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Appel européen pour la restauration et le renforcement du droit du travail et des droits syndicaux au sein de l’Union européenne

Alors que depuis plus de trente ans maintenant l’imposition de la flexibilité dans l’organisation du travail a conduit à une forte dégradation du statut des travailleurs de la fonction publique et du statut des travailleurs salariés du secteur privé, ainsi que de leurs conditions de rémunération, une offensive encore plus profonde contre le droit du travail s’est mise récemment en place et s’amplifie d’année en année depuis que la Commission européenne en 2005 a décrété qu’il était nécessaire de « moderniser le droit du travail ». Depuis lors, tant à travers des mesures nationales (comme les diverses réformes en France qui ont déstabilisé le code du travail en profondeur) que par le biais d’interventions de l’Union européenne, les droits les plus centraux constituant le coeur même du droit du travail et du droit syndical ont subi des attaques puissantes, indignes de systèmes politiques qui se réfèrent à la démocratie.

La grande majorité de la classe politique composant l’Union européenne et celle des Etats-membres aide le monde patronal dans ses ambitions de régressions sociales ; le bilan qui en résulte sur la situation des droits du travailleur aujourd’hui partout en Europe est dès lors déplorable :

- le contrat de travail à durée indéterminée est présenté comme obsolète et à faire disparaître au plus tôt ;

- le statut de fonctionnaire garantissant un emploi stable et une rémunération liée à des évolutions barémiques régulières est en train de devenir une « espèce en voie de disparition ». Or elle permet l’indépendance des agents et la garantie de l’égalité de traitement des citoyens ;

- les protections contre le licenciement sont fortement revues à la baisse ;

- le droit au départ à la retraite et au financement collectif d’une pension de retraite permettant une vie digne ont été sérieusement réduits ;

- la garantie de pouvoir bénéficier dans la durée d’un revenu de remplacement décent par rapport au dernier salaire via l’allocation de chômage lors de la perte de son emploi a été considérablement diminuée.

Cent millions de personnes au sein de l’Union européenne vivent dans la pauvreté dont 48% sont situés dans l’Europe des 15, et le nombre de travailleurs pauvres s’accroît d’année en année : ils sont plus de 10% par exemple en Italie ou en Espagne. Comme si cela ne suffisait pas, les Autorités de l’Union européenne ont pris récemment des décisions intolérables :

- La Cour de Justice de l’Union européenne, par ses arrêts récents (Viking, Laval, Rüffert, Luxembourg) réduit violemment les droits sociaux fondamentaux : elle confirme la suprématie de la liberté d’établissement et de la liberté de prestation de services sur le droit de grève, elle attribue un pouvoir d’appréciation au juge national sur la légitimité d’une grève, elle dévalorise les conventions collectives qui ne sont pas d’application générale, enfin elle impose aux États les libertés commerciales comme éléments indiscutables de l’ordre public et limite l’ordre public social à un socle minimal décrit dans une directive dont cela n’était pas l’objet (détachement des travailleurs, 1996).

- La Commission, le Conseil et le Parlement ont adopté un règlement qui sera d’application partout en Europe en décembre 2009 (Règlement CE n°593/2008) et qui assimile le contrat de travail à un simple contrat civil entre parties considérées comme égales.

Ces nouveaux éléments indiquent clairement l’intention des Autorités européennes d’abolir peu à peu le droit du travail comme domaine juridique spécifique et non assimilable à des relations civiles privées. Ce faisant, elles nous font replonger au 19ème siècle, époque au cours de laquelle le droit civil régnait en maître dans les relations de travail et où c’est la voix de l’employeur qui prime toujours sur celle du travailleur, celle du fort sur celle du faible.

L’ensemble des signataires s’élèvent fermement contre ce processus rétrograde. Ils lancent un appel pour que les nouveaux élus après les votes européens de juin 2009 s’engagent à faire intégrer le plus rapidement possible les normes internationales du travail (les 188 conventions de l’OIT et l’ensemble des articles de la Charte sociale du Conseil de l’Europe) dans le droit communautaire. Inventons l’ordre public social européen ! En effet, pour qu’il y ait une Union démocratique entre les peuples européens, il est indispensable de constituer un socle de dispositions impératives, le droit social international et européen, qui fasse primer les droits sociaux démocratiques sur le droit de la finance et du commerce. Ceci devrait aussi aboutir au plus tôt à la création d’une chambre spécialisée en droit du travail au sein de la Cour de Justice des Communautés européennes et à une refonte des pouvoirs intégrant enfin le principe démocratique d’indépendance et de séparation des pouvoirs, faisant notamment du parlement européen un vrai législateur.

http://www.labour-union-rights.eu/

Premiers signataires :

- Mateo Alaluf (Belgique), professeur de sociologie du travail, Université libre de Bruxelles.

- Paul Bouffartigue (France), directeur de recherches CNRS du Laboratoire d’Économie et de Sociologie du travail, CNRS-Universités d’Aix-Marseille I et II.

- Christina Deliyanni-Dimitrakou (Grèce), professeur en droit, Université Aristote de Thessalonique.

- Gilbert Demez, (Belgique) professeur émérite en droit social à l’Université catholique de Louvain.

- Bernard Friot, (France), économiste et professeur de sociologie de l’Université de Paris-10.

- Corinne Gobin (Belgique), professeure de sc. politique, maître de recherche du Fonds national de la recherche scientifique à l’Université libre de Bruxelles.

- Claude Javeau (Belgique), professeur émérite de sociologie, Université Libre de Bruxelles.

- Steve Jefferys, (Royaume-Uni), Directeur du Working Lives Research Institute de Londres.

- Francis Kessler (France), maître de conférence en droit privé à Paris 1, chroniqueur en droit social dans le supplément hebdomadaire économique du Monde.

- Yannis Kouzis, (Grèce) professeur à l’Université Panteios d’Athènes et conseiller scientifique à l’Institut de Travail de la GSEE (Confédération Générale des Travailleurs Grecs).

- Jurgen Kädtler, (Allemagne), directeur de l’Institut de recherche sociologique à l’Université de Göttingen.

- Robert Lafore, (France), professeur agrégé de droit public, directeur honoraire de l’IEP de Bordeaux.

- Evelyne Serverin, (France), juriste et sociologue, directrice de recherche au CNRS en sociologie du droit, membre de l’IRERP, laboratoire de droit social et des relations professionnelles.

- Georges Spyropoulos, (Suisse), docteur en droit, ancien directeur au BIT (Bureau International du Travail) à Genève, Suisse.

- Giovanna Procacci, (Italie), professeur de sociologie, Université de Milan."

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