RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

Bolivie : L’armée réprime. La mobilisation continue

(11 octobre 2003)

Des tanks rouvrent la route de la gazoline

Le samedi 11 octobre, l’armée et la police ont très violemment réprimé,
avec des tirs d’armes de guerre, la population qui manifestaient dans la
ville d’El Alto (elle "surplombe" la cuvette où se trouve La Paz). Au soir
du samedi, les radios annonçaient la mort d’un enfant (Alex Mollericona) et
d’un jeune homme de 27 ans, père de trois enfants (Walter Choque Huanca).
Dès le matin du 11 octobre, les militaires ont attaqué des manifestants sur
l’autoroute qui relie El Alto à La Paz ; puis dans les divers quartiers de El
Alto. Des appels contre la répression ont été lancés par la Fédération des
journalistes, par l’évêque Jésus Juarez et par l’Assemblée des Droit de la
personne humaine.

Le président bolivien, Gonzalo Sanchez de Lozada (Goni), a accusé le
dirigeant du MAS (Mouvement vers le socialisme), Evo Morales, de
"conspiration" et de "préparation un coup d’Etat". De la sorte, le
gouvernement justifiait et justifie la répression. Le dirigeant du MAS, qui
est un des leaders historiques du mouvement des paysans plantant la coca,
non seulement a rejeté ces accusations, mais a souligné que le gouvernement
avait déjà tué plus de 70 personnes au cours des dernières années. Il
insista sur le fait que Goni "voulait éliminer les dirigeants syndicaux" et
préparer un autocoup. Personne ne peut "gouverner en démocratie avec autant
de balles tirées sur le peuple" a déclaré Evo Morales.

La Centrale ouvrière bolivienne a appelé la population à la résistance
civile. Le soir du 11 octobre les affrontements continuaient.

Le soulèvement démocratique et populaire qui se développe en Bolivie
traduit la brutalité de l’exploitation à laquelle est soumise la population.
Depuis 1985, les "plans d’ajustement" du FMI se sont multipliés. Sur quelque
8,2 millions d’habitants, 4,6 millions sont considérés comme pauvres ou
extrêmement pauvres. Dans les campagnes, 9 sur 10 sont "classsés" parmi les
pauvres ; dans les villes 5 sur 10. Les activités dites informelles, où
règnent des formes d’exploitation très brutales, concernent quelque 70% de
la population urbaine employée. La récession plus marquée au cours des trois
dernières années a accentué encore la paupérisation. La population
bolivienne se dresse pour revendiquer le "droit de vivre". Rien de plus.

La réponse des détenteurs du pouvoir politique, qui sont à la tête d’un
petit et enclavé secteur modernisé de l’économie largement contrôlé par des
transnationales, traduit la vérité de leur domination : des balles pour la
population
. réd.

La Paz, le 10 octobre 2003.

Un imposant dispositif militaire avec des chars d’assaut, des hélicoptères
de combat et des centaines de soldats en tenue de combat s’est déployé cet
après-midi sur la route bloquée qui relie la ville de La Paz, momentanément
coupée du reste du pays, avec la ville de El Alto. Le but de cette
intervention : réapprovisionner en essence et en diesel le siège du
gouvernement, qui continue à être encerclé par les maifestations populaires.

Cette incursion militaire, dirigée depuis un hélicoptère par le Ministre de
la Défense, Carlo Sanchez Berzain, a réussi à atteindre le barrage de
Senkata, lieu se trouvent l’entreprise de distribution du gaz liquide et de
l’essence.

C’est là qu’ont convergé les chars, les hélicoptères et les camions
transportant des militaires, d’abord pour protéger et, par la suite, pour
escorter une trentaine de camions citerne jusqu’à la ville de La Paz. Cette
caravane faisait penser à une scène de Beyrouth ou de Bagdad. Jusqu’au
moment de la publication de cette dépêche il n’y avait pas eu
d’affrontements entre cette caravane,d’une part, et, d’autre part, les
mineurs de Huanuni et les habitants de El Alto, qui, armés de pierres, de
bâtons de dynamite [tradition des mineurs de Bolivie qui lancaient de la
dynamite dans les aires lors des manifestations] et de barres de fer,
avaient maintenu le blocage durant plusieurs heures.

