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Bernard Arnault, la superclasse et l’Europe

Acte I : le président François Hollande annonce la création d’une nouvelle tranche d’imposition à 75 % pour la part des revenus dépassant un million d’euros par an, donnant ainsi une suite logique à ce qu’il avait promis pendant la campagne électorale. Le 23 août, douze industriels français dont les entreprises sont cotées en bourse critiquent la proposition.

Bernard Arnault, propriétaire de LVMH, chef de file mondial de l’industrie du luxe en termes de chiffres d’affaire, met alors en garde le Premier ministre Jean-Marc Ayrault sur les conséquences de ce projet. Il laisse ensuite filtrer la nouvelle selon laquelle son entreprise serait sur le point d’organiser la fuite à l’étranger de ses cadres au premier plan.

Le 6 septembre, le Figaro annonce un certain nombre d’aménagements à cet impôt :

- la taxe à 75% ne s’appliquera qu’aux revenus du travail (salaires, primes…),
- les couples, avec ou sans enfants, seront épargnés tant que les revenus du foyer fiscal ne dépassent pas les deux millions d’euros,
- les revenus du capital (immobilier, plus-values sur les cessions d’actions, intérêts…) seront exonérés,
- les revenus exceptionnels des artistes et des sportifs (on se demande bien pourquoi…) ne seront également pas touchés.

En fait, explique le Figaro, la taxation à 75% ne serait pas une tranche d’impôt supplémentaire, mais plutôt une taxe à part qui intégrerait la CSG (7,5%) et la CRDS (0,5%). Au final, elle ne serait finalement que de 67%, analyse le quotidien.

Malheureusement, le revenu annuel d’Arnault, dont la fortune est estimée par Forbes à 41 milliards de dollars (ce qui en fait l’homme le quatrième homme le plus riche du monde et le premier de France) est toujours au-dessus du nouveau seuil de deux millions d’euros. Et nous ne parlons pas des dividendes (335 millions d’euros en 2007) qui ne sont tout simplement pas couverts par la nouvelle taxe, mais du seul revenu gagné en tant que gestionnaire de son groupe, soit la bagatelle de quatre millions d’euros perçus en 2008… Bernard Arnault est le manager le mieux payé de France. Encore un record…

Acte II : c’est le coup de théâtre. Le quotidien belge la Libre Belgique annonce que l’homme d’affaires français a introduit une demande à la commission des naturalisations de la Chambre, à Bruxelles. La Belgique reste un pays de cocagne pour les grosses fortunes françaises.

Or, il semble que Bernard Arnault a fait aujourd’hui marche arrière… Tout comme François Hollande qui, dans un entretien accordé à TF1, suit la même démarche en voulant se montrer très ferme à propos de la fameuse taxe à 75% sur la part de revenus supérieurs à un million d’euros, prévenant qu’il n’y aurait « pas d’exceptions » pour les artistes ou les footballeurs par exemple, comme certains membres du gouvernement l’avaient pourtant envisagé. Cette taxation resterait cependant exceptionnelle, limitée au temps du redressement (!), soit deux ans, et ne concernerait selon lui que « 2 à 3.000 personnes ».

Généreux avec la haute bourgeoisie, il l’est en revanche beaucoup moins avec les ménages puisqu’il va leur demander 10 milliards d’impôts supplémentaires l’an prochain, tout en décidant en parallèle de maintenir une hausse d’impôts quasi-généralisée pour les Français via un gel du barème de l’impôt sur le revenu malgré l’inflation, décidé par la précédente majorité et qu’il avait dit vouloir supprimer pendant la campagne présidentielle. De même, 10 autres milliards seraient payés par les entreprises (les modalités restent quand même à préciser…). Enfin, pour boucler le budget de l’État, François Hollande espère dégager dix milliards d’économies grâce aux restrictions budgétaires dans la fonction publique. « L’État ne dépensera pas un euro de plus en 2013 qu’en 2012 », assure François Hollande avant d’ajouter : « il y aura une stabilité des effectifs de la fonction publique. Les emplois qui seront créés dans l’éducation seront forcément compensés ailleurs ». Une annonce qui marque une rentrée de plain-pied dans l’austérité.

En résumé, dix milliards d’économies, dix milliards de prélèvements supplémentaires pour les grandes entreprises et dix milliards pour les ménages. Il convient toutefois d’ajouter qu’une partie de ces milliards ont déjà été dépensés à renflouer une énième banque, en l’occurrence le Crédit immobilier de France. Début septembre, le gouvernement a dû se porter au secours de la banque de France afin de lui éviter la faillite. Pour cela, l’État a donné sa garantie, à hauteur de 4,7 milliards d’euros, d’après une source proche du dossier.

Nous attendons avec impatience les prochains épisodes de ce feuilleton. Mais au moins, trois choses sont claires :

1) Les États membres continuent à socialiser les pertes subies par les institutions financières privées,

2) Entre les impôts et les coupes dans les dépenses publiques, la plus grande partie de l’effort décidé par le gouvernement socialiste « pour redresser la barre » est supportée par les classes intermédiaires et celle qui ne vit que de sa force de travail,

3) Les tentatives d’imposer des taux élevés de fiscalité aux riches entrent en collision avec les lois fiscales de différents pays européens, ce qui pousse naturellement les plus audacieux à fuir leurs responsabilités.

Mais, comme à l’accoutumée, l’union européenne n’aborde jamais ce sujet sensible. On se demande bien pour qui elle roule ?

Capitaine Martin

Résistance http://www.resistance-politique.fr/article-bernard-arnault-la-superclasse-et-l-europe-109990552.html

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