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Election en Bolivie : une grand victoire pour la démocratie

La Bolivie est un pays de l’Amérique du Sud d’un peu plus de 9 millions de personnes aux ethnies multiples. Elle est composée à 55% d’Amérindiens (30% Quechua et 25% Aymara), à 30% de métis, et à 15% d’Européens blancs. Sans accès à la mer, depuis la guerre du Pacifique (1879-1884), elle est une enclave entourée par le Brésil, le Paraguay, l’Argentine, le Chili et le Pérou. Les principales caractéristiques de sa géographie sont l’Altiplano, un haut plateau se situant au milieu des Andes, et le lac Titicaca qui est la plus vaste étendue d’eau d’Amérique du Sud et le plus haut lac commercialement navigable du monde. Une majorité de la population y vit. A l’est, en direction de la frontière brésilienne, on y retrouve le climat tropical et de vastes étendues de terre et de forêt.

La Bolivie, bien qu’étant le pays le plus pauvre de l’Amérique du Sud, n’en est pas le moins riche en ressources naturelles : étain, gaz naturel, pétrole, zinc, tungstène, antimoine, argent, fer, plomb, or, bois de construction, barrage hydro-électrique. Elle a été, plus souvent que moins, sous la gouverne de gouvernements, surtout oligarchiques et dictatoriaux. Les mouvements sociaux qui s’élevaient contre l’hégémonie de ces gouvernements ont été constamment réprimés par les forces militaires, entrainées à servir prioritairement les oligarchies et leurs intérêts. En dépit de ces répressions sanglantes, ils n’ont toutefois pas été entièrement anéantis. Christian Rudel de l’Université Laval, présente, en 2006, l’entrée en scène d’Évo Morales comme nouveau Président de la Bolivie :

« C’est sur fond de mécontentement social qu’Evo Morales, ancien syndicaliste paysan, défenseur des cultivateurs de coca, puis organisateur du Mouvement vers le Socialisme (MAS), a bâti sa conquête du pouvoir. Il a élaboré un programme social et antilibéral, porté par les associations et syndicats du mouvement social : nationalisation des secteurs-clés de l’économie (hydrocarbures, transports, télécommunications), arrêt du paiement de la dette extérieure, défense de la coca, plante emblématique de la culture indienne, fin de l’intervention états-unienne et convocation d’une Assemblée constituante pour redéfinir la nature de l’État et l’adapter à la réalité pluriethnique de la nation. »

Qui est-il donc cet homme, d’à peine cinquante ans, devenu, pour ces millions d’amérindiens, le porteur des promesses de libération, prophétisées par leurs ancêtres depuis des milliers d’années ?

EVO MORALEZ AYMA fut le premier Bolivien d’origine amérindienne à être élu, en 2005, Président de la Bolivie, pays où les hauts plateaux voisinent le ciel et où les vallées arrivent jusqu’au dessous du niveau de la mer. Si en 2008, le monde salua avec enthousiasme et admiration l’élection du premier noir élu au poste de Président des États-Unis, celle du premier amérindien à occuper, en 2005, la Présidence de la Bolivie passa pratiquement inaperçue. Pourtant, cette élection innovait sur plusieurs fronts. Évidemment, il y avait l’origine amérindienne de l’élu, mais aussi le parcours humain, marqué par une enfance humble sur les hauts plateaux d’Orinoca, les luttes syndicales avec les mineurs, puis les combats politiques contre la corruption et pour le respect des droits des amérindiens et amérindiennes, sans discrimination pour personne.

Je me permets la citation d’un article de Fidel Castro, qui a rencontré à quelques reprises ce personnage qui ne cesse de le fasciner et dont il nous trace son portrait et son itinéraire. Pour lui, Évo Morales eût été un candidat tout désigné pour le prix Nobel de la paix 2009.

« Evo Morales, paysan indigène très pauvre, faisait paître dans les Andes, en compagnie de son père, le troupeau de lamas de sa communauté indigène. Il n’avait même pas six ans. Tous deux les conduisaient quinze jours durant jusqu’au marché où ils les vendaient pour acheter les aliments de la communauté. Quand j’ai interrogé Evo sur cette expérience singulière, il m’a raconté qu’il « descendait dans un hôtel 1 000 étoiles », une belle formule pour désigner le ciel si dégagé de la Cordillère qu’on y installe parfois des télescopes.

