël. C’est exactement pour cette raison que les Palestiniens ne doivent rien signer du tout et attendre qu’Israël s’effondre tout seul au cours des deux prochaines décennies.
Depuis 1948, c’est à dire depuis 62 ans, des millions de Palestiniens attendent dans des camps de réfugiés de pouvoir rentrer chez eux. Ils peuvent attendre encore un petit peu qu’Israël s’effondre au cours des 20 ans qui viennent. An contraire, si les Palestiniens signent un accord de paix global avec Israël ils ne pourront jamais rentrer chez eux comme leur en donne le droit la Résolution 194 de 1948.
L’histoire et la démographie sont du côté des Palestiniens et les Palestiniens sont contre Israël et le sionisme. Mais les Palestiniens doivent donner un peu plus de temps à l’histoire et à la démographie pour que Israël et le sionisme s’effondrent. Vingt ans, ce n’est qu’une paille au regard de l’histoire millénaire du peuple palestinien qui est le peuple originel de la Palestine. Dieu n’a aucun droit de voler la Palestine aux Palestiniens et de donner la Palestine aux Juifs pour commencer. Et l’ONU avait encore moins le droit de voler la Palestine aux Palestiniens pour la donner aux sionistes en 1947.
En attendant les Palestiniens doivent maintenir la pression sur Israël, le sionisme et les sionistes en Palestine. Les Palestiniens ont parfaitement le droit en vertu des lois internationales de résister à un régime illégal, colonial, génocidaire et criminel d’occupation armée de leur terres, de leurs maisons et de leur peuple qui remonte à 1948, aussi longtemps qu’ils le font d’une manière conforme au droit humanitaire international. En même temps les Palestiniens doivent continuer à édifier leur état comme ils le font avec succès depuis la première Intifada en 1987 sur la base du Commandement Unifié de l’Intifada.
Sur le plan international les Palestiniens doivent continuer leur offensive légale, diplomatique et politique contre Israël. La Palestine a gagné beaucoup de terrain depuis le 15 novembre 1988 jour où le PNC a proclamé l’indépendance de la Palestine. La Palestine va gagner de plus en plus le soutien international pendant les deux prochaines décennies, en partie grâce à la campagne BDS qui s’accélère et qui délégitime Israël et le sionisme dans le monde entier. An même moment Israël va continuer son déclin jusqu’à devenir un état paria comme la Yougoslavie génocidaire s’est effondrée et n’existe plus en tant qu’état. Israël aura le même destin que la Yougoslavie génocidaire à condition que les Palestiniens ne signent aucun accord international de paix avec Israël.
Quand Israël s’effondrera la plupart des sionistes seront déjà partis ou en train de partir vers d’autres pays du monde. Les Palestiniens pourront alors demander que leur état occupe toute la Palestine du mandat Britannique, y compris la ville entière de Jérusalem qui deviendra leur capitale. La Palestine pourra inviter tous ses réfugiés à rentrer chez eux selon la résolution 194.
Il y aura des Juifs qui resteront en Palestine, volontairement ou non. La Palestine et les Palestiniens traiteront avec justice les Juifs qui seront restés. La Palestine et les Palestiniens ne feront pas aux Juifs ce que Israël, le sionisme et les sionistes ont fait aux Palestiniens.
les Palestiniens ne doivent rien signer et ils doivent laisser Israël s’effondrer de lui-même.
Francis A. Boyle
Le Professeur de droit de l’université de l’Illinois, Francis A. Boyle a été conseiller juridique de l’Organisation de Libération de la Palestine dans le cadre de la Déclaration d’Indépendance de la Palestine de 1988 ; de la délégation palestinienne aux négociations de Paix pour le M.O. de 1991 à 1993 ; et du Président Yasser Arafat. Il relate ces événements dans son livre "la Palestine, les Palestiniens et le droit international" (Clarity Press, 2003). On peut le joindre à : FBOYLE [a] AW.UIUC.EDUP
Pour consulter l’original :
http://www.dissidentvoice.org/2010/10/the-impending-collapse-of-israel-in-palestine/
Traduction D. Muselet pour le Grand Soir