"Ils vont mourir, ces maudits", criaient les habitants au passage des
militaires. Ces derniers attendaient que le nombre de ceux qui défendaient
les barrages diminue au fil des heures et de la baisse de température (la
nuit la température descend au-dessous de zéro dans cette région) pour
pouvoir rejoindre La Paz.

Des informations en provenance de l’Association patronale des entreprises du
gaz mentionnent qu’aux premières heures de la nuit, le 90% des fournisseurs
de La Paz avaient fermé leur station, faute de combustible. Néanmoins, selon
le porte-parole présidentiel, Mauricio Antezana, les fournitures d’essence
seraient normalisées aux cours des prochaines heures.

Cependant, le déplacement militaire a éveillé de nouveaux soupçons. Ainsi,
Rufo Calle, le dirigeant de la Fédération de La Paz, a averti que le
déplacement de chars, d’hélicoptères et de régiments militaires constituait
la préannonce d’un imminent "état de siège", qui pourrait être instauré
cette fin de semaine : "Je veux dénoncer le fait que le gouvernement est en
train de planifier l’assaut de la Radio San Gabriel, où se déroule une grève
de la faim de plus de 200 dirigeants paysans loyaux au "Mallku" Felipe
Quispe (dirigeant paysan)".

C’était également l’impression qui se dégageait de la Plaza Murillo, où se
trouve le Palais du Gouvernement, à midi, lorsque des policiers rouaient de
coups de pied et de matraque des habitants, y compris des femmes qui
distribuaient pacifiquement des tracts du Movimiento al Socialismo (MAS),
dans lesquels s’exprime le refus du projet d’exportation du gaz aux Etats
Unis en passant par un port chilien.

Voici ce qu’on pouvait lire dans ce tract :

"Nous exigeons :

1. Que Sanchez de Lozada abroge immédiatement le décret DS 24806 du 4 août
1997, selon lequel on transfère la propriété des hydrocarbures produits dans
le pays à des entreprises privées, qu’il annule immédiatement tous les
Contrats de Risque Partagé signés sur la base de ce décret, et qu’il annule
immédiatement tout projet ou initiative de vente du gaz naturel aux Etats
Unis ou au Chili jusqu’à l’adoption d’une nouvelle Loi sur les Hydrocarbures
approuvée à l’échelle nationale.

2. Au cas où le gaz ne serait pas récupéré des mains des transnationales, le
Président doit renoncer à son mandat présidentiel et ouvrir la voie à une
succession conforme à la Constitution.

3. Qu’on lance un débat national pour la refondation ou la reconstitution du
pays, débat qui devra déboucher sur la convocation et création d’une
Assemblée Constituante où nous pourrions nous asseoir face à face, pour
prendre une décision historique en ce qui concerne notre destin".

Au cours de la nuit, à quelques rues de la Plaza Murillo [à La Paz], des
milliers d’ouvriers des fabriques, des enseignants, des chômeurs et des
universitaires criaient ensemble des slogans contre Goni (le Président), et
marchaient agrippés à leurs flambeaux et à leurs espoirs.

"Nous défendrons la Patrie et ses ressources naturelles, que Sanchez de
Lozada veut offrir en cadeau aux transnationales et au Chili" déclarait le
mineur Jaime Solares, dirigeant de la Centrale ouvrière Bolivienne (COB),
revitalisée, qui se trouvait en tête du cortège. En guise de fond sonore, on
pouvait entendre répéter avec colère et douleur le slogan "Fusil, metralla,
el pueblo no se calla" (Les fusils et les mitraillettes ne parviendront pas
à faire taire le peuple !).

Source :
http://www.alencontre.org

A propos d’ Evo Morales, le dirigeant du MAS voir
ici : Evo Morales : « Les années des multinationales sont comptées en Bolivie »

- Une analyse du pays par Walter CHà VEZ
Journaliste. Codirecteur de l’édition bolivienne du Monde diplomatique.