Durant ces dures années de son enfance, la seule autre issue pour les paysans de la communauté aymara où il est né était d’aller couper la canne à sucre dans la province argentine de Jujuy, où une partie de la communauté se réfugiait parfois lors de la campagne sucrière.

(…) Il apprit à lire et à écrire en espagnol dans une petite école publique où il se rendait à pied, à cinq kilomètres de la chaumière où il vivait avec ses frères et ses parents.
Pendant son enfance hasardeuse, Evo était constamment à la recherche de maîtres. Il a appris de son peuple trois principes moraux : ne pas mentir, ne pas voler, ne pas être faible.

Quand il eut treize ans, son père l’autorisa à vivre à San Pedro d’Oruro pour y faire des études secondaires. L’un de ses biographes nous dit qu’il était meilleur en géographie, en histoire et en philosophie qu’en physique et en maths. Le plus important, toutefois, c’est que pour payer ses études, il se levait à deux heures du matin pour aller travailler comme boulanger, manoeuvre ou dans d’autres métiers qui demandent un effort physique. Il allait en classe l’après-midi. Ses compagnons l’admiraient et l’aidaient. Dès l’école primaire, il avait appris à jouer divers instruments à vent, et il fut trompettiste d’une prestigieuse fanfare d’Oruro.

Encore adolescent, il avait organisé l’équipe de football de sa communauté, dont il était le capitaine.

L’accès à l’université n’était pas à la portée d’un indigène aymara pauvre.

Une fois ses études secondaires terminées, il fit son service militaire et retourna dans sa communauté, sur les hauteurs de la cordillère. La pauvreté et les catastrophes naturelles obligèrent sa famille à émigrer vers la région subtropicale d’El Chapare, où elle obtint un petit lopin de terre. Evo avait vingt-trois ans quand son père mourut en 1983. Il travailla durement la terre, mais c’était aussi un militant né qui organisa tous les travailleurs, créa des syndicats et combla par là des vides dans des secteurs où l’État ne faisait rien.

Je me bornerai à dire qu’Evo a été capable de vaincre les terribles campagnes de calomnies orchestrées par l’impérialisme, ses coups d’État et ses ingérences dans les affaires intérieures du pays, de défendre la souveraineté de la Bolivie et le droit de son peuple millénaire au respect de ses coutumes. »

Un des moments forts de son dernier mandat fut celui de la modification de la Constitution à laquelle s’est opposé avec force et violence l’Oligarchie. A l’époque, j’avais écrit un article sur « La marche d’un peuple » allant rejoindre son Président qui faisait une grève de la faim, arme utilisée pour briser l’acharnement d’un Sénat majoritairement servile à l’oligarchie et qui refusait d’entériner cette nouvelle Constitution. C’est ce même peuple qui, en ce 6 décembre 2009, vient de reporter au pouvoir celui qui répond si bien à ses attentes. Les résultats des sondages recueillis à la porte des urnes, le donne gagnant avec plus de 62 % d’appui populaire, très loin devant ses adversaires.

VIVE LA DÉMOCRATIE ET LONGUE VIE A EVO MORALES, SON PRÉSIDENT

Oscar Fortin
6 décembre 2009
http://humanisme.blogspot.com

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(...) quelqu’un a dit il y a vingt ans : "vous pouvez croire tout ce qu’on raconte sur cet homme, sauf qu’il est mort".

(...) Ce lieu sera pour toujours un témoignage de lutte, un appel à l’humanisme. Il sera aussi un hommage permanent à une génération qui voulait transformer le monde, et à l’esprit rebelle et inventif d’un artiste qui contribua à forger cette génération et en même temps en est un de ses symboles les plus authentiques.

Les années 60 étaient bien plus qu’une période dans un siècle qui touche à sa fin. Avant toute chose, elles ont été une attitude face à la vie qui a profondément influencé la culture, la société et la politique, et a qui a traversé toutes les frontières. Un élan novateur s’est levé, victorieux, pour submerger toute la décennie, mais il était né bien avant cette époque et ne s’est pas arrêté depuis. (...)

Avec une animosité obstinée, certains dénigrent encore cette époque - ceux qui savent que pour tuer l’histoire, il faut d’abord lui arracher le moment le plus lumineux et le plus prometteur. C’est ainsi que sont les choses, et c’est ainsi qu’elles ont toujours été : pour ou contre les années 60.

Ricardo Alarcon,
président de l’Assemblée Nationale de Cuba
Allocution lors de l’inauguration de la statue de John Lennon à la Havane, Décembre 2000

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