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Cuba : La diplomatie française joue avec le feu

Par Hernando Calvo Ospina*

(Rebelión.org. Espagne. Septembre 1 2003)

Des mesures politiques agressives, et de surcroît des relations avec l’extrême droite de Miami.

I) L’Union Européenne a décidé d’adopter des mesures répressives contre Cuba,
en raison de l’incarcération, au mois d’avril, de 73 personnes dénommées "
dissidentes ". Il n’a servi à rien que Cuba démontre les étroites relations
que les condamnés entretenaient avec des agences du gouvernement étasunien
et certaines européennes, pour déstabiliser le système politique en place. A
cela s’est ajoutée l’exécution de trois preneurs d’otages sur un petit
bateau qu’ils essayaient de diriger vers les Etats-Unis, mettant en danger
la vie de dizaines de personnes, dont deux Françaises.

L’Union Européenne a
décidé d’agir contre Cuba alors qu’elle ne le fait pas contre d’autres pays
latino-américains où la torture, les disparitions et les assassinats sont le
pain quotidien. Une grande partie de ces nations connaissent une violence
d’Etat cruelle qui n’a jamais été signalée à Cuba. Ainsi l’Union Européenne,
poussée par les gouvernements d’Espagne et d’Italie, principalement, assume
la même attitude agressive que les Etats-Unis.

II) L’Espagne est de moins en moins une référence en ce qui concerne les
relations de l’Europe avec l’Amérique latine, pour des raisons complexes qui
ne seront pas abordées ici - disons juste que l’arrogance du président Aznar
n’y est pas pour rien. La France vise à devenir la nouvelle référence, mais
dans le cas de Cuba elle est plutôt mal partie.

Quand au milieu des années 90 presque personne ne pariait un centime sur
l’avenir de la Révolution ; alors que l’on s’attendait chaque matin à 
l’annonce du naufrage de cet exemple de dignité et de changement social, le
plus beau qu’ait connu l’Amérique latine, le gouvernement français
complotait pour saboter le navire.

En décembre 1996, le gouvernement français décerne le Prix des Droits de
l’Homme à Elizardo Sanchez. Il est bon de rappeler que M. Sanchez a été l’un
des " dissidents " les plus encensés par la grande presse et récompensé par
plusieurs nations et institutions. Il jouit de ce fait d’une reconnaissance
internationale, en particulier depuis que l’on pressent la fin de l’Union
Soviétique et que dans cette nation pullulent les " dissidents " en tout
genre, aujourd’hui convertis dans leur majorité en délinquants ou mendiants.
Dans son pays, seuls ses voisins et les services de renseignements savent
qui est M. Sanchez.

Aujourd’hui qu’Elizardo Sanchez est de nouveau dans la presse
internationale, il est intéressant de mentionner un détail très peu connu.
Le dossier qui a permis à M. Sanchez d’obtenir le Prix a été réalisé par
l’ambassade de France à La Havane, laquelle l’a remis à Paris, à celui qui
était à l’époque directeur de la Cimade, respectable Organisation non
gouvernementale. Ce monsieur n’a jamais transmis le dossier aux responsables
de la section " droits de l’homme " de cette institution, lesquels étaient
davantage au courant de la situation interne de Cuba. Ces derniers n’ont
jamais su - c’est ce qu’ils ont confié à l’auteur de cet article - quels
mérites avaient valu au " dissident " Sanchez de recevoir des mains de M.
Chirac l’un des prix les plus représentatifs octroyés par l’Etat français,
avec vingt mille dollars à la clé.

III) Désormais l’Etat français, toujours présidé par M. Chirac, a rendu publiques
sa prise de distance et sa confrontation avec l’Etat cubain. Non seulement
il a invité pour la première fois les " dissidents " à la célébration de sa
fête nationale, le 14 juillet, à La Havane, mais il a également apporté un
soutien considérable à des organisations comme Reporters Sans Frontières
(RSF) et en particulier à son directeur Robert Ménard, qui souffre d’une
obsession maladive à l’égard de la Révolution cubaine. Quand on aborde le
thème de Cuba avec M. Ménard, son visage se transforme et ses yeux se
révulsent. Une telle obsession a conduit M. Ménard et d’autres membres de
RSF à occuper et assiéger l’Office du Tourisme de Cuba à Paris, et à 
s’enchaîner aux grilles de l’ambassade cubaine de la même ville. Des actes
censurables qui contrastent avec l’éthique que prétend posséder cette
association.

