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Collapse : nuit noire ou grand soir

Il flotte dans l’air un parfum de fin du monde. Ça va chauffer pour l’humanité.

Mais le prix Nobel d’économie de 2018 s’en fout. William Nordhaus prévoit une baisse de 10% de la richesse mondiale produite (PIB) pour 2100 dans l’hypothèse d’une augmentation de température de 6 °C d’ici la fin du siècle. Ce n’est pas dramatique.

Pourtant un autre économiste, Nicholas Stern, sonne l’alerte et anticipe une baisse de 90% du PIB pour la même hausse de température de 6 °C. Dans ce cas cela ressemble plutôt à l’apocalypse.

On ne sait qui a raison. Quand on le saura, il sera trop tard. Mais il faut prendre des décisions aujourd’hui et dans cette incertitude. Chacun y va de son imagination et porte des réponses à ces deux questions vitales.

Peut-on échapper au scénario noir ? Faut-il s’insurger pour y arriver ?

On n’échappera pas au pire nous dit le philosophe Dominique Bourg « Dans la prochaine décennie, je doute que l’on puisse changer vraiment les choses ; si on commence à les changer substantiellement, ce sera plutôt dans la décennie suivante. Or, si tel est le cas, le risque de dérive vers une planète chaude est probable. Et une planète chaude, ce n’est plus qu’un milliard d’humains vers la fin du siècle.  » (ici). A l’échelle de la Chine, cela représenterait 50 000 personnes en moins chaque jour.

On échappera au pire sans insurrection nous explique Aurélien Barreau. Ce dernier publie le 3 septembre 2018 une tribune dans le journal Le Monde intitulée « Le plus grand défi de l’histoire de l’humanité : l’appel de 200 personnalités pour sauver la planète ». Il précise sur Thinkerview ne pas croire « que le capitalisme soit le principal problème » (écoutez ici minute 20).

On échappera au pire sans insurrection en créant des petites communautés altruistes nous explique Pablo Servigne (écouter la question de Ruffin dans les dernières minutes de l’interview ici).

Eviter à tout prix l’insurrection. C’est l’obsession des bourgeois pour conserver le pouvoir et la richesse depuis la révolution. L’insurrection, premier devoir des citoyens dans la constitution de 1793 est lourdement punie aujourd’hui (lire ici).

Pourtant comment faire sans cette insurrection ?

Aujourd’hui, globalement la trajectoire de 3,5 °C n’est même pas tenue. Selon le Giec, la planète pourrait franchir le seuil de 1,5°C dès 2030.

Or, mondialement, 10% des riches émettent 45% des gaz à effet de serre (GES). 50% des plus pauvres émettent 15% des GES. Les 40% de la classe intermédiaire émettent donc 40% des GES.

Pour avoir une chance d’éviter la nuit noire pour tous, les classes moyennes doivent rejoindre une consommation proche de celle des plus pauvres. Les 10% les plus riches doivent accepter eux aussi de baisser drastiquement leurs émissions en changeant radicalement leur train de vie.

Pensez-vous que « égalité et décroissance » seront octroyées gentiment par les oligarques effrayés par l’apocalypse ?

Pour rendre effective cette « égalité et décroissance », il faut supprimer le marché libre sans régulation. Or la révolution bourgeoise de 1789 a consacré le marché libre et vite retoqué les idées comme celle de Robespierre d’encadrer le prix du blé (écoutez Guillemin ici). Aujourd’hui, l’évasion fiscale est soutenue par le conseil constitutionnel au nom du libre marché (lire ici).

Pour rendre effective cette « égalité et décroissance », il faut supprimer la propriété privée excessive. Or la révolution bourgeoise de 1789 l’a gravée dans la constitution.

Pour rendre effective cette « égalité et décroissance », il faut faire des remises de dette.

On n’échappera pourtant pas au pire même avec une insurrection, nous expliquent les partisans du « vivre dans les restes » qui propose de saboter la technologie destructrice pour reprendre notre humanité capable d’une pensée critique (lire ici).

On échappera au pire avec une insurrection, nous expliquent les partisans du « grand soir » pour imposer égalité et sobriété à tous.

Qui est utopiste ?

Qui est cinglé ?

Qui est le plus à même d’éviter quelques milliards de morts en un siècle ?

Dans quel monde voulons-nous vivre ?

Mais peut être aussi dans quel monde voulons-nous survivre ?

Il y aura un soir, peut-être est-il déjà passé, de bascule ou la vie sur terre deviendra chaque jour plus difficile. A partir de ce moment, chaque soir sera petit…ou grand.

Egalité et décroissance nécessite une insurrection contre la violence de notre système aveugle et suicidaire.

Denis DUPRÉ

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