
C’est un véritable coup de tonnerre dans le ciel argentin. Buenos Aires, qui avait fondé tous ses espoirs sur la Cour Suprême américaine, vient de voir sa condamnation confirmée dans le procès qui l’oppose à des fonds spéculatifs. La Cour a refusé de s’impliquer dans cette affaire, qui a pris des allures de psychodrame planétaire. L’Argentine doit donc rembourser 1,3 milliard de dollars à des fonds surnommés fonds « vautours », car ils font leur apparition quand un Etat est aux abois.
Le fonds Elliott du milliardaire Paul Singer
Elliott est le plus célèbre d’entre eux. Il a été fondé par le milliardaire américain Paul Singer. Son coup de maître ? Avoir mis la main sur des titres obligataires argentins lorsque ceux-ci ne valaient quasiment rien, du fait de la faillite du pays en 2001, et obtenu de la justice américaine une décision favorable. Les juges de New York ont ordonné à Buenos Aires de rembourser le fonds à 100 %, et non à hauteur du prix que celui-ci a réellement payé.
Plus rocambolesque encore, les juges ont déclaré que la seule façon légale d’échapper à cette injonction était, pour l’Argentine, de ne plus payer aucun de ses autres créanciers. En somme, de se déclarer en défaut de paiement. Un comble pour un pays qui est passé par deux accords de restructurations de dette, en 2005 et 2010, et qui vient, après des années de négociations de conclure un accord pour apurer sa dette envers le Club de Paris (qui réunit la France, l’Allemagne, le Japon..).
Spectre du défaut de l’Argentine
C’est donc le spectre du défaut qui refait surface. Dans quelques semaines, lorsque le gouvernement devra honorer sa prochaine échéance, il pourrait décider de ne rien verser, pour éviter de rembourser Elliott, devenu la bête noire de la présidente Cristina Kirchner. Une perspective qui a fait plonger la Bourse de Buenos Aires en début de séance.
Le refus de la Cour suprême américaine de se saisir du dossier est aussi un camouflet pour tous ceux qui avaient publiquement défendu la cause de l’Argentine ces derniers mois : la France (François Hollande avait d’ailleurs reçu Cristina Kirchner), le Brésil, le Mexique et même le prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz. Tous arguaient du risque que ferait peser la condamnation de l’Argentine sur les autres dettes d’Etat. La plus haute juridiction américaine n’a manifestement pas été sensible à ces arguments. Pour ceux qui voient dans l’Argentine un Etat « voyou », c’est à l’inverse une grande victoire.
Cristina Kirchner devait s’exprimer hier soir. L’Argentine, dont les réserves de changes fondent, craint de devoir rembourser beaucoup plus que 1,3 milliard de dollars si d’autres investisseurs s’engouffrent dans la brèche.
Isabelle Couet