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Je ne veux pas la faire !

La Covid qui angoisse vient de laisser la place à la Politicofolie. Tout le monde parle dans le même sens pour dénoncer la présence des troupes russes sur le territoire ukrainien. Assurément, les USA viennent de gagner une nouvelle bataille.

"Il ne s’agit pas de s’indigner, il faut penser" Edgar Morin.

Devant ce déploiement de convictions réduites, je pense au musicien Henri Sauguet qui aimait faire savoir « qu’il était l’oiseau et non l’ornithologue » et si je ne suis pas musicien je ne suis pas non plus un politologue mais un citoyen ordinaire inquiet, qui a peur et qui se pose des questions : comment en sommes-nous arrivés là ? Et que faire désormais pour éviter la catastrophe ?

« On ne fait pas la guerre pour se débarrasser de la guerre » disait Jean Jaurès mais nous ne pouvons pas écarter le fait que l’armée russe progresse en Ukraine. Cependant, pour en savoir plus, pour y voir plus clair, sur qui pouvons-nous compter dans le tumulte de la ruée antipoutine, que j’entends bien, mais qui ne me satisfait pas. C’est vrai, des paroles guerrières masquent toute réflexion et nous mènent tout droit sur le front des morts : « la guerre économique »... « l’OTAN est aussi une alliance nucléaire », « le double péril nucléaire ». C’est le règne non plus de la communication mais des communiqués de guerre portés par des saute-ruisseaux dont il est urgent de se garder. De son côté, Ursula von der Leyen, la Présidente de la commission européenne veut accélérer la procédure d’admission de l’Ukraine dans la Communauté, comme si elle se soumettait à l’ukase de Volodymyr Zelenski qui réclame une intégration sans délai. Et pour ne pas disparaître des radars médiatiques Yannick Jadot s’agite pour la livraison d’armes létales à l’Ukraine, alors que son programme propose en première place la sortie de l’Otan et par conséquent un peu moins de précipitation. Attention qu’à force de chercher des voies on ne trouve le déshonneur. Mais la note la plus élevée du délire vient de ce rassemblement de bellicistes rodés où BHL est aux côtés de l’ex-directeur de la CIA et commandant de l’offensive sur Bagdad en 2003, David Petraeus. C’est l’image de ce que nous sommes devenus : de simples supplétifs du Pentagone. Il est urgent de s’éveiller car Il ne s’agit plus de s’indigner, mais de penser.

Dans cette sale affaire, Joe Biden voit d’un bon œil l’Europe aller au front, voire se brûler et s’affaiblir. Car, c’est un secret de polichinelle, la crise ukrainienne n’a pas pour origine l’Ukraine. Il s’agirait notamment d’un certain gazoduc « Nord Stream » qui va de la Russie à l’Allemagne, ce qui doit pas mal agacer Washington. En effet, il serait surprenant que les étasuniens se satisfassent de cette situation où les Allemands auraient un gaz peu cher et les Russes des revenus à jet continu. La politique de rapprochement entre les Russes et les Allemands ne reposait pas sur du sable.
Alors pourquoi ne pas
se demander si toute la propagande hystérique anti-Poutine n’aurait pas pour but de créer une crise fatale comme l’a expliqué la sous-secrétaire d’État aux affaires politiques, Victoria Nuland, lors d’un point de presse du département d’État le 27 janvier : « Si la Russie envahit l’Ukraine d’une manière ou d’une autre, Nord Stream 2 n’avancera pas ».
On peut dénoncer l’intervention de Poutine sans être aveugle ni oublieux.

Et oui ! Honte aux oublieux, notamment les gensdetélé, qui parlent de la première guerre en Europe depuis celle de 39-45, alors que les plaies ne sont toujours pas fermées de la guerre de Yougoslavie qui a duré plus de quatre ans et du bombardement de la Serbie par l’Otan avant la sécession du Kosovo, cette province germe de la Serbie. Finalement il s’agit là du résultat d’un grand remplacement, ce qui s’approche de la situation actuelle du Donbass où les bombes d’une fraction de l’armée ukrainienne tombent quotidiennement et sèment la terreur, le désespoir, l’abandon tout en renforçant aussi la résistance. L’Otan peut attaquer et refaire les cartes, mais pas la Russie mon bon monsieur.

