La modestie et la cubanité l’auront caractérisé tout au long d’une carrière débordante de talent et d’imagination, et qu’il débuta à l’hebdomadaire Mella, en 1963. Son œuvre fut diffusée dans diverses publications humoristiques, et sa série Vampires, qui plus tard sera portée au grand écran, allait acquérir une dimension internationale.
L’année 1970 marque la naissance, dans la revue Pionero, du personnage Elpidio Valdés, notre héros le plus aimé et devenu un symbole, sur un ton humoristique, de la lutte contre le colonialisme espagnol pendant la Guerre d’indépendance. Une galerie de personnages qui allaient s’installer dans la vie quotidienne avec leur signification symbolique (Maria Silvia, le géneral Resoples, le cheval Palmiche...) et qui inviteraient les enfants du pays à jouer à la charge à la machette en utilisant n’importe quel bâton, et un choix savoureux d’expressions cocasses dont on se souvient encore... « Je voudrais bien voir ça, compay ! », « Ne vous en faites pas, généra, on va en faire de la puée de talc », « Apportez-moi des clous, des pointes, mon fusil tire n’importe quoi », « La vôtre, au cas où, mister ».
Son film Vampires à La Havane (1985) fut un véritable événement en ce sens qu’il a su réunir humour et politique dans une histoire qui a été appréciée au milieu d’un océan de rires. Une satire anticapitaliste se déroulant au milieu de la corruption des années 1920 et qui opposait les vampires cubains, étasuniens et européens les uns aux autres. Un succès qui allait faire revenir Padron avec Encore des Vampires à La Havane.
Filminutos, Quinoscopios, Mafalda – avec le scénariste et dessinateur argentin Quino – dessinateur, créateur de bandes dessinées, cinéaste, Juan Padron aura évolué comme un grand dans tous les domaines, ce qui lui a valu de nombreux prix et distinctions, comme le Prix national du film en 2008.
Il avait, comme peu d’autres, le don de la surprise, car lorsque l’on pensait que sa capacité artistique avait été pressée jusqu’à la dernière goutte, il réapparaissait avec de nouvelles contributions. Jusqu’à ce qu’il tombe malade et que tout soit différent. Il n’est donc pas exagéré d’affirmer que le pays lui fait ses adieux avec une dette de gratitude, qu’il paiera chaque fois qu’il rencontrera l’un de ses personnages et, comme si c’était Juan Padron lui-même, lui sourira et se souviendra de lui.