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Contre le terrorisme des marchés : Lettre de la Grèce.

Photo : Steve Outram

Pendant les derniers mois nous assistons à une attaque vulgaire dont l’objet ciblé est l’économie grecque. Cette attaque des marchés, cette attaque d’un fantôme qui plane menaçant et anonyme au dessus de l’Europe, s’intensifie au jour le jour, dépassant toute limite et toute frontière. Bombardés par des nouvelles destinées plutôt à terroriser qu’à éclaircir, nous nous rendons compte que ce qui nous manque est, plus que l’information, une pensée capable de saisir l’image globale de la situation, qui se détériore constamment. Ce qui nous manque est une action qui proposerait des modèles alternatifs de vie et de croissance.

En favorisant les plans des marchés, une campagne insistante de plusieurs Médias a nourri le public européen d’informations polluées pour arriver à la construction d’une opinion publique déformée. Le cas grec a été présenté comme une anomalie constante et isolée, en faisant référence à des facteurs économiques, mais également à des facteurs raciaux, et la Grèce a été taxée de nation indigne d’appartenir à l’Europe. Nous savons pourtant que les politiques basées sur la recherche de boucs émissaires ont par le passé conduit à l’horreur des guerres, des épurations nationales, et des camps de la mort, et qu’aujourd’hui de telles logiques sont non seulement injustes mais aussi aberrantes et destructrices. Cette propagande néo-raciste a créé le climat interdisant une intervention européenne rapide et efficace à la crise, et a finalement piégé certains gouvernements, même ceux qui avaient montré une certaine complaisance, en ignorant que le but de l’attaque ne se limitait pas à la Grèce et son économie mais visait l’économie, la cohérence et l’existence même du sud européen et finalement de toute l’Europe.
Sous la menace des indicateurs d’évaluation, les citoyens européens sont sommés de se soumettre à des mesures toujours plus intolérables sans savoir où elles vont s’arrêter ou si elles pourront conduire à un meilleur avenir. Cependant, en Grèce, au Portugal, en Espagne, en France, en Italie et ailleurs, des gens toujours plus nombreux refusent de se soumettre a des politiques unidimensionnelles, visant a l’assainissement d’un système malsain qui, comme Saturne, tente de nouveau de dévorer ses enfants.

Cette tendance capitaliste boulimique est en grande mesure la cause de la crise économique et politique qui sévit en Europe et ailleurs, et aussi en Grèce. Les problèmes du pays sont dus en grande mesure à l’hémorragie de la course aux armements, par ce que l’Europe, ne semble pas capable de garantir la sécurité de ses frontières, ni celles de son économie. Pourtant ceux qui ont été, par le passé et aujourd’hui encore, responsables des problèmes du pays, sont plusieurs représentants du pouvoir, qui mettent leurs intérêts personnels avant l’intérêt public, en incitant une partie de la société à ignorer ses responsabilités, ses obligations et ses droits et minant ainsi les concepts de la collectivité et de la conscience civique. Les Grecs, ainsi que plusieurs autres Européens, ignorent quelles seront les nouvelles mesures qui leurs seront imposées dans le proche avenir et se rendent compte que le produit de leur sacrifices servira pour couvrir les dettes au lieu d’ être utilisé pour la croissance économique.

Ces constatations, bien que nécessaires pour une autocritique féconde, ne signifient pas que toutes les femmes et les hommes Grecs, qui descendent aujourd’hui dans la rue pour protester, le font pour sauvegarder des privilèges injustifiables. Les privilégiés ne montrent pas très souvent une tendance à manifester et les salaires en Grèce sont parmi les plus bas de l’euro-zone. Au delà du chiffre officiel de 15% des chômeurs on doit compter avec le chômage non déclaré, les petits pensionnaires et les jeunes travaillant sous des conditions exténuantes pour des rétributions allant de 400 a 250 EUROS par mois. La hausse de la dette internationale et publique du pays et la soumission du gouvernement à la politique de l’Union Européenne et du Fond Monétaire International ont comme résultat que les sommes assurées à travers les nouveaux prêts ne servent qu’à couvrir les intérêts exorbitants, en interdisant toute croissance. Les Grecs, ainsi que le reste des Européens, sont incapables de connaître les mesures supplémentaires qui vont leur être imposées d’un moment à l’autre. Le parlement grec est dévalorisé du moment qu’il doit simplement souscrire aux dictats des contrôleurs étrangers. Le Premier Ministre démocratiquement élu quelques mois auparavant a plusieurs fois déclaré que le pays a perdu une partie de son indépendance nationale. Ce qui signifie que le fantôme des marchés menace aujourd’hui, en Grèce et partout en Europe, de soumettre la politique aux volontés occultes de la haute para- économie.

