Tous étaient antifascistes et communistes pour la plupart. Si trois d’entre eux étaient français, vingt étaient étrangers : arméniens, italiens et espagnols antifascistes, juifs venus de toute l’Europe pour d’autres. Nombreux avaient combattu au sein des Brigades Internationales en Espagne.
Tous étaient, aux yeux de Vichy et des nazis, des étrangers. Ils cumulaient ainsi ce que le nazisme et le régime de Vichy exécraient.
Ceux qui étaient nés de parents immigrés et avaient grandi en France avant la guerre et qui avaient travaillé, étaient syndiqués. Ils avaient été regroupés dans une section syndicale particulière intitulée dans un premier temps Main d’Œuvre Étrangère (MOE).
En 1930, à la veille de la grande dépression, il y avait environ 3,5 millions de travailleurs étrangers en France, soit 7 % de la population totale. Ils représentaient 15 % de la classe ouvrière.
Sous la pression de la vague xénophobe des années 30, le PCF modifie l’intitulé de cette section syndicale étrangère en Main d’Œuvre Immigrée (MOI).
Tous les membres de l’Affiche Rouge étaient membres des groupes armés des FTP- MOI (Francs-Tireurs et Partisans Main d’Œuvre Ouvrière Immigrée) créés fin 1941 par le PCF en région parisienne et placés sous la direction de Charles Tillon, chargé de l’organisation de la lutte armée en zone occupée.
Ils représentaient l’unique force combattante à Paris dont disposait le PCF.
Parce qu’ils n’attendaient aucune clémence de la part des Allemands et parce que Vichy ne leur laissait pas le choix en dehors de la clandestinité, les différents groupes FTP-MOI, étaient particulièrement déterminés dans la lutte contre l’occupant et la politique raciste de Vichy à l’égard des étrangers, tout en étant parfaitement insérés dans la dynamique de la résistance nationale.
En novembre 1943, au moment de leurs arrestations par la Brigade Spéciale (BS) (groupe de répression dépendant de la Préfecture de Police parisienne) puis livrés aux Allemands, les derniers membres du groupe parisien de la FTP-MOI regroupaient encore près de 70 combattants.
Aujourd’hui, à la veille de l’élection présidentielle, la droite et l’extrême droite françaises développent un discours raciste d’une violence inouïe, reprenant à leur compte – tel Zemmour – les propos les plus éculés des idéologues racistes et fascistes de la Troisième République, propos aujourd’hui dirigés contre les Musulmans, contre les migrants, contre les exilés et les demandeurs d’asile, tous présentés comme une menace existentielle contre la civilisation européenne, une menace contre la France et ses « valeurs », affirmées comme étant judéo-chrétiennes !
Tandis que les représentants officiels de l’État tiennent des propos à peu près identiques, veulent ériger des murs aux frontières de l’Europe, délèguent à des alliés du Sud la répression contre ceux qui tentent le voyage vers les pays du Nord et que la gauche est muette sur ces questions, il est important de rappeler le sacrifice de ces femmes et de ces hommes – étrangers pour certains – tous animés de la même haine contre le nazisme, contre le fascisme que Pétain et son gouvernement collabo assumaient pleinement.
Tous luttaient pour un avenir où les hommes seraient libres, considérés d’une égale dignité humaine, quelles que soient leur origine, leur couleur de peau, leurs croyances.
Un avenir qu’il nous appartient toujours de construire.
Aujourd’hui, en cette première partie du XXIe siècle, les leçons des combats antifascistes et émancipateurs des membres de l’Affiche Rouge restent d’une extrême actualité, riches de multiples enseignements. Elles dépassent la simple commémoration de circonstance.
Il nous revient, à nous juifs antisionistes, engagés dans les combats de l’antiracisme politique, contre le fascisme qui vient, à rappeler leurs sacrifices et conserver précieusement leurs mémoires.
La Coordination nationale de l’UJFP, le 17 février 2022.