Un échec de plus pour le FMI

Extraits :

Les graves événements qui ont secoué la Bolivie en janvier et en février derniers ont fait plusieurs dizaines de morts et des centaines de blessés. Ils prouvent une fois de plus, concrètement, la faiblesse des propositions d’ajustement du Fonds monétaire international et l’aveuglement des classes dirigeantes latino-américaines. En proie à une crise politique, sociale et institutionnelle majeure, le pays doit également faire face à l’attitude trouble de l’ambassade des Etats-Unis.

Par ailleurs, des manoeuvres particulièrement douteuses ont été percées à jour quand le gouvernement a demandé à l’entreprise Intec de procéder à une étude « impartiale » sur les conditions permettant à la Bolivie d’exporter ce gaz aux Etats-Unis dans les conditions les plus favorables pour le pays. Des chercheurs indépendants ont découvert qu’Intec, financée à hauteur de 386 000 dollars par l’agence américaine Trade Development Agency pour mener à bien cette étude, est non seulement étroitement associée à la multinationale Bechtel, mais a également des liens avec Repsol-YPF, British Gas et BP Amoco, transnationales qui forment le groupe Pacific LNG (10).

Eruption annoncée du volcan bolivien - lire

URL de cet article 1060
  
AGENDA

RIEN A SIGNALER

Le calme règne en ce moment
sur le front du Grand Soir.

Pour créer une agitation
CLIQUEZ-ICI

Même Thème
Figures Révolutionnaires de l’Amérique latine
Rémy HERRERA
Cet ouvrage propose au lecteur sept chapitres consacrés à quelques-uns des révolutionnaires les plus importants d’Amérique latine et caribéenne : Simón Bolívar, José Martí, Ernesto Che Guevara, Hugo Chávez, Fidel Castro et Evo Morales. L’Amérique latine et caribéenne offre depuis le début des années 2000 l’image de peuples qui sont parvenus à repasser à l’offensive, dans les conditions historiques très difficiles qui sont celles de ce début de XXIe siècle. C’est cette puissante mobilisation populaire qui est (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

"Une petite fille dans la rue, en robe jaune, qui allait souvent chercher des bonbons et autres auprès des soldats américains. Un jour un char passe et pour une raison inexplicable, un tireur sort du char américain et abat la petite fille. Il y a tellement d’incidents de ce genre"

Julian Assange - Wikileaks
interviewé sur Democracy Now, donnant un exemple des crimes commis en Irak et révélés par Wikileaks

L’UNESCO et le «  symposium international sur la liberté d’expression » : entre instrumentalisation et nouvelle croisade (il fallait le voir pour le croire)
Le 26 janvier 2011, la presse Cubaine a annoncé l’homologation du premier vaccin thérapeutique au monde contre les stades avancés du cancer du poumon. Vous n’en avez pas entendu parler. Soit la presse cubaine ment, soit notre presse, jouissant de sa liberté d’expression légendaire, a décidé de ne pas vous en parler. (1) Le même jour, à l’initiative de la délégation suédoise à l’UNESCO, s’est tenu au siège de l’organisation à Paris un colloque international intitulé « Symposium international sur la liberté (...)
19 
Analyse de la culture du mensonge et de la manipulation "à la Marie-Anne Boutoleau/Ornella Guyet" sur un site alter.
Question : Est-il possible de rédiger un article accusateur qui fait un buzz sur internet en fournissant des "sources" et des "documents" qui, une fois vérifiés, prouvent... le contraire de ce qui est affirmé ? Réponse : Oui, c’est possible. Question : Qui peut tomber dans un tel panneau ? Réponse : tout le monde - vous, par exemple. Question : Qui peut faire ça et comment font-ils ? Réponse : Marie-Anne Boutoleau, Article XI et CQFD, en comptant sur un phénomène connu : "l’inertie des (...)
93 
La crise européenne et l’Empire du Capital : leçons à partir de l’expérience latinoaméricaine
Je vous transmets le bonjour très affectueux de plus de 15 millions d’Équatoriennes et d’Équatoriens et une accolade aussi chaleureuse que la lumière du soleil équinoxial dont les rayons nous inondent là où nous vivons, à la Moitié du monde. Nos liens avec la France sont historiques et étroits : depuis les grandes idées libertaires qui se sont propagées à travers le monde portant en elles des fruits décisifs, jusqu’aux accords signés aujourd’hui par le Gouvernement de la Révolution Citoyenne d’Équateur (...)
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.