Au début des années 1960, le gouvernement travailliste (NdT : les "socialistes" britanniques) d’Harold Wilson acquiesça secrètement à une demande de Washington pour que l’archipel des Chagos, une colonie britannique, soit "nettoyée" et "aseptisée" de ses 2 500 habitants afin qu’une base militaire puisse être construite sur l’île principale de l’archipel, l’île de Diego Garcia. ()
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Le nom Chagos vient du portugais « chinqua chagas » (les cinq plaies du Christ) qui a été réduit à Chagas, puis s’est transformé en Chagos.
L’archipel des Chagos, 64 km2, est composé de 65 îlots. Diego Garcia est la plus grande île. Sa superficie est de 27 km2. Le territoire marin fait 13 000 km2.
Peros Banhos est composé de 27 îlots, Salomon, de 11 îlots, Egmond, de 7 îlots.
332 familles, soit 1 500 à 2 000 personnes, ont été déracinées des Chagos entre 1965 et 1973.
Actuellement, le nombre de Chagossiens de la première génération se chiffre à 850 ; ceux de la seconde génération sont 5 200.
Sur 100 Chagossiens faisant partie du voyage, 75 sont du GRC (Groupement réfugiés Chagos), 10 du CSC (Comité social des Chagossiens) et 15 des Seychelles (Comité social des Chagossiens aux Seychelles).
Du paradis à l’enfer
Selon M., avant l’arrivée des Américains, ils menaient une vie sans perturbations : « On pouvait boire et manger ce qu’on voulait. On ne manquait jamais de rien. A part les habits qu’on portait, on n’achetait jamais rien là -bas ! »2(*)8. En 1961, une enquête secrète, menée par la Marine Militaire américaine, estime qu’il faut « balayé et nettoyé [Diego Garcia] ». Robin Mademootoo, avocat des Ilois, raconte que cela a commencé par la privation et l’arrêt des envois des aliments de base sur l’île : le lait, l’huile, le sucre, le sel, les médicaments... Puis la rumeur concernant un éventuel bombardement de l’île a commencé à circuler, performant lentement un travail de terreur dans tout l’Archipel. En 1973, Sir Bruce Greatbratch, alors Gouverneur des Seychelles, donne l’ordre de tuer tous les chiens. Environ mille animaux de compagnie seront ainsi gazés en quelques jours. « Les enfants criaient et pleuraient. Ils étaient détruits par les sort réservé à leur chien, et ils pensaient subir la même chose après. Tout le monde pensait que les Anglais étaient sans pitié et qu’ils allaient nous faire la même chose qu’avec les chiens »2(*)9. Lors de l’arrivée du Nordvaer, ils n’ont le droit d’emporter qu’une seule valise par personne. Sur le bateau, pendant la traversée, les conditions sont des plus déplorables : « On était des animaux sur le Nordvaer. On avait qu’un seul matelas, même si y’en a qui avait plusieurs enfants »3(*)0. Dans « Le Silence des Chagos », La mère de Désiré, enceinte de sept mois, n’a légalement pas le droit d’être embarquée sur un bateau. Qu’importe son état ! L’infirmier la déclare apte à embarquer. Le bateau attend la tombée de la nuit, pour que personne ne puisse voir ce qu’ils quittaient vraiment, ni même inscrire dans leurs yeux une dernière image de leur île, de leur vie. Pourquoi ne se sont-ils pas rebellés contre cette déportation ? Peut-être par peur des représailles, par fatalisme, par docilité ? M. m’a dit que « la colère ne ramène pas le ciel bleu »3(*)1. Un premier arrêt est fait aux Seychelles. Quelques personnes sont débarquées et menées dans une prison détruite depuis, où elles seront gardées dans une cellule, avant d’être transportées à l’Ile Maurice. Arrivés à l’Ile Maurice, certains attendent sur le quai que le prochain bateau les ramène chez eux. Mais il n’y aura jamais de bateau de retour. « Votre île a été vendue, vous ne rentrerez jamais chez vous ! ». « Mon mari, en entendant ça, a eu une crise cardiaque. Ca lui a paralysé le bras et la bouche. Il est mort quelques jours plus tard, à l’hôpital »3(*)2.