Tout ceci incite à la vigilance dans un pays dont l’histoire abonde en mobilisations de masse contre des troupes d’occupation, des dictatures et des injustices sociales. Ces mobilisations, malgré la perte tragique et inacceptable de trois vies humaines, sont, en Grèce, comme dans la plupart de l’Europe, dans leur majorité écrasante non violentes. De plus, dans un pays où l’étranger est traditionnellement considéré comme sacré, elle ne menace point ceux qui visitent le pays. Ce dont les citoyens grecs on besoin, c’est de passer de la négation et de la dénonciation d’un modèle social et politique qui a déjà démontré ses limites, à l’invention d’une nouvelle positivité, originale et féconde, qui va faire face au désespoir et ouvrir des perspectives pour le futur.

On dit souvent que la crise de la Grèce et de l’Europe n’est pas uniquement d’ordre économique mais aussi politique et culturel. Cela veut dire que dans toute réponse possible à la crise, le facteur culturel doit avoir une position centrale. La réalité matérielle et immatérielle des villes où nous vivons, celle de nos rencontres et des relations que nous réussissons à établir, des différentes langues que nous parlons et des narrations qui établissent nos identités ne peut être rayée par la force de la baisse et de la hausse des chiffres dans les bourses, fluctuant selon la volonté des indicateurs d’évaluation des marchés. Le fait d’avoir ou de ne pas avoir de travail, de préserver ou de perdre nos droits humains, à commencer par le droit à la dignité, le fait de s’enrichir collectivement et individuellement à travers le dialogue substantiel interculturel, est avant tout une chose autre, liée à la culture, l’enseignement, les valeurs des civilisations. Ce qui signifie que la création, la pensée, la recherche dans les domaines de l’économie, de l’énergie, de l’écologie etc., activités qui aujourd’hui sont absorbées ou marginalisées par le système, doivent devenir centrales, pour apporter leur réponses a la crise.

C’est pour cette raison que nous nous adressons à toutes et a tous qui, en Grèce comme dans le reste de l’Europe et ailleurs, ont le sentiment que la crise les concerne directement et aspirent à briser les barrières de l’isolement qui nous tiennent prisonniers comme une armure narcissique et castre notre volonté de réaction. Nous adressons à tous ceux qui essaient de penser au delà de stéréotypes, qui refusent que l’Europe soit divisée entre Nord et Sud, entre catholiques ou protestants, orthodoxes, musulmans ou athées, riches ou pauvres. A tous ceux qui refusent cette nouvelle guerre économique. La signature de ce document peut représenter une contribution à la création de réseaux de mémoire, de communication, de critique, qui va proposer des rencontres et des actions communes en Grèce et ailleurs, entre des personnes de tous les pays de notre continent et du reste du monde. En répondant par des actes concrets au terrorisme des marchés et au néo-racisme qui les sert, essayons de transformer les brèches ouvertes par la crise terrible que nous subissons, en occasion pour une prise de conscience des citoyens européens et pour le retour créateur du politique dans notre vie.

PETITION
http://www.petitiononline.com/letfg/petition.html

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La République contre son École
Muriel FITOUSSI, Eddy KHALDI
Certains, après la sortie de « Main basse sur l’école publique », (1) n’ont pas voulu croire, au moins dans un premier temps, dans la radicalité des postulats et parti-pris idéologiques qui avaient présidé, comme nous le dénoncions alors, aux mesures initiées par Xavier Darcos. Puis la « fusée des réformes » a décollé, et les yeux de nombreux citoyens, au-delà même de la communauté éducative, ont été décillés. Les atteintes graves au service public d’éducation se sont succédées à un rythme (…)
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Quand l’ordre est injustice, le désordre est déja un commencement de justice.

Romain ROLLAND

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