Le PS, Post-Scriptum de l’Histoire ?
Après DSK, qui préféra, face à l’injonction présidentielle, s’en remettre à la jouissance, voici que Hollande déboutonne sa responsabilité de rigueur et que le Grand Destin du monde, décidemment en forme facétieuse ces dernières années, nous révèle une fois de plus qu’il a, en matière de présidentielles françaises, des vues en tout point opposées à celles des sondages.
On nous dit qu’Hollande délégua son refus au plan de rigueur, et que son (bouc ?) émissaire se trompa de bouton : après quoi une « mise au point » en forme de post-scriptum fut ajoutée en bas du document officiel, indiquant que ces Bartelby sans panache auraient préféré ne pas. Là encore, on ne peut que louer l’esprit du temps pour son goût de l’exhibitionnisme en matière de vérité : car il n’est pas nécessaire d’être psy pour comprendre les indications des déviances « ânodines » qui frappent à répétition nos si peu dignes dignitaires. Par Hollande, nous apprenons ainsi que le PS est désormais un Post-Scriptum au bas d’un document de l’Assemblée Nationale. Rappelons que jadis, le socialisme fut censé être une étape vers le communisme. Celui-ci étant désormais, n’en déplaise aux philosophes réactionnaires à la mode, un signifiant plutôt insignifiant, il serait difficile pour le parti socialiste de continuer à s’instituer comme une étape vers… le passé. On applique donc désormais, et ce depuis environ deux décennies, la méthode du post-scriptum. Le PS privatisa certaines entreprises ? P.S : « En fait nous étions contre ». Le PS prône dans les faits un capitalisme bon teint ? P.S : « En fait nous serions plutôt contre ». Le PS est un parti de luttes intestines, une machine à pouvoir ? P.S : « En réalité nous ne pensons qu’à la France ». En ces temps de campagne surpeuplée, on peut compter sur les Français pour être sémiologues : se tromper de bouton, et de surcroît en ayant délégué à un autre le soin de le faire, voilà qui poussera bien des électeurs à se tromper de bulletin, voire d’urne, signifiant ainsi pour le PS une fin en poussière de cendres.
Mais ne chargeons pas trop François. C’est bien tout le PS qui traverse depuis quelques années déjà , et sans rémission apparente, son épreuve du négatif. Ainsi de la récente lettre au Français de Martine Aubry qui commence par cette phrase : Je vous écris pour vous dire que notre pays n’est pas voué au déclin. Ici, le B-A-BA de la communication, à savoir qu’on n’enfile jamais la perle noire d’une double négative, est passé à la trappe de la schizonévrose. Là où il aurait fallu un simple Je vous écris pour vous dire que notre pays est voué au succès, le discours renonce d’emblée au combat et succombe aux charmes du déclin et de la négation. J’avais pourtant de la sympathie pour Martine, mais cette phrase sans élan ni fierté - lue au détour d’un tract qu’on m’offrit pourtant face au siège PS de la rue Montorgueil - semble annoncer une présidence aussi morose et crispée que son apparence médiatique. DSK l’envahissant, Aubry la figée, Hollande l’homme glissant, que reste-t-il au PS à part un certain art du mouvement contre-productif qui nous donne des boutons ? In extremis, qu’il s’éveille à la franchise, renonce à l’esprit d’escalier et à la politique du post-scriptum. Qu’ils comprennent une fois pour toutes qu’en matière de société, ce n’est pas l’intention qui compte, ou alors lorsque c’est le cas les comptes finissent par prendre le dessus sur les intentions. Il ne suffit pas de se dire de gauche pour l’être réellement. Souhaitons que dans les mois qui viennent, une gauche des germinations soit davantage arrosée par l’eau médiatique. Une gauche qui ne se contente pas de réformettes, mais qui se propose de réinventer l’art d’être libres, le courage de diversifier les égalités, de dynamiser les fraternités sans dissoudre les singularités. Un gauche qui définira la vie comme « une immense efflorescence d’imprévisible nouveauté » (Bergson), pour une France où chaque citoyen sera considéré… comme un bouton de rose.
Luis de Miranda, philosophe, romancier.