Je me demande ce que pensent le gouvernement français et RSF maintenant que
l’on a découvert qu’Elizardo Sanchez, l’une de leurs principales " vedettes
", élevé au rang de - soi-disant - remplaçant de Castro, collabore avec les
services de renseignements cubains depuis 1997. Mais ce n’était pas par
fidélité envers la Révolution. Dans le livre " El Camaján ", récemment paru
à La Havane, Elizardo Sanchez apparaît comme détenteur d’un opportunisme
extrême qui l’a conduit à pactiser avec tout le monde par intérêt, répétant
ainsi l’histoire de nombreux " dissidents " cubains glorifiés à l’étranger.
Sanchez, lors d’interviews avec la presse internationale, a nié une telle
collaboration, mais il n’a pas réussi à expliquer les preuves
photographiques présentes dans le livre.

Depuis la parution du livre, le nom d’Elizardo Sanchez doit empêcher de
dormir ceux qui l’ont soutenu pour qu’il complote contre la Révolution
cubaine, car ils savent quel genre d’informations il a pu fournir. Mais le
possible cauchemar de ceux qui ont soutenu la " dissidence " a commencé au
mois d’avril, quand le Ministre cubain des affaires étrangères en personne,
a annoncé dans une conférence de presse que plusieurs " vedettes "
internationales de la " dissidence " étaient des agents des services de
renseignements cubains.

Deux d’entres elles l’étaient depuis plusieurs années, et tout comme
Sanchez, faisaient partie des contacts indiscutables de Reporters Sans
Frontières, du Département d’Etat étasunien, de la mafia cubaine de Miami et
de plusieurs gouvernements européens : Nestor Baguer et David Orrio. Leurs
articles furent très diffusés et bien rémunérés par de nombreux médias
internationaux. Ironie du sort : ceux qui payaient pour que l’on porte
atteinte à la souveraineté de Cuba, finançaient en fin de compte ceux qui la
protégeaient.

IV) Le gouvernement français prend très au sérieux le soutien ouvert qu’il
apporte à la contre-révolution cubaine, à tel point qu’il est entré en
relation avec la Fondation Nationale Cubano Americaine (FNCA).

Il est de notoriété publique que la FNCA est une organisation d’extrême
droite basée à Miami, fondée en 1983 par le Conseil National de Sécurité du
président Ronald Reagan. Elle entretient, cela va de soi, des relations très
étroites avec la CIA et le Département d’Etat. La FNCA a servi les intérêts
étasuniens dans plusieurs régions du monde, en commençant par soutenir la
brutale " Contra " nicaraguayenne et le criminel de guerre Jonas Savimbi.

La FNCA a financé de nombreux attentats terroristes contre Cuba, y compris
ceux qui ont touché des sites touristiques à la fin des années 90, et coûté
la vie à un jeune Italien. La FNCA, en coordination avec l’entreprise de
rhum Bacardi, a financé et rédigé la loi Helms-Burton qui entendait
soumettre le peuple cubain par la faim. Cette loi étasunienne est toujours
une source de confrontation entre l’Union Européenne et les Etats-Unis, car
elle viole plusieurs règles du commerce international. En effet, l’un de ses
paragraphes prétend envoyer dans les prisons étasuniennes tous ceux qui font
du commerce avec Cuba : c’est le cas de plusieurs entreprises européennes,
en particulier françaises, installées sur l’Ile.

Cela - et plus encore - importe peu au gouvernement français qui a reçu à la
mi-juillet Ramon Umberto Colas Castillo, comme le révèle le journal Le Monde
du 25 août. M. Colas n’est pas le simple représentant international des
soi-disant " bibliothèques indépendantes de Cuba " qu’il prétend être. Il
suffit d’enquêter un tant soit peu - et le gouvernement français a largement
les moyens de le faire - pour découvrir aisément que M. Colas travaille pour
la FNCA. Mais ce n’est pas tout. Colas est venu préparer la visite en France
d’une délégation de haut niveau de la FNCA qui, selon des fonctionnaires du
Ministère des affaires étrangères français, sera reçue officiellement à la
mi-septembre.

La diplomatie française ne semble pas savoir qu’elle joue avec le feu.

Hernando Calvo Ospina , journaliste et écrivain colombien résidant en France.

Contact @

Source : CUBA SOLIDARITY PROJECT http://viktor.dedaj.perso.neuf.fr/html/

"Lorsque les Etats-Unis sont venus chercher Cuba, nous n’avons rien dit, nous n’étions pas Cubains."

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