Les anciens habitants des Chagos sont alors conduits dans des « Housing Estate », sorte de logement social géré par l’Etat. En arrivant dedans, M. se rappèle que les maisons de Estate Beau Marchand « n’avait ni eau, ni électricité. Tout était envahi par les animaux et il y avait des poubelles partout. Il n’y avait ni porte, ni fenêtre. Il n’y avait pas de sanitaires, juste un trou dans le sol. Quand il pleuvait, y’avait de l’eau partout. C’était l’enfer ». M. se souvient de sa première case de paille, à Cassis : « On n’avait pas un sou pour manger, c’était la misère »3(*)3. La manque de nourriture saine a des conséquences rapides et dramatiques sur l’état de santé de ces nouveaux habitants dans les quartiers pauvres de l’Ile Maurice. Les gens sont obligés de s’entasser dans des cités étouffantes et bruyantes, où la promiscuité ajoute à l’enfer extérieur. Dans « Le Silence des Chagos », Charlesia tente de fuir cette vision cauchemardesque. « la même façon de donner le dos, comme une muraille hérissée de barbelés, à la ville qui grouille derrière elle », p.72. Les conditions de logement restent malheureusement très précaires, même aujourd’hui. Charlesia résume toute sa souffrance, lorsqu’elle parle de sa terre d’avant et de ce pays nouveau, qui n’a rien d’accueillant. Ce contraste montre la douleur de ces exilés, dépossédés de leur vie. « La terre, l’autre terre. La vraie... La terre d’avant. D’avant la peur, l’incompréhension. D’avant la solitude et l’angoisse folle de la mer. D’avant le bateau voleur qui avait fait douleur ce qui aurait dû être grande joie. D’avant cette nouvelle terre aux montagnes hautaines et indifférentes, aux habitants distants et méprisants. D’avant la colère. D’avant la fausse résignation pour empêcher que l’incompréhension et la rage impuissante explosent en folie », p.87-883(*)4. En faisant allusion à la récente visite sur son île, M. explique : « Je me suis rendues dans mon paradis, mais il a bien fallu retourner dans cet enfer, dans ma pauvreté ici. ». Mémoire on line
Selon une demande de Washington (sic)
Au début des années 1960, le gouvernement travailliste (NdT : les "socialistes" britanniques) d’Harold Wilson acquiesça secrètement à une demande de Washington pour que l’archipel des Chagos, une colonie britannique, soit "nettoyée" et "aseptisée" de ses 2 500 habitants afin qu’une base militaire puisse être construite sur l’île principale de l’archipel, l’île de Diego Garcia. "Ils savaient que nous étions inséparables de nos animaux domestiques", dit Lisette, "quand les soldats américains sont arrivés pour construire la base, ils firent reculer leurs gros camions jusqu’aux baraques de briques dont nous nous servions pour préparer les noix de cocos ; des centaines de nos chiens avaient été emprisonnés dedans. Ils les ont gazé avec des raccords fait à leur pots d’échappement. On pouvait les entendre hurler."
Lisette, sa famille et des centaines d’insulaires furent mis de force sur un vieux bateau à vapeur rouillé à destination de l’île Maurice, distante de 4 000 km. Ils devaient dormir dans les cales contenant du fertilisant : de la merde d’oiseaux. La météo était dure, tout le monde était malade ; deux femmes firent des fausses-couches. Larguée sur les quais de Port Louis, les deux plus jeunes enfants de Lisette Jollice et Régis, moururent à une semaine d’intervalle. "Ils sont morts de tristesse", dit-elle. "Ils avaient tout entendu et ont vu l’horreur du gazage de nos chiens. Ils savaient qu’ils quittaient leur maison pour toujours. Le médecin de Maurice nous a dit qu’il ne pouvait pas guérir la tristesse."
Cet acte fut fait dans le plus grand des secrets. Dans un document d’archive officiel, sous le titre de "Maintenir la fiction", le conseiller juridique du ministère des affaires étrangères exorte ses collègues de camoufler leurs actions en "reclassifiant" la population comme étant une population "flottante, nomade" et de "refaire les règles au fur et à mesure". L’article 7 des statuts du TPI dit que "la déportation ou le transfert forcé de populations" est un crime contre l’humanité. Que la Grande-Bretagne ait commis un tel crime en échange d’une ristourne de 14 millions de dollars sur un sous-marin nucléaire américain Polaris, n’était pas dans l’agenda d’un groupe de correspondants de la "défense" qui furent envoyés aux îles Chagos par le ministère de la défense lorsque les travaux de la base américaine furent terminés. "Il n’y a rien dans nos dossiers", dit un officiel du ministère, "à propos des habitants ou à propos d’une évacuation." johnpilger.com Lire l’article au complet (Source)
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De 1965 à 1973 : La dépopulation des Chagos a lieu en trois phases. Il est défendu aux Chagossiens qui se déplacent à l’étranger de retourner dans l’archipel. Ils sont séparés de leurs familles. L’importation de nourriture est strictement contrôlée pour essayer de pousser les Chagossiens à partir. Finalement, les habitants de Diego Garcia sont transportés de force à Peros Banhos et à Salomon. Deux ans plus tard, des navires mal ravitaillés en eau et nourriture et surpeuplés amènent les Chagossiens à Maurice et aux Seychelles. Des officiels britanniques et américains mentent aux Nations unies et au Congrès. Ils affirment que les Chagossiens sont des travailleurs contractuels saisonniers.
1982 : Un comité permanent est établi par l’Assemblée Nationale pour enquêter sur « les circonstances qui ont mené à et ont suivi l’excision de l’archipel des Chagos, incluant Diego Garcia, de l’Ile Maurice en 1965 et la nature exacte des transactions qui ont eu lieu ». Présidé par le ministre des Affaires Etrangères, Jean-Claude de l’Estrac, le comité détaille, entre autres, le rôle du gouvernement mauricien dans l’excision de l’archipel et dénonce le gouvernement britannique pour avoir « bafoué » la Charte des Nations Unies. Il rejette également les déclarations de Seewoosagur Ramgoolam et Veerasamy Ringadoo qui avaient affirmé devant le comité qu’à aucun moment « ils avaient été mis en présence d’un document relatant l’excision des îles ». Mémoire on line
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Tout ça pour ça…
Selon les volontés de Washington
Et que dire, sur la prison de « Diego Garcàa » ? « Diego Garcàa » est le plus grand centre de tortures "ils appellent d’une façon tout euphémistique « interrogatoires »" pour les prisonniers réputés les plus « importants » par l’Empire. C’est là que le prisonnier Ibn Al-Sheikh Al-Libi a dû mentir, puisqu’il ne résistait pas au supplice auquel il était soumis. Il a dit, pour éviter qu’ils continuent de le lacérer, que Saddam Hussein était allié d’Al-Qaeda, et qu’il avait les fameuses armes de destruction massive, desquelles on a tant parlé. Source
N.B. : Notre fier drapeau canadien y est imprimé.
Gaëtan Pelletier
La Vidure