Je pense que ça serait une bien mauvaise chose que de s’intéresser au gendarme qui a été l’auteur du tir. Il fait un boulot de merde (certes il pourrait le quitter), dans lequel on le paye pour réprimer des manifestations, tout en lui donnant des limites d’usage de son matos qu’il est censé ne pas dépasser, et comme tout travailleur, comme un conducteur de déneigeuse qui a un peu trop tiré sur la Vodka ou sur ses capacités, il y a un moment où il dépasse les limites, par maladresse ou comme aboutissement de l’endoctrinement haineux de ses supérieurs. Et puisqu’il a entre les mains une arme dangereuse ce dépassement abouti à un drame.
Donc les deux principales questions à poser pour se rapprocher de l’identité des coupables sont :
1- Comment se fait-il qu’une arme dont l’utilisation peut s’avérer aussi dangereuse soit mise dans les mains de gendarmes hors situatuion de guerre ?
2- Comment se fait-il qu’une opposition légitime et pacifique à un projet délirant et relevant des magouilles d’une mafia locale, soit l’objet d’une telle répression depuis plusieurs mois, qui puisse aboutir à un tel drâme ?
Ce n’est pas un gendarme qui a tué Remi. Je ne pense pas qu’un gendarme ait été à l’origine de ces deux choix politiques qui ont amené les conditions pour que ce drâme arrive. Certe il ne faut pas qu’un sentiment d’impunité existe chez ces forces du désordre, et donc il faut punir l’acte final, mais les principaux coupables ne sont pas là.
En répondant aux deux questions, on trouve pas mal de potentiels coupables par contre, et ça serait bien que la justice s’intéresse à leurs cas :
1 - L’arme qui a tué est une arme qui ne devrait pas se trouver sur ce genre de manif, mais que Sarkozy avait trouvé bon autoriser et que le PS n’a pas trouvé bon interdire quand il est arrivé au pouvoir, bien content que l’UMP lui ai mis à disposition cet arsenal pour mater les opposant à ses projets.
2 - Oui l’opposition est légitime, s’il en fallait encore, le récent rapport du ministère de l’environnement vient en apporter une preuve de plus. Et oui l’opposition du Testet est historiquement pacifique. Elle fait face par contre à une violence multiple depuis des mois. Violence d’abord du projet en lui-même. Violence ensuite dans la manière dont les procédures sont baclées, les magouilles et la corruption prédominantes ayant abouti à faire passer le projet en force et à accélérer sa réalisation pour prendre de court les contestaires et les études critiques en cours, et on peut même féliciter le mouvement de résistance de n’avoir pas eu recours à de la violence plus tôt face à ce déni de citoyenneté dont font preuve les autorités du Tarn depuis le début, déni qui revient cracher sur la démocratie et sur l’humain, et qui appelle forcément à la résistance, voir à l’insurrection. Violence enfin dans la répression depuis plusieurs mois sur la ZAD face à des pacifiques qui subissent tirs tendus de grenade et autres sans ménagement car le chantier doit avancer vite.
J’étais moi-même au Testet samedi soir, loin de la zone des combats, mais j’ai pu en discuter avec des personnes bien impliquées dans la lutte et qui avait vu les choses se préparer pendant l’aprèm. On lit par endroits que des éléments cagoulés (d’extrême droite selon JLM) extérieurs à la lutte auraient entrainé le groupe qui est allé au contact des gendarmes. C’est une énorme connerie ! Ce sont les violences des ces derniers mois qui ont entrainé cette attaque. A force d’en prendre plein la gueule (nombreux blessés dont certains assez graves dans des situations qui ne justifiaient pas l’usage de la force), ce sont d’authentiques opposants au projet qui ont fini par avoir la rage, et ont voulu profiter du nombre d’opposants présents ce soir là pour aller se venger en caillassant des gendarmes (qui étaient nombreux à cet endroit sans autre raison valable que de faire de la provoc d’ailleurs). Je ne pense pas que c’était la bonne chose à faire que d’aller s’attaquer aux flics à ce moment, il ne fallait pas céder à la provoc, mais je comprends que des militants excédés et meurtris depuis des semaines aient eu cette réaction.
Si je dis ça, c’est pour affirmer qu’après tout on s’en fout de savoir qui a attaqué l’autre samedi soir, on s’en fout de savoir si les manifestants avaient des engins explosifs dangereux, et on s’en fout même de savoir si Remi a été tué par une grenade ou un de ses engins présent dans son sac, ou les deux à la fois, et donc on s’en fout de savoir qui a tiré cette grenade. Ce qui a tué Rémi c’est la violence politique qui s’abât sur le Testet depuis le début du projet, violence qui appelle à plus de violence, et qui a finalement réuni toutes les conditions pour qu’un drâme finisse par arriver. Et cela ce sont aux politiques d’y répondre, et ce n’est pas étonnant que les solfériniens bien mouillés dans tout ça restent discret sur ce crime d’Etat.