
Créée en 1985 dans le contexte des négociations de paix entre le gouvernement Belisario Betancur et les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie, l’Union Patriotique a rassemblé les membres de la guérilla et des militants politiques. L’espoir qu’avait suscité la création de cette organisation politique a été tué avec le massacre de plusieurs milliers de ses militants, élus et dirigeants.
Quatre mois avant son congrès, qui s’est tenu les 15 et 16 novembre derniers, l’UP a récupéré son statut légal.
Laurent Péréa, membre de la direction nationale, représentait le PCF à ce congrès.
Depuis un an, il y a une évolution flagrante de la situation politique en Colombie, due au processus de paix engagé, qui crée un espoir après tant d’années de luttes, de résistances, de guerre. Il s’entrevoit aujourd’hui, malgré les difficultés réelles, les manques de garanties, la possibilité de trouver une issue politique, une issue positive pour le peuple colombien en termes de transformation sociale.
On voit bien comment les fronts sociaux et politiques font émerger la recherche forte d’un instrument politique pour cette transformation sociale. Du Polo Démocratique à la Marche Patriotique, d’un Parti communiste partie prenante, animateur/acteur de ce processus de changement, l’Union Patriotique représente une force qui se veut moteur d’une unité large, d’un mouvement transformateur en construction dynamique. Aujourd’hui, dans ce processus engagé, l’UP, au- delà de la réhabilitation, pose la question avec les familles des victimes du génocide, de la reconnaissance de l’état de celui-ci, tout comme de la réhabilitation politique.
En termes d’espoir, le retour d’Aida Avella, ancienne dirigeante et élue de l’UP, après plus de 23 années d’exil, a été vécu comme un fait historique très important. Sa proposition de candidature à la présidentielle de 2014 à l’ensemble de la gauche se veut représenter tout ça.
Au cœur de ce congrès, le processus de paix en discussion à La Havane a bien entendu traversé toute la réflexion. Ce qu’il en ressort, c’est qu’il est une étape très importante dans la perspective de trouver un débouché politique, visant précisément à renforcer la démocratie et créer les garanties que toutes les organisations politiques dans le pays, sans exception, puissent bénéficier de la protection de l’État, avec droits à l’égalité et avec les mêmes conditions, afin d’agir sur la scène politique nationale. Ce processus porte en lui la référence d’en finir avec un état violent, un état terroriste qui a conduit à l’extermination de l’UP qui, avec Aida et un contingent d’une diversité d’hommes et de femmes venant de tous les coins du pays, représente une force incontestable aujourd’hui.
Les plus de 1200 délégués à ce congrès en ont été un marqueur fort, notamment au regard de la diversité présente en termes d’acteurs sociaux, syndicaux, citoyens et politiques.
L’espoir est désormais fort à ce que peut-être une solution politique à ce conflit émerge de La Havane à condition qu’il y en ait vraiment la volonté. Cette volonté existe côté mouvement populaire et UP. Un porte-parole du gouvernement est également venu l’exprimer à ce congrès.
En fait, se dessine aujourd’hui la dynamique d’un large front populaire et social pour la paix dans les secteurs de gauche et démocratiques, avec la volonté d’imposer la paix sur les intentions des militaristes, les bellicistes et les hésitations du gouvernement.
C’est dans ce contexte que se dessinent les élections de 2014. De fait, le cadre général du processus électoral repose sur la paix, la politique sociale et l’ouverture démocratique, reflétant une relation profonde des facteurs clés de la vie nationale. En ce sens, prendre des mesures pour construire un projet d’unité d’une gauche encore trop divisée est l’une des volontés fortes qui a émergé avec le Ve Congrès de l’Union patriotique.
La bataille des garanties et le dialogue à La Havane pour la fin de la guerre sont les questions principales du débat politique et électoral qui s’engage. Le chemin s’annonce difficile. Le président Santos propose un horizon très limité. Les premiers accords montrent les préjugés et les contraintes que le système dominant veut imposer à l’issue des négociations.
Les calculs du régime montrent que leur principale préoccupation est d’éviter un « excès de démocratie » qui pourrait amener à une assemblée constituante.
Laurent Péréa