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Ce que révèlent sur le climat deux journées ordinaires

Photo Cole Burston/AFP

De la réactivation des incendies au Canada aux inondations dans le Sri Lanka, en passant par la sécheresse en Inde et la mort des coraux en Australie, quelques heures de la vie de la planète nous rappellent qu’il est urgent de freiner le réchauffement climatique. Mais, partout dans le monde, on se garde de passer aux travaux pratiques. Même en France, le président de la République et son gouvernement donnent le sentiment d’avoir déjà oublié les conclusions de la conférence de Paris sur le climat dans la conduite des affaires du pays au quotidien.

On n’en parlait pratiquement plus depuis une dizaine de jours. Mais la forêt continue de brûler dans la province de l’Alberta, au Canada. Le feu a déjà dévasté 285.000 hectares et le changement d’orientation des vents dirige désormais l’incendie vers les installations pétrolières. Les flammes sont à moins de 15 kilomètres des installations de Suncor Energy et de Syncrude Canada tandis que les 4.000 ouvriers en poste sur les deux sites viennent d’être évacués. Lundi soir, les flammes gagnaient de trente à quarante mètres par minute sur le front de l’incendie tandis qu’un temps chaud et sec prévu pour durer encore au moins 48 heures compliquait le travail des pompiers.

En Inde, on ne fait pas état d’incendies et le gouvernement central communique le moins possible sur la terrible sécheresse qui frappe de nombreuses régions depuis deux ans. Dans un pays qui avait déjà l’habitude de pomper de manière abusive l’eau des nappes phréatiques pour irriguer les cultures, ont estime que 330 millions de personnes sont victimes aujourd’hui du manque d’eau.

La mousson est attendue avec impatience alors que beaucoup de récoltes ont été perdue du fait de la sécheresse. Mais, s’il pleut de trop, la mousson peut aussi causer des ravages du fait des inondations. C’est ce qui se passe au Sri Lanka où les fortes plus de ces derniers jours ont tué des femmes et des enfants tandis que plus de 200.000 personnes ont été transférées dans des centres d’accueil après une pluviométrie de 373 millimètres en 24 heures.

En Inde, dans l’Etat du Maharashtra, le plus touché par lé sécheresse, plus de 3.000 paysans se sont donné la mort depuis 2015, soit une moyenne de huit suicides par jour. Faute de pouvoir tirer revenu de leurs champs, beaucoup de paysans veulent changer de métier et vont chercher du travail en ville. Mais on manque d’eau aussi en ville au point que des tracteurs tirent des citernes dans la banlieue de Delhi pour tenter de ravitailler la population.

Comme une mauvaise nouvelle n’arrive jamais seule, une étude du GIEC, publiée par l’ONG Christian Aid le 16 mai, nous indique qu’il faut se préparer au pire d’ici 2060. A supposer que chaque Etat tienne ses engagements pris en termes de « contribution nationale » à la conférence de Paris sur le climat, le réchauffement climatique sera néanmoins supérieur de 3°C à celui du début du XXème siècle. Entre autres conséquences, 1,2 milliards de ruraux et de citadins seront victimes de la montée des eaux en Chine, en Inde, au Vietnam, au Bangladesh, en Indonésie, en Thaïlande, en Birmanie, aux Etas Unis et aux Pays Bas notamment.

En Australie, gros producteur de charbon dans des mines à ciel ouvert, une étude publiée vendredi dernier par « Nature Scientific Reports » indique notamment « qu’une exposition chronique au charbon peut avoir des effets mortels considérables pour les coraux et réduire la croissance des herbiers marins et des poissons ». Selon Karhryn Berry, responsable de l’étude, « les coraux exposés à une plus faible concentration vivent plus longtemps, mais la plupart meurent au bout de quatre semaines ».On sait enfin que 93% de la grande barrière de corail australienne est aujourd’hui affectée par le blanchiment imputable, entre autres causes, aux pollutions et à l’acidification de l’eau en raison du réchauffement climatique.

Au Chili, les images diffusées lundi r soir par France 3 montraient, à nouveau, des tonnes de sardines mortes échouées sur les plages victimes d’une algue rouge toxique dont la prolifération a été favorisée par le réchauffement des eaux sous l’influence du phénomène El Nino. Le désastre écologique dure depuis des semaines et les pêcheurs chiliens accusent aussi le développement des élevages industriels de saumons le long de la côte d’être également responsable de la pollution ; les déjections de ces poissons, chargées d’azote, venant favoriser la prolifération de ces algues toxiques.

Ainsi, moins de six mois après la conférence de Paris sur le climat, l’état du monde ne cesse d’empirer sur tous les continents. En France, le président de la République a oublié le sujet comme en témoigne mardi matin son intervention sur Europe 1, consacrée à défendre la politique antisociale du gouvernement avec la loi El Khomri . Plus politicien que jamais, il a promis une réduction d’impôts pour les ménages en 2017, si la croissance économique du pays s’améliore en 2016 de deux ou trois dixièmes de point par rapport aux prévisions de l’INSEE.

A droite, chacun cherche les mots pour définir une politique encore plus injuste socialement et toujours aussi peu soucieuse que celle de Hollande des conséquences du réchauffement climatique. Les autres pays de l’Union européenne ne font pas mieux que la France. Mardi matin, Ségolène Royal , ministre de l’Environnement , a déclaré avoir « lancé un appel aux ambassadeurs pour qu’ils mobilisent leurs gouvernements afin que l’on ait avant l’échéance du conseil européen de la fin juin, les dates de délibérations de tous les conseils des ministres et les dates de ratification dans les parlements (...) Je n’imagine pas que l’Union européenne arrive à la Cop 22(en novembre prochain à Marrakech ) en état d’observateur et que l’accord entre en application sans l’Union européenne », a-t-elle prévenu.

Plus tard dans la journée, elle a pu féliciter l’Assemblée nationale pour le vote unanime du projet de loi de ratification de Paris sur le climat. Tant mieux dira-t-on en attendant de voir comment la France entame ensuite les travaux pratiques pour diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050.

Gérard Le Puill

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