Au milieu des années soixante, le Royaume-Uni connaissait de sérieuses difficultés économiques et financières, au point que le gouvernement travailliste dut faire appel à l’aide du FMI. Ce fut la première - et dernière - fois qu’un pays riche était contraint de passer sous des fourches caudines normalement réservées aux pays pauvres.
Juste avant cela, le Premier ministre Harold Wilson avait décidé la création d’un impôt exceptionnel (super tax) pour les très riches, de sorte que leurs revenus furent taxés à plus de 95%. A l’époque, la livre anglaise était divisée en 20 shillings, eux-mêmes divisés en douze pennies. Une fois qu’on avait pris le coup, on avait affaire à une monnaie extrêmement concrète : certains produits étaient pensés en livres, d’autres en shillings, d’autre en pennies. Pour tout compliquer, les Britanniques utilisaient même la guinée, qui valait 21 shillings (une livre plus 1 shilling). Bref, c’était le bon temps.
Pas pour le Beatle George Harrison, très bon musicien mais nouveau riche furieux de se voir tondre la laine sur le dos. Pour l’album Revolver, il composa la chanson " Taxman " , dans laquelle, de manière très poujadiste et égoïste, il exprima son ire. Renvoyant dos-à -dos les travaillistes et les conservateurs (« Mr Wilson, Mr Heath »), il créa très habilement un narrateur qui n’était autre qu’un percepteur particulièrement zélé et sadique. Ce fonctionnaire était prêt à tout taxer : la rue si on conduisait une voiture, un siège si on voulait s’asseoir, nos pieds si on voulait se promener. « Si vous gagnez 20 shillings », disait le taxman, j’en prendrai 19 » (« There’s one for you, nineteen for me »).
Mais ce qui révulsa au plus haut point Harrison, ce fut l’augmentation de l’impôt sur les successions. Payer un impôt alors qu’on était mort était incompréhensible pour le Beatle : « declare the pennies on your eyes » (dans l’Angleterre traditionnelle, on fermait les yeux des morts avec des pièces de monnaie, d’or si possible).
Et notre bonne Liliane, me direz-vous ?
J’avoue que l’idée de cette note m’est venue lorsque j’ai lu que l’héritière de l’empire L’Oréal était imposée - en toute légalité - à 11% (c’est fort bien expliqué dans Le Canard Enchaîné de cette semaine).
La nostalgie n’est plus ce qu’elle était.