Et puis souvenons-nous que James Backer, secrétaire d’État entre 1989 à 1993 sous la présidence de George H. W. Bush, assure à trois reprises à Moscou dans des rencontres officielles avec des représentants des autres grandes puissances occidentales que « la juridiction militaire actuelle de l’Otan ne s’étendra pas d’un pouce vers l’Est. Il faut croire que pour les USA le mensonge est un sport national dont le record demeure la farce tragique des armes de destruction massive de Saddam Hussein.

Mais, pour le moment, la raison a du mal face aux convictions et un vent de folie, où la bêtise n’est pas la plus mince des forces, fait virevolter les politiques, les journalistes, les gens de tous bords qui voient des ennemis partout, surtout lorsqu’ils sont Russes, sportifs, même handicapés, artistes notamment qui auraient le culot de danser, de chanter, de danser de jouer sur notre sol, nos planches ou dans nos postes, alors même qu’ils sont nos invités, qu’il faudrait les écouter et les protéger de la connerie. C’est une chasse aux sorcières qui vise tout ce qui sonne russe. Je me demande bien pourquoi le journal Le Monde du 3 mars 2022 s’est abaissé à faire l’éloge de cet infâme auteur au nom impossible Fiodor Dostoïevski ? Et puis, tant que nous y sommes, Tugan Sokhiev, le chef de l’Orchestre du Capitole de Toulouse ferait bien de se cacher sans tarder. Je veux bien l’accueillir à la maison où je tiens un piano à sa disposition. Heureusement que le comique troupier est aussi de la partie et que les Russes ont dû bien rire lorsqu’ils ont appris qu’ils étaient exclus du Concours Eurovision de la chanson [Note du Grand Soir : sommé par la mairie de se positionner, il a choisi de démissionner].

Mais remontons à la surface et ne détournons pas les yeux ni les oreilles car ils sont nombreux parmi les artistes russes à ne pas manquer de courage et à afficher leurs différences. Elena Kovolskaya directrice du Théâtre d’Etat et du centre culturel Vselvolod-Meyerhold de Moscou a annoncé sa démission « pour protester contre l’invasion de l’Ukraine ». Alors stop à ces hordes de salauds qui sont la honte de la France et qui devraient plutôt s’inspirer de Marcel Conche, magnifique philosophe de la mesure et du scepticisme, pour qui « tout homme est en soi l’égal de tout autre, si l’on considère uniquement cette capacité essentielle que chacun possède de dire ce qui se montre à lui comme vrai ».

Il n’est jamais trop tard pour parler, écouter, partager, décider fraternellement avec en tête l’urgence d’un cessez le feu pour un retour nécessaire à la diplomatie telle qu’en dessine les contours Francis Wurtz, Député honoraire du Parlement européen, dans le journal L’Humanité du 28 février : « Une nouvelle conférence d’Helsinski en vue d’aboutir à un traité paneuropéen de sécurité dont le principe fondamental serait qu’aucun pays signataire ne prenne pour sa propre sécurité, une mesure affectant le sécurité d’un autre pays signataire ». Pourtant, même si le chemin s’annonce difficile, il ne faut rien négliger pour que là où règne la folie puisse aussi germer l’espoir.

Sinon, comme le disait Paul Valéry, si la guerre est un massacre de gens qui ne se connaissent pas au profit de gens qui se connaissent bien mais qui ne se massacrent pas, il faudra bien qu’un jour des comptes soient réglés, et cher. En 14-18 les poilus haïssaient moins les boches de devant que les boches de l’arrière, ces faiseurs de drames et de morts, qui préparaient la société libérale de l’après-guerre, semblables à ceux et celles qui préparent aujourd’hui le triomphe des lois du marché, avec le nivellement des goûts, celui des esprits, des vins même, là où la France ne sera plus qu’un vague souvenir.

Guy CHAPOUILLIE

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