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Haro sur Saint-Vincent-de-Paul, par Michel Strausseisen.


Les corps de 351 foetus et enfants morts nés ont été " découverts " dans le service d’Anapathologie de l’hôpital Saint-Vincent-de-Paul à Paris. Voilà de quoi faire les choux gras d’une presse traditionnellement en mal de sujets au mois d’août. Tout le monde monte aux créneaux : le ministre de la Santé, les grosses têtes de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), et même le sieur Pelloux, qui s’est fait une réputation en tant que défenseur des médecins urgentistes, et qui à présent, sans doute grisé par sa stature médiatique, a rejoint ce concert estival.

En fait de quoi s’agit-il ? Comme le rappelle le Pr Axel Kahn, membre de l’Académie des Sciences : "C’est la continuation de vieilles habitudes hospitalières", les hôpitaux ayant longtemps conservé des corps et des foetus, avant que la loi ne fixe des règles pour le respect des corps. "Au 19e siècle mais encore au 20e siècle, il y a dans de très nombreux hôpitaux des musées de la médecine avec des bocaux et dans ces bocaux, (...) des pièces d’anatomie, des foetus (...) des embryons et des nouveau-nés montrant des malformations", a rappelé Axel Kahn sur RTL.

Il est vrai que la législation a changé en la matière. Mais le fait que des corps de foetus aient été conservés, très certainement à des fins de recherche médicale, valait-il cette levée de boucliers médiatique ? On peut se demander, en effet, " à qui profite le crime " ...

Nul n’est besoin de chercher très loin. Cette " affaire " , visiblement volontairement montée en épingle, vient à point nommé renforcer l’entreprise de démantèlement de la Santé publique mise en oeuvre par nos dirigeants politiques et par leur affidée, Mme Van Lerberghe, Directrice Générale de l’AP-HP.

Saint-Vincent-de-Paul est depuis plusieurs années dans le collimateur du pouvoir et de l’AP-HP. Cet hôpital, qui était à la pointe de la médecine et de la chirurgie en pédiatrie et en maternité, de renommée mondiale (plusieurs premières mondiales y ont eu lieu) a été purement démantelé et bradé par les pouvoirs publics et la Direction Générale. Au nom d’une soi-disant rentabilisation de la Santé, cet hôpital d’exception a été sacrifié au profit de projets comme l’hôpital Georges Pompidou, qui se révèle aujourd’hui être un gouffre financier.

Malgré la défense acharnée de l’hôpital Saint-Vincent-de-Paul par les personnels, les usagers (plus de trente mille signatures !), par le maire du 14e arrondissement M. Pierre Castagnou, Mme Van Lerberghe et les pouvoirs publics ont maintenu leur décision de démantèlement.

Si aujourd’hui le maire de Paris, Bertrand Delanoë, se dit "profondément" choqué par l’annonce "stupéfiante" de la découverte des 351 foetus et enfants morts-nés, rejoignant ainsi la cohorte des vautours, peut-être ferait-il mieux de se souvenir de ses promesses faites à l’hôpital même avant son élection, quand il affirmait que la Mairie de Paris s’opposerait absolument à la fermeture de Saint-Vincent. Or, M. Alain Lhostis, représentant de la Mairie au Conseil d’Administration de l’AP-HP, a donné son accord de principe, lors d’une inauguration à Cochin, pour ce démantèlement, en échange de vagues promesses de l’AP-HP concernant la restructuration (promesses qui bien entendu n’ont à leur tour pas été tenues). Décidément, cette " horreur " médiatique est des plus suspectes...

Quant aux leçons d’éthique des dirigeants de l’AP-HP et des pouvoirs publics, c’est tout simplement l’histoire du voleur qui crie au voleur ! Les journalistes en mal de copie pourraient par exemple aller se renseigner sur des expulsions par l’AP-HP, dont celles de personnes âgées, qui ont eu lieu il y a guère longtemps rue Delambre, à deux pas de Saint-Vincent... Ils pourraient se renseigner sur les moyens mis en place pour les prochaines canicules : chacun sait à l’AP-HP que ces mesures sont dérisoires, notamment à cause du " dégraissage " actuellement en cours et qui vide dramatiquement et dangereusement les services de leurs personnels...

Quant au nombre, 351, qui s’en étonnera dans un hôpital dont le recrutement en maternité est spécialisé dans le suivi des grosses pathologiques ? Non, contrairement à ce qui est dit, ce nombre n’est pas " anormalement élevé " au regard des milliers de grossesses pathologiques qui ont été prises en charge à Saint-Vincent-de-Paul. La recherche a nécessairement besoin de ces foetus et enfants morts-nés pour identifier, décrire les malformations, bénéficier des futurs progrès en recherche et en dépistage anténatal. On pourrait supposer aussi d’éventuelles raisons médico-légales : certains parents peuvent parfois remettre en cause le bien-fondé d’une interruption thérapeutique de grossesse.

On imagine l’état des nombreux parents ayant dû se résoudre à une interruption de grossesse, non seulement ceux directement concernés, mais aussi tous les autres : la maternité de Saint-Vincent-de-Paul, qui est pourtant un service différent de celui de l’anapathologie, est depuis ce matin submergée par les appels téléphoniques de parents angoissés... L’AP-HP et le ministre de la Santé ont-ils pensé à eux avant de porter cette " affaire " sur la place publique ?

Ces pouvoirs publics, ces dirigeants qui méprisent ouvertement les vivants voudraient-ils se " refaire une santé " sur le dos des morts ?
Cet " affaire " montée en épingle, puisque la pratique des recherches médicales sur les foetus et les enfants morts-nés est non seulement normale mais surtout nécessaire, cette soi-disant " affaire " ne vient-elle pas à point nommé pour achever un hôpital de pointe et justifier, après coup, la politique de démantèlement de la Santé publique en France ?

Alors oui, à qui profite le crime ?

Paru dans Vendémiaire, revue virtuelle, gratuite, politique et culturelle.

www.geocities.com/actpol/REVUE.html

actpol@yahoo